Svizzera-Italia : una storia importante

Lundi 28, mardi 29 et mercredi 30 novembre, le Président italien Sergio Mattarella et sa fille ont été reçus avec les plus grands honneurs de la Confédération lors d’une visite d’Etat de trois jours. L’occasion de souligner les étroites relations, les nombreuses valeurs et une langue commune entre la Suisse et l’Italie. Récit de ces trois journées exceptionnelles.

Sergio Mattarella et sa fille ont passé trois jours entre le 28 et le 30 novembre dernier dans notre pays. Ils ont été accueillis officiellement au Palais fédéral par l’ensemble du Conseil fédéral puisqu’il s’agissait d’une visite d’Etat. Cela a impliqué comme le veut la tradition les hymnes nationaux des deux pays, les honneurs militaires et des discours. Cette visite avait pour but de renforcer les excellentes relations bilatérales entre Berne et Rome. Ce choix d’inviter un président italien est compréhensible de la part d’Ignazio Cassis, car ce dernier est un représentant de la minorité italophone en Suisse.

Un programme chargé sur trois jours

Sergio Mattarella avait un programme chargé. Lundi soir, il