Ces méga-investissements qui déforment la réalité

Dans son édition à paraître, le New Yorker Magazine publie un article intitulé “How Venture Capitalists are Deforming Capitalism” où l’histoire rocambolesque de WeWork, notamment l’ego trip de son fondateur Adam Neumann, est présentée en trame de fond. Cela a fait réagir Hervé Lebret qui souligne ces déviances dans le monde l’investissement depuis un certain temps: “Aujourd’hui, les startups lèvent des centaines de millions de dollars avant d’entrer en bourse et font d’énormes pertes même au moment de l’offre publique de vente [IPO en anglais].” On peut citer l’exemple de Snowflake qui est entrée en bourse à la mi-septembre alors que les opérations de l’entreprise ne couvraient en aucun cas ses dépenses (le pari est que la croissance et les marges opérationnelles renversent cette tendance).

 

Le phénomène n’est pas nouveau mais il est intéressant de réfléchir derechef à cette déformation des règles que l’argent induit. “Même la startup la plus mal gérée peut battre ses concurrents si les investisseurs la soutiennent.” est-il indiqué dans le chapeau de l’article du New Yorker Magazine. Le soutien prend avant tout une forme financière mais il peut également se traduire par un appui de “réputation” – on peut penser au Board assez prestigieux de Theranos qui conférait un certain prestige à cette startup qui a défié la chronique.

 

En 2018, Martin Kenney de l’Université de Californie à Davis et John Zysman de l’Université de Californie à Berkeley publiait un article qui soulignait également les nouveaux dilemmes de la finance entrepreneuriale: ” La croissance simultanée du nombre et de la taille des sources de financement privées a entraîné une situation dans laquelle les nouvelles entreprises peuvent se permettre de subir des pertes massives pendant de longues périodes afin de déloger les entreprises en place […]. Cette situation a déclenché des bouleversements remarquables dans de nombreux secteurs industriels autrefois stables car les nouveaux venus, alimentés par les investissements en capital, ont réduit les prix et affaibli les services des entreprises en place. Le résultat final est que les nouveaux entrants, ayant accès à des quantités massives de capitaux, peuvent survivre à des pertes pendant une période suffisamment longue pour supplanter les entreprises existantes et, par conséquent, transformer les écosystèmes industriels antérieurs.”

 

La création de méga-fonds tels que les Vision Funds pilotés par Softbank (le premier fond était de 100 milliards de dollars pour 18 milliards de pertes et le second fond annoncé est de 108 milliards) a donné lieu à des investissements défiant toute attente. Avec de telles sommes en jeu, la logique du bon sens ne prévaut pas nécessairement, comme le déclarait un ancien dirigeant du groupe WeWork au journaliste du New Yorker Magazine: “Au fond, nous avons choisi l’ignorance délibérée et l’avidité plutôt que d’admettre que cela était manifestement de la folie [batshit crazy en anglais].” Quand l’appât du gain corrompt à ce point, il n’est pas difficile de comprendre de quelle manière des milliards de dollars partent en fumée. En tire-t-on vraiment des leçons ou continue-t-on à parier sur d’autres chevaux pour se refaire la main? Il semblerait que la responsabilité des investisseurs soit rarement remise en cause alors qu’il suffirait qu’un des leurs montrent l’exemple (et prenne sur lui, rende des comptes) pour que les pratiques changent radicalement dans cette industrie dont les rouages s’apparentent à ceux d’un club.

 

Comme me le disait le directeur d’une école de management: “Il n’y a pas de fumée sans feu; mais il peut y avoir beaucoup de fumée si vous avez quelqu’un pour agiter un tapis au-dessus des flammes.” So, who wants money?!

 

 

Joyeux anniversaire swissnex

Et de deux décennies! Le saviez-vous? Il semble que non.

Perspectives sur une aventure dont vous avez entendu parler; ou pas.

 

Historique

 

Il y a 20 ans jour pour jour, Xavier Comtesse lançait officiellement la Swiss House à Boston. “Trouvez le lieu, l’argent et le personnel” lui avait-on dit après avoir avalisé le projet de consulat scientifique, une première. En 2003, sous l’impulsion du bureau de San Francisco, le réseau en gestation se renomme swissnex (de nexus, pas next, fréquente erreur) et se positionne avec son slogan: connecting the dots. Sa mission: créer des ponts entre la Suisse et le monde (comprendre: des écosystèmes dynamiques dans lesquels une présence suisse manque ou que swissnex peut complémenter) dans les domaines de l’innovation, la recherche et l’éducation (relations académiques au sens large); à ceux-ci s’ajoutent l’art, le design, l’architecture et la culture.

 

Au jour d’aujourd’hui, on dénombre cinq sites principaux (Boston, San Francisco, Shanghaï, Bangalore qui fête ses 10 ans, Rio de Janeiro) et leurs satellites (New York, Guangzhou, São Paulo) – le tout faisant partie du réseau plus global avec les attachés dans des consulats et ambassades de Suisse (p.ex. le Science & Technology Office à Tokyo). Le bureau de Singapoure ferme en 2015, signe de la flexibilité du réseau et décision concrète pour éviter une redondance avec les acteurs en présence, comme notamment l’ETHZ et le campus CREATE et l’ambassade pour les activités diplomatiques.

