De Credit Suisse à UBS, les problèmes s’aggravent

Le Conseil fédéral ne pouvait pas tergiverser en prenant sa décision d’éviter à tout prix la faillite de Credit Suisse, orchestrée en quelques jours et annoncée le 19 mars 2023, à l’issue d’un week-end particulièrement tendu pour les différents acteurs de l’économie suisse et de la finance mondiale.

L’intervention des autorités politiques suisses et de la Banque nationale suisse était alors devenue évidente, indispensable et impérative, compte tenu de la perte de confiance des actionnaires de Credit Suisse à l’origine de l’effondrement du cours de son action sur les marchés boursiers. Bien que cette banque d’importance systémique («too big to fail») ait satisfait aux exigences, par ailleurs largement insuffisantes, en matière de liquidités et de fonds propres imposées au Credit Suisse par les réglementations nationales et internationales, cela n’a pas suffi à empêcher la panique et la ruée sur cette banque d’un grand nombre de ses actionnaires et de ses déposants. L’effet domino a été très rapide et problématique, obligeant la Confédération suisse à intervenir pour dissiper les doutes sur la résilience du secteur bancaire national, lui-même étroitement lié au secteur financier international.

UBS a ainsi pu exploiter à son avantage (à court terme) sa position avantageuse sur la place bancaire suisse pour acquérir Credit Suisse à un prix intéressant, reprenant toutes ses activités sur les marchés financiers. En résulte par conséquent un colosse bancaire jouissant d’une position dominante tant en Suisse que dans l’économie globale. Un colosse qui pourra continuer de spéculer des sommes énormes dans l’immense casino de la finance de marché, étant donné la garantie désormais explicite dont il bénéficie de la part de l’État – entendez de la Confédération et de la Banque nationale suisse – après deux interventions urgentes qui ont permis d’éviter les faillites d’UBS et de Credit Suisse en 2008 et 2023 respectivement.

Or, ni la crise financière globale qui a éclaté à l’automne 2008 après la mise en faillite de la banque d’investissement Lehman Brothers, ni le sauvetage in extremis de Credit Suisse en mars 2023 n’auront servi de leçon ni aux régulateurs et superviseurs des institutions financières, ni à ces dernières, qui sont au contraire désormais certaines que, dans leur ensemble, elles sont trop grandes pour qu’on les laisse partir en faillite. En outre, l’acquisition de Credit Suisse par UBS aura pour conséquence une concentration des activités du secteur bancaire suisse. L’immense part de marché d’UBS dans le système bancaire national lui permettra dès lors de dicter ses conditions à l’ensemble de ses emprunteurs, qu’il s’agisse de personnes ayant des hypothèques ou d’entreprises ayant contracté des prêts pour financer leurs activités économiques.

Dans une économie libérale comme celle de la Suisse, le paradoxe est double à cet égard: d’une part, ces banques d’importance systémique répondent à une logique de privatisation des profits et de socialisation des pertes du fait qu’elles sont trop grandes pour faire faillite; d’autre part, la concentration du pouvoir de marché permise par la reprise de Credit Suisse par UBS va à l’encontre du principe de la libre concurrence ainsi que de celui de la responsabilité individuelle de chaque acteur économique. La nouvelle UBS sera non seulement trop grande pour faire faillite, mais aussi trop grande pour être gérée correctement, puisque les activités financières les plus rentables – mais aussi les plus risquées – sont celles qui sont menées dans le grand casino de la finance globale dont les principaux acteurs sont précisément ces institutions financières qui se savent too big to fail, profitant du fait qu’elles soient également trop grandes pour être correctement supervisées. Les autorités de surveillance des marchés financiers n’ont en effet pas la capacité d’observer les activités menées par ces institutions dans le monde entier et se limitent par conséquent souvent à superviser uniquement les activités menées à l’intérieur de leurs propres frontières nationales. D’autant plus que ces autorités sont en concurrence les unes avec les autres pour empêcher que certaines des activités les plus rentables menées par les banques d’importance systémique ne soient délocalisées en dehors de leur territoire national, entraînant ainsi, supposément, une perte de compétitivité en sus d’un affaiblissement de la croissance économique pour leur propre pays.

Le scénario à court terme semble donc déjà tracé et très inquiétant, tant pour celles et ceux qui craignent de perdre leur emploi, notamment sur la place financière suisse (compte tenu des réductions d’effectifs déjà annoncées dans ce qui reste du Credit Suisse), que pour de nombreuses activités économiques qui dépendent du financement des institutions bancaires. Inquiétude d’autant plus grande à un moment où les taux d’intérêt suivent une trajectoire à la hausse, dans le sillage des choix de politique monétaire de la Banque nationale suisse – qui ne parviendront toutefois pas à freiner l’augmentation des prix à la consommation, mais pourraient au contraire l’accentuer, puisque les banques exigeront des taux d’intérêt plus élevés pour financer les coûts de production des entreprises, amenant nombre d’entre elles à répercuter cette hausse des intérêts bancaires sur leurs prix de vente. Une fois de plus, ce sont les plus fragiles financièrement qui en feront les frais, créant une spirale qui entraînera l’ensemble de l’économie vers le bas, avec des répercussions négatives aussi pour les finances publiques. Les tensions sociales n’en seront qu’exacerbées et l’on constatera une aggravation de la situation sur un marché du travail déjà confronté à une série de problèmes qui se chevauchent et se renforcent mutuellement – compte tenu aussi de l’absence de volonté et d’action politique à cet égard.

Comme si cela ne suffisait pas à pousser l’économie et la société dans son ensemble vers l’abîme, le rachat de Credit Suisse par UBS engendrera davantage de problèmes liés au réchauffement climatique dans la mesure où le mastodonte résultant de ce rachat sera un acteur majeur dans le domaine du financement des activités liées aux combustibles fossiles. Cela exacerbera la crise environnementale et le monde entier sera davantage exposé aux risques climatiques, augmentant également les risques de poursuites judiciaires pour les banques (soi-disant) suisses, ceci nuisant grandement à la réputation internationale de la Suisse, à la fois en tant que centre financier et en tant que zone géographique où toute activité économique peut avoir lieu et devrait servir l’intérêt général pour le bien commun.

Sergio Rossi

Sergio Rossi est professeur ordinaire à l’Université de Fribourg, où il dirige la Chaire de macroéconomie et d’économie monétaire, et Senior Research Associate à l’International Economic Policy Institute de la Laurentian University au Canada.

42 réponses à “De Credit Suisse à UBS, les problèmes s’aggravent

    1. IL faut bien se dire que les illusions concernant les banques centrales européennes et Suisse ne sont que du flan, au niveau des liquidités, il n’y a que la FED, les banques centrales européennes ne sont que des boutiques administrées par la FED. 20 années de fuite dans le vide et dans la création de demandes inexistantes, une partie a été absorbée dans les bourses avec des sociétés qui n’innovent rien, par dessus quelques années avec des taux zéros, injection de masses financières dans un désert technologique et industriel et c’est la chute dans le chaos. D’un côté des dettes colossales et de l’autre un tas de bulles dénués de projet et d’investissement productifs. Obstruction par la dette et destruction de la production, plus la dette, y a pas de sortie sinon une chevauchée dans l’impossible.

  1. Matière à penser et à agir =>

    1) «La Suisse est incapable d’anticiper. Ni dans le domaine économique (…), ni dans le domaine énergétique, ni dans celui de sa place dans le monde. Le pays est paralysé par la peur du lendemain (…). Il faudrait une réflexion stratégique. C’est le rôle du Conseil fédéral: se projeter à long terme, se demander qui sont nos alliés, qui est contre nous, imaginer des coopérations (…). Mais au lieu de cela, il hésite. (…) C’est l’affrontement permanent entre les naïfs qui croient que le pays est à l’abri des affres de l’Histoire et ceux qui pensent que nous sommes entrés dans un monde où les menaces se sont transformées en incertitudes multiples et difficiles à identifier.»

    En mars 2012, Denis Froidevaux (www.letemps.ch/suisse-incapable-danticiper)

    2) “Nous avons été menés en bateau par des managers incompétents et menteurs.”

    Michel, une longue carrière au Crédit suisse (LMD, 26.03.23)

    3) “La Banque nationale suisse (…) s’est progressivement transformée en l’un des hedges funds les plus massifs du monde par ses positions spéculatives les plus folles, comme par la taille de son bilan qui a atteint et dépassé le seuil vertigineux de 10000 milliards de francs. (…) En investissant ainsi à haute dose sur le marché américain, la BNS a favorisé un pays étranger et la spéculation financière, au détriment de son économie nationale. ”

    Michel Santi, expert des banques centrales et des marchés financiers (Illustré, 22.03.23)

    4) BLABLA-BANQUE: LE DISCOURS DE L’INACTION

    “La réglementation des banques va tuer les investissements et la croissance » ; « Le remède sera pire que le mal ! » ; « Cela ne sert à rien » : voilà les trois grands arguments que les banques utilisent pour s’opposer à toute initiative de réforme ou d’encadrement de leur secteur en France, en Europe et dans le monde. La crise bancaire et financière de 2007-2008 avait offert une occasion de changer en profondeur le fonctionnement du secteur bancaire et financier. Pourtant, en dépit de la nécessité des réformes, elles ont provoqué une levée de boucliers de la part des banques et de leurs représentants. Au moyen d’un discours bien rôdé, le lobby bancaire est parvenu à convaincre citoyens et gouvernements que le renforcement de la réglementation mettrait en péril l’investissement des entreprises, l’emploi et la croissance… Quels sont donc les ressorts de ce discours aussi influent que paralysant ? Comment le lobby bancaire parvient-il à tisser sa toile jusqu’aux plus hautes sphères du pouvoir ? Un ouvrage critique qui décrypte le discours rhétorique du lobby bancaire en s’appuyant sur la grille de lecture du socio-économiste Albert O. Hirschman (l’argument de l’effet pervers, celui l’inanité et enfin de la mise en péril pour empêcher toute réforme) afin de rouvrir le débat aux citoyens, leur faire prendre conscience des débordements de la finance, pour mieux remédier aux excès et à la fragilité du secteur bancaire, et remettre la finance sous contrôle et au service de l’économie.”

    Prof. Jézabel Couppey-Soubeyran, économiste

    http://www.payot.ch/Detail/blablabanque-jezabel_couppey_soubeyran-9782841868018?cId=0

    http://www.youtube.com/watch?v=cgVvZairGQY

    Cf. aussi: 2 SIÈCLES DE RHÉTORIQUE RÉACTIONNAIRE (www.fayard.fr/sciences-humaines/deux-siecles-de-rhetorique-reactionnaire-9782213026480)

    5) “Notre modèle économique – qui est basé sur l’extraction, sur l’exploitation – est nourri d’une cécité, d’une avidité, d’une indifférence, d’une insouciance, d’une violence qui conditionnent largement la vie des autres.”

    David van Reybrouck, philosophe

    http://www.actes-sud.fr/catalogue/sciences-humaines-et-sociales-sciences/nous-colonisons-lavenir

    http://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-grand-face-a-face/le-grand-face-a-face-du-samedi-04-mars-2023-9537205

    Cf. aussi “BAISE TON PROCHAIN (www.actes-sud.fr/catalogue/sciences-humaines-et-sociales-sciences/baise-ton-prochain)

    6) “PARASITES. Les parasites ne sont pas ceux que l’on croit. La véritable classe parasite est celle qui est située au sommet du corps social, cette classe bourgeoise qui a envahi la société tout entière, rachetant ses médias, finançant ses hommes politiques, exploitant ses travailleurs au plus bas prix possible. En retour, cette classe ne nous apporte rien. Pire, elle nous coûte bien plus cher qu’elle ne nous rapporte. Elle nuit plus qu’elle brille. Elle nous mène au désastre écologique car elle est incapable de vivre sans accumuler. Moralement, elle est un naufrage. Pourtant chaque jour, elle est décrite sur nos radios, nos chaînes de télévision et dans nos journaux comme un groupe social indispensable à notre survie. Foutaise : ce livre le démontre clairement. Non, les 500 familles les plus riches de France ne sont pas composées de dynamiques entrepreneurs qui ont pris des risques. Non, elles ne créent pas d’emploi. Non, elles ne nous font pas du bien. Oui, on pourrait vivre sans leur règne.”

    Nicolas Framont, sociologue

    http://www.payot.ch/Detail/parasites-nicolas_framont-9791020911568?cId=0

    http://www.youtube.com/watch?v=VRNTZflvaR4

    7) “Les dirigeants des grands groupes ont une manière de penser similaire, quasi un esprit de corps, car ils sortent pratiquement tous du même moule. (…) Leurs priorités va aux valeurs de l’actionnariat, aux techniques d’optimisation fiscale et non pas au bien-être des employés ou à l’éthique (…) placés au second plan.”

    Felix Bühlmann, sociologue (24h, 23.03.23)

    8) “ La raison fondamentale du retour des crises, en dépit de toutes les expériences passées: l’incapacité à en tirer vraiment les leçons, à laisser les faits mettre en question des doctrines libérales erronées.”

    Paul Krugman, économiste nobelisé

    wwww.payot.ch/Detail/pourquoi_les_crises_reviennent_toujours-paul_r_krugman-9782020996037?cId=0

    9) “L’imaginaire capitaliste est devenu ringard, il se fissure de partout.”

    Alain Damasio, écrivain (www.youtube.com/watch?v=Y8SpcxR6FjQ)

    10) Egalement:

    https://bonpourlatete.com/actuel/macron-et-credit-suisse-les-ravages-de-l-arrogalcoolisme

    https://www.24heures.ch/pourquoi-la-bns-na-pas-renfloue-credit-suisse-207315747665

    https://bonpourlatete.com/actuel/le-conseil-federal-ne-s-embarrasse-pas-de-l-etat-de-droit

  2. Désolé mon très cher Ami Sergio, mais si tu estimes que porter assistance au Credit Suisse d’une manière aussi déraisonnable que celle organisée “dans l’urgence” par le gouvernement helvétique, la BNS, la Finma et l’UBS, est une condition sine qua pour éviter un Armageddon financier – à mon sens et avec tout mon respect – ceci relève d’une vue de l’esprit. Ce que les intervenants aux relations incestueuses ont tout simplement réussi à faire en espérant gagner du temps, c’est d’offrir à l’échelle de la théorie des risques une opportunité supplémentaire aux spéculateurs. Une pure folie! Nous verrons ensuite ce que révélera l’enquête du MPC.

    https://blogs.letemps.ch/sergio-rossi/2022/11/14/credit-suisse-et-le-casino-de-la-finance-globale/#comments

    Rappelons tout de même au passage que les obligations convertibles contingentes (ne faisant pas l’unanimité dans les milieux financiers à l’époque) ont été acceptées en 2010 par la Finma, pour précisément “renforcer” les exigences relatives aux fonds propres de catégorie 1 et de catégorie 2 de la banque systémique helvétique : Credit Suisse. Évidemment, alors que la tempête frappait l’UBS en pleine lumière, le sauvetage du CS restait en dehors des radars médiatiques et pourtant! En l’absence des fonds du Qatar et les “CoCo bonds”, le CS aurait connu un tout autre sort en 2010 déjà. Des perfusions (des bénédictions?) qui lui auront néanmoins permis de poursuivre sur la voie des scandales (comme autant de risques supplémentaires) durant près de trois lustres.

    Bien à toi

  3. Quand est-il de l’indépendance nationale? L’Etat prétend qu’il n’a pas d’autre choix que d’offrir des garanties presque illimitées à un établissement privé qui fait deux fois plus d’affaire au US qu’en Suisse. Et quant une fois de plus il se fera pincer, c’est la Suisse qui aura mal.

    1. Bonsoir Gwaskell,

      De quelle indépendance nationale parlez-vous ? Vous voulez plutôt parler de l’extrême dépendance de la Suisse aux marchés financiers, immobiliers et des matières premières (jusqu’à leur effondrement). Le secret bancaire…out; la confiance en la place financière helvétique…out; la probité dans la transition climatique…out; la pseudo neutralité helvétique, bientôt…out (…)

      https://blogs.letemps.ch/laurent-horvath/

      “Basé à Genève, Trafigura a réalisé un bénéfice de $7 milliards, Glen Core basé à Zoug 17,3 milliards. Le plus grand trader au Monde, Vitol a généré $15 milliards de bénéfices. Les 450 employés actionnaires vont pouvoir prendre leur retraite au nez et à la barbe de la diminution des rentes de la LPP voulue par les assurances Suisses”. Et j’ajouterai – personnellement – que l’AVS connaîtra aussi son lot de réformes pour palier aux errements des prédateurs du pays (avec le même alibi sempiternellement servi depuis des années par les économistes “mainstream et les spin-doctors d’un gouvernement que trop familiarisé aux relations incestueuses).

  4. Les banques centrales ont deux choix à présent: Augmenter les taux ou les maintenir plus élevés, étrangler les liquidités et regarder les diverses banques et entreprises chuter comme des mouches (Récession profonde). Ou abaisser à nouveau les taux au plus proche du point zéro et la reflation sera impossible (Stagflation). Dans les deux cas, le seul résultat possible est un “hard landing” brutal. En sus, le marché des produits dérivés est actuellement hypersensible, tandis que de nombreux pays dans le monde ne veulent plus détenir de monnaies (dettes) occidentales (comme déjà abordé lors de mes analyses des mois précédents). C’est le cas de l’Arabie saoudite et du Brésil qui acceptent désormais des paiements en yuan, ce qui pourrait bientôt tenter les pays de l’association des nations de l’Asie du Sud-Est qui envisagent déjà d’abandonner le dollar US, l’euro, le yen et la livre sterling pour réaliser les règlements financiers transnationaux dans leurs propres monnaies ou en yuan. Quant à la CNOOC et TotalEnergies, ils ont conclu leur premier achat de gaz naturel liquéfié en provenance des Emirats arabes unis en yuan. Cette fuite devant le dollar US ou l’euro (est-ce que la Suisse a besoin que sa devise embrasse le statut de “monnaie refuge”?🙈) à une vitesse vertigineuse et ce sont les canaux de refinancement des Etats-Unis (et de l’Eurozone) qui se tarissent, ce qui conduira la Fed ou la BCE à monétiser encore plus massivement la dette, donc à détruire la valeur de leur monnaie respective. Dans la logique d’une telle fuite massive, la monnaie locale ne tardera pas à aller au tapis, malgré les hausses de taux que les banques centrales enchaînent pour juguler l’inflation galopante (ou pour tenter d’appâter des capitaux étrangers?).

    Le système arrive en fin de course!

    1. Bonjour Raymond,
      Merci pour cette analyse que je partage. Vous avez raison de mettre un accent implicite sur la question de confiance. En tout cas , cet élément crucial est en filigrane dans votre texte. Comme vous le savez Crédit Suisse s’est engagé dans un processus d’autodestruction irréversible dés l’instant où elle a perdu la confiance de ses investisseurs. Le rachat forcé de CS par UBS va, selon toute vraisemblance, poser plus de problèmes qu’il n’en résout, dans la mesure où cette fusion en catastrophe entre deux banques systémiques, comporte potentiellement les germes de l’extension de la crise de confiance à toute la place financière helvétique.

