Ces derniers mois, j’observe une accélération du développement des plateformes de mobilité. Si votre voiture arrive bientôt en fin de vie et que vous pensez la changer pour une voiture électrique, il est peut-être préférable d’attendre. La mobilité comme service (Mobility-as-a-Service en anglais) se profile à l’horizon.
Ce modèle d’affaires consiste à payer un abonnement mensuel qui vous donne accès à plusieurs modes de transport : bus, train, voiture de location, taxi, service d’autopartage ou encore vélo et trottinette en libre-service. L’application vous indique pour tous vos trajets la combinaison optimale pour arriver à votre destination.
Sachant qu’en moyenne votre voiture est parquée 95% du temps, cette solution mérite d’être considérée.
Qui s’imposera comme le nouveau Netflix de la mobilité ?
On peut distinguer trois types d’entreprises qui développent cette nouvelle manière de “consommer” la mobilité :
- Des start-up lancent de nouvelles plateformes avec l’ambition de conquérir le monde
- Les applications de transports publics élargissent leur service
- Les plateformes de transport par chauffeurs privés tels que Uber et Lyft intègrent dans leur application des modes de transport alternatifs
Parmi les nouvelles entreprises, la société Maas Global vient tout juste de terminer un tour de financement de 29.5 millions d’euros. Elle a lancé l’application Whim il y a 2 ans en Finlande. A Helsinki, l’application propose par exemple un pack Whim Unlimited qui comprend les transports publics, les vélos en libre-service, les taxis et les véhicules de location pour 499 euros par mois. Plus de 6 millions de trajets ont déjà été effectués en utilisant cette solution.
Cette nouvelle levée de fonds vise à soutenir l’expansion dans de nombreuses villes. Comme dans le cas de la téléphonie mobile, le succès d’un tel service dépendra des possibilités de « roaming ». Pouvoir utiliser la même application partout où l’on se déplace est primordial pour obtenir un taux d’adoption élevé. Comme utilisateur, on ne veut pas devoir installer sur son smartphone une application par ville et gérer de multiples abonnements.
Les applications des transports publics étendent leur offre avec des forfaits intégrant plusieurs modes de transport. Lausanne et Genève ont uni leur force pour lancer l’application ZenGo. Vous pouvez, depuis cet été, faire partie du pilote et souscrire un abonnement qui vous donne accès aux transports publics et à l’offre de PubliBike. En complément, avec un système de jetons, l’abonnement vous donne aussi accès aux services de Mobility et de TaxiService. La mise en place des partenariats et l’harmonisation du service est un défi. Dans ce pilote, Mobility est par exemple uniquement disponible à Genève.
Avec une approche plus globale, Moovit, l’application leader pour la recherche de trajet en transports publics, vient de signer le mois dernier un partenariat avec Waze pour intégrer son service d’autopartage. Moovit, déjà mentionné dans mon article précédent sur le Big data, compte maintenant plus de 500 millions d’abonnés dans le monde. Cette intégration leur permet de proposer une solution alternative pour des trajets qui sont mal desservis par les transports publics.
Finalement, les plateformes de transport par chauffeurs privés évoluent également dans cette direction : Uber a lancé son service Transit dans douze villes dont Paris. Son application vous propose des itinéraires en bus et en métro. L’entreprise a également intégré dans son application Jump, son service de vélos électriques.
L’objectif d’Uber est d’augmenter la fréquence d’utilisation de son application. En contrôlant la relation client, ils espèrent, dans le futur, trouver des moyens de monétiser ces services, probablement en utilisant nos données de mobilité qu’ils auront collectées.
Comment nos données sont-elles utilisées ?
Avec ces deux milliards d’utilisateurs, Facebook possède suffisamment de données pour analyser nos comportements et connaître nos préférences et nos envies. De façon similaire, l’entreprise qui s’imposera sur ce marché de la « mobilité comme Service » possèdera une mine d’or d’informations sur tous nos mouvements. On peut déjà observer les premiers signes : avec ses 500 millions d’utilisateurs, Moovit revend déjà des données à Uber pour son service Transit.
En conséquence, avant de remplacer sa voiture pour un abonnement à une de ces applications, il faudra se demander à qui l’on veut donner l’information sur tous nos déplacements et savoir ce que ces sociétés vont en faire. Obtenir une transparence sur les algorithmes sera important pour savoir de quelle manière ces entreprises vont influencer nos déplacements.
Ce marché est estimé par certains analystes à $100 milliards en 2030. On peut s’imaginer qu’une partie du revenu sera générée par la monétisation de nos données.
En complément :
Le service de Whim expliqué en anglais :
La version plus locale avec ZenGo, le pilote lancé cet été à Genève et Lausanne :
Est-il préférable d’attendre? Oui dans le sens où l’achat d’une voiture doit être un acte réfléchi. Par contre la mobilité du futur que vous nous présentez ici ne concernera qu’une minorité de citoyens, ceux des zones urbaines. Autrement dit, ceux qui peuvent tout à fait se passer d’une voiture. Le citoyen lambda dans son village valaisan ou obwaldien ne disposera de toute façon pas d’une offre de transport public suffisante et complémentaire à un véhicule personnel, et vous demandera “Publibike? c’est quoi ça?” …
Effectivement ces solutions vont en premier lieu être disponibles en zone urbaine. Cependant l’innovation se développe aussi dans les zones de montagnes. C’est plus compliqué, mais j’ai par exemple rencontré la semaine dernière un entrepreneur qui a lancé « Quick Pick », une solution de covoiturage spontané, solidaire et sécurisé. Un pilote est en déploiement sur la Commune de Bagnes en Valais.
Du point de vue comptable, immobiliser un véhicule physiquement et son équivalent monétaire est en effet peu recommandable.
L’avenir est aux solutions multimodales, oui certes.
Mais l’offre disponible en Suisse reste aujourd’hui limitée au citadin sans enfant.
De plus, les prix annoncés pour les offres ZenGo laissent songeur… pourquoi la combinaison d’éléments existants est plus onéreuse que prendre les éléments dissociés ?
Dans l’immédiat, pour le citoyen suisse, un abonnement de TP local annuel et une part de sociétaire Mobility reste l’option la plus économique.
Ou alors conserver sa vieille voiture, car l’utilisation d’un véhicule à moteur thermique est peut-être moins polluante que la fabrication d’une nouvelle hybride bardée de batteries et autres circuits imprimés …
L’utilisation des applications est bénéfique à la fois pour le client et la société. Elles sont utiles, car elles nous empêchent de perdre notre temps.
Très intéressant par contre donner notre mobilité à des multinationales ou des fonds capital-risques qui ne payent qu’une partie dérisoire d’impôt en Suisse ne sera pas la solution. Aussi avec l’actualité des Uber et autres en Suisse au niveau de leurs capacités d’être un employeur honnête, loyal et responsable, nous remarquons que ces entreprises ne sont pas des partenaires fiables. Je veux bien parler le langue techno-scientiste jusqu’au-boutiste, mais pas au détriment du vomis mondialisés. Une politique local forte et indépendante fera que certains acteurs seront disqualifiés et c’est très bien ainsi.
Les clients et les entreprises, quel que soit leur type, doivent utiliser des applications afin de gagner plus de temps.