 

Le financement – Thierry Lombard et LODH permettent en 1999 de lancer l’initiative à ses débuts avec une donation –  est en partie privée, en partie publique. La continuité des activités est garantie seulement si les fonds sont réunis année après année à la différence d’autres organisations partenaires comme par exemple Switzerland Global Enterprise. La contribution financière étatique est dérisoire en comparaison de, par exemple, quelques coucous qui sillonneront nos cieux, devisés à 6 milliards de francs. Paradoxalement, un entrepreneur me lançait une fois: “vous n’êtes pas assez chers pour que l’on vous prenne au sérieux.” De quoi réfléchir au modèle d’affaire, tâche compliquée tant le spectre des activités est large et que la spécialisation dépend plus de la personne en charge que d’un cahier des charges très défini.

 

Succès

 

Comment mesurer les succès d’une telle initiative dont le but est de créer des liens? On ne compte plus les mises en relation entre des startups et des experts et/ou investisseurs (dont on a vent des mois ou même des années plus tard), des chercheurs et des instituts, des artistes et des musées. Il est ardu de quantifier les résultats d’un soft power mis en application au quotidien avec des moyens restreints mais qui sont ingénieusement compensés par de la créativité au niveau de la programmation des événements, des formats de collaboration, du rapport humain tissé au fil des ans dans pléthore de secteurs et avec une ouverture propre aux swissnexers. “Engineered serendipity” aura-t-on pu entendre lors d’échanges.

 

On peut cependant penser à quelques exemples concrets. Le fil est parfois ténu et pas forcément évident à prouver mais on ne pourrait réfuter le rôle behind the scenes pour en arriver à des succès tels que la présence de MassChallenge en Suisse, les projets d’innovation de Nestlé dans la Silicon Valley, le partenariat ECAL-MIT et tant d’autres à des niveaux plus personnels: untel qui change de poste suite à une rencontre lors d’un petit-déjeuner réseautage à swissnex et qui joue désormais un rôle clé dans une entreprise. Cette toile de relations pourra être “activée” en temps voulu pour créer une situation win-win.

 

Les détracteurs du réseau trouveront en tout temps des critiques à émettre. Il s’agit le plus souvent d’une incompréhension des rouages sous-jacents que d’une volonté de voir le verre à moitié plein. Comment comprendre la réalité du terrain depuis un siège bernois? Cela ne doit néanmoins pas amoindrir l’auto-critique pour constamment devancer les piques des observateurs. Pour un pays occupant (souvent) la première place des classements en innovation et investissant massivement dans l’éducation, le réseau swissnex fait régulièrement des envieux parmi les autres pays qui essaient, non sans peine, d’imiter la Suisse dans ce domaine. Entre tracasseries administratives et cadres auxquels se conformer, les projets étrangers ne parviennent pas à couvrir autant de terrain que swissnex ne le fait. Mais ne nous reposons pas sur nos lauriers, la paresse guetterait nos esprits.

 

Futur

 

A la fin des années 90s, l’idée était de trouver une parade au brain drain vers les Etats-Unis en maintenant des liens et créant des ponts avec les institutions académiques et les chercheurs. Le monde se trouvait également à l’aube de la dot come bubble.

 

Fast forward en 2020: avec ce Big Reset, quels sont les prochains défis à relever? Quelle est la valeur ajoutée du réseau? Comment financement ses activités? Dans quels lieux? Quels partenaires impliquer? Ce qui est certain: faire la place à des esprits ouverts, jeunes, curieux et entreprenants capables s’insuffler un renouveau. “C’est par la jeunesse que vient l’énergie” comme disait l’autre. Les pistes de réflexion semblent se cristalliser autour de l’initiative nex20 (en espérant que d’autres idées étofferont les cinq associations d’idées qui défilent avec le bouton “Surprise me”). Cinq voies de réflexion sont listées: connecter/travailler/vivre/se rencontrer/apprendre demain; on se départit des thèmes redondants “… of the future” même si l’idée reste dans la même veine.

 

Si le Parlement et les instances politiques décident en quelque sorte du sort de swissnex, il est impératif de continuer à convaincre leurs acteurs du bien-fondé de l’initiative dans un monde globalisé où le contact humain reste toutefois essentiel. Pour sortir du cliché banco-chrono-choco si ancré dans l’imaginaire des étrangers, une des missions de notre pays est de se projeter sur le devant de la scène. “Regardez ce que l’on peut faire ensemble!” devrait-on asséner au lieu de se profiler comme trop souvent au second plan.

 

Alors que le réseau fête ses noces de porcelaine avec le Secrétariat à l’Education, la Recherche et l’Innovation (SERI) et le Département des Affaires Etrangères (DFAE): what’s next swissnex?

Les immigrés innovent ne vous en déplaise!

Le 14 septembre dernier, Le Temps publiait un article sur les résultats d’une étude issue du Collège de Management de l’EPFL. Celle-ci met en lumière la forte contribution des inventeurs immigrés en Suisse à l’innovation du pays à travers le dépôt de brevets.