      J’en veux pour preuve le mauvais traitement réservé aux détenteurs des “coco bonds” ou obligations convertibles contingentes. On est bel et bien en présence d’une rupture de contrat de mon point de vue. Car, à n’en pas douter, les conséquences de celle-ci vont être fort dommageables à la fée confiance que l’État fédéral et la BNS viennent de sacrifier sur l’autel des intérêts des actionnaires. Sans parler des pauvres salariés de Crédit Suisse qui sont les grands oubliés dans cette opération de sauvetage public qui ne dit pas son nom.
      ,A cet égard, l’économiste et académicien Willem Buiter a sévèrement critiqué les conditions de sauvetage de CS. “C’était apparemment conforme au contrat qu’ils ont signé, mais c’était clairement une idiotie économique. Vous ne subordonnez pas des créanciers seniors à des créanciers juniors, cela a juste créé de la confusion, et semé le doute sur le bon sens des régulateurs et superviseurs.” C’est par conséquent une décision incompréhensible et irrationnelle dans la mesure où elle ferme définitivement la porte au recours à ce type d’instrument de financement ( coco bonds ) dont l’émission consécutive à la crise financière de 2008 a été justifiée par le fait d’éviter la dilution du capital des banques systémiques et sans doute de protéger les contribuables de la socialisation des pertes des banques.
      Dans la même veine, on peut s’attendre à ce que les monnaies comme le dollar ou l’euro perdent la confiance des investisseurs du vaste monde, qui sera demain probablement multipolaire avec à la clé un polycentrisme monétaire dominé par la compétition entre un dollar déclinant et un yuan ascendant en accord avec le piège de Thucydide. En tout cas, en saisissant les avoirs de l’État et des oligarques russes les Etats-Unis et l’Union européenne viennent de détruire la confiance dans leur propre monnaie. Désormais on voit mal le monde islamique ou chinois, par exemple, continuer à détenir des avoirs et des actifs libellés en dollars ou en euros, sachant qu’ils pourraient se trouver dans la même situation que la Russie pour la simple raison qu’il puisse exister des divergences sur les croyances et les valeurs. Alors que celles-ci devraient être traitées en toute hypothèse comme des faits devant se plier au critère de l’analyse scientifique ou plutôt à l’analyse logico-expérimentale, et ce indépendamment de tout a priori idéologique, lequel conduit inévitablement à une hiérarchisation des visions du monde forcément contestable.
      Amicalement.

  5. Gravissime? Effectivement.

    “Nous y voilà: la Banque Nationale Suisse utilise désormais les bonnes vieilles ficelles de la stratégie de la peur (The Shock Doctrine).

    Pour justifier de l’absorption du Crédit Suisse par l’UBS, en catimini et face aux critiques généralisées, son Vice-Président nous confie que -1 seul jour plus tard – cette banque aurait fait faillite et aurait plongé le monde dans un marasme généralisé. Que ce monsieur justifie ses déclarations qui – si étaient vraies – sont très graves. Qu’il ne se contente pas de lancer de telles phrases creuses. Je le réaffirme : Une banque centrale ne devrait pas faire ça !” Dixit MS, ancien conseiller de banques centrales.

    https://michelsanti.fr/non-classifiee/cette-bns-qui-cherche-a-nous-faire-peur

  6. Morceaux choisis dans le papier exemplaire du journaliste Eric Felley (quotidien “mainstream” Le Matin).

    Tout est dit, il a osé Eric Felley 👏

    “Les petits actionnaires de la banque Credit Suisse peuvent bien se défouler contre les dirigeants, rien ne va fondamentalement changer avec la nouvelle UBS”

    “Vincent Kaufmann, directeur de la Fondation Ethos, qui a souhaité que toute la lumière soit faite sur la responsabilité des dirigeants actuels et anciens de la banque. Ce qui n’est pas gagné et de loin”

    “Cette dernière assemblée générale de Credit Suisse se déroule juste une semaine avant le début de la session extraordinaire du Parlement à Berne, le 11 avril (…) La session a été expurgée de tout ce qu’elle pouvait contenir de trop clivant, notamment la création d’une commission d’enquête. Le Parlement va avaliser les 109 milliards de garanties promises par le Conseil fédéral à UBS”

    “Après les communiqués d’indignation de tous les partis politique au lendemain du 19 mars, le lobby bancaire semble avoir repris le contrôle de ses troupes au Parlement. Les velléités de régulation (plus de fonds propres, moins de bonus) seront probablement diluées dans l’adoption d’un ou deux postulats. Cela permettra de faire traîner les choses, tout en donnant l’impression à l’opinion publique de faire quelque chose”

    “Il en va de même des poursuites contre des anciens de Credit Suisse ou de la restitution des bonus. Cela n’arrivera pas. À l’heure actuelle, a précisé ce mardi Axel Lehmann, aucune poursuite n’a été engagée contre d’anciens responsables. La Suisse ne connaît pas d’action collective qui pourrait permettre de regrouper les forces dans une seule plainte. La droite n’en a jamais voulu au Parlement”

    “La responsabilité de la chute inexorable du Credit Suisse est diluée dans un grand nombre de personnes qui ont pris de mauvaises décisions. Mise bout à bout, elles ont fini par couler la banque, qui n’a pas fait faillite, rappelons-le. Ces décisions ont été prises et avalisées par des assemblées générales. La même chose pour les bonus. Ils ont été octroyés en conformité avec des règlements. Les gens n’ont rien volé, ils se sont servis, c’est tout”

    PS: Pour la bonne forme, entre-autres, comme ex-whistleblower du CS – bien avant le 15 septembre 2008 – vous pensez bien que je ne suis plus actionnaire de cette entité depuis.

  7. Voyage dans le temps et l’espace

    Saison 2023 (61): Bâle III. Une régulation déjà vidée de sa substance.

    En effet, Bâle III avait déjà revu ses prétentions à la baisse avec un accord à minima et l’on s’en étonne quasi une décennie plus tard. L’ensemble des apprentis sorciers n’aurait-il pas une fâcheuse tendance à nous prendre systématiquement pour des c**s au fil des ans? À n’en point douter.

    – Suppression sur la version 2010 de la clause initiale de Bâle III (version 2009) prévoyant d’inclure une majoration spécifique du notionnel pour les dérivés de crédit ;

    – Alignement des normes bancaires européennes IFRS plus strictes et prudentielles − qui obligeaient les banques européennes à comptabiliser leurs positions en brut − sur les normes comptables des banques américaines comptabilisant en net ;

    – Assouplissement des critères de liquidité auxquelles elles seront soumises à partir du 1er janvier 2015 qui répond aux demandes pressantes des acteurs du secteur mais se révèle de facto très insuffisant. La base des actifs comptabilisés comprenant les liquidités inclut désormais des obligations (y.c les “CoCo Bonds”) des actions et certains types d’emprunts hypothécaires (à l’instar des “RMBS”) ➡️ ce qui ne correspond plus aux règles prudentielles élémentaires⬅️ Cependant les banques devront provisionner à hauteur de 60% cette même année, puis 70% en 2016 et ainsi de suite pour atteindre 100% en 2019 (…)

    Nous pouvons ainsi relever les raisons de l’échec de Bâle III :

    – Les facteurs de conversion en équivalent crédit (CCF) de 10 % qui permettent de faire figurer au bilan une part de l’exposition hors bilan posent d’énormes problèmes face aux montants colossaux engagés. L’ISDA, une association de professionnels regroupant les principaux intervenants sur les marchés financiers des produits dérivés indique que « les effets des règles proposées vont probablement pousser à une disparition de liquidité significative sur le marché, évaluée entre 15 700 milliards de $ à 29 900 milliards de $. » Le Comité de Bâle ayant lissé dans le temps l’application des accords (à minima), nous aurions donc une perte de liquidité mondiale d’un peu plus 3000 milliards de $ par an (sur 5 ans).

    http://gillesbonafi.blogspot.com/2014/06/bale-iii-autopsie-dun-echec.html?m=1

    On refait un point dans dix ans après Bâle IV, puis Bâle V ? 🙈

  8. Merci pour votre article.
    Voyez-vous ce qui est violent et insupportable dans ces affaires, c’est l’impunité avec laquelle ces cambrioleurs font la poche à toute la société, de façon légale. L’impression d’avoir confier à un voleur d’écrire les lois afin de rendre ses forfaits légitimes.
    La population est prise en otage.
    Cordialement,

  9. “KBW Bank Index” est le benchmark des cours des actions de sociétés bancaires de premier plan et son but sert d’indicateur avancé pour les observateurs du secteur bancaire. En deux mots, si l’aversion aux valeurs bancaires prédomine, alors la prime de risque augmente. C’est-à-dire que le capital confiance dans les valeurs bancaires se liquéfie alors que Sisyphe n’a pas encore atteint le plancher des vaches.

    https://cms.zerohedge.com/s3/files/inline-images/2023-04-05_04-55-36.jpg?itok=2iTnZMgL

  10. Je crois qu’il est prématuré de tirer immédiatement les leçons de la crise bancaire que nous venons de vivre et qui continue de manière insidieuse telle une maladie à faire des dégâts invisibles, car il semblerait qu’on ne dispose pas d’une connaissance exhaustive des détails des bilans des banques systémiques ou non et dans lesquels se dissimule le diable. En tout cas, nous venons de connaitre la première secousse sérieuse depuis 2008. Mais en vérité nous ne sommes pas à l’abri d’autres séismes bancaires dont on ignore l’ampleur en termes de panique et de contagion, et donc leurs répercussions délétères sur l’économie réelle.
    C’est pourquoi il n’est pas absurde d’affirmer que cette épée de Damoclès continue à planer sur l’économie réelle tant que les pouvoirs publics n’auront pas le courage de prendre le taureau par les cornes afin de traiter de manière radicale le problème de risque systémique dont la seule vertu, à mes yeux, est d’ébranler la croyance religieuse dans le libéralisme sans limites. Sur ce point, les autorités helvétiques ( Etat fédéral et Banque nationale suisse) viennent de nous en faire la démonstration en encourageant la concentration du secteur bancaire et donc la remise en cause des avantages habituellement attribués à l’économie concurrentielle. En l’occurrence la tarification au coût marginal des biens et services permet de maximiser le bien-être des consommateurs et des producteurs; par conséquent toute autre institution de marché s’écartant de cet idéal concurrentiel est une source d’inefficience. C’est ce qu’on apprend quand on compare les deux graphiques d’écolier concernant la situation de concurrence et celle d’un monopole ou d’une concurrence imparfaite. Au risque de me tromper, il me semble bien que ces idées constituent le fondement du crédo libéral des milieux économiques et de la droite suisses. C’est aussi le paradoxe sur lequel le professeur Rossi attire l’attention dans sa chronique qui est stimulante pour la réflexion.

    En attendant que les leçons de cette crise bancaire soient pleinement tirées et que les méthodes de régulation soient débarrassées de leurs failles actuelles, on peut d’ores et déjà faire un certain nombre d’observations. Mais sans trop d’illusions quant à leur respect ou donc leur efficacité, car l’imagination des banquiers n’a pas de limites, surtout pour trouver des stratégies ou plutôt des stratagèmes de contournement des règles afin d’exploiter la faiblesse de la réglementation bancaire, quand bien même celle-ci est destinée à les protéger contre leurs propres excès ou plutôt leur cupidité. C’est pourquoi en la matière on est dans une situation analogue à celle du fisc engagé dans un combat sans fin contre les fraudeurs. Ces derniers ont toujours une longueur d’avance pour réduire la taille de son assiette fiscale, tout en restant dans les clous de la légalité. (optimisation fiscale grâce à une armada de fiscalistes et d’avocats d’affaires).

    le principal enseignement qu’on peut inférer de ce spasme bancaire est la nécessité de renforcer la régulation et la supervision des acteurs bancaires sans tenir compte de leur taille, en donnant les moyens adéquats ( humains, financiers et matériels) aux instances chargées de cette mission de surveillance des risques auxquels ils sont exposés. Comme détecter de manière préventive le risque des taux d’intérêt de la banque centrale, notamment quand le portefeuille d’actifs est trop concentré sur la détention des bons de trésor américain à 10 ans par exemple. Ce qui semble être le cas de la Silicon Valley Bank qui est à l’origine du choc. Pour mener à bien ce travail d’entomologiste, l’instance de supervision devrait disposer du personnel compétent en nombre suffisant, sachant que cette proposition a toutes les chances d’être accueillie par les néo-libéraux comme une mesure bureaucratique, tout particulièrement en Suisse où les critiques formulées par le banquier escroc Gatewood contre les olibrius de l’Etat, ” ( voir Paul Krugman : ” Sortez-nous de cette crise… maintenant”.) rencontreraient selon toute vraisemblance un écho favorable.

    D’autre part, il est hautement souhaitable que les autorités de régulation et donc les responsables politiques devraient se montrer inflexibles face à la pression du lobby bancaire. Ce dernier semble avoir une forte propension à exploiter les périodes de stabilité du systéme bancaire pour exiger l’assouplissement de la réglementation en recourant à un faisceau d’arguments souvent accompagnés d’un vernis de rationalité. Par exemple la règlementation bancaire est un frein à l’expansion du crédit et donc à la croissance et à l’emploi. C’est pourquoi la crise des banques régionales américaines peut s’interpréter comme la conséquence mécanique du détricotage de la législation bancaire opéré sous l’administration Trump pro-business et pro-Wall-Street.
    Par ailleurs, il me semble que les normes de Bâle III mises en place au lendemain de la crise de 2008 portent potentiellement et paradoxalement les germes de l’instabilité, tout particulièrement quand elles sont utilisées de manière contracyclique comme le recommandent certains économistes. Autrement dit, elles doivent être modulables en fonction des circonstances économiques. Remarquons en passant que l’idée de la flexibilité et de la contracyclicité est sympathique en soi et semble véhiculer un message au parfum keynésien. Cependant, elle n’est pas exempte de tout défaut dans la mesure où elle pourrait introduire une ambiguïté sur l’interprétation des circonstances économiques. Par conséquent elle comporte le danger de desserrer la bride aux banquiers, lesquels succomberaient à la tentation du casino de la finance ( activités de spéculation).
    En tout cas, il serait hautement souhaitable de perfectionner les règles prudentielles et de les immuniser contre les pressions des milieux bancaires, tant qu’un remède radical n’a pas été apporté au lancinant problème du risque systémique et son corollaire l’aléa moral. De ce point de vue, force est de constater que le sauvetage public de Crédit Suisse et des banques régionales américaines n’est pas une bonne nouvelle pour tous ceux qui aspirent à mettre un terme au principe scandaleux selon lequel pile les banques raflent la mise au casino de la finance, face les contribuables doivent passer à la caisse pour éviter la catastrophe du systéme économique.
    Pour toutes ces raisons, il n’est pas excessif d’affirmer que nous sommes encore otages du chantage des banques via le risque systémique, alors que nous croyions à tort que les règles prudentielles de Bâle III et l’union bancaire en Europe nous avaient définitivement délivrés de la caverne de la finance obscure qui continue malheureusement à prospérer dans l’ombre avec son shadow banking. De ce point de vue, il semble que nous avons perdu de vue les recommandations et les mises en garde des pères de l’économie politique avec la diversité de ses sensibilités. A cet égard, il n’est pas inutile de rappeler que dès le 18e siècle, Adam Smith recommandait aux gouvernements de limiter drastiquement la liberté des banquiers et Karl Marx, au milieu du 19e siècle, écrivait que les grandes banques privées ne sont que des associations de spéculateurs privés qui s’établissent à côté des gouvernements afin de leur prêter l’argent du public.

    1. Bonjour cher Noel,
      Sachez que j’appuie et soutien votre analyse de la première à la dernière ligne. Merci pour ce partage.

      Puisque vous faites également allusion (à juste titre) aux bons du Trésor US ainsi qu’au resserrement de la politique monétaire de J.Powell (qui croyait dur comme fer, sous peu encore, que l’inflation s’inscrirait tel un phénomène à court terme), permettez-moi de vous adresser une courte réaction adressée à notre hôte. Sujet dé-dollarisation “(…) Les erreurs répétées de la Fed dans la conduite de la politique monétaire ces dernières années – accompagnées de la courroie de transmission des différentes crises – n’ont fait qu’exacerber et renforcer le processus de cette dé-dollarisation entamé depuis trois lustres à l’échelle du globe. En raison du rôle de la prédominance du dollar US dans l’appétence internationale pour les “actifs sans risques” (bons du Trésor), le fait que cette monnaie de réserve perde de sa superbe à l’aune “des monnaies de réserve alternatives” induira un sérieux virage dans l’intérêt porté à l’égard de “la dette US négociable” sur les marchés. À de courtes périodes, cela se traduira probablement par des rendements plus élevés mais par analogie des niveaux plus inflatés du service de la dette. Ce changement forcera par effet de manche le gouvernement américain à réduire ses dépenses et ouvrira ainsi les portes à la stagflation US. Sous une forme ou une autre, la dé-dollarisation apparaît inévitable avec l’actuelle guerre économique mondiale (y.c énergétique/climatique) et les monnaies numériques de banques centrales marqueront de leur empreinte un nouveau Bretton Woods”.

      En effet, nous sommes toujours dans l’oeil du cyclone, cher Noel, alors que le temps manque cruellement pour un soft landing.

      Amicalement

  11. Voyage dans le temps et l’espace

    Saison 2023 (62) : Séchez vos larmes – rien ne va plus – la partie recommence!

    Les dirigeants d’UBS ont affirmé mercredi à leurs actionnaires que le rachat hâtivement arrangé de Credit Suisse était une “tâche herculéenne” pleine de risques, mais que c’était la bonne décision à prendre. Eh bien, personnellement, je persiste à dire que non. D’ailleurs, avec raison et discernement, durant l’assemblée générale de l’UBS, un ancien employé à la retraite exposera d’emblée que la nouvelle UBS va être tellement grande qu’elle “ne pourra plus être sauvée” en cas de choc; “elle va être trop grosse pour survivre”. Voilà, circulez, y a plus rien à voir même si Sisyphe n’en a pas terminé avec “son gros boulet”. Alors, hormis les actionnaires captifs – à l’instar par exemple des assurés des caisses de pension – dois-je avoir de la compassion pour les petits actionnaires? Eh bien non, je n’en ai aucune.

    Pourquoi? C’est très simple, tout d’abord à l’échelle des risques un investisseur n’est pas un épargnant et reste conscient qu’en prêtant une fraction de son capital à une entité – en échange d’un droit social et patrimonial – il ne peut négliger son propre risque. D’ailleurs, par ce seul statut auto-conféré d’investisseur, “le petit actionnaire” croyant jouer dans la cour des grands alors qu’il n’est que le pion d’un jeu de société dont il ne maîtrise plus les nouvelles règles, ne peut se prévaloir du statut de l'”ignorant”. S’intéresse-t-il au moins et en profondeur à la nouvelle donne? J’en doute. Dommage, car il devrait pourtant savoir que depuis plusieurs lustres, pour beaucoup d’entités le capital n’est plus un ingrédient crucial. Qu’il se rappelle alors au souvenir du “phénomène Spotify” avec son entrée à la bourse de New York, par exemple: “l’objectif n’était pas de lever de nouveaux capitaux, malgré le traditionnel accueil lui ayant été réservé. En effet, et de l’aveu même de son grand patron, l’objectif prioritaire de cette entrée en bourse fut de permettre aux investisseurs privés initiaux de trouver des acquéreurs à une partie de leurs actions de cette société, accessoirement à des prix intéressants (…) Spotify n’avait donc nul besoin davantage de capitaux, mais juste de donner une opportunité à ses capital-risqueurs de sortir et de recouvrer leurs investissements assortis d’un profit”. On pouvait dès lors aisément comprendre que dans un tel contexte, la gouvernance des entreprises subissait déjà un glissement fondamental “car les pourvoyeurs de capitaux – à savoir les actionnaires – ont de moins en moins de pouvoir sur la marche de la société puisque leurs deniers ne lui sont plus vitaux. Le contrôle exercé dans le passé par l’actionnariat sur la gestion de l’entreprise devient ainsi quasiment inexistant, et quoi de plus logique du reste alors même que leurs capitaux sont de moins en moins sollicités (…) Comme les capitaux ne sont plus une denrée rare et que les marchés boursiers sont désormais trop spéculatifs, l’actionnaire se voit progressivement retirer ses prérogatives et son argent n’est plus la priorité des dirigeants d’entreprise”. Mais, force est de constater comme un deuxième exemple, le nombre de “petits actionnaires” ayant salué durant cette dernière décennie perdue le paradoxe des profits sans prospérité, à l’instar du mal endémique de la politique “Share buy-back”.

