On parle beaucoup depuis quelques semaines du développement de grandes installations photovoltaïques dans les Alpes.
Les Chambres fédérales ont voté cet automne des mesures visant à faciliter la création de telles infrastructures, et à la subventionner fortement. Concrètement, les grands parcs solaires alpins, produisant au moins 10 GWh dont au moins 500 kWh pour 1 kWh de puissance installée en hiver, pourront obtenir un soutien financier fédéral. La rétribution unique s’élèvera à 60% au maximum des coûts d’investissement. Les exigences en matière de protection de l’environnement ont par ailleurs été abaissées, afin de faciliter la création de ces parcs solaires. Ces derniers ne pourront toutefois pas être installés dans les marais, les biotopes nationaux et les réserves sauvagines et d’oiseaux migrateurs.
Le canton du Valais a tout récemment sauté sur cette occasion, et a adopté sous forme de décret validé par le Grand Conseil les mesures visant à appliquer sur son territoire ces nouvelles dispositions fédérales. Afin d’accélérer le processus d’autorisation pour ces champs solaires alpins, l’exécutif valaisan pourra désormais statuer seul sur les dossiers, sans passer par la commission cantonale des constructions, qui octroie d’habitude les permis de construire situés hors zone à bâtir. L’effet suspensif en cas de recours sera par ailleurs levé, ce qui fait que ces projets ne seront pas bloqués en cas de contestation devant les tribunaux.
Bref, on doit se préparer à voir pousser un peu partout dans le massif alpin des parcs solaires photovoltaïques. S’il s’agit d’une plutôt bonne nouvelle en matière de transition énergétique, notamment car les panneaux installés en haute montagne produisent beaucoup plus d’énergie que leurs cousins de plaine en hiver, lorsque le stratus règne en maître sur une bonne partie du Plateau, il en va autrement lorsqu’on essaie de dézoomer un peu, et de brosser un bilan environnemental global.
Comme souvent lorsqu’il s’agit d’opportunités de gagner facilement de l’argent ( ici via les subventions importantes délivrées par la Confédération), les considérations en matière de protection des paysages ou de la biodiversité passent à la trappe. Si on ne cadre pas ce développement, il y a fort à parier que des dégâts importants seront commis sur l’environnement. On va défricher des zones boisées, imperméabiliser des sols, déranger la faune pour une production d’énergie somme toute assez réduite. Car des installations de ce type ce ne sont pas que des panneaux solaires installés dans des prés, mais aussi des routes d’accès, des lignes électriques pour transporter l’énergie produite etc.
Il existe pourtant des manières bien moins invasives de développer l’énergie solaire dans les Alpes, en se concentrant sur les zones déjà concernées par les activités humaines, raccordées avec la puissance nécessaire au réseau électrique et facilement accessibles. Le potentiel des parois anti-avalanches, barrages et autres installations sportives ou récréatives est important, et mérite d’être exploité prioritairement, avant d’aller planter des panneaux solaires au milieu de nulle part.
Des exemples vertueux existent, comme par exemple le parc solaire flottant installé par la Romande Energie sur le lac de barrage des Toules, près du Grand Saint-Bernard. Cette installation ne dérange rien ni personne, et permet de produire l’équivalent de l’électricité consommée annuellement par plus de 200 ménages, sans porter d’atteintes au paysage ou à l’environnement.
C’est clairement dans cette direction que l’on doit aller si on souhaite développer de manière durable cette indispensable énergie photovoltaïque.
Le référendum annoncé par les Verts valaisans et des ONG environnementales contre le décret du Grand Conseil du Vieux Pays cité ci-dessus est ainsi une bonne nouvelle. Il permettra d’ouvrir le débat sur ces évolutions, et on l’espère de cadrer un peu ce qui peut l’être, afin que ce nouvel Eldorado solaire ne se transforme pas en Far West, puis en cimetière d’un développement véritablement durable et respectueux de l’environnement.