Citons: “Près de 30% des inventeurs travaillant et déposant des brevets en Suisse durant la période 2002-2015 sont titulaires d’un permis B, C, L ou G. […] Cela fait de la Suisse l’un des quatre premiers pays au monde en termes de proportion d’inventeurs immigrés, aux côtés de l’Allemagne, du Royaume-Uni et des Etats-Unis.

Remettre en cause la relation de cause à effet entre la force créatrice – des idées aux emplois – et la contribution des inventeurs immigrés à l’innovation (et donc à l’économie) relève d’une conviction politique, pas de faits.

Ce débat fait régulièrement rage aux USA, grand pays de l’immigration qui se retrouve empêtré dans des considérations similaires à intervalles réguliers. Il convient de rappeler qu’au pays de l’Oncle Sam, les immigrés contribuent également de façon très conséquente à faire croître l’économie via leur contribution à l’innovation nationale. Les récentes recherches du Prof. Daniel Kim de l’Université de Wharton, une référence dans le milieu économico-entrepreneurial, indiquent que “les immigrés aux USA créent bien plus d’emplois qu’ils n’en prennent, principalement parce que beaucoup d’entre eux sont plus enclins à lancer des entreprises qui créent ensuite beaucoup d’emplois.” Au niveau des statistiques, les immigrés représentent environ 15% des travailleurs aux USA et ont 80% de chances en plus de devenir entrepreneurs que les travailleurs autochtones.

Une myriade d’organisations telles que les investisseurs One Way Ventures basés à Boston ne s’y trompe pas en prenant le parti de soutenir les entrepreneurs étrangers sur sol américain. Il s’agit plus qu’une conviction mais bel et bien d’une réalité économique que l’on ne peut reformatter au gré de ses convictions politiques. Si jamais il vous fallait des arguments pour voter prochainement sur un certain objet…

Musk, la puce et le cerveau

Le 1er septembre dernier, on annonçait qu’Elon Musk avait détrôné son “collègue” milliardaire Mark Zuckerberg. Surprise pour certains, infamie pour d’autres: l’ingénieur fou voyait ses avoirs prendre l’ascenseur lors du split des actions Tesla. Pourtant, ce ramdam pécunier a quelque peu occulté une nouvelle en lien avec les paris fous de l’entrepreneur américain.

……..drum roll……….

Entre en scène Gertrude, un cochon qui se retrouve sous le feu des projecteurs. La raison? Des chercheurs lui ont intégré un appareil afin de pouvoir transmettre les signaux de son cerveau à un écran d’ordinateur. Gertrude, perplexe, a apparemment continué de dévorer des friandises alors que son cerveau se confondait avec cette nouvelle réalité.

Si ce type de stimulation cérébrale n’est pas nouveau – les médecins implantent régulièrement des électrodes dans le cerveau humain pour traiter l’épilepsie et la maladie de Parkinson – le Neuralink est particulièrement novateur. Il utilise une technologie sans fil et a la taille d’une grosse pièce de monnaie, ce qui contraste fortement avec les dispositifs implantables encombrants typiques des autres technologies de soins de santé.

Rappelons que l’entreprise technologique éponyme du bastion Musk – 158 millions de dollars levés –  affirme sur sur son site “développer des interfaces cerveau-machine à très haut débit pour connecter les humains et les ordinateurs.”

Fidèle à lui-même, Musk voir grand et prévoit de tester le dispositif sur des humains, en affirmant qu’il peut être utilisé pour traiter une myriade de maladies dont la paralysie, la cécité et la dépression. Rien que ça.

Cependant, les avantages potentiels ne s’arrêtent pas là. Musk a suggéré que l’appareil peut éventuellement être utilisé pour invoquer Teslas par télépathie ou pour diffuser le dernier album en vogue directement dans votre cerveau.

Comme il l’a dit dernièrement : “L’avenir va être bizarre.” Vous avez dit bizarre? Comme c’est étrange.

Source: AngelList

V2X: Véhicule-à-tout

Récemment, Nissan annonçait proposer une nouvelle monnaie d’échange. En effet, dans son exposition de Yokohama explorant le futur de la mobilité, l’entreprise permet aux visiteurs de payer leur parking en transférant une partie de l’électricité stockée dans les batteries de leurs véhicules électriques au bâtiment abritant l’exposition. L’électricité sera-t-elle bientôt monnaie courante?

Ce type d’initiatives – ou de technologies – visant à valoriser l’électricité des batteries de véhicules s’inscrit dans le concept “vehicle-to-grid”, abrégé V2G, traduit en français par “véhicule-réseau”, technologie permettant le flux bidirectionnel d’électricité de et vers la batterie. Avec d’autres véhicules de la marque japonaise, l’entreprise Octopus prône notamment la solution Powerloop pour encourager ses utilisateurs à adopter ce nouveau type d’échange.

Au cours d’un voyage à San Francisco en 2017, John Sarter, fondateur et directeur de l’entreprise Sol Lux Alpha, par ailleurs membre du réseau Solar Impulse, me faisait visiter des bâtiments dits “net zéro” (parfois complété par positif) pour indiquer que leur consommation énergétique est neutre: ils produisent autant qu’ils consomment (et produisent même parfois plus). Si une catastrophe naturelle venait à survenir, comme par exemple un “big ‘quake” redouté en Californie, une des applications envisagées est de pouvoir fournir les habitants du quartier en électricité, notamment par et pour leurs véhicules qui se mueraient en batterie mobile. En considérant la forte densité énergétiques de ces dernières, la capacité de stockage mobile est conséquente.