    Faut-il être encore assez stupide pour croire que Greg Becker, PDG de la Silicon Valley Bank – qui a vendu pour environ 30 millions de dollars d’actions au cours des deux années ayant précédé la chute de la banque – a été un Oracle des marchés financiers en vidant “son entité” d’une part non négligeable de sa substance? Visionnaire, Signature Bank qui a fait aussi faillite avait réorienté ses activités ces dernières années pour se concentrer davantage sur les crypto-actifs (“cryptomonnaies”) et certains cadres ont vendu pour 100 millions de dollars d’actions au cours des trois années qui ont précédé sa faillite. La moitié de ces ventes ont été réalisées par Scott Shay, président de Signature Bank et ancien directeur général de la banque, ainsi que par son successeur. Ces dirigeants faisaient tous partie du comité du conseil d’administration qui supervisait le profil de risque de la banque axée sur “les cryptomonnaies”. Encore des Oracles!

    En attendant, si les causes des faillites à la Silicon Valley semblent relever d’une conjonction d’événements et d’une irrationnelle prise de risque (dont les potentiels délits d’initiés ne sont que des effets parmi d’autres), ils illustrent ô combien le capitalisme contemporain est tombé dans les oubliettes. Quant à la déconfiture du Credit Suisse, sa culture pathologique du risque entamée depuis des lustres ne peut aussi facilement se résumer à une pseudo-incompétence des dirigeants successifs. En effet, dans la théorie des risques, entre-autres, l’aléa moral et les risques juridiques entrent dans l’équation; c’est-à-dire, vulgairement parlant, que j’ai tout intérêt à augmenter la profitabilité de l’entité qui m’emploie (top management) même si mon “business as usual” demeure condamnable dès l’instant où le montant des amendes reste inférieur à la profitabilité dopée de mon entité. Tout comme j’ai intérêt à augmenter les bénéfices pour mes gros actionnaires (spéculateurs sur dividendes) en augmentant mes prises de risque (moral hazard) sur les marchés spéculatifs. Comme les hautes rémunérations dépendent des résultats, autant dire que “la comptabilité moderne” me permet de rafler le futur au présent (idem pour les gros joueurs). La comptabilité moderne a évolué en trois étapes : 1) au début du XIXe siècle, des bénéfices n’étaient comptabilisés que lorsqu’ils étaient véritablement apparus ; 2) au milieu du XIXe siècle, on faisait apparaître prématurément des bénéfices en « enkystant » le passif, et ceci, n’est-ce pas, pour ne pas décourager les petits investisseurs ; 3) dans les années 1980, on se mit à distribuer des bénéfices anticipés (« marking-to-market »). Dans les années 1975, le cabinet d’études McKinsey s’attaqua à un problème d’envergure : les intérêts des investisseurs et des dirigeants des grosses entreprises n’étaient pas alignés : d’une certaine manière ce que les uns obtenaient dans le partage des bénéfices, les autres en étaient privés. Cet antagonisme larvé bénéficiait aux salariés. Il y avait donc là un problème urgent à résoudre ! et McKinsey & Co le résolut. Les dirigeants des entreprises se verraient attribuer des options sur l’achat d’actions de leur compagnie au cours du jour où ces « stock-options » leur seraient attribuées. Si le cours de l’action grimpait, ils bénéficieraient de la hausse en fonction du nombre de leurs options (l’effet délétère du “Share buy-back” permet précisément cette mécanique infernale qui dope artificiellement les cours des titres). Les dirigeants, tout comme les actionnaires, auraient dorénavant les yeux fixés sur le cours des actions de l’entreprise, s’efforçant de booster son bilan de trimestre en trimestre par tous les moyens possibles et par la « comptabilité créative (imaginative !) » en particulier. Le court-termisme était désormais inscrit dans l’économie : McKinsey avait réussi ! l’avenir avait été entièrement sacrifié au présent !

    Alors, séchez-moi ces larmes de crocodile tant que la partie continuera!

  12. Voyage dans le temps et l’espace

    Saison 2023: – Master class – Armageddon financier et théorie des risques, nos homo-politicus n’ont rien voulu voir venir. Et pourtant, à leur manière, ils sont eux aussi des bandits manchots.

    – Allo docteur, cinquante ans de finance casino à l’échelle de la théorie des risques, ça donne quoi?

    – Bein, naturellement des gagnants dans une faible proportion…

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    au détriment d’un océan de serfs!

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    Et en une analyse? – Bein, naturellement ceci!

    “De nombreux observateurs s’attendent à ce que les taux d’intérêt retombent à zéro à mesure que l’inflation se dissipe et que les banques centrales se précipitent pour stimuler les économies en déclin. Cette attente est raisonnable compte tenu des événements des 15 dernières années (2008-2023), mais si nous effectuons un zoom arrière sur une chronologie de 50 ans, nous obtenons une perspective différente et tirons une conclusion différente.

    2023 n’est pas 2008, et la différence peut se résumer en une phrase : le risque global a été réévalué . Les taux d’intérêt ne reflètent pas seulement les anticipations d’inflation et les mesures de relance de la banque centrale ; les taux d’intérêt et les rendements obligataires reflètent également la prime de risque sur le coût de la monnaie-crédit, et si le profil de risque a changé de manière fondamentale, la prime de risque et le coût de la monnaie-crédit refléteront cela, indépendamment de l’inflation et des mesures de relance de la banque centrale.

    L’économie mondiale change de manière fondamentale, et cela revalorise tout : le coût de l’argent/du crédit, le prix des actifs, la valeur des couvertures et des assurances, etc. Le principal moteur de toute cette réévaluation est le risque, car c’est la réévaluation du risque qui force la réévaluation de tout. Lorsque le risque est faible et transparent, la prime de risque est faible et cela se traduit par des coûts faibles et stables. Lorsque le risque monte en flèche et est difficile à évaluer, la prime de risque augmente et cela pousse les coûts à la hausse.

    En termes de valorisation des actifs, les risques plus élevés réévaluent les actifs à la hausse ou à la baisse en fonction du profil de risque : qu’advient-il de l’actif si la liquidité s’épuise dans une crise induite par le risque ? Si le crédit se tarit, qu’advient-il de la demande pour l’actif ?

    Le risque a tendance à s’auto-renforcer. Si nous regardons autour de nous et voyons que tout le monde est convaincu que le risque est théorique plutôt que réel, nous arrêtons d’acheter des couvertures contre les mauvaises choses et nous payons une prime pour les actifs qui se portent bien dans les périodes à faible risque. Mais si nous voyons d’autres personnes se mettre sur la défensive – vendre des actifs, rembourser la dette, réduire les dépenses et investir à risque – alors nous tirons également nos cornes. Qu’est ce qui a changé? L’économie mondiale a entamé un cycle au début des années 1990 de baisse des risques dans l’ensemble du système en raison de ces changements de réduction des risques :

    1. La dissolution de l’URSS et la fin de la guerre froide hyper coûteuse et à risque accru.

    2. Le flot de pétrole à bas prix alors que tous les gisements super-géants découverts dans les années 1970 ont commencé leur production maximale.

    3. La Chine est devenue « l’atelier du monde » à faible coût, permettant à 30 ans de faire exploser les bénéfices des entreprises alors que les entreprises réduisaient leurs coûts en délocalisant leur production en Chine.

    4. Cette délocalisation a stimulé les bénéfices tout en dégonflant les coûts de production en raison de coûts de main-d’œuvre beaucoup plus faibles, de normes environnementales laxistes / inexistantes et de la volonté des producteurs chinois d’accepter des marges bénéficiaires extrêmement minces.

    5. La réduction du risque mondial et l’impact déflationniste de la mondialisation (délocalisation et ouverture de nouveaux marchés) ont permis aux banques centrales d’abaisser les taux d’intérêt pendant 30 ans sans déclencher d’inflation et aux services bancaires/prêts du secteur privé d’accroître le crédit et l’effet de levier, en mondialisant/commodisant efficacement instruments financiers de couverture des risques (financiarisation).

    6. Après un décalage de dix ans (les années 1980), les progrès de l’informatique personnelle, des logiciels et de la publication assistée par ordinateur ont finalement commencé à générer des gains de productivité.

    7. La théologie économique du néolibéralisme a été adoptée à l’échelle mondiale. Le néolibéralisme prétend que “les marchés résolvent tous les problèmes” et donc la solution universelle est de transformer tout en marché en réduisant les réglementations et la surveillance de l’État.

    Toutes ces forces ont eu tendance à restreindre les prix des matières premières, des biens et des services et à réduire les risques systémiques tout en élargissant les marchés, les “innovations” financières et les profits. Cela a créé un « cercle vertueux » global dans lequel chaque dynamique renforçait les autres. Ce « cycle vertueux » s’est terminé lors de l’effondrement financier mondial de 2008-09, mais a été dissimulé pendant une décennie par des politiques extrêmes :

    1. La Chine a lancé la plus grande expansion du crédit de l’histoire (expression de Russell Napier) pour contrer l’effondrement.

    2. La Réserve fédérale et d’autres banques centrales ont lancé une politique de répression financière (c’est-à-dire gérer les marchés financiers de manière centralisée plutôt que de laisser les forces du marché dicter la liquidité, le prix, le risque, etc.), conduisant à une politique de taux d’intérêt zéro (ZIRP) qui était effectivement négative -les taux depuis que l’inflation a continué de crachoter à 1,5 % à 2 %.

    Pourquoi le « cercle vertueux » s’est-il terminé ? La réponse de base est les rendements décroissants : les rendements de toute nouvelle politique ou dynamique telle que le néolibéralisme, la mondialisation ou la financiarisation suivent une courbe en S…

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    …où les rendements initiaux sont prodigieux (la phase de boost) puis, à mesure que la dynamique devient omniprésente, les rendements diminuent jusqu’à stagner. À ce stade, le système se décompose à moins que de nouvelles mesures plus extrêmes ne soient appliquées – par exemple, le ratio dette/PIB de la Chine doublant de 140 % à 280 % et les taux d’intérêt étant supprimés à zéro.

    Un autre facteur est la cannibalisation des marchés intérieurs une fois que la mondialisation a écrémé les rendements faciles. La financiarisation commence par paraître “innovante” en affirmant qu’elle peut couvrir tous les risques à faible coût, réduisant ainsi à zéro le risque de jouer à des jeux financiers. Comme Benoit Mandelbrot et d’autres l’ont expliqué, cela n’est pas possible pour des raisons structurelles/mathématiques (les marchés sont des fractales, etc.). À mesure que les gains faciles diminuent, la financiarisation prend des actifs qui étaient autrefois à faible risque et les banalise en « instruments » qui peuvent être vendus à l’échelle mondiale en tant qu’« actifs à faible risque ». C’est ce qui est arrivé aux hypothèques immobilières, qui sont passées de très réglementées et à faible risque à mal réglementées / frauduleuses et emballées dans des titres adossés à des hypothèques très trompeurs qui masquaient le véritable risque – élevé – derrière des réclamations farfelues de faible risque.

    Alors que les coûts augmentaient en Chine et dans d’autres pays producteurs, les coûts de main-d’œuvre ont commencé à augmenter, ainsi que des taxes et des mandats plus élevés pour réduire la pollution de l’air étouffante et l’eau/le sol empoisonnés qui résultent inévitablement d’une industrialisation incontrôlée. La réduction du coût du capital/du crédit à un niveau proche de zéro a généré une vague de tsunami de capitaux générés par le secteur privé, à la fois dans le secteur bancaire et dans les secteurs non bancaires en plein essor (banque parallèle). Ce crédit à faible coût a ensuite été lancé sur les marchés mondiaux pour chasser tout investissement à haut rendement, ce qui signifie bien sûr parier sur des actifs risqués tout en se protégeant soi-disant contre les pertes.

    Toute cette ingénierie financière – ZIRP, crédit bon marché et abondant, recherche de rendement – dépend en fin de compte de la liquidité, c’est-à-dire la présence d’acheteurs en taille pour créer un marché pour quiconque cherche à vendre un actif. Si la liquidité s’épuise pour une raison quelconque – une crise bancaire, une panique du marché, etc. – alors les vendeurs manquent d’acheteurs et le marché revalorise l’actif à des niveaux de plus en plus bas jusqu’à ce que des acheteurs émergent. Dans un marché sans offre/liquidité nulle, il n’y a aucun acheteur tant que le prix ne s’approche pas de zéro.

    L’effacement potentiel de la “richesse” générée par la bulle ferait s’effondrer l’ensemble du système financier mondial, car tous ces actifs sont la garantie de l’immense montagne mondiale de crédit/dette. L’évaporation de la liquidité en 2008-09 est ce que l’ancien président de la Fed – Alan Greenspan – a identifié comme le risque qu’il n’avait pas anticipé.

    Alors, qu’est-ce qui a changé vers 2007-09 ? La mondialisation et la financiarisation sont passées d’un « cycle vertueux » à la stagnation/au déclin, les politiques sont devenues plus extrêmes pour masquer les risques systémiques croissants, et l’ajout d’un milliard de nouveaux travailleurs aspirant à tous les luxes consommateurs de matières premières du mode de vie de la classe moyenne a absorbé la production excédentaire de pétrole et autres matières premières. Les excédents ayant disparu, les prix ont dû commencer à augmenter.

    Le confinement et la reprise post-Covid, les politiques de la Chine sont passées de «l’ouverture au monde» et de la «montée pacifique» à une militarisation agressive et à la restriction de l’accès de la société chinoise au monde extérieur.

    Tous ces facteurs ont exposé les risques qui avaient été masqués avec succès :les risques que les chaînes d’approvisionnement mondiales puissent s’effondrer ou être perturbées par la géopolitique ; le risque que les jeux de financiarisation puissent exploser ; le risque que le néolibéralisme n’arrive pas à supprimer les risques de fraude et d’exploitation ; les risques que la montée en flèche de la dette dépasse l’expansion de l’économie réelle, générant des crises de la dette, et les risques de politiques extrêmes générant des conséquences imprévues (aléa moral, prise de risque extrême, etc.) et un retour de bâton (réindustrialisation, guerres commerciales, etc.)

    À ces risques s’ajoutent désormais des sources de risques démographiques, de capital, de main-d’œuvre et de ressources.Les tensions géopolitiques augmentent, ce qui est historiquement typique des époques où les produits de base deviennent rares et/ou indisponibles/coûteux. Cela incite à la réindustrialisation, à la relocalisation, à la relocalisation amicale, etc., qui sont toutes des questions de sécurité nationale visant à réduire la dépendance vis-à-vis des rivaux ou des chaînes d’approvisionnement risquées.

    En effet, l’État-nation doit prendre le contrôle des marchés déréglementés, l’idéal néolibéral. Cette réindustrialisation est également motivée par la transition vers des sources d’énergie autres que les hydrocarbures, un objectif qui nécessitera beaucoup plus de capital que la plupart ne le pensent, même s’il est inférieur aux attentes irréalistes. La demande de milliers de milliards de nouveaux investissements exercera une pression sur le crédit pour la consommation (maisons neuves, véhicules, vacances, etc.), faisant grimper le coût du crédit, quelles que soient les autres conditions.

    Au cours de la dernière décennie, les taux de natalité dans de nombreuses économies développées et en développement se sont effondrés alors que la main-d’œuvre vieillit et prend sa retraite. Ces deux développements signifient que des programmes de retraite et de protection sociale ont été lancés alors que 5 travailleurs pour chaque retraité ne sont plus viables maintenant qu’il n’y a que 2 travailleurs à temps plein pour chaque retraité/bénéficiaire de l’aide sociale.

    Le déclin de la force de travail introduit également deux autres dynamiques: Les pénuries potentielles de main-d’œuvre et la stagnation de la demande, car les personnes âgées consomment beaucoup moins que les nouveaux ménages avec enfants. Alors que les taux de nuptialité et de natalité chutent, les perspectives de croissance économique tirée par la consommation chutent également.

    Les extrêmes politiques du ZIRP, de l’aléa moral, de l’expansion du crédit et de la chasse aux rendements ont gonflé “The Everything Bubble”, qui a mis le prix du logement et des véhicules hors de portée des 60% inférieurs (ou dans de nombreuses régions, des 80% inférieurs) de ménages.

    Cette inégalité croissante érode la cohésion sociale et favorise un mode de vie alternatif dans lequel les jeunes travailleurs se retirent de la course effrénée pour acquérir un revenu et une richesse de classe moyenne supérieure. Cela diminue le bassin d’acheteurs potentiels de tous les actifs surévalués, réduisant davantage la liquidité sur une base démographique/structurelle.

    En termes simples, la marée montante de la richesse et des profits n’a pas soulevé tous les bateaux. Les 5 % les plus riches ont engrangé la grande majorité des gains d’appréciation des actifs, des gains en capital et des bénéfices. Cela génère un contexte de risque croissant de désordre social.

    En plus de tout cela, 30 ans d’inflation modérée se sont inversés en une ère d’inflation soutenue qui, malgré les espoirs de nombreux commentateurs, ne sera pas éphémère. Cette ère d’inflation est motivée par :

    1. Des niveaux d’endettement excessifs qui ne peuvent être gérés qu’en gonflant la dette à des niveaux gérables.

    2. Les pénuries de produits de première nécessité qui poussent les prix au-dessus de ce que les consommateurs peuvent se permettre tout en n’étant pas assez élevés pour financer de nouveaux investissements massifs nécessaires pour augmenter l’offre.

    3. Le coût du capital doit augmenter pour refléter la hausse de la prime de risque à l’échelle mondiale.

    Toutes les ruses déployées pour restaurer la confiance en 2008-09 ont atteint de tels extrêmes que désormais le risque systémique – de défaut, de conflits, de chaînes d’approvisionnement rompues, de chantage géopolitique, de pénurie de produits de base et peut-être le risque le moins compris, l’évaporation de la liquidité à mesure que le crédit et les acheteurs d’actifs risqués se raréfient– augmente considérablement.

    Ces risques sont difficiles à évaluer ou à couvrir complètement, et l’interdépendance de l’économie mondiale et du système financier – un système étroitement lié – signifie que le risque dans un domaine se propage rapidement au reste du système.

    Cette hausse structurelle des risques systémiques augmente les coûts et modifie le calcul risque-récompense de chaque actif.