Par ailleurs en 2019, Volkswagen annonçait que toute la gamme Golf de la huitième génération allait être équipée de technologies V2X, à savoir “vehicle-to-everything” (véhicule-à-tout en français), ce qui représente le plus grand déploiement en termes d’échelle dans le monde automobile (bien que Toyota et Cadillac aient devancé le constructeur allemand de quelques années).

Avec des chiffres de vente en constante hausse, les véhicules électriques sont sources d’innovations multiples quant à l’électricité qu’ils transportent. De nouveaux modèles d’affaires voient et verront indéniablement le jour. Roulez jeunesse!

Le bureau: manque ou lieu obsolète?

Cette semaine, l’entreprise américaine d’équipement sportif et d’activités en plein air REI annonçait qu’elle mettait en vente son campus – qui allait faire office de nouveaux quartiers généraux – alors même que les employés s’apprêtaient à s’y installer. La raison en est simple: la pandémie de Covid-19 a chamboulé les habitudes des employeurs et employés en un temps record. Les dirigeants de REI ont donc rapidement changé de cap pour s’adapter à la nouvelle donne.

Il est évident que la crise sanitaire actuelle et son cortège de mesures pour garantir la sécurité de tout un chacun accélère le passage au travail à distance et qu’elle a un impact majeur sur l’immobilier commercial. A bon entendeur, notamment de WeWork qui vient d’annoncer un investissement supplémentaire de plus d’un milliard de dollars de la part fonds SoftBank pour faire face à l’impact du Covid-19.

Il est à noter qu’au début de l’été déjà, plusieurs entreprises internationales comme Facebook, Twitter, le groupe PSA, etc. avaient déclaré que des solutions de télétravail avaient ou allaient être mises en place et ce pour une longue durée. Une forme d’agilité digitale qui permettra sans nul doute de créer des opportunités à défaut de n’y voir que des problèmes par rapport à “l’ancien modèle.”

“Office centricity is over” – Tobi Lutke, CEO de Shopify

Dans son édition du weekend dernier, la journaliste Cassie Weber partage ses pensées dans dans la newsletter Quartz. “Si les soudains confinements nationaux ont prouvé quelque chose au monde des affaires, c’est que le travail à large échelle et à distance est bien plus possible que bien des personnes ne l’aient jamais rêvé. Mais alors que les choses commencent à se tasser, beaucoup disent aussi que le bureau leur manque.

Elle cite notamment une récente étude qui a cherché à comprendre comment l’expérience des employés du monde entier en matière de culture d’entreprise avait changé depuis le début de la crise. Il est peut-être surprenant de constater que 37 % des personnes interrogées ont déclaré qu’elles pensaient que la culture sur leur lieu de travail s’était améliorée depuis le début de la pandémie, contre 15 % qui pensaient qu’elle s’était détériorée; près de la moitié ont déclaré se sentir plus liés à leur organisation, contre 18 % qui se sentent moins liés.

Si la culture d’entreprise est un ensemble de choses à travers desquelles les employés “vivent l’entreprise” et les employeurs veulent la présenter (intangibles comme l’ambiance, les valeurs, etc. ou tangibles comme les perks, les types de bureaux, les salaires, etc.), la crise que nous traversons actuellement est une épreuve du feu pour les redéfinir.

Se passera-t-on bientôt de métro pour ne garder que boulot et dodo?

Innovation vs. Optimisation

La réputation d’Index Ventures n’est plus à faire. Comme tous les protagonistes de premier ordre dans le monde du capital risque, ils publient régulièrement des articles dont la portée dépasse la simple annonce d’investissement (le guide sur les plans de participation des employés de startups est une référence, une excellente comparaison entre les pratique états-uniennes et européennes).

Récemment, un de leurs associés Mike Volpi prenait son clavier pour discuter de la différence d’approches entre l’innovation et l’optimisation, deux pierres angulaires qui selon lui ont façonné la Silicon Valley.

Avec la professionnalisation du monde des startups, le monde de l’entrepreneuriat est plus structuré et mieux planifié. Au fil des années, de crises en succès, de leçons en expériences, les pratiques qui ont fait leurs preuves se sont répandues et ont été appliquées avec minutie. La manière de gérer une entreprise passe désormais sensiblement plus par l’optimisation de métriques, ce qui est logique et attendu de la part des sociétés à succès.

 

Chaque CEO voudrait avoir les deux [l’innovation et l’optimisation] mais, en pratique, ce sont des forces contraires. La poursuite de l’optimisation d’une entreprise peut aspirer la créativité et l’innovation. La recherche aveugle de l’innovation peut conduire à la faillite d’une entreprise en laissant derrière elle une foule de projets créatifs mais à moitié achevés.

 

Innovation

Selon Volpi, l’innovation réalise pleinement son potentiel lorsque plusieurs ingrédients sont présents:

    • la culture du risque: l’innovation implique d’essayer des idées et projets dont la réussite n’est pas garantie. “L’innovation et l’échec sont les deux faces de la même pièce.” A cause de l’asymétrie risque-récompense disproportionnée dans le monde de la tech, une prise de risques assez conséquente est nécessaire pour assurer un retour sur investissement suffisant.
    • En parallèle, mettre en place et favoriser les récompenses pour la prise de risque. Un projet innovant capote? Il faut soutenir ceux qui l’ont lancé et mené car c’est en apprenant de ses erreurs que l’on construit son expérience (on se remémore les adages du style “fail forward” qui sont légion).
    • Une chronologie adaptée: les fruits de l’innovation ne se récoltent pas le lendemain après avoir planté les graines; toutefois, il faut être vigilant à ne pas laisser traîner des projets indéfiniment. “Après tout, l’innovation ne prend vie que lorsqu’elle rencontre un client.

 

Optimisation

Dans un monde des affaires de plus en plus axé sur les données, l’optimisation est devenue un processus essentiel pour créer de la valeur pour les actionnaires. […] Si vous pouvez mesurer quelque chose, vous pouvez l’améliorer et progressivement mieux gérer l’entreprise. L’excellence opérationnelle est clairement une vertu et elle doit être encouragée.” Entrepreneurs, prenez-en bonne note!

Cependant, dans toute logique de tracking de métriques, il est primordial de suivre l’évolution des bonnes valeurs et de pouvoir les mesurer objectivement. Sinon, on peut aisément être induit en erreur et ne pas corriger ce qui devrait l’être.

Alors comment mesurer l’innovation, par un nombre de lignes de codes? par l’adhésion à des plans d’action? via le sentiment de cohésion dans l’équipe? La tâche est ardue. “Il est clair que vous pouvez identifier l’innovation a posteriori, mais pendant qu’elle se produit, c’est beaucoup plus difficile.” souligne-t-il.

 

Le bon mix

Volpi renchérit: “Le défi sous-jacent est assez évident. Les entreprises doivent optimiser leurs opérations, mais le faire en excès peut en fait étouffer l’innovation et potentiellement nuire aux perspectives à long terme de l’entreprise.”

A chaque organisation une façon d’innover qui dépend de sa culture, de son marché, de sa technologie. Volpi souligne la différentiation nécessaire pour éviter d’imposer une unique manière d’innover mais il est partisan d’une innovation institutionnalisée qui est créatrice de valeur (lire à ce titre l’ouvrage d’O’Connor, Corbett et Peters sur la corporate innovation).

Relevant que “la nécessité d’une excellence et d’une optimisation opérationnelles“, il conclut: “à l’extrême, l’optimisation et l’innovation se juxtaposent et les dirigeants modernes doivent veiller à ne pas entraver le moteur d’innovation de leur entreprise par l’imposition excessive de mécanismes d’optimisation.

Les lois empiriques de la tech

Récemment, la plateforme CB Insights publiait un article sur les huit “lois empiriques” que les années de développement technologique ont confirmées et qui, par voie de conséquence, ont donné les lettres de noblesse aux personnes qui ont repéré ces tendances. Retour sur celles qui ont façonné le domaine de la tech depuis plusieurs décennies.

  • Loi de Moore

Peut-être la plus connue, elle date de 1965 lorsque le co-fondateur d’Intel, Gordon Moore, prédit que chaque année, les fabricants de semi-conducteurs sont capables de doubler le nombre de transistors sur les puces électroniques alors que leur prix est divisé par deux. Cette observation se confirma à tel point qu’elle fût apparentée à une sorte de “prophétie auto-réalisatrice” dans l’industrie, permettant aux industriels de planifier leurs chiffres ventes, stratégies et ressources nécessaires. En 1975, Moore ajuste sa prédiction exponentielle en précisant que la puissance des circuits intégrés double chaque deux ans, ce qui s’avèrera correct jusqu’à il y a peu à cause de la complexité de réduire encore plus la taille des transistors de façon économiquement viable. Avec l’avènement des ordinateurs quantiques, Neven pourrait détrôner Moore.

  • Loi de Metcalfe

En 1980, un des pères de la technologie Ethernet, Robert Metcalfe, observe que l’augmentation de la valeur des réseaux de communication est proportionnelle au nombre de leurs utilisateurs. En effet, à l’instar des premières installations de téléphones, le coûts initial de connexion au réseau excède généralement la valeur qui en résulte. Cependant, à un certain moment, une masse critique d’utilisateurs connectés est atteinte: les coûts initiaux deviennent alors inférieurs aux bénéfices dus aux connexions supplémentaires. Facebook, Twitter et Snap sont trois exemples suivant cette logique: plus les gens s’inscrivent sur les réseaux sociaux, plus il devient intéressant de les rejoindre. Le but est d’ensuite de réussir à fidéliser les utilisateurs pour qu’ils restent, sinon gare à la chute.