    Prenons l’exemple du logement. Lorsque nous sommes convaincus que le logement augmentera de 30 % chaque décennie comme sur des roulettes, nous paierons les prix d’aujourd’hui en espérant que la maison gagnera 30 % au cours de la prochaine décennie. Mais à mesure que la prime de risque financier augmente et que nous devons prendre en compte le risque que la maison perde 30 % de sa valeur à l’avenir, nous hésitons à payer le prix élevé d’aujourd’hui.

    Alors que d’autres deviennent également méfiants, la reconnaissance du risque se renforce et à mesure que les prix baissent, notre méfiance augmente et nous décidons d’attendre que les risques d’une nouvelle baisse deviennent plus clairs.

    Le problème avec l’évaluation des risques est que les risques complets ne sont jamais clairs jusqu’à ce qu’il soit trop tard.

    Tout est réévalué, y compris le risque lui-même, le coût du capital et du travail et la valeur de tous les actifs. Cette révision des prix est actuellement modeste, mais comme les risques se manifestent, nous pouvons anticiper une accélération de la révision des prix. Si la liquidité s’épuise – les acheteurs de maisons se retirent soudainement du marché – la baisse des prix peut être dramatique et s’auto-renforcer.

    Dans un système maintenu par des extrêmes toujours plus grands, la confiance s’érode très rapidement une fois que l’extrême suivant ne parvient pas à déplacer l’aiguille. À ce stade, tous les paris sont ouverts car la confiance dans la capacité des décideurs politiques à “sauver la situation” s’évanouit.

    Une fois que la confiance disparaît, la liquidité disparaît également. Une fois que les marchés sont illiquides, le problème ne se limite pas à la baisse de la valorisation – le vrai problème est de trouver un acheteur qui vous permettra de convertir l’actif en espèces.

    Il est clair que la prime de risque mondiale a augmenté de façon spectaculaire et augmente dans un arc imprévisible. Cette tendance structurelle à des risques plus élevés va tout réévaluer, y compris les rendements obligataires et les taux d’intérêt.” Contribution: Charles Hugh Smith

  13. Voyage dans le temps et l’espace

    Saison 2023 (63): Des actes de cannibalisme sur le radeau de La Méduse helvétique?

    Certes, le “radeau de La Méduse” est l’œuvre la plus célèbre du peintre français Théodore Géricault, mais elle est également inspirée d’un véritable naufrage, celui de la frégate La Méduse. “Après avoir décidé de se passer de la lecture des cartes et de l’avis de ses officiers, l’erreur d’estimation de son capitaine aura eu pour conséquences d’échouer le navire et contraindre les passager à embarquer à bord d’un radeau de fortune”. De là, un calvaire s’en suivera durant douze jours où les émeutes, massacres et cannibalisme rythmeront le quotidien des survivants”. Alors, si j’ai délibérément choisi cette allégorie pour illustrer le tableau helvétique – avec le naufrage de la banque aux deux voiles – est qu’il demeure particulièrement intéressant de mon point de vue de prendre acte de l’effroi du “think tank (néo) libéral Avenir Suisse”. La missive acerbe (mais néanmoins paradoxale) mentionne: “Non seulement, le Conseil fédéral a garanti des milliards, mais il a démantelé des principes centraux de la politique monétaire”.

    Avenir Suisse dénonce avec véhémence l’application du droit d’urgence qui a permis le mariage forcé entre Credit Suisse et UBS: “Les principes cardinaux de la politique monétaire suisse et l’indépendance de la BNS ont été foulés aux pieds” a estimé hier le groupe de réflexion “libéral”. Jouissif, sachant qu’Avenir Suisse a presque toujours été du côté des grands Timoniers du néolibéralisme. “Un détail important a largement échappé à l’attention lors de la reprise de Credit Suisse” renchéri ce think tank (néo) libéral: “Non seulement, le Conseil fédéral a garanti des milliards, mais il a démantelé des principes centraux de la politique monétaire”. Là, c’est encore plus pathétique sachant qu’Avenir Suisse n’a jamais blâmé la BNS lorsqu’elle a mis en gage – avec la bénédiction du Conseil fédéral – “l’épargne de tout un pays pour financer sa politique monétaire controversée”.

    https://mobile.payot.ch/Detail/le_crepuscule_de_la_banque_nationale_suisse-vincent_held-9782888922124

    Au sein de l’ouvrage de l’économiste Suisse, Vincent Held, on y découvre précisément “comment la BNS a massivement mis à contribution le système bancaire suisse – ainsi que diverses institutions de prévoyance ! – pour financer sa très coûteuse politique d’affaiblissement du franc”. Oui, en effectivement, Avenir Suisse a sorti sa boussole lui indiquant la direction du courant populaire à suivre; quitte à piétiner à présent ses compagnons de fortune pour préserver sa peau. “Le nouveau mécanisme adopté pour l’occasion représente la rupture d’un tabou, car il touche à rien de moins qu’à la quintessence des conditions-cadre de la politique monétaire”, selon des experts des marchés financiers cités par Avenir Suisse. Nooon, sérieusement Avenir Suisse, vous êtes revenu dans les ordres du Libéralisme après avoir “dévoré” l’excroissance “Néo”? Ces experts triés sur le radeau de La Méduse helvétique “en appellent au Parlement fédéral pour qu’il rétablisse l’indépendance de la Banque nationale suisse (BNS) et qu’il respecte les valeurs de base de la politique monétaire helvétique”. Bien que j’adhère au constat, je critique vertement l’hypocrisie du cercle d’influence Avenir Suisse. Son empreinte n’est ainsi que le début d’un cannibalisme helvétique non assumé.

    1. Qu’est-ce que le think tank (néo) libéral Avenir Suisse – fondé en 1999 par quatorze des plus grandes multinationales helvétiques♟ne comprend-il toujours pas dans la forme juridique du “Hedge funds BNS” ?

      “Banque centrale de la Suisse, la Banque nationale est une société anonyme régie➡️ par une loi spéciale⬅️. Les dispositions du code des obligations relatives à la société anonyme sont applicables, à moins que la LBN en dispose différemment. ➡️La Banque nationale est administrée avec le concours⬅️ et ➡️sous la surveillance de la Confédération⬅️ Cette forme juridique ➡️associant des éléments de droit public et de droit privé⬅️ a été choisie lors de la création de la Banque nationale en 1907”

      https://www.snb.ch/fr/ifor/public/qas/id/qas_unternehmen#t4

      ♟Par ordre alphabétique : ABB, Credit Suisse Group, Groupement des Banquiers Privés Genevois, Jacobs Holding, Kuoni Holding, McKinsey Switzerland, Nestlé, Novartis, Roche, Sulzer, Swiss Re, UBS, Zurich Financial Services (autant dire une bonne partie des forces vives du “Filz”)🙈

      1. Vous souhaitez à présent connaître le nom de “ces experts triés sur le radeau de La Méduse helvétique”? Pas de soucis..

        (Avenir Suisse & Allnews.ch)

        Jürg Müller: “Après des études en économie politique aux Universités de Saint-Gall et de Cambridge, il a accompli son doctorat à l’EPF de Zurich et a ensuite été rédacteur économique de la Neue Zürcher Zeitung pendant plus de quatre ans…”

        Lukas Schmid: “Après des études d’économie politique à l’Université de Saint-Gall, il a d’abord travaillé pour les CFF avant de terminer son doctorat à l’Université de Lucerne et de devenir assistant de recherche au département d’économie politique…”

        Laurenz Grabher: “Depuis mars 2023, il est Senior Researcher. Auparavant, il a travaillé entre autres au sein des Parlements européen et autrichien, à l’institut d’économie nationale à l’Université de Saint-Gall, ainsi que dans le domaine du consulting. Il est titulaire d’un master de l’Université de Saint-Gall en économie et d’un master en finance et investissements de la Rotterdam School of Management..”

        Un point commun? Si l’on retrouve la Mecque du néo-libéralisme, aux États-Unis, à l’Université de Chicago, en Suisse, elle se trouve à l’Université de Saint-Gall. Le temple, lui, se loge sur les hauteurs de Vevey: La Société du Mont-Pèlerin🙊🙈🙉

    2. Bonjour Raymond,
      Un grand merci pour ce commentaire qui établit un parallèle pertinent entre le radeau de la Méduse et le naufrage de la banque aux deux voiles. Notons d’emblée que, grâce au génie du jeune artiste romantique Théodore Géricault en quête de lumière médiatique et donc de la réussite sociale, cette catastrophe maritime a fait d’un fait divers tragique un fait historique, et de simples mortels comme des soutiers des héros. En outre la monumentale toile de Géricault a rompu avec un académisme étouffant et conformiste; elle a également enrichi la langue française avec l’expression “radeau de la Méduse” pour désigner une organisation dirigée vers son propre anéantissement. Ce qui sied à merveille à la situation du deuxième fleuron bancaire de la Suisse.

      Si la postérité a retenu la mémoire de ce drame particulier de la marine à voile, c’est sans doute à cause du fait que Géricault a pris des libertés par rapport aux faits réels, pour laisser la porte ouverte à la liberté de réflexion et d’imagination sur la dimension dramatique de la condition humaine dans les conditions extrêmes. C’est pourquoi le radeau de la Méduse est avant tout une réflexion sur la fragilité de la condition humaine, la détresse, l’horreur et l’espoir, sur fond de déchainements des éléments de la nature et l’inévitable invention de l’art de la survie dans des circonstances extrêmes.
      C’est sans doute le recours à l’art qui a contribué à immortaliser ce naufrage. Sans lequel celui-ci aurait été traité comme une catastrophe parmi tant d’autres avec ou sans actes de cannibalisme, sachant que l’anthropophagie n’a pas commencé avec le naufrage de la Méduse. En effet, on est enclin à penser avec le recul que si notre artiste avait mimé la démarche, par exemple, d’un comptable ou d’un financier en costume trois-pièces et cravate pour évaluer les conséquences financières de cet accident pour la compagnie d’assurance ou les indemnités et pensions à verser par le Trésor royal aux veuves et aux orphelins des malheureux passagers ayant péri dans cette catastrophe, il aurait probablement sombré dans l’oubli et personne n’aurait entendu parler de cette tragédie, en dehors peut-être d’un cercle restreint de spécialistes ou de passionnés de l’histoire maritime.

      Il est également possible que, selon toute vraisemblance, le Musée du Louvre aurait été privé d’un chef d’œuvre qui participe, certes de manière marginale, à l’équilibre de la balance commerciale de la France, grâce au tourisme de masse. En tout cas, une chose est sûre, c’est le fameux tableau de Géricault qui semble être à l’origine de l’inspiration dans d’autres domaines de l’art tels la littérature, la musique, la sculpture ou le cinéma. Ainsi, sans cette toile subversive à souhait dénonçant l’ordre social dominé par les élites déconnectées du réel, mais aussi par la pratique de l’esclavage, on n’aurait probablement pas eu le chef-d’œuvre d’Eugène Delacroix : “la liberté guidant le peuple”

      Revenons à nos moutons tout en continuant avec la métaphore filée. Effectivement, il existe une forte similitude entre le radeau de la Méduse et Crédit suisse. Le premier élément commun qui vient à l’esprit, c’est l’erreur du pilotage. Sauf que dans le cas du naufrage de la Méduse le capitaine a été condamné à trois ans de prison en raison de son incompétence manifeste. Notons qu’à l’époque sous le régime de la Seconde Restauration, le népotisme était déjà une pratique très prisée, puisque le capitaine de la frégate transportant des colons vers l’Afrique était un aristocrate royaliste. Il a été nommé à ce poste à grande responsabilité grâce au copinage et donc à ses liens avec la noblesse. C’est pourquoi il ne semble pas excessif d’interpréter le tableau de Géricault comme la défense des victimes contre les inconséquences de l’Etat.

      Cependant, Il n’en va pas de même pour CS, car les anciens dirigeants qui ont coulé le deuxième fleuron bancaire suisse continuent à se la couler douce, après avoir perçu des rémunérations et des bonus pharaoniques durant leur mandat à la tête de la banque en question. Comme on peut le constater le capitalisme que de nombreux néo-libéraux continuent à considérer comme un horizon indépassable pour l’humanité, est miné par ses propres contradictions. Surtout quand il récompense de manière indue des personnes triées sur le volet, mais dont les talents de gestion ont été paradoxalement une catastrophe pour l’entreprise qu’ils étaient censés piloter dans l’intérêt de toutes les parties prenantes.

      Le naufrage de la Méduse a été une tragédie pour les familles des 150 malchanceux qui étaient à bord du radeau de fortune abandonné par le capitaine aux flots déchainés de l’océan. Seulement dix ont survécu. En revanche la déconfiture de CS est un drame social pour les employés et les petits actionnaires des deux géants bancaires dont la fusion a été contrainte par le gouvernement fédéral. Rappelons que ce dernier a ordonné aux dirigeants de la banque bénéficiaire et sans doute aussi à ceux de la banque cédante, de ne pas solliciter l’aval de leurs actionnaires. Autrement dit, l’autorité fédérale a mené à la hussarde la fusion au nom de l’intérêt supérieur de la place financière.
      Cette méthode qui consiste à se passer de l’aval des actionnaires, constitue incontestablement une entorse inhabituelle au droit de propriété que cette même autorité juge sacré et donc non négociable. Et ce d’autant plus qu’un tel droit est considéré comme étant à la base de la prospérité d’une économie libérale dans laquelle l’Etat devrait s’abstenir d’interférer le moins possible. Bref, sous la pression des marchés et des autorités étrangères du monde occidental, le Conseil fédéral a invoqué des circonstances exceptionnelles comme en période de guerre afin d’éviter la faillite de CS dont les conséquences auraient été, selon toute vraisemblance, cataclysmiques pour la place financière helvétique. Sur ce point, bien évidemment il peut y avoir une diversité d’opinions, mais ce qui est indéniable c’est que la procédure utilisée ressemble à s’y méprendre au fameux 49.3 du gouvernement français par sa brutalité.
      Par ailleurs, suite à cette mégafusion, il faudrait s’attendre à ce que des dizaines de milliers d’emplois disparaissent en Suisse avec le risque que le taux de chômage parte sur une pente ascendante, tout particulièrement, si aucun plan social pour les employés de CS et d’UBS n’a été prévu. Ce qui semble être le cas, à en juger par la crainte exprimée par les syndicats à ce sujet. En tout cas, une chose est certaine, c’est que les fusions consenties ou forcées ont toujours eu un impact négatif sur l’emploi, tout particulièrement lorsqu’elles ont un caractère intra-sectoriel. Cette observation est corroborée par des études empiriques menées dans le cadre de l’économie américaine, même s’il convient d’accueillir leurs résultats avec circonspection, dans la mesure où la méthodologie retenue est souvent sujette à caution. Plus précisément les conclusions de tels travaux sont souvent sensibles aux hypothèses retenues en amont.

      A ce sujet, les responsables d’UBS ont promis que tous les collaborateurs tant d’UBS que de CS seront traités correctement et que compte tenu de la tâche herculéenne à mener pour réussir la fusion, la nouvelle banque aura besoin de plus que moins de gens. Or, on sait que les promesses n’engagent que ceux qui les croient. En tout cas, ces annonces ne sont pas en cohérence avant la volonté affichée par la même direction de réduire les coûts et d’élaguer les activités non rentables de CS. Sans parler des risques de doublons du fait de la similarité des profils des deux banques. C’est pourquoi il existe une forte probabilité que ce mariage forcé entre les deux géants bancaires se traduira par un licenciement d’une partie importante du personnel. Selon les estimations avancées par certains journaux suisses, plus de 11000 postes de travail pourraient passer à la trappe, rien qu’en Suisse.

      En résumé, Crédit Suisse est le radeau de la Méduse et pour que le Conseil fédéral ne se trouve pas dans la situation du commandant Hugues Duroy de Chaumareys de la frégate française, il serait souhaitable qu’il pense aux conséquences de la garantie financière qu’elle vient d’ octroyer à UBS en termes d’aléa moral et qu’il mette au point un plan de sauvetage pour toutes les victimes de cette mégafusion forcée.
      Amicalement.

  14. Au sein de notre “Meilleur des mondes”, en 2023, pas moins de 65 000 milliards de dollars de dettes en dollars non enregistrées circulent dans le système financier mondial dans des banques non américaines et des banques parallèles (shadow banking system). Pour mettre en perspective ce chiffre, le PIB mondial se situe à 104 000 milliards de dollars. Cette dette “cachée” en dollars se présente sous la forme de swaps de devises, qui ont explosé au cours de la dernière décennie en raison d’années d’assouplissement monétaire et de taux d’intérêt extrêmement bas (voir à zéro ou négatif) alors que les investisseurs recherchaient des rendements plus élevés. Aujourd’hui, la dette non enregistrée de ces échanges de devises vaut plus du double de la dette en dollars officiellement enregistrée dans les bilans de ces institutions.

    https://www.visualcapitalist.com/wp-content/uploads/2023/01/hidden-dollar-debt-infographic.jpg

    Oui, effectivement, ce n’est pas joli-joli!!!

  15. Après la grande conflagration de 2008 et malgré les multiples promesses des décideurs politiques du monde entier d’encadrer le “shadow banking system”, aucune mesure sérieuse n’a été prise. En fait, le monde du secteur “bancaire parallèle” a continué de se développer d’une manière effrayante…

    https://michelsanti.fr/crise-financiere/shadow-banking#comments

    Ces fournisseurs alternatifs de crédit ont également ajouté de l’oxygène supplémentaire aux économies locales fragilisées (crise financière de 2008 et crise des dettes souveraines dès 2010…) car ils ont autorisé un nouveau souffle aux “entreprises zombies” et ont permis aux ménages de maintenir ou d’augmenter le modèle d’une consommation sans limites. Une illusion! C’est aussi l’une des principales raisons pour laquelle les régulateurs n’ont jamais été trop enclins à prendre des mesures strictes pour juguler ces “habiles facilitateurs”. Si nos homo-politicus ne comprennent toujours pas le sens des mots (ou maux?), alors comme pour nos chères “petites têtes blondes”, il faut leur montrer des images…

    https://cdn-get-2.whotrades.com/u3/photoF755/20206932142-0/blogpost.jpeg

  16. Voyage dans le temps et l’espace

    Saison 2023 (64) : Les américains vont devoir se priver de crédit pour financer les chocolats de Pâques

    Durant la semaine écoulée, l’indice des conditions de crédit de l’American Bankers Association est tombé au plus bas niveau depuis le début de la pandémie, indiquant que les économistes des banques voient les conditions de crédit s’affaiblir fortement au cours des six prochains mois (à minima). En conséquence, les banques sont susceptibles de devenir encore plus prudentes quant à l’octroi de crédit. En sciences économiques, un resserrement du crédit est une limitation ou une raréfaction du crédit offert aux entreprises et aux particuliers, ou une forte hausse des coûts liés à l’endettement conduisant également à un “credit crunch”. Le phénomène est parfois concomitant avec une crise de liquidité! Bon, pour le coup et sans surprise, nous avons tous les ingrédients d’un “credit crunch”. La ruée bancaire n’étant pas terminée aux États-Unis et l'”expérience de mort imminente d’innombrables banques régionales” obligeront les petites et moyennes banques à resserrer davantage les prêts alors qu’ils entrent en mode de survie et se replient, bloquant ainsi toute nouvelle émission de prêts et envoyant l’économie américaine dans les abysses. Pour rappel, 70 % du PIB américain provient de la consommation dont l’essentiel provient de la création de nouveaux crédits. C’est un problème pour cette économie de casino car les banques ayant moins de 250 milliards de dollars d’actifs sont responsables d’environ 50 % des prêts commerciaux et industriels américains, 60 % des prêts immobiliers résidentiels, 80 % des prêts immobiliers commerciaux et 45 % du crédit à la consommation. Et avec des segments clés de l’économie privés de lignes de financement critiques, le PIB étasunien s’effondrera mécaniquement. Récession… stagflation…et ce n’est pas la devise US comme “arme de guerre” qui arrangera le “Schmilblick”!