  • Loi de Gall

En 1975, Robert Gall écrit: “Un système complexe qui fonctionne se trouve invariablement avoir évolué depuis un système simple qui fonctionnait. La proposition inverse se révèle également exacte: un système complexe développé de A à Z ne fonctionne jamais et vous n’arriverez jamais à le faire fonctionner. Vous devez recommencer depuis le début, en commençant par un système simple.” Ce principe deviendra une pierre angulaire du développement de nouveaux produits afin que leur finalité devienne la priorité, à savoir faire en sorte que les gens veulent utiliser ces produits. On pensera donc par exemple au concept de “minimum viable product” lors de l’élaboration de nouveaux produits et services, pratique largement répandue dans les startups: on vise d’abord un produit sans trop de fonctionnalités et on l’améliore au fur et à mesure grâce aux feedbacks des utilisateurs.

  • Règle des deux pizzas (Amazon)

Début 2002, Jeff Bezos décide de s’attaquer à la surabondance de communication interne afin d’augmenter la productivité. Il réorganise donc toutes ses équipes en suivant la règle des deux pizzas: les d’employés sont réunis en groupes assez petits afin de se sustenter de seulement deux pizzas lors des tardives sessions au bureau. Cette volonté de limiter la taille de groupes de travail garantit une forme d’agilité alors même que l’entreprise est très large et compte de nombreux départements. Elle encourage également une certaine dépendance dans la prise de décision au lieu de trop dépendre de la hiérarchie. Résultat: une croissance moins coûteuse, une facilitation d’expérimentation et, au final, plus d’innovations proposées aux utilisateurs. Bezos l’exprime en 2013: “La distribution [décentralisée] des inventions dans toute l’entreprise […] est le seul moyen d’obtenir une innovation robuste et à haut débit.” Chez Spotify, les squads de maximum huit personnes s’inspirent de la même logique générale.

  • Loi de Conway

En 1967, Melvin Conway remarque que “les organisations qui conçoivent des systèmes […] sont contraintes de produire des designs qui sont des copies de la structure de communication de leur organisation.” Autrement dit: si par exemple deux développeurs n’échangent pas souvent ni librement, l’intégration d’un logiciel se fera difficilement; si au contraire leur communication est ouverte et fréquente, les chances que l’expérience utilisateur soit fluide sont bien plus grandes. Un exemple: Apple qui organise ses équipes non pas autour d’un produit mais en assemblant diverses expertises fonctionnelles (p.ex. design, marketing, etc.) afin d’unifier les expériences à travers tous les produits et services de la marque. Un autre: la manière de fonctionner de la plateforme GitHub reflète la nature décentralisée et asynchrone de la collaboration entre leurs programmeurs-contributeurs.

  • Loi des “clics de m*”

Attribuée à Andrew Chen, associé dans le bureau de capital risque Andreessen Horowitz, elle stipule que tout nouveau canal marketing, aussi utile soit-il initialement, perd peu à peu son efficacité avec le temps. L’investisseur attribue trois raisons à cela: i) la nouveauté: les gens y répondent par la curiosité mais reconnaissent vite des habitudes, ii) les fast followers: l’efficacité d’un canal se répand comme traînée de poudre et une certain fatigue s’installe chez les personnes, iii) l’échelle: si des early adopters répondent positivement à des nouveaux outils marketing, le grand public sera plus hésitant. Cela pose également la question centrale des métriques afin de mesurer l’efficacité d’une campagne marketing (p.ex. le taux d’ouverture d’une newsletter envoyée par email).

  • Loi de Zimmermann

En 2013, le pionnier de l’encryption d’emails Phil Zimmermann affirme que de nos jours, la trajectoire naturelle d’une technologie est de rendre la surveillance (de masse) plus facile, de telle sorte à ce que la capacité des ordinateurs à collecter des données d’utilisateurs double chaque deux ans (vous avez dit Moore?). Ce n’est plus un secret que les données sont le bien le plus précieux de notre époque et qu’il est donc naturel d’offrir des services gratuits en échange de données d’utilisateurs. Facebook, Google et tant d’autres en sont les fers de lance afin de mieux connaître leurs utilisateurs et donc offrir des publicités encore plus ciblées à de potentiels clients. Avec l’avènement de l’Internet of Things (IoT), le débat continuera de faire rage: avantages et utilités versus effritement de la sphère privée.

  • Principe de Pareto

Vers la fin du 19ème siècle, l’économiste italien Vilfredo Pareto consigne une observation: 80% des terres du pays sont entre les mains de seulement 20% de la population. En étudiant d’autres contrées, il y découvre les mêmes proportions. Dès ce moment, cette règle générale trouve un magnifique écho dans une multitude de situations, allant du sport aux assurances qualité. Ce principe s’illustre particulièrement bien dans le monde du capital risques où la majorité des investissements dans des jeunes pousses ne rapportent que peu ou pas alors qu’une minorité surpasse de loin le retour sur investissement moyen.

(source CB Insights)

Covid 19: vers plus d’institutions et d’agences gouvernementales?

Puisque l’Histoire nous permet de mieux saisir le présent et, par anticipation, mieux prévoir le futur, Bruce Katz dans ForeignPolicy nous rappelle que “les crises provoquent la création de nouvelles agences et institutions gouvernementales. En prenant les Etats-Unis pour exemple, le pays a créé

  • le Département de la Sécurité Intérieure (Department of Homeland Security) après les attaques du 11 septembre, et
  • le Bureau de la Protection des Finances des Consommateurs (Consumer Financial Protection Bureau) suite à la crise des subprimes de 2008-2009.