    Allez, sur ces bonnes nouvelles du monde d’après, soyons tout de même prudent avec le risque occasionné par les chocolats de Pâques. Il ne faudrait tout de même pas ajouter une crise de foi(e) aux crises actuelles.

      1. Voyage dans le temps et l’espace

        Saison 2023 (65): Quel plan de sauvetage vont-ils aborder pour les personnels victimes de la mégafusion forcée UBS/Credit Suisse?

        Inutile de le répéter, même si beaucoup ont une mémoire à géométrie variable, que la Suisse n’a jamais été à court d’innovations foireuses pour préserver coûte que coûte l’intégrité de ses forbans de la finance. Il n’est dès lors pas vain de rembobiner un autre film de l’histoire, c’est-à-dire ce coup de Trafalgar ayant laissé une profonde cicatrice dont la Suisse a le secret.

        Pour commencer, comprenons bien que nous ne sommes pas – comme nos homo-politicus se complaisent à le véhiculer – au sein d’une vulgaire “crise bancaire”, mais bel et bien dans le vortex d’une autre crise financière internationale. À présent, nous pouvons pénétrer le sujet (un exemple parmi tant d’autres) avec la compagnie d’assurances Caisse de rentes suisse (Schweizerische Rentenanstalt) fondée en 1857, à Zurich, sous la forme d’un établissement de droit privé ayant pour but de conclure des assurances vie, décès et rentes viagères. Cette dernière n’étant encore totalement financiarisée à cette époque. Bien que le gouvernement zurichois en ait eu l’initiative et que Johann Conrad Widmer ait réalisé les travaux préliminaires, le Credit Suisse (CS) apparaît toujours comme le fondateur de la Rentenanstalt (“Renten” pour les intimes) car la banque garantit les prestations de la compagnie qui ne disposait pas de capital initial. A l’entrée en vigueur du Code des obligations en Suisse, la Rentenanstalt dut, à l’instar d’autres assurances mutuelles, s’inscrire en tant que coopérative au registre du commerce. Elle se détacha ainsi progressivement de la tutelle du Credit Suisse au rythme de la croissance de sa fortune et s’en sépara définitivement en 1885.

        La prépondérance des assurances de capital par rapport à celles de rente eut pour conséquence un complément de la raison sociale qui devint la Société suisse d’Assurances générales sur la vie humaine (Schweizerische Lebensversicherungs- und Rentenanstalt) en 1894. La même année, la Rentenanstalt offrit une assurance populaire destinée aux revenus modestes dont les primes furent initialement encaissées à la poste au moyen de carnets de timbres. Durant la Première Guerre mondiale, la “Renten” se lança sur une grande échelle dans la prévoyance du personnel, un secteur qui flamba après la Deuxième Guerre mondiale. Avec l’entrée en vigueur de la loi sur la prévoyance professionnelle (LPP) et, dans la continuité de son corps de métier, après la reprise de la compagnie 《La Suisse Assurances》 en 1988, la direction de la Rentenanstalt se sentant limitée dans ses mouvements face à la libéralisation débridée des marchés, parvint à transformer la “Rentenanstalt” en société par actions en 1997. Dans le cadre d’une stratégie de bancassurance, les acquisitions se succédèrent: Lloyd Continental, UTO Albis, Livit et Banque du Gothard en 1999, Société fiduciaire suisse en 2000 et le parc immobilier d’Oscar Weber Holding en 2001.

        Cette expansion forcée et irrationnelle mena la compagnie de près de 150 ans au bord de la faillite en 2001-2002, autant de conséquences se rajoutant aux affres de la finance casino, de la bulle Dotcom et la débâcle du fond LTCM (Long Term Capital Management). Des “zinzins” (OPCVM, fonds de pension, compagnies d’assurance … i.e. des intermédiaires financiers non bancaires) naturellement impactés!

        La nouvelle organisation revendit ainsi en urgence les acquisitions et concentra son activité sur son secteur traditionnel, opérant dès l’année 2002 sous le nom de Swiss Life (crise de réputation oblige = changement de marque). De novembre 2002 à mai 2008, le nouveau Boss, Rolph Dörig (“ex-CS”) aura été le président de la direction de l’assureur vie Swiss Life et de mai 2008 à mai 2009 délégué du conseil d’administration. Il fut président du conseil d’administration de Swiss Life Holding SA à partir de mai 2009 et également président du conseil d’administration du plus grand prestataire de services RH au monde, le groupe Adecco (ne souriez pas encore, vous allez connaître la suite). Ah, il faut aussi préciser qu’en 1986 (le futur affranchi de Swiss Life) Rolph Dörig a rejoint le Credit Suisse où il a assumé des rôles de direction dans divers domaines d’activité (au grade de lieutenant?). À partir de 2000, ce diplômé de la Harvard Business School deviendra membre de la direction du Credit Suisse Group et responsable des activités Corporate Banking et Retail en Suisse. En 2002, il a occupé la fonction de Président Suisse de la Banque jusqu’à ses nouvelles fonctions auprès de l’ex-Rentenanstalt (la nouvelle organisation Swiss Life). Le groupe Swiss Life ainsi affaibli essuyera un échec en 2008 durant la crise financière (et post 2008 avec les affaires liées aux “PPLI – Insurance Wrappers” visées comme des outils transfrontaliers d’évasion fiscale). Et pour l’anecdote, l’un des “lieutenants” de Swiss Life (siège Suisse) sentant déjà le vent du boulet des “PPLI-Insurance Wrappers”, se fera recycler auprès de la Finma (le gendarme helvétique des marchés financiers). L’organisation Swiss Life employait environ 8 200 personnes en 2009 et était active en Suisse, en France, en Allemagne, au Liechtenstein, au Luxembourg, à Singapour et à Dubaï.

        Revenons à présent et plus précisément sur ce qui nous occupe: “Plan social et réinsertion des personnels?”. Mais afin d’appréhender correctement la manœuvre, nous sommes contraints à nous replonger vers la compagnie 《La Suisse Assurances》reprise en 1988 par la “‘Rentenanstalt”. Première société romande d’assurances sur la vie, 《La Suisse Assurances》 fut fondée à Lausanne en 1858 par des représentants de la haute bourgeoisie: Henri Richard, Samson Boiceau, François Guisan, William Rey, Eugène Doxat, Emile-Samuel Bory. A la veille de la Deuxième Guerre mondiale, elle renonça à ses activités en Europe et acquit plusieurs portefeuilles de compagnies étrangères implantées en Suisse (une manne). Le secteur accidents fut créé en 1940, l’assurance choses fut introduite en 1978. Lors de son entrée forcée en 1988 dans le groupe Rentenanstalt (auj. Swiss Life), 《La Suisse Assurances》comptait en l’an 2000 plus que 1 000 collaborateurs répartis entre sa direction générale de Lausanne et ses vingt-trois agences générales installées sur tout le territoire helvétique.

        En 2005, la compagnie sera totalement dissoute par l’entité Swiss Life. Le secteur des assurances vie intégré à Swiss Life, tandis que le domaine patrimoine fut racheté par la Vaudoise Assurances et celui maladie et accidents par Helsana. Les personnels, eux, dispatchés entre les différentes structures pour les uns; d’autres “pouvant compter implicitement” sur les services du plus grand prestataire de services RH au monde, le groupe Adecco, dont l’affranchi Rolph Dörig n’était autre que le président du conseil d’administration (un vice mené à son paroxysme? Bon, Economiesuisse/Avenir-Suisse et les homo-politicus étaient rassurés, les médias “mainstream” ont fait le job: rasséréner la population). À ceci près qu’une très grande majorité des personnels connaîtra une mise au placard; du mobbing poussant vers la sortie; un blocage de l’ascenseur professionnel; puis les départs “volontaires” s’enchaîneront ensuite vers la case chômage relevant mécaniquement les coûts reportés sur la charge régalienne. Un plan (social) néolibéral réussi! Ceci, bien évidemment, avec la si caractéristique rigueur de l”‘Omerta”, au risque sinon que “les soldats” soient bannis à jamais du milieu financier. En attendant, le temps tissait son ouvrage en effacant soigneusement les traces du crime tout en enroulant les cadavres à l’intérieur du tapis. Alors, je crains fort que cette pratique peu reluisante ne se réitère pour les personnels (doublons) du Credit Suisse, surtout dans un pays profondément enraciné aux dogmes du néolibéralisme.

        Toutefois, que l’État vienne à présent parrainer une telle mégafusion UBS/Credit Suisse – qui faut-il lui rappeler? – porte le bilan de la nouvelle entité UBS à 1’600 milliards alors que le PIB helvétique est de 700 milliards et le bilan de la BNS à plus de 850 milliards, est une pure hérésie. Alors avec un énorme OUI : – J’aimerais bien que les homo-politicus viennent nous expliquer comment – et par quel miracle hormis celui qui visera à trucider à l’avenir les caisses de pension lors de la réalisation du prochain aléa majeur – vont-ils porter secours à l’ensemble de la population helvétique pris en otage d’un “aveuglement meurtrier”.

        Enfin, ne nous leurrons plus, le système de prévoyance AVS (1er pilier) ainsi que les avoirs des caisses de pension (2ème pilier) – comme pronostiqué au sein de mes innombrables “voyages dans le temps et l’espace” – sont déjà sur la table des paris. Ou plus politiquement incorrect: Le “pizzo” est en bonne main.

  17. “La disparition du Credit Suisse n’est pas celle de la Suisse, c’est la disparition d’une banque, une grande banque mais d’une banque uniquement, ni plus ni moins”, a relativisé aujourd’hui le Président de la Confédération, Alain Berset, à l’ouverture de la session extraordinaire du Parlement.

    https://www.rts.ch/play/tv/redirect/detail/13878945

    Finalement, nos homo-politicus ne valent pas mieux que la succession des dirigeants du Credit Suisse depuis plus de quinze ans. “Des inconscients notoires ou des sociopathes totalement décomplexés”. Consternant.

  18. Voyage dans le temps et l’espace

    Saison 2023 (66) : À quand des rétributions à la méritocratie pour les homo-politicus et non plus des privilèges à la médiocratie?

    Dans la continuité à fermer les yeux sur les coquins de la place financière suisse, rappelons-nous tout de même des privilèges de la Berne fédérale (ai-je dis qu’ils s’inscrivent dans la lignée de la “Public Choice Theory”?). Pourtant, le compte “Vostro” de cette démocratie reste financé par l’ensemble des contribuables: le revenu annuel brut d’un conseiller fédéral se monte à 468‘276 francs (état au 1er janvier 2023). Ce traitement, tout comme le salaire du personnel de la Confédération, est adapté au renchérissement, sans augmentation du salaire réel. A ce traitement s’ajoute un montant forfaitaire de 30 000 francs (état au 1er janvier 2023, non indexé), destiné à couvrir les frais. Le Président de la Confédération reçoit en plus une indemnité de 12 000 francs pendant l’année présidentielle. Les frais de télécommunication (réseau fixe, téléphonie mobile, informatique) sont pris en charge, à la différence de la redevance radio et télévision, que les conseillers fédéraux paient eux-mêmes. Les conseillers fédéraux et le chancelier de la Confédération ont droit à un véhicule de représentation et à un véhicule de service. Pour leur utilisation à titre privé, un montant équivalant à 0,8 % de la valeur à neuf du véhicule est facturé chaque mois. Les conseillers fédéraux reçoivent également un abonnement général des CFF en 1ère classe et un abonnement des Remontées Mécaniques Suisses.

    Après leur démission, les conseillers fédéraux continuent de percevoir la moitié de leur salaire annuel vie entière. Actuellement, cela correspondrait à une pension d’environ 234’000 francs par an. Les anciens conseillers fédéraux ne reçoivent toutefois la pension de retraite que s’ils n’exercent pas d’autre activité lucrative après leur démission. Cette règle s’applique lorsqu’un membre du Conseil fédéral a été en fonction pendant au moins quatre ans. Toutefois, un ex-conseiller fédéral peut tout à fait percevoir sa pension de retraite intégrale (50 pourcent de 468’276) et officier en parallèle auprès de divers conseils d’administration du secteur privé en percevant des indemnités; pour autant que ces dernières – cumulées à la pension de retraite du CF – ne dépassent pas le montant du revenu annuel brut d’un conseiller fédéral en place, c’est-à-dire 468‘276 francs en 2023. Auquel cas, le dépassement aura pour incidence à réduire la pension de retraite du CF jusqu’à concurrence.

    D’autre part, les membres du gouvernement national, les juges fédéraux et les chanceliers fédéraux reçoivent eux aussi une pension de retraite (en pourcentage du revenu) plutôt qu’une rente qui serait, elle, tributaire des contraintes et conditions telles que réglementées par le système de prévoyance sociale helvétique dont la plèbe reste assujettie (système des trois piliers). Ceci s’expliquerait simplement par le fait que les élus n’ont pas de prévoyance, ni de revenus (donc pas d’assurance chômage) ni de rente après leur démission ou leur destitution.

    Que l’on vienne me dire encore que la Suisse est un pays Libéral.

  19. Voyage dans le temps et l’espace

    Saison 2023 (67): Le “Crony Capitalism” n’est pourtant pas un jeu de bac à sable.

    L’argent trouble qui traîne dans les terrains de jeux ploutocratiques préférés de New York, Londres, Paris ou encore Zurich (pôle financier) avec son excroissance de politiques centralisées à Berne, n’a rien de nouveau. En effet, ce “système économique de connivence” est né lors de la crise financière asiatique de 1997 et fut largement utilisé ensuite pour décrire l’économie philippine sous la dictature de Ferdinand Marcos dans les années 1980. Dans ce “système économique de connivence”, les entreprises prospèrent non pas grâce à la libre entreprise, mais plutôt grâce à l’argent gagné grâce à une collaboration étroite entre une classe d’affaires et la classe politique, c’est-à-dire dans lequel des personnes ou des organisations ayant des relations étroites avec des personnalités politiques profitent de ces relations pour acquérir un avantage concurrentiel injuste. En Occident, ceci devrait aussi nous rappeler les nombreux scandales financiers du début du XXIe siècle aux Etats-Unis, par exemple, qui à leur manière ont déterré les squelettes marquant la période de la fin du XIXe siècle avec la dictature économique et sociale des ” barons voleurs”. En se temps là, la présidence, le Congrès, la Cour suprême et les deux principaux partis américains, tous étroitement liés aux trusts industriels et financiers, avaient dû sévir pour sauver la réputation du système financier et garantir sa stabilité. À sa manière, l’historien américain Howard Zinn y a même consacré un chapitre de son ouvrage où il dénonçait cette période durant laquelle “le capitalisme ne cesse d’avoir recours à l’Etat”.

    Nous voyons bien, à l’instar des deux faces d’une même pièce, ainsi qu’à la lueur des derniers événements (aux États-Unis et en Suisse) que la finalité d’un système économique capitaliste sur lequel repose des individus ou des entreprises ayant des liens étroits avec des dirigeants politiques et des représentants du gouvernement produit les mêmes effets, dont celui d’obtenir notamment un avantage injuste sur le marché. De part sa nature pervers, comprenons bien que ce “système économique de connivence” permet une concurrence sans restriction pour obtenir des permis, des subventions gouvernementales, des allégements fiscaux ou d’autres types d’intervention de l’État sur les ressources et, cela est souvent accompli par des intérêts commerciaux manipulant leurs relations avec le pouvoir de l’État en place. En raison des fortes incitations auxquelles sont confrontés les gouvernements pour extraire des ressources par la fiscalité, la réglementation et l’encouragement de l’activité de recherche de rente, ainsi que celles auxquelles sont confrontées les entreprises capitalistes pour augmenter leurs profits en obtenant des subventions, en limitant la concurrence et en érigeant des barrières à l’entrée, ceci est malheureusement devenu la forme prédominante du capitalisme tel que pratiqué aujourd’hui dans ce bas monde. D’ailleurs, les nouvelles données empiriques sont suffisamment étoffées aujourd’hui pour constater à quel point la richesse et l’intérêt des magnats ont augmenté ces vingt dernières années en raison des politiques favorables aux entreprises cotées, et mises en œuvre par les responsables gouvernementaux – dont on ose croire (?) que “leur volonté” se manifestait avec la prospérité de la société dans son ensemble – alors même que le fossé des inégalités n’a eu de cesse à s’élargir (paupérisation) tandis qu’une infime minorité s’est accaparé la plus grande partie du fruit du labeur d’une très grande majorité. Toutefois, la montée en puissance du “capitalisme de copinage” reste aussi bien attribuée à la fois aux socialistes et aux capitalistes radicaux. Selon les socialistes, le “capitalisme de copinage” serait un sous-produit inévitable du capitalisme pur, alors que d’un autre côté, les capitalistes pensent que le “capitalisme de copinage” résulte du besoin des gouvernements socialistes d’exercer un contrôle économique.

    On l’aura ainsi compris, le “système économique de connivence” reste largement blâmé pour une série de malheurs sociaux et économiques, car il peut entraîner de la corruption explicite (et implicite via le financement opaque de divers partis politiques, par exemple). Les entreprises exploitent leurs liens politiques pour acquérir un avantage injuste sur le marché (lobbies), souvent en soudoyant des représentants du gouvernement, ou en conditionnant des supports de voix à des élections. Cela fausse donc la concurrence sur le marché des biens et services et rend particulièrement difficile la prospérité des petites entreprises et des entrepreneurs lorsque certaines entreprises ont un avantage injuste en raison de leurs relations politiques. Les positions monopolistiques des grandes entreprises (et plus largement encouragées sur l’autel de la financiarisation outrancière) peuvent évidemment affaiblir la concurrence et dissuader ainsi les petites entreprises d’innover davantage ou d’améliorer leurs biens et services. Ce système de perversion est tout aussi néfaste à la démocratie puisqu’il amène une tendance toujours plus marquée des gens à perdre confiance dans les institutions politiques et économiques. Puis, la défiance envers la mise en œuvre des réformes par les politiciens et le fonctionnement efficace des entreprises peuvent en être sérieusement entravés (crise de confiance).

    Enfin, cessons une bonne fois pour tout de croire que le “Crony Capitalism” se limite simplement aux marchés émergents ou aux pays en développement, car il existe suffisamment de conséquences désastreuses dans le monde imputables à ce “système économique de connivence”: La conflagration immobilière aux États-Unis (subprime); l’oligarchie de la Russie qui peut difficilement fonctionner sans l’aide du gouvernement; les distorsions économiques et financières en Chine, qui sont créées par l’Etat pour donner un avantage concurrentiel à ses propres entreprises; sans oublier le paradoxe américain caché par l’alibi du “protectionnisme”, mais dont les principes s’accordent à présent à ceux de la Chine; la Confédération Helvétique par ses relations incestueuses avec la sphère financière et dont le principe même de la “neutralité” y est intimement lié (et à présent en sursis); l’UE mercantile et sa technocratie dirigée contre les peuples alors qu’elle n’a jamais rempli les principes élémentaires d’une ZMO…etc.

    https://www.attali.com/finance/crise/

    En attendant, alors que notre monde poursuit sa fragmentation, nos gouvernances continuent à jouer la montre en restant dans le bac à sable

  20. Le mariage forcé de Crédit Suisse et d’UBS continue à faire des vagues et à faire du bruit dans Landerneau. Ainsi la chambre basse du Parlement vient de rejeter la décision de sauvetage de CS prise par le gouvernement fédéral au motif que ce dernier n’a consulté ni les parlementaires ni les actionnaires ni les employés des deux banques en question. L’argument selon lequel il fallait agir vite pour éviter une faillite de CS aux conséquences incalculables sur la place financière de la Suisse et sur la finance internationale, ne semble pas avoir convaincu. De même les syndicats ne sont pas en reste et reprochent au gouvernement fédéral d’avoir fait le choix de sauver les banques au détriment des emplois.
    Je voudrais m’attarder quelque peu sur la réaction des syndicats. A juste raison ces derniers ont exprimé des craintes au sujet de la menace que cette fusion menée à la hussarde fait peser sur les emplois dans le secteur bancaire. Parmi les mesures proposées par les syndicats, figure en bonne place la mise en retraite anticipée des séniors. Il va sans dire que loin de moi l’idée de remettre en cause la proposition syndicale ou de rendre responsable ce partenaire social si utile de la gestion des conséquences d’une situation plutôt subie que choisie par ses mandants en l’occurrence les employés des deux banques systémiques.

    Bien évidemment les syndicats ont tout à fait raison de pointer du doigt l’asymétrie entre le traitement des banques et celui des emplois. Pourquoi les pouvoirs publics mobilisent-ils aisément des moyens financiers colossaux et mettent-ils la BNS à contribution pour sauver une banque too big to fail en situation de faillite à cause d’une série d’erreurs de gestion et de scandales financiers? Alors qu’ils semblent afficher une totale indifférence face à la nécessité de sauver des milliers d’emplois menacés de destruction. Etant entendu que sauver une banque systémique avec des derniers publics n’exclut aucunement la possibilité de licencier une proportion non négligeable du personnel. Sauf à faire l’hypothèse que les salariés licenciés n’auraient aucune peine à retrouver un emploi dans le secteur bancaire, lequel, semble-t-il, connait actuellement une pénurie de main-d’oeuvre qualifiée.

    En tout cas, c’est le pari implicite sur lequel semble reposer le raisonnement du gouvernement fédéral. Ce dernier ne semblerait pas avoir prévu de plan de sauvetage pour les emplois dans sa boîte à outils. Cependant, cet optimisme en matière d’emplois est à relativiser et à tempérer par la concentration bancaire que le gouvernement fédéral vient d’encourager, quant à ses conséquences sur la tarification des services bancaires aux clients, et sur les postes de travail dans l’ensemble du secteur bancaire. En effet, il existe une forte probabilité qu’une banque en situation de monopole évince les autres banques concurrentes du marché et aboutisse à une destruction massives des emplois. Dans un tel scénario, il est incontestable que les mesures d’accompagnement en faveur des salariés impactés par la restructuration sont nécessaires.

    A présent venons-en à la proposition des syndicats, qui consiste à mettre en retraite les séniors de manière anticipée. A priori cette mesure est sympathique et pourrait donc rencontrer un écho favorable auprès des intéressés à la condition que ceux-ci puissent partir en retraite avec une pension à taux plein et qu’ils ne restent pas parqués dans le chômage comme leurs homologues français jusqu’à ce que l’heure de la retraite sonne. En vérité, cette mesure recèle de nombreux écueils tant au niveau individuel qu’au niveau collectif. La première idée qui vient à l’esprit, c’est que les séniors risquent de devenir une variable d’ajustement dont les entreprises pourraient user et abuser à la moindre anicroche du côté de la demande adressée à leur production de biens et services.
    A cet égard, l’expérience française est riche d’enseignements et pourrait éclairer notre lanterne en ce qui concerne le cas qui nous occupe. En effet, après le premier choc pétrolier dans les années 1970 le gouvernement Raymond Barre sous le septennat de Valery Giscard d’Estaing, a mis en place un dispositif de mise en retraite anticipée pour les séniors similaire à celui préconisé par les syndicats suisses. Ce qu’on en retient c’est qu’un tel mode de gestion des effectifs de salariés en présence d’une restructuration ou d’une tout autre cause comme un choc adverse d’offre ou de demande pourrait mettre le taux de chômage sur une trajectoire ascendante et in fine aboutir à une dégradation des comptes de la protection sociale ( assurance-chômage, caisses des retraites).
    C’est pourquoi les syndicats devraient prendre en compte les effets pervers de la mesure en question, puisque celle-ci porte potentiellement les germes d’inciter les entreprises à ne pas internaliser les conséquences négatives de leurs décisions sur leur environnement. Tout particulièrement si un tel dispositif est généralisé à tous les secteurs de l’économie et que les entreprises y recourent systématiquement pour adapter leurs effectifs aux chocs conjoncturels ou structurels.

    En tout cas, on est enclin à penser qu’au delà des différences institutionnelles et comportementales entre la Suisse et la France, l’idée que la rationalité individuelle puisse conduire à des conséquences indésirables au plan collectif, ne s’en trouve pas mise en défaut. Surtout en l’absence de l’instauration d’un systéme d’incitations sous la forme d’un bonus et d’un malus (taxes ou subventions) , par exemple, comme dans le monde de l’assurance, afin de décourager les entreprises à se séparer de leurs employés âgés ou non à moindres frais pour les mettre sur le dos de la collectivité.

    1. 😉Ils doivent avoir une bonne raison pour ne pas voir le mur des réalités…

      https://off-guardian.org/wp-content/medialibrary/head-in-sand-banner-2000×900.jpg

      …Il y a une idée étrange qui plane à ce sujet si l’on ne sait pas quelque chose, alors cela n’existe pas. Un peu comme l’image de l’autruche proverbiale avec sa tête dans le sable. Mais cela va au-delà du déni!

      L’ignorance, c’est quand on ne sait pas du tout quelque chose, le déni, c’est quand on le sait, mais qu’on l’ignore.

      Amicalement

  21. Si chacun fait sa p’tite cuisine dans sa gargote sans trop ébruiter l’affaire, alors ça commence à m’inquiéter. L’Unité monétaire universelle du FMI, également connue sous le nom d'”Unicoin”, est la “monnaie numérique de la banque centrale internationale” qui a été conçue pour fonctionner en conjonction avec toutes les monnaies nationales existantes. Eh bien, “lors des réunions de printemps 2023 du Fonds monétaire international (FMI), la Digital Currency Monetary Authority (DCMA) a annoncé le lancement officiel de la monnaie numérique de la banque centrale internationale qui renforce la souveraineté monétaire des banques centrales participantes et se conforme aux récentes recommandations de politique sur les actifs cryptographiques (crypto-actifs) proposées par le FMI. L’unité monétaire universelle (UMU), symbolisée par le caractère ANSI, Ü, est légalement une marchandise monétaire. Elle peut effectuer des transactions dans n’importe quelle monnaie de règlement ayant cours légal et fonctionne comme une monnaie numérique de banque centrale pour appliquer la réglementation bancaire et protéger l’intégrité financière du système bancaire international”

    https://www.prnewswire.com/news-releases/the-digital-currency-monetary-authority-dcma-launches-an-international-central-bank-digital-currency-cbdc-301793163.html

  22. La TSR (media étatique de propagande) ne craint même plus le ridicule lorsqu’elle interviewe Marcel Rohner…

    https://www.rts.ch/info/economie/13945866-marcel-rohner-un-plafonnement-des-bonus-ne-va-pas-repondre-a-la-problematique.html

    …qui, souvenons-nous en, il y a 16 ans, était tout de même le directeur général de l’UBS lorsque celle-ci a dû être sauvée par l’État (puis, a été remplacé ensuite par Oswald Grübel). Auparavant, Marcel Rohner était responsable du secteur Wealth Management, au cœur du litige fiscal avec les Etats-Unis (litige qui scellera le secret bancaire).

    Le fait qu’à présent la carrière professionnelle du principal lobbyiste de la place financière suisse soit si étroitement liée à des scandales bancaires n’envoie certainement pas le bon signal à l’étranger 🙉🙊🙈

    “Crony capitalism”…pensez-vous?👏

  23. Même l’ex-directeur du Contrôle fédéral des finances, alias le “shérif”, ose à présent soulever un coin du voile sur les relations incestueuses de “Suizera Nostra”…

    https://www.heidi.news/articles/credit-suisse-y-a-t-il-un-complice-dans-la-salle

    C’est déjà dire que les “class actions” menées contre l'”Organisation” vont s’avérer très instructives sur le plan de l’Intérêt général. En effet, comme le concède le shérif: “il s’agirait maintenant de s’intéresser au deuxième rang des défaillances: les politiques, les autorités de régulation et les cabinets d’audit”.

    1. Les propos du “shérif” sont intéressants à plus d’un titre, surtout lorsqu’il dénonce que “depuis 27 ans, les radicaux et l’UDC ne veulent plus lâcher le Département fédéral des finances (…) Officiellement, Credit Suisse paye chaque année un million de francs aux partis politiques suisses, à l’exception des Verts (…)

      A la tête du DFF pendant sept ans, Ueli Maurer a systématiquement allégé les charges fiscales des banques et s’est à plusieurs reprises opposé frontalement à Marc Branson, directeur de la Finma jusqu’en avril 2021, lorsque celui-ci essayait de faire son travail correctement (…)”

      Afin de contrecarrer une prochaine saignée* sur le bon peuple, comme par hasard, une motion pertinente vient d’être déposée par un parti politique qui – selon toute apparence – ne veut pas se laisser acheter.

      https://www.parlament.ch/de/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20233471

      *[Si l’Administration fédérale des contributions (AFC) ne s’exprime pas sur le cas UBS – secret fiscal oblige – elle confirme toutefois l’existence du «report de pertes» pour toutes les personnes morales, indépendamment de leur activité. «Les pertes de sept exercices précédant la période fiscale peuvent être déduites du bénéfice net de la période fiscale», précise ainsi un porte-parole. Concrètement, les bénéfices d’UBS au cours des prochaines années pourront donc être compensés par les pertes de Credit Suisse, ce qui permettra à la nouvelle méga-banque de payer au final peu ou pas d’impôts du tout. Tout en continuant de verser des bonus. Interrogée, UBS refuse de commenter le sujet]

  24. https://youtu.be/qZc_8lmgU-w
    Voici une analyse limpide et intéressante du professeur Rossi concernant la crise bancaire et l’inflation. Ce dernier développe un raisonnement qui met en exergue un paradoxe de la politique monétaire restrictive. Ainsi on y apprend que celle-ci a de fortes chances de déboucher sur davantage d’inflation et sur l’instabilité du systéme bancaire, dès lors qu’on prend en considération le comportement de marge des banques de second rang et le contexte d’endettement des agents économiques (ménages, entreprises, Etats).

    Contrairement à la pensée dominante et à l’optimisme de la communication des banques centrales, il est illusoire d’espérer traiter efficacement un choc inflationniste dû à un phénomène de raretés quasi généralisé par une hausse des taux d’intérêt dans la mesure où la conjoncture économique actuelle est dominée par une insuffisance de l’offre en raison de toute une série de facteurs tels la crise pandémique, la géopolitique et la problématique environnementale (transition énergétique). Dans un tel contexte, la politique monétaire restrictive inciterait les banques commerciales à augmenter leurs marges bénéficiaires et à répercuter les coûts de leur refinancement auprès de la banque centrale ou du marché interbancaire sur leurs clients. Ceux-ci pourraient devenir insolvables du fait de l’alourdissement de leurs dettes induit par le relèvement des taux d’intérêt ou par la difficulté dans le cas des entreprises à répercuter la hausse du coût du crédit sur leurs clients, tout particulièrement pour celles qui opèrent sur un marché concurrentiel.

    En résumé, le professeur Rossi montre les enchaînements pervers de la politique monétaire restrictive qui est présentée par les autorités monétaires comme la panacée incontournable pour empêcher l’inflation de s’enkyster dans les comportements avec son inévitable boucle prix-salaires. Sur bien des points, force est de constater que le raisonnement de notre hôte est similaire à celui développé par Irving Fisher et Hyman Minsky dans un environnement économique dominé par la déflation et l’endettement des acteurs économiques. Mais il s’agit bien évidemment de la description d’un scénario à front renversé dans la mesure où l’analyse de M. Rossi s’applique à un contexte inflationniste avec un niveau élevé d’endettement des ménages et des entreprises.

    A cette analyse j’ajouterai un autre élément d’instabilité dont peu de personnes parlent et qui est pourtant bien documenté. Il s’agit de l’augmentation de la vitesse de circulation de la monnaie en tant qu’indicateur avancé de l’inflation anticipée. Il n’est pas inutile de rappeler que la vélocité de la monnaie se définit comme la rapidité avec laquelle une quantité de monnaie circule. Plus précisément cela signifie qu’un franc suisse, par exemple, peut effectuer plusieurs transactions par unité de temps en changeant plusieurs fois de mains. Afin de montrer le lien entre la vitesse de circulation de la monnaie et l’inflation anticipée, on peut s’appuyer sur l’équation d’Irving Fisher : M.v=P.Q. Pourquoi l’augmentation de la vélocité de la monnaie peut-elle accélérer l’inflation?

    L’explication en est simple et repose sur la constance de M et Q. En effet, si les agents économiques anticipent une hausse des prix dans le futur, ils vont acheter maintenant les biens et les actifs financiers qu’ils désirent consommer ou détenir dans le futur. Autrement dit, ils augmentent leurs dépenses pour se débarrasser de la monnaie dont le pouvoir d’achat va s’éroder au fil du temps. Et c’est cette fuite devant la monnaie qui semble être à l’origine de l’accroissement de la vitesse de circulation de la monnaie en l’absence de toute variation de la masse monétaire M. Dans un tel contexte, la conduite à tenir pour les autorités monétaires serait de maintenir les taux d’intérêt à un niveau constant, ce qui relativise l’optimisme de ces dernières de pouvoir maitriser les anticipations d’inflation via une politique monétaire restrictive. Nous souhaitons bonne chance aux banques centrales dans leur quête d’une «Goldilocks Economy » qui n’est pas de ce monde, soumis à la loi du mouvement et de l’instabilité, à l’instar de la vérité chez Platon.

  25. Voyage dans le temps et l’espace

    Saison 2023 (68): L’Organisation helvétique s’autocongratule.tandis que les banksters continuent à mener le bal

    Joe Ackermann est sorti du bois, lui qui a pré­si­dé le Credit suisse (CS) dans les an­nées 90, avant de rejoindre la Deutsche Bank dont il est de­ve­nu le pre­mier pré­sident étran­ger. Après un pas­sage dans le do­maine des assurances, il se dit au­jourd’­hui éco­no­miste in­dé­pen­dant.

    [Son en­tre­tien avec Eric Gu­jer de la NZZ, dans l’émis­sion Standpunkte, vaut le dé­tour. Il y ex­plique en long et en large qu’à par­tir d’un pe­tit pays, l’am­bi­tion in­ter­na­tio­nale dé­me­su­rée, dans les mou­vances in­son­dables et chan­geantes du «sha­dow banking» aux Etats-Unis, s’avère fort ris­quée. Hier comme au­jourd’­hui… et comme demain. Il rap­pelle sur­tout que l’UBS son­geait déjà à mettre la main sur le CS au moins de­puis 1998. C’é­tait pour elle un but stra­té­gique. At­teint main­te­nant, l’ayant reçu le 19 mars 2023 «en ca­deau» – c’est le mot uti­li­sé – du Conseil fé­dé­ral. Ce­lui-ci prêt par ailleurs à don­ner d’énormes ga­ran­ties à l’opé­ra­tion (209 mil­liards).

    Etait-ce la seule so­lu­tion pos­sible, comme le ra­bâchent les dé­pu­tés «chauf­fés» par l’UBS? Joe Acker­mann n’en croit rien. D’autres scé­na­rios lui pa­rais­saient envisageables. D’au­tant plus que de­puis un an, il mi­jo­tait avec quelques amis un plan de sau­ve­tage pour le CS qu’il voyait déjà ex­posé aux pires dan­gers. Avec l’in­jec­tion de ca­pi­taux pri­vés et sur­tout un dé­mem­bre­ment: concen­tra­tion sur le mar­ché suisse et ces­sion du sec­teur d’in­ves­tis­se­ments à l’étran­ger. Pen­dant tous ces mois où s’accu­mu­laient les pé­rilleux nuages, les au­to­ri­tés com­pé­tentes, le Dé­par­te­ment des fi­nances, la FIN­MA, la Banque na­tio­nale, ont-elles dor­mi? Après les pré­cautions d’usage, la ré­ponse tombe: oui. Elle se sont ap­puyées sur quelques pa­ramètres ap­pa­rem­ment ras­su­rants, in­suf­fi­sant pour me­su­rer la gra­vi­té de la si­tua­tion qui évo­luait à toute vi­tesse.

    Comment ce gou­rou fi­naud a-t-il pris la dé­ci­sion? «Comme ac­tion­naire de l’UBS, je m’en suis ré­joui, comme ci­toyen suisse, beau­coup moins…» Il ra­conte avoir sui­vi la confé­rence de presse depuis Hel­sin­ki – sa femme est fin­lan­daise –, et être en­tré aus­si­tôt dans une vive co­lère. Il consul­te alors Google pour connaître le CV des huit per­sonnes qui avaient dé­ci­dé de tout. Hors des deux par­ties à l’af­faire, au­cune n’avait as­su­mé des fonc­tions di­ri­geantes dans une banque. Certes le Département des finances s’est entouré de consultants zurichois et américains, pour un montant estimé à 20 millions de francs, mais ces conseillers techniques aident à exécuter une décision prise, jamais à la réflexion au moment de choisir.

    Les gens de l’UBS avaient ad­mi­ra­ble­ment pré­pa­ré le ter­rain… Acker­mann prêche peut-être pour sa pa­roisse mais on com­prend qu’il s’étonne qu’au­cune consul­ta­tion plus large n’ait eu lieu les jours pré­cé­dents ce choc im­mense. Il va jus­qu’à dire que les dé­ci­deurs se sont trou­vés «pri­son­niers». De qui? Il ne le dit pas. Mais c’est clair.

    A l’ap­pui de sa thèse tombe une ré­cente in­for­ma­tion de Bloomberg. Dès le début de l’an­née, le patron d’UBS a consti­tué un pe­tit groupe d’ex­perts, avec ceux de son «alma ma­ter» (sic) Mor­gan Stan­ley, pour pré­pa­rer le scé­na­rio de la re­prise du CS en voie d’ef­fon­dre­ment. Sous un ri­gou­reux «top se­cret» et à l’insu des cadres.

    L’ex­pert à la mine de vieux chat dé­nonce bien sûr les fautes des res­pon­sables du CS. Mais plus lar­ge­ment il met en cause la for­ma­tion des hauts cadres bancaires en Suisse. Les écoles ne soulignent pas as­sez les risques de la fi­nance in­terna­tio­nale. Les états-ma­jors ne pra­tiquent pas de «stress tests» comme cela se pratique en Al­le­magne, où l’on si­mule des crises graves, étu­diant les moyens d’y répondre dans l’ur­gence. En un mot: les ban­quiers suisses ron­ronnent. Trop sûrs d’eux. Plus cou­pés qu’ils ne l’ima­ginent des ma­nœuvres in­ter­na­tio­nales de la finance de l’ombre.