[Dans les centres urbains] la pandémie du coronavirus encouragera sûrement les changements institutionnels où de nouvelles compétences émergeront afin de répondre au dévaste économique”. Peut-on dès lors parler d’innovation institutionnelle voire gouvernementale?

Dans un autre registre, l’innovation étatique avait su mettre en place un plan d’action pour combattre d’éventuelles pandémies. En effet, le Plan suisse de pandémie Influenza datant de 2018 refait timidement surface et sa lecture est vivement recommandée (l’exergue liminaire “If you fail to plan, you are planning to fail” attribuée à Benjamin Franklin fait rire jaune au vu de la situation). Sa mise en application demeure toutefois une énigme et on se demande quel grain de sable a enrayé la machine, en termes de préparation, alors qu’on annonce fièrement que “cela fait une semaine […] que la Confédération ravitaille le commerce de détail en masques à raison d’un million de pièces par jour.” Verra-t-on un renforcement majeur de l’Office Fédéral de la Santé Publique qui est sur le devant de la scène? Assurément si l’on prend le pouls de la population qui replace derechef la santé au centre des préoccupations. Quant aux Etats-Unis, y verra-t-on le retour d’une task force dédiée à la gestion des risques de pandémies alors qu’elle a été quasiment dissoute par l’administration Trump en 2018? Il s’agit d’une nécessité que nul ne contestera.

En ce début du mois de mai, tandis que nos voisins déconfinent prudemment et que le “retour” de notre système politique est prôné haut et fort par notre Présidente, on assiste toutefois, comme le soulignait Annabelle Timsit dans Quartz, à une reprise de l’activité étatique: “[…] alors que nous sommes collectivement confinés chez nous, l’un des plus grands réarrangements de pouvoir de l’histoire moderne se déroule sous nos yeux – et l’on craint vraiment que nous soyons trop débordés pour y faire quoi que ce soit.

Au cours des dernières semaines, les dirigeants du monde entier ont étendu leurs pouvoirs de manière sans précédent au nom de la lutte contre le nouveau coronavirus.

  • En Thaïlande, le gouvernement peut désormais censurer les médias.
  • En Corée du Sud, les autorités utilisent les enregistrements des téléphones portables, des cartes de crédit et des GPS pour suivre les patients atteints de Covid-19 en temps réel.
  • Aux États-Unis, le ministère de la justice a demandé aux législateurs le pouvoir de demander que les accusés soient détenus indéfiniment sans procès en cas d’urgence.

Dans un récent épisode du podcast Talking Politics, deux experts en théorie politique ont discuté du moment où les pouvoirs d’urgence deviennent tyranniques. Selon eux, l’état d’urgence est justifié si la menace est publique, universelle et existentielle, et si les pouvoirs extraordinaires sont autorisés par le peuple, limités dans le temps et proportionnels. Le Covid-19, que l’on a appelé “le grand égalisateur”, correspond certainement à la première moitié de cette description, mais qu’en est-il de la seconde ?

Il y a très peu de choses dans l’Histoire pour nous convaincre que les États sont désireux de rendre des pouvoirs une fois qu’ils ont été attribués. […] Il convient de noter que peu de déclarations d’urgence adoptées dans le monde pour faire face à la crise du Covid-19 sont assorties d’une clause de temporisation.

Quant aux autres points, qui détermine quelle perte de nos droits personnels est proportionnelle à la menace ? Et qui parle au nom du peuple ?”

Pour reprendre la récente déclaration de la Conseillère Fédérale Sommaruga: “Que la démocratie reprenne ses droits!”, il est impératif que celle-ci ne tombe pas dans l’oubli lorsque l’on assistera à une vague d’ “innovation” d’Etat.

Covid-19: les géants du numérique se renforcent

Tandis que toute l’économie subit l’impact paralysant du coronavirus, les affaires des plus grandes entreprises technologiques se maintiennent, voire prospèrent. Les gens étant invités, voire forcés, à travailler à domicile et à rester à l’écart des autres, la pandémie a renforcé la dépendance aux services des plus grandes entreprises du secteur technologique (les GAFAM par exemple) tout en accélérant les tendances qui leur profitaient déjà.

Pour les entreprises qui gèrent leurs infrastructures sur l’Internet, l’adaptation des besoins informatiques est coûteuse et compliquée. Le cloud computing facilite cette tâche et offre une alternative rapide et scalable. Les entreprises se débarrassaient déjà de leurs propres centres de données pour louer des ordinateurs chez Amazon (Web Services AWS), Microsoft (Azure) et Google (Cloud). Cette évolution devrait s’accélérer car des millions d’employés sont obligés de travailler à domicile, des étudiants de suivre leurs cours depuis chez eux, etc., ce qui met à rude épreuve les infrastructures technologiques des différentes organisations.

  • Utilisation croissante des outils de collaboration et de télétravail

Microsoft a fait une promotion agressive de son nouvel outil de messagerie et de collaboration, Microsoft Teams, qui est en concurrence avec la société indépendante Slack qui avait vraiment démocratisé la messagerie instantanée au travail. Récemment, Microsoft a déclaré que le nombre d’utilisateurs de Teams avait augmenté de 37 % en une semaine, pour atteindre plus de 44 millions d’utilisateurs quotidiens. Chaque jour, il y a eu au moins 900 millions de réunions et de comptes rendus de conférences téléphoniques sur Teams.

  • Les applications de livraison de produits d’épicerie sont très demandées

Depuis plusieurs années déjà, Amazon s’est allié aux détaillants en magasin (brick and mortar) en rachetant par exemple la chaîne nord-américaine Whole Foods. Cependant, désormais réticents à se rendre en magasin, les acheteurs se tournent d’autant plus vers le géant du commerce en ligne pour une plus grande variété de produits, comme les produits d’épicerie et les médicaments en vente libre (rappelons qu’en 2018, Amazon était possédait 49% des parts du commerce de ventre en ligne aux USA). Pour faire face à la demande, le groupe cherche actuellement à recruter 100’000 personnes pour ses centres et ses réseaux de distribution. Après les livres, Amazon chamboule les habitudes d’achat pour les produits d’épicerie.

D’autres applications de livraison de produits d’épicerie, dont Instacart (cherche 300’000 personnes dans les trois prochains mois, soit plus du double de sa base actuelle), Walmart Grocery (cherche 150’000 personnes pour ses centres de distribution) et Shipt, ont commencé à enregistrer un nombre record de téléchargements quotidiens.

  • Augmentation du trafic vers les sites de streaming vidéo et les plateformes de médias sociaux

Les appels vocaux sur le service de messagerie WhatsApp (2 milliards d’utilisateurs au niveau mondial, appartenant au groupe Facebook) ont doublé en volume. L’application Messenger de Facebook (1.3 milliards d’utilisateurs au niveau mondial) a connu une croissance similaire. Les analystes sont optimistes quant aux perspectives de Facebook, car de nombreuses personnes s’y tournent pour obtenir des nouvelles en temps de crise et pour se distraire lorsqu’elles travaillent à la maison (Facebook News, tout comme LinkedIn Newsroom avec notamment un feed spécifique sur le coronavirus).

Les téléchargements de l’application Netflix (167 millions d’utilisateurs au niveau mondial) ont augmenté de 66 % en Italie, de 35% en Espagne et de 9% aux USA où Netflix a été fondé et était déjà largement populaire (Netflix et YouTube ont même réduit leur qualité pour ne pas bloquer le réseau). Aujourd’hui, alors que les salles de cinéma ferment sur ordre du gouvernement, Netflix et YouTube gagnent un nouveau public.

L’utilisation des jeux vidéo et de la diffusion en direct a aussi connu une forte hausse: le week-end du 14 mars a vu une augmentation significative du nombre de spectateurs de la diffusion en direct par rapport au week-end précédent, avec une hausse de 10 % pour Twitch et de 15 % pour YouTube Gaming. Verizon a constaté que les jeux en ligne ont augmenté de 75 % aux heures de pointe en Amérique du Nord, tandis que la diffusion en continu a augmenté de 12 %.

  • Augmentation de l’utilisation des applications

Même Apple, une entreprise qui compte des centaines de magasins fermés dans le monde, semble de plus en plus vouloir sortir de la pandémie en bonne santé. De nombreuses usines d’Apple sont presque revenues à la normale. Les gens consacrent plus de temps et d’argent à ses services numériques. Apple a même annoncé le lancement d’une gamme de nouveaux gadgets.

L’augmentation du temps et de l’argent consacrés aux téléphones est également une bonne nouvelle pour Apple et Google, car ils réduisent la plupart des ventes et des achats d’applications. En deux semaines aux USA, les recettes de l’App Store d’Apple et d’Android ont augmenté de 14 à 20%.

  • Les plus grandes entreprises technologiques pourraient en sortir beaucoup plus fortes

Cela ne veut pas dire que les grandes entreprises technologiques ne doivent pas s’inquiéter. La publicité, le moteur de Google et de Facebook, a tendance à souffrir en période de ralentissement économique. Les actions d’Apple, de Microsoft, d’Amazon, de Facebook et de la société mère de Google, Alphabet, ont perdu collectivement plus d’un trillion de dollars en valeur marchande au cours des dernières semaines. Et Microsoft, Twitter et Apple ont réduit leurs prévisions financières à court terme en raison du ralentissement des dépenses de consommation.

Au-delà des cinq grands protagonistes, les choses ont été plus difficiles. Les outils de communication comme Zoom sont désormais essentiels, mais les entreprises de location de voitures comme Uber and Lyft et les sites de location de propriétés comme Airbnb voient leurs clients disparaître. L’industrie technologique mondiale, qui pèse 3’900 milliards de dollars, en souffrira cette année, mais on à quel point? Difficile de le prédire.

En résumé, lorsque l’économie finira par s’améliorer, les grandes technologies pourraient bénéficier de l’évolution des habitudes de consommation. Et malgré des mois de critiques de la part des législateurs, des régulateurs et des concurrents avant que la pandémie ne frappe durablement les USA et le reste du monde, les plus grandes entreprises finiront probablement l’année plus fortes que jamais.

(source AngelList)