    La suite des évé­ne­ments, que Acker­mann n’évoque pas, semble lui don­ner raison. L’UBS est gagnante sur tous les plans. Au­cune ré­gu­la­tion sup­plé­men­taire n’est en vue, ni sur les fonds propres, si sur les pro­cé­dures de sur­veillance. La Conseillère fé­dé­rale en charge, ma­dame KKS, s’en re­met à l’ar­gu­men­taire des béné­fi­ciaires de son «ca­deau». Le non dé­mons­tra­tif du Conseil na­tio­nal est vexant pour elle mais ne l’en­trave en rien. Quant à l’af­faire des obli­ga­tions conver­tibles du CS (17 mil­liards!) mises à la pou­belle à la dif­fé­rence des ac­tions, elle sera tôt balayée par les ju­ristes de la ma­chine fé­dé­rale, même si cer­tains ar­ticles de loi peuvent mettre en doute la lé­ga­li­té de cette dé­ci­sion, prise en­core une fois sous le droit d’ur­gence.

    Connais­seur de la ma­tière fi­nan­cière, le pro­fes­seur zu­ri­chois Marc Ches­ney avait déjà dres­sé, il y a dix ans, une liste de treize mesures vi­sant à di­mi­nuer les risques et as­su­rer plus d’équi­té entre intérêts pri­vés et pu­blics. Avec no­tam­ment un sys­tème de bo­nus-ma­lus, un mi­cro-im­pôt sur les tran­sac­tions, ou la cer­ti­fi­ca­tion of­fi­cielle des pro­duits fi­nan­ciers. Toutes ces in­té­res­santes suggestions res­te­ront long­temps en­core dans les ti­roirs. Pour­quoi? Parce qu’une garde parlementaire sert la cause des banques plus que celle du peuple. On y trouve aus­si bien la droite, le centre, que l’UDC qui a dit non pour la ga­le­rie à ma­dame KKS et re­fu­sé en même temps d’améliorer la ré­gu­la­tion. Et cer­tains élus de gauche ou verts sont aus­si fort hé­si­tants quand ils risquent de dé­plaire de ce côté.

    Comment faire bou­ger ce rap­port de forces? Com­men­cer d’abord par ou­vrir les yeux. Pour cela, l’urgence est de lan­cer la com­mis­sion d’en­quête par­le­men­taire sur l’his­to­rique du séisme. Avec consul­ta­tion de tous les do­cu­ments utiles, avec inter­ro­ga­toires des ac­teurs concer­nés, dans le pri­vé comme dans l’ad­mi­nis­tra­tion. Si ce tra­vail est fait jus­qu’au bout, sans conces­sions ni complaisances, la base sera là pour ame­ner en­fin la cor­rec­tion d’un bout du monde hel­vé­tique.

    Faute de quoi la grande banque suisse – pas si grande vue des Etats-Unis – affron­te­ra les risques in­hé­rents au «sha­dow ban­king» et à ce­lui, à son tour, d’une éven­tuelle crise de confiance, or­ches­trée ou pas. La Confé­dé­ra­tion pour­rait-elle alors, une fois en­core, faire pleu­voir des cen­taines de mil­liards pour sau­ver cette en­tre­prise di­ri­gée par d’in­cor­ri­gibles mé­ga­lo­manes? Po­ser la ques­tion, c’est y répondre] by Jacques Pilet

    Le peuple helvétique a-t-il raisonnablement conscience, au-delà des récentes élucubrations de nos inconscients jouant avec des allumettes dans une véritable poudrière, que les spécialistes suisses de la haute finance estimaient déjà – début 2016 – à 30 pourcent le négoce de gré à gré des produits dérivés? Que selon la Banque des règlements internationaux (la banque centrale des banques centrales) le produit intérieur brut de tous les pays du monde était d’environ 63 billions de dollars en 2016, tandis que le chiffre d’affaires mondial des produits dérivés était environ dix fois plus important. Selon la compilation des données du blog “Inside Paradeplatz”, le Credit Suisse représentait à lui seul 50,98 billions de dérivés il y a seulement sept ans. Courant 2007 (exubérance irrationnelle du subprime US) soit un an avant la crise financière (avec la faillite de la banque d’investissement américaine, Lehman Brothers, le 15 septembre 2008) il n’était “que” de 40,23 trillions. Une augmentation de 10,747 billions en seulement huit ans (2015/2016). Or, malgré les promesses continues de réduire la banque d’investissement afin de rendre les banques universelles plus résistantes aux crises, leurs portefeuilles de dérivés a continué de croître depuis. Le développement rapide est dû au cœur battant des banques d’investissement (au modèle universel) car celles-ci injectent les positions dérivées de manière rentable et sans interruption sur le marché et dans les portefeuilles de leurs clients, après quoi elles sont comptabilisées avec ce que l’on appelle dans le jargon, une évaluation de la “juste valeur”. C’est-à-dire qu’en réalité, les régulateurs observent à quel point ces valorisations sont “justes et liquides” seulement lorsqu’elles sortent de l’ombre, au plus tard lors des crises, comme en 1998; 2008; ou visible en Grèce en 2010. En attendant, la déclaration officielle des régulateurs est la suivante : “Les risques s’équilibrent sur une base nette”🙈🙉🙊

    Ce compromis (cette complicité?) occulte ainsi la dynamique de croissance et la complexité des produits dérivés, permettant aux banquiers d’investissement responsables de siphonner des profits toujours croissants, financés par de l’argent gratuit et peu de fonds propres. L’évolution justifie de nouvelles primes record en fin d’année!!!

    Personne ne remet ainsi en question les risques associés à la pratique de cette musique mortifère. Ni les mécanismes de contrôle interne, ni les régulateurs ne posent de questions sur la fête somptueuse organisée par les banksters. Vous pensez (à raison) au Crony capitalism effect?

  26. Voyage dans le temps et l’espace

    Saison 2023 (69): Après les saignées diverses et variées, les peuples préféreront-ils s’acquitter du “pizzo” au lieu de renverser la table?

    À présent, faut-il dire: “- Au diable la transparence, laissez donc les banksters à leur gros business”. Telle est la question.

    On peut tout à fait le croire, sachant le “manque de données sur les transferts en compte courant entre les banques et la BNS, que cette dernière ne déclare plus depuis courant 2013”. Ce constat fut aussi dénoncé par le professeur en finance quantitative de l’Université de Zurich, Marc Chesney. Fermons aussi les yeux sur le “business” de l’ensemble de l’Organisation et ne revenons surtout pas sur la question du micro-impôt sur l’ensemble des transactions financières (les flux).

    Pourtant, il aurait été intéressant de rappeler qu’au-delà de l’aspect fiscal, ce que manifestement les peuples peinent toujours à saisir, est qu’une micro-taxe sur tous les paiements électroniques (les flux) reste la mesure la plus simple et la plus efficace pour limiter les transactions purement spéculatives et faire disparaître “le commerce” électronique à haute fréquence (HFT) purement spéculatif en Suisse. Dans le même temps, une telle micro-taxe permettrait de supprimer la taxe sur la valeur ajoutée antisociale et bureaucratique sur les biens de consommation courante. Il resterait même beaucoup d’argent pour l’AVS et la transition énergétique.

    Comme s’il fallait encore le rappeler sempiternellement, à l’instar d’autres grandes banques internationales, le Credit Suisse en difficulté était hyperactif sur des plates-formes de négociation opaques (“dark pool”) ou tentait de réaliser des bénéfices élevés en quelques millisecondes (trading haute fréquence à la nano seconde) en rendant les “produits d’optimisation du rendement” acceptables pour les clients et les fonds de pension dans des publicités pleine page, par exemple, avec le nom incompréhensible “Autocallable Barrier”; “Reverse convertibles”, etc. Ceci tout en manipulant le marché avec l’envoi de milliers d’ordres flash pollués. Que nos “homo-politicus” comprennent une bonne fois pour toute que notre système bancaire devrait en effet assurer la fluidité des opérations de paiement et de crédit des titulaires de comptes et des entreprises et gérer les actifs. La notion de confiance a-t-elle encore un sens pour nos coquins de la politique? J’en doute, car dans les faits, l’on ne peut plus ignorer en 2023, rationnellement parlant, que l’industrie financière a transformé le monde financier en un “gigantesque tripot” où des milliards de profits (injustifiés) attirent. On joue et on s’enrichit sans vergogne aux dépens des autres – sans bénéfice pour l’économie nationale (l’intérêt général et le bien commun). Dans le “pire des cas”, à l’instar du Credit Suisse par exemple, les spéculateurs peuvent compter sur des renflouements gouvernementaux. Toute la population porte ainsi le risque d’un accident (moral hazard).

    Ce micro impôt est également légitimé suite aux aides massives des banques centrales, convient le chercheur en finance, Marc Chesney, qui précise que “la Banque centrale américaine a d’ailleurs acheté pour 4 000 milliards de dollars de titres en 2020 qui ont dopé les portefeuilles des investisseurs à court terme du monde entier”. Aujourd’hui encore, nous voyons avec consternation qui sont toujours les preneurs d’otages et qui devra se débarrasser du “syndrome de Stokholm” à l’heure de l’Armageddon financier, avant le grand passage vers la “destruction-créatrice Shumpétérienne 2.0”. Une loi empirique qui débouchera sur les “bull shit job”? Pour emprunter cette formule à feu David Graeber, docteur en anthropologie, économiste et professeur à la London School of Economics.

    Comme on le sait, à l’heure où les discours pronant l’orthodoxie budgétaire reviennent à marche forcée et que le “fiscal cliff” américain est une réelle préoccupation, il conviendrait de remettre l’ouvrage sur le métier. Et si la Suisse ne compte envoyer un signal fort, comment les États-Unis vont-ils, eux, raisonnablement justifier la situation des “happy few” puisque le 1% aux USA, par exemple, devient dès lors détenteurs de deux tiers des richesses financières et entrepreneuriales américaines, quand les 90% les moins fortunés ne détiennent que 6% des richesses? Pour ce qui a trait à présent à la question des dépenses extraordinaires des plus nantis et cette crainte qu’ils ne contournent le micro-impôt sur les flux en honorant leurs dépenses en cash, nous ne pouvons ignorer qu’ils s’exposent aux exigences contraignantes, ainsi que leurs intermédiaires financiers, prévues par la Loi fédérale concernant la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (LBA/18.02.2020). Concernant la crainte d’une délocalisation des activités du “high frequency trading”, elle peut être appréhendée d’une manière relative puisque la “disparition de cette activité prédatrice” (une arme fatale via le recours aux ordres “flash”) est souhaitable pour l’économie réelle à moyen/long terme.

    Un gage de confiance vers un renouveau financier et économique (un changement de paradigme) que nous devrions considérer avec sérieux!

    *****
    RAYMOND
    24 mai 2021 à 22 h 43 min

    La Taxe sur les Mouvements de Fonds, TAMF, en mémoire à René Tourenq (dit Montgranier).

    La double dynamique de libéralisation des échanges de biens et services, des mouvements de capitaux et de personnes, et d’intégration de nos économies intégrées depuis le début des années 1990, a contribué à accroître la concurrence fiscale sur notre planète. Or, dès la financiarisation exacerbée de nos économies “globalisées” (avec sa captation des richesses au sein d’un océan de serfs), la fiscalité est apparue alors comme l’un des derniers outils à la disposition des gouvernements pour stimuler l’activité économique en renforçant la compétitivité des entreprises et l’attractivité des territoires. Mais à défaut d’un ruissellement suffisant, cette politique s’est assimilée à la maxime qui postule à déshabiller Pierre pour habiller Paul; c’est-à-dire une injustice fiscale menée pour le plus grand profit d’une minorité au détriment d’une majorité. Une dichotomie dans la taxation des flux par rapport aux biens que le français René Toureng avait déjà identifiée dans les années 1980 – par son ouvrage “La Clé de la crise, Éditions économiques financières et sociales, 1985*” – période où les marchés financiers s’étaient empressés d’embrasser le mouvement de libéralisation des taux d’intérêt des dettes publiques, respectivement des emprunts souverains.

    “René Tourenq (1912 – 2005) a dédié les 25 dernières années de sa vie à étudier la fiscalité française et à tenter de faire comprendre et adopter une sorte de révolution fiscale qu’il a appelée la Taxe sur les Mouvements de Fonds, TAMF – « l’œuf de Colomb », disait-il – un impôt léger et juste, très peu couteux, adapté aux techniques modernes et permettant à court terme de diminuer de façon radicale, voire de supprimer la plupart des multiples taxes et impôts existants. Sa grande idée fiscale (prémisse au projet du micro-impôt helvétique) repose sur une taxe sur tous les mouvements de fonds (en particulier tels qu’ils sont saisis par les compensations interbancaires) et dépasse nettement l’intérêt du solidarisme français. Elle a une portée européenne et pourrait bien permettre de repenser dans ses fondements toute fiscalité, de combattre efficacement l’arrogance insolente de la finance de marché, de la contrôler tout en lui faisant jouer un rôle direct dans la collecte de l’impôt et surtout de permettre le financement du revenu d’existence.”

    Pourtant, “l’oeuf de Colomb” de René Tourenq n’aura malheureusement pas séduit les politiques de droite comme de gauche, bien que plusieurs laquais de la médiocratie néolibérale lui ont assuré que son idée était excellente. À contrario de la France, pour bénéficier d’un nouvel ordre et ainsi saisir ses débouchés, la Suisse a ce précieux sésame qui lui permet donc de renverser la table par voix démocratique. Quelle en fasse bon usage car le micro-impôt c’est l’avenir.
    ****

  27. Voyage dans le temps et l’espace

    Saison 2023 (70): Antre de Lucifer ou affaire d’État? Les deux mon neveu!

    Ces derniers mois, force est de constater que le “CS Gate” offre à nouveau une caisse de raisonnance sur le monde de la duplicité entre État coquin et banksters. Même “le quatrième pouvoir helvétique” reste muselé dans cette “Antre de Lucifer” avec l’article 47 de la Loi fédérale sur les banques et les caisses d’épargne. Car l’interdiction de publication mentionnée au précédent article est aussi une interdiction d’investigation, perceptible comme une restriction de la liberté de la presse qui n’est fondamentalement rien de plus qu’une excroissance au paragraphe du secret bancaire, qui interdit aux employés de l’industrie de transmettre des informations internes. De quoi déjà dénoncer une affaire d’État. Ne participant aux “Swissleaks” publiées en février 2015, les médias helvétiques ne pourront révéler près d’un siècle de scandales au Credit Suisse, signalant autant de probabilités anticipées de risques en devenir. Malheureusement, même avec l’appui d’un consortium étranger, rien ne viendra ébranler la stratégie de la banque voilée, deuxième entité systémique du pays, ni n’encouragera à une meilleure diligence des organismes de surveillance (FINMA – BNS) de l'”Antre de Lucifer”🙈🙉🙊 Le leitmotiv? Nier les évidences jusqu’au statut des “limites débouclées”.

    À présent que le début des “class actions” est entamé, que les “Nazi Assets” sont sortis des placards du Credit Suisse après la publication des rapports du Comité du budget du Sénat américain – le jour du souvenir de l’Holocauste en Israël – démontrant que l’entité Credit Suisse a eu des relations avec des nazis et détenait encore des comptes liés à eux depuis la Seconde Guerre mondiale (au temps du réduit national) jusqu’en 2020, tout en “entravant” les enquêtes…

    https://worldisraelnews.com/credit-suisse-served-nazi-clients-as-recently-as-2020/

    dès lors, en effet, l'”Antre de Lucifer” n’est pas au bout de ses peines avec le “CS Gate”. L’État coquin helvétique n’ayant malheureusement retenu que peu de leçon de l'”UBS Gate” – “en pleine guerre économico-financiaire post 2008” – alors même qu’aujourd’hui les relations incestueuses en Suisse vont devoir à nouveau se payer au prix fort! Autre temps, autre époque, certes, mais on entend encore les mots de Brad Birkenfeld (Whistleblower UBS) raisonner depuis le pénitencier fédéral de Minersville en Pennsylvanie, où il rédige notamment la note ci-dessous pour le World Policy, dont voici un extrait:

    “…Si le gouvernement suisse était vraiment sérieux au sujet de poursuivre les cadres supérieurs d’UBS pour leur conduite illégale à grande échelle, cela signifierait enquêter sur lui-même, un conflit d’intérêts inhérent et quelque chose qui s’est avéré être une farce totale. En substance, le secret bancaire est analogue au racket criminel – et le gouvernement suisse, avec tous les banquiers privés suisses, est un co-conspirateur…”

    https://archive.wikiwix.com/cache/index2.php?url=http%3A%2F%2Fwww.worldpolicy.org%2Fblog%2F2012%2F09%2F12%2Fbradley-birkenfeld-whistleblower-his-own-words#federation=archive.wikiwix.com&tab=url

    Compte tenu des événements financiers, économiques, géopolitiques, climatiques et sociétaux sur le plan mondial, il est indéniable qu’aujourd’hui: “Antre de Lucifer et affaire d’État” sont les deux faces d’une même pièce.

  28. Voyage dans le temps et l’espace

    Saison 2023 (71): L’esprit des Lumières s’est éteint (RIP)

    La dette nationale des États-Unis est la somme d’argent que le gouvernement fédéral doit à ses créanciers du monde. Mais lorsque le gouvernement dépense plus qu’il ne gagne, il a un déficit budgétaire et doit émettre de la dette sous forme de titres du Trésor (des bons du Trésor dont les rendements doivent être à la hauteur des attentes des marchés). Ai-je dis que la lutte contre l’inflation galopante par la Fed (resserrement monétaire) n’est qu’un écran de fumée, alors que les États-Unis n’échappent déjà plus à la récession? Ai-je dis que les États-Unis, par la main bien visible de “Big Jay” Powell, tentent une politique de la terre brûlée sachant qu’ils n’échapperont pas à la stagflation? Car si le dollar américain a dès lors joué un double rôle de monnaie nationale et internationale, comme je l’écrivais au deuxième trimestre 2022, “ceci n’est pas sans poser problème puisque nous connaissons aujourd’hui un nouveau dilemme de Triffin. Cette forme contemporaine du dilemme traduit l’incompatibilité entre la gestion des finances publiques américaine, la dette publique américaine et le déficit budgétaire en pourcent du PIB – et la demande extérieure excessive de titres américains, respectivement de “bons du Trésor” (titre obligataire souverain). Ainsi, via cette hégémonie, les Etats-Unis continuent de profiter du rôle international du dollar pour fournir au reste du monde, notamment aux investisseurs publics (banques centrales) et aux banques commerciales “une dette” (un titre obligataire valant comme une reconnaissance de dette) liquide “sûre et sans risque”. Et ce, dans le but de financer leur déficit public et continuer à s’endetter sur le dos des autres. D’ailleurs, John Adams (1735-1826), deuxième président des États-Unis, l’avait compris très tôt lorsqu’il affirmait péremptoirement les deux façons d’asservir une nation: l’une par l’épée et l’autre par la dette”. En 2023, nous pouvons observer ceci:

    2023* 31,4 milliards de dollars 2%
    2022 30,9 milliards de dollars 9%
    2021 28,4 milliards de dollars 6%
    2020 26,9 milliards de dollars 19%
    2019 22,7 milliards de dollars 6%
    2018 21,5 milliards de dollars 6%
    2017 20,2 milliards de dollars 3%
    2016 19,6 milliards de dollars 8%
    2015 18,2 milliards de dollars 2%
    2014 17,8 milliards de dollars 6%
    2013 16,7 milliards de dollars 4%
    2012 16,1 milliards de dollars 9%
    2011 14,8 milliards de dollars 9%
    2010 13,6 milliards de dollars 14%
    2009 11,9 milliards de dollars 19%
    2008 10 000 000 $ 11%
    ….
    Puis celà! Alors que le “fiscal cliff” a toujours été un sujet des plus sérieux (entre-autres pour les marchés financiers) et que les États-Unis enregistrent un déficit continu depuis vingt ans, il n’est dès lors pas inintéressant de constater que la dette nationale atteint désormais 31,4 billions de dollars dans le contexte actuel…

    https://www.visualcapitalist.com/wp-content/uploads/2023/03/Visualizing-U.S.-Debt-in-2023.jpg

    Et ce, alors même que l’Iran (en 2023), la Chine, l’Inde, la Russie et l’Arabie saoudite se sont rapprochés pour former un front commun contre l’hégémonie du dollar américain, un sujet anticipé et largement développé courant de l’année dernière lors de mes nombreux “voyages dans le temps et l’espace”.

    Si je reprends mon analyse du 26 avril 2022: “je vais le dire à nouveau avec un agacement non dissimulé et une arrogance assumée. La passivité de cette nouvelle race d’homo-politicus me fatigue terriblement, car soit elle reste frappée d’une tare congénitale sans commune mesure, soit elle assume un QI de moineau tant l’ensemble des “sciences économiques” lui restent étrangères. À sa décharge, rien de surprenant après avoir été suspendues durant des décennies aux mamelles des “sciences économiques mainstream”. Bref! Encore une fois, huit ans après la révolution Ukrainienne de Maïdan (2014) – déjà oubliée pour beaucoup – l’on vient s’étonner à présent que l’aggravation du dernier conflit en Ukraine mené par la Russie (2022) précipite le grand renversement du monde. Un peu de sérieux nos homo-politicus puisque la mondialisation nous démontre bien, aujourd’hui, en 2022, que l’Occident – sous leadership américain – ne parvient plus à contenir les puissances émergentes! Souvenons-nous – alors que les USA craignent à ce jour et plus que tout un embrasement avec l’Asie, malgré les apparences trompeuses – que l’Union économique eurasiatique tombe d’accord avec la Chine pour mettre cette fois en place un système financier et monétaire indépendant du dollar US. Mais rien de nouveau sous le soleil en fait, car en 2009 – soit une année après la grande conflagration financière mondiale de 2008, débarquée des États-Unis, symbole par excellence des excès de la finance – le gouverneur de la Banque populaire de Chine, M Zhou Xiaochuan, était revenu à la charge contre l’”hégémonie du dollar” dans le cadre d’une conférence intitulée “Reform the international Monetary System”. Pour un nouvel ordre monétaire mondial.

    En 2018 – soit bien avant le choc sanitaire mondial aux conséquences économiques catastrophiques – Poutine et son homologue chinois Xi Jinping avaient réaffirmé leur volonté de se passer du dollar américain dans le cadre de leurs échanges commerciaux. Sans compter que l’Arabie saoudite eu récemment encore – en mars 2022 – envisagé d’accepter le Yuan pour ses exportations de pétrole. Enfin, si l’ancienne Libye de Kadhafi et l’ancien Irak de Saddam Hussein se sont cassés les dents sur les “pétrodollars” – que le Vénézuela qui était le 4ème pays le plus riche du monde dans les années 1950, paie son addiction à l’empire américain ces dernières années – une entente de la Chine, des producteurs arabes d’hydrocarbures et de la Russie pour se passer du billet vert serait fatale pour l’économie américaine grevée par sa dette exponentielle. Et par analogie lourde de conséquences pour l’Europe. Le “Petroyuan” n’est donc plus un risque que “nos économistes mainstream” ne peuvent feindre d’ignorer (ou plutôt le cacher encore longtemps à l’océan de serfs). Comme le “bénéfice-risque” fut un terme à la mode (emprunté à la sphère financière de surcroît et à la discipline des sciences comportementales), je défie tous nos homo-politicus de s’en rappeler afin de respecter leurs prérogatives qui, soi-disant, viseraient l’Intérêt général et le bien commun”.

    En 2023, maintenant que l’Iran a trouvé sa place, nous devons retenir qu’au sein de cette “troisième guerre économique mondiale”, dans les prémisses d’un Armageddon financier (souhaité par les États-Unis en dépit des apparences?) que le régime iranien en particulier – après son rapprochement diplomatique avec les Saoudiens négocié à Pékin et qui mettra en lumière le pragmatisme du dirigeant de l’Arabie saoudite (MBS) critiqué par le passé pour ses décisions erratiques, qui ont conduit le royaume ultraconservateur dans une guerre sans fin au Yémen, un blocus agressif du Qatar voisin – profite à présent pleinement de ce nouvel axe géopolitique puisqu’il vend des armes à la Russie ; vend du pétrole et commerce avec la Russie et la Chine, malgré les sanctions, et compte sur le soutien de Pékin et de Moscou au Conseil de sécurité de l’ONU. Comme Ali Akbar Velayati, un conseiller principal du guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, l’a étonnamment reconnu à “Tasnim News”, média contrôlé par l’État iranien : “Nous sommes l’un des rares pays au monde à s’opposer clairement aux États-Unis, à poursuivre fermement sa vie politique et à établir des relations et des accords avec d’autres pays. Alors, qu’y a-t-il de mal à ce que nous ayons des relations avec des pays comme la Russie, la Chine et l’Inde? Ces pays ont une technologie de pointe et, à plusieurs reprises, contrairement à l’Occident, ils ont répondu à nos demandes et nous ont offert leurs capacités. Que devrions-nous attendre d’autre d’un pays allié? ….. Oui, pendant des années de sanctions, notre meilleur client a été la Chine, et certaines années, nous avons échangé des biens d’une valeur allant jusqu’à 52 milliards de dollars avec la Chine. Récemment, dans la dernière initiative prise par l’Occident et dirigée par les États-Unis, la résolution était censée être émise contre nous au Conseil de sécurité de l’ONU, mais elle a fait l’objet d’un veto de la part de la Russie et de la Chine”, cela a le mérite d’être clair. En ce sens, si la Russie voit des gains en Ukraine tout à l’instar des membres de l'”Organisation du Traité de l’Atlantique Nord”, que les États-Unis (sur le déclin) ne lâcheront pas leur part du gâteau, tout en continuant à jouer la montre en planifiant la prochaine grande conflagration financière mondiale (reset) alors la Chine tentera de s’emparer de Taïwan (producteur clé des semi-conducteurs). En même temps, je dis ça mais je ne dis rien.

    Une conclusion? Non, je laisserai cette responsabilité aux têtes chercheuses du gouvernement fédéral de vous l’expliquer, paraît-il qu’elles œuvrent pour l’Intérêt général et le bien commun.

  29. Voyage dans le temps et l’espace

    Saison 2023 (72): L’affaire des CoCo Bonds d’aujourd’hui sera l’affaire des “Limited Qualified Investor Funds” (L-QIF) de demain.

    Et dire qu’à l’époque, j’ai suffisamment tenu le crachoir en prêchant dans le désert contre la création du véhicule financier de “recapitalisation” du Credit Suisse (lors de son premier sauvetage exercé au nez et à la barbe du bon peuple helvétique) que j’en suis arrivé l’année dernière à vouloir réitérer l’exercice en dénonçant à nouveau nos bonimenteurs, mais en un seul pitch.

    Rappelons-nous la promotion des CoCo Bonds dans l’allée des marchands de rêve:

    ****
    Berne, 24.08.2011 – Plusieurs modifications dans le domaine de l’impôt anticipé vont permettre à des sociétés suisses d’émettre leurs obligations à des conditions concurrentielles en Suisse. Elles s’appliqueront également au nouvel instrument financier que constituent les CoCo Bonds (Contingent Convertible Bonds). L’autorisation de leur émission en Suisse s’accompagne de l’assurance que le droit national sera appliqué. La sécurité juridique de cet instrument s’en trouvera donc renforcée. Dans le même temps, ces modifications affermiront le rôle de garantie de l’impôt anticipé. Le Conseil fédéral a approuvé aujourd’hui un message au Parlement à leur sujet. Le projet de loi relatif à la maîtrise des risques systémiques inhérents aux grandes banques («Too Big Too Fail») avait déjà permis d’introduire de premières mesures en ce sens.

    Dans son message du 20 avril 2011, le Conseil fédéral a soumis au Parlement des propositions pour renforcer la stabilité du secteur financier en maîtrisant ces risques➡️ Le train de mesures proposé doit permettre d’éviter qu’à l’avenir l’État ne soit contraint d’investir les deniers publics pour secourir des établissements dont la faillite menace tout le système. ➡️L’un des instruments que le Conseil fédéral a proposés pour renforcer les fonds propres des banques est ce qu’on appelle les CoCo Bonds. Il s’agit d’obligations convertibles en fonds propres, dont la conversion est subordonnée à la réalisation d’une condition fixée par contrat (contingency).

    ➡️Le Conseil fédéral avait aussi proposé des mesures fiscales pour promouvoir l’émission d’emprunts et donc également celle de CoCo Bonds en Suisse et renforcer le marché des capitaux suisses. Il a opté dans ce cadre pour une introduction graduelle de mesures fiscales. Dans un premier temps, il a ainsi proposé le 20 avril 2011 la suppression du droit de timbre d’émission sur les obligations et papiers monétaires ainsi que l’exonération du droit de timbre d’émission sur les droits de participation qui résultent de la conversion de CoCo Bonds.

    Dans le message adopté aujourd’hui➡️ il présente des modifications de l’impôt anticipé. Son objectif est de permettre l’émission d’emprunts, y compris de CoCo Bonds, à des conditions concurrentielles en Suisse.

    En effet, les conditions fiscales actuelles ne s’y prêtent pas. La principale raison en est que l’impôt anticipé est perçu par l’établissement émetteur (selon le «principe du débiteur») sur les rendements des obligations, quel que soit le créancier. Par conséquent, il frappe aussi les investisseurs institutionnels exonérés de l’impôt, tels que les caisses de pension. Cette situation a conduit la plupart des sociétés suisses à émettre leurs obligations à l’étranger plutôt qu’en Suisse. Cela entraîne des frais de supplémentaires pour les sociétés et une perte de recettes fiscales pour la Suisse, du fait que la création de valeur n’a pas lieu dans notre pays. En outre, le but de garantie poursuivi par l’impôt anticipé n’est pas atteint car aucun impôt anticipé n’est perçu sur les rendements des obligations émises à l’étranger, même lorsque ces titres sont détenus par des personnes assujetties à l’impôt en Suisse.

    Face à cette situation, le Conseil fédéral propose en ce qui concerne l’impôt anticipé frappant les rendements des obligations et papiers monétaires de passer du principe du débiteur au principe de l’agent payeur: dorénavant ce ne sera pas l’émetteur, mais l’agent payeur suisse (en général une banque) qui prélèvera l’impôt.

    Celui-ci connaît ses clients et est en mesure de percevoir l’impôt de manière différenciée en fonction de la personne du créancier. À l’avenir, seuls les intérêts versés à une personne physique domiciliée en Suisse seront soumis à l’impôt anticipé, mais désormais les rendements des obligations émises à l’étranger seront aussi soumis à l’impôt anticipé. Les investisseurs nationaux et étrangers qui ne sont pas assujettis à l’impôt en Suisse pourront être exonérés de l’impôt anticipé. Grâce aux mesures proposées, il sera possible de prélever l’impôt anticipé de manière ciblée auprès des personnes physiques domiciliées en Suisse et cet impôt exercera ainsi sa fonction de garantie pour les impôts sur le revenu et sur la fortune. Le principe de l’agent payeur n’est pas un concept nouveau. Il est déjà appliqué dans le cadre de l’accord sur l’imposition de l’épargne conclu avec l’UE et constitue la base technique des impôts libératoires que la Suisse vise à conclure dans le cadre bilatéral avec l’Allemagne et le Royaume-Uni.

    Le Conseil fédéral poursuit par ce moyen trois objectifs:

    Renforcer la stabilité du secteur financier: ➡️ Grâce à la possibilité d’émettre des CoCo Bonds depuis la Suisse:l’application du droit suisse, que suppose l’émission des CoCo Bonds en Suisse, accroît considérablement la sécurité juridique. En cas de risque d’insolvabilité, cet élément est décisif pour que les CoCo Bonds puissent être convertis sans difficulté en fonds propres.

    Rehausser l’attrait de la place financière en stimulant le marché suisse des capitaux: ➡️Grâce aux nouvelles conditions fiscales, les sociétés suisses se voient accorder la possibilité d’émettre des obligations et papiers monétaires depuis la Suisse à des conditions concurrentielles en comparaison internationale.

    Augmenter l’équité fiscale grâce au renforcement de la fonction de garantie de l’impôt anticipé🙈🙉🙊

    D’après le droit en vigueur, le financement externe d’un groupe de sociétés par des emprunts s’effectue par l’intermédiaire des sociétés étrangères du groupe (le débiteur n’est pas suisse), de sorte que les intérêts sur ces emprunts échappent à l’impôt anticipé. Il est souhaitable de s’éloigner de ce mécanisme, ce qui renforcera la fonction de garantie de l’impôt anticipé et ainsi la perception correcte des impôts sur le revenu et sur la fortune.

    https://www.admin.ch/gov/fr/start/documentation/communiques.msg-id-40710.html

    ****
    Question sur la confiance à accorder à nos camelots (bonimenteurs) de la Berne fédérale:

    👉LKIFF
    13 novembre 2022 à 21 h 05 min
    Bonjour,
    Pourriez-vous nous expliquer l’intérêt du L-QIF ?
    https://www.sif.admin.ch/sif/fr/home/documentation/focus/archives/l-qif.html

    Réponse en deux temps:

    👉RAYMOND
    14 novembre 2022 à 13 h 16 min
    Bonjour LKIFF,
    Je tiens tout d’abord à préciser que ma réponse n’engage que moi-même et sans trop vouloir entrer dans les détails techniques, l’avantage (si l’on peut le dire de la sorte) de ce type de placement alternatif – réservé aux investisseurs qualifiés – permet de concurrencer certains fonds alternatifs étrangers (même des hedge funds) au travers d’opportunités de rendements supérieurs et par analogies des risques également, à l’instar par exemple des “Reserved Alternative Investment Funds” au Luxembourg ou le “Notified Alternative Investment Fund” à Malte; les considérations fiscales territoriales entrent également dans l’équation des “avantages”. D’autres parts, certes, le “Limited Qualified Investor Fund” peut procurer à la Suisse un lieu plus attractif et compétitif pour la place financière helvétique (vu le poids des actifs sous gestion des caisses de pension, des assurances…) sans compter qu’une redomiciliation offshore des fonds pourrait devenir une option, ce qui deviendrait intéressant pour maîtriser les coûts de fonctionnement (encore que ceci est relatif dans l’environnement de ces vingt dernières années). La Suisse verrait donc là une opportunité à renforcer le marché du capital-risque et du capital-investissement – face aux enjeux d’aujourd’hui et de demain – en ouvrant de nouveaux débouchés pour une “mise en commun plus efficace” des actifs. Ça, c’est la version du camelot, ce marchant ambulant qui vend dans la rue ou dans un lieu public sa marchandise à force de boniments.

    Par contre, si l’on se penche plus en avant du côté des risques – par exemple vers les épargnants captifs au travers des structures institutionnelles de prévoyance – comme les caisses de pension par exemple – et bien que les directives ou réglementations d’investissement pour le L-QIF sont plus libérales, il n’existe pas de directives d’investissement et de règles de diversification des risques spécifiques pour les “Limited Qualified Investor Funds” car seuls “les investisseurs qualifiés” sont autorisés à investir dans un L-QIF. C’est-à-dire que la prime de risque est intrinsèquement supportée par l’épargnant captif. D’ailleurs, le “CISA” (According to the Collective Investment Schemes Act of 23 June 2006) – loi du 23 juin 2006 sur les placements collectifs (“LPCC”) – n’impose pas de restrictions pour les investissements autorisés et, par conséquent, autorise les investissements dans des classes d’actifs traditionnelles telles que, par exemple, les valeurs mobilières, les instruments du marché monétaire et l’immobilier, ainsi que dans des classes d’actifs plus exotiques, notamment les matières premières, les crypto-actifs (“cryptomonnaies”), l’art, le vin, le luxe, les marchandises ou les voitures de collection. De plus, puisqu’aucune règle de diversification des risques ne s’applique non plus, un L-QIF (“Limited Qualified Investor Funds”) peut investir tous ses fonds dans un seul actif ou un seul type d’actifs (par exemple, des actions d’une seule société). Ainsi, même si les bases élémentaires des règles de diversification des risques ne sont pas appliquées – mais néanmoins autorisées – les techniques d’investissement doivent être communiqués aux investisseurs dans les documents du fonds. Donc, comme la plupart des autres organismes de placement collectif non conventionnels, un L-QIF peut investir dans des actifs dont la liquidité du marché est limitée ou dont la valorisation peut être difficile. Que se serait-il passé dans l’exemple de la faillite de FTX, deuxième plus importante société au monde de cryptomonnaie? Alors, bien que la LPCC (Loi sur les Placements Collectifs de Capitaux) délègue au Conseil fédéral la définition des restrictions de placement, celles-ci ne devraient pas être plus strictes que les restrictions existantes pour les fonds de placements alternatifs.

    D’ailleurs, les L-QIF ne seront pas tenus de préparer un prospectus ou un document d’informations clés pour la distribution ou l’offre, car les L-QIF ne peuvent pas être proposés aux clients de détail. Vous comprenez mieux à présent ma notion “d’épargnants captifs”? De plus, la FINMA n’a pas besoin d’examiner ou d’approuver aucun document d’entreprise ou matériel de marketing. De quoi la dédouaner en cas d’aléa majeur ou de “Moral hazard Effect”. Toutefois, histoire à s’éloigner d’éventuelles considérations ammorales, sur la première page de tout matériel de marketing et dans le cadre de chaque activité de marketing, le fonds doit être clairement appelé “L-QIF” ou “Limited Qualified Investor Fund” et il doit être clairement indiqué que le “L-QIF” n’est ni agréé, ni surveillée par la FINMA. “Un investisseur avertit n’en vaut-il pas deux”? Sauf pour les épargnants captifs!!! Bien évidemment, pour se dédouaner également, “mais pour des raisons de transparence”, le Département fédéral des finances (DFF) tiendra un registre accessible au public de tous les L-QIF et institutions responsables de leur administration. Histoire que nos homo-politicus – et leur successeur- puissent s’en laver les mains un jour ou l’autre.

    Conclusion: N’oublions jamais que l’épargne captive en Suisse demeure une manne considérable pour la finance de prédation.

    Bien à vous
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    Rendez-vous dans quelques années pour rediscuter de ce délicat sujet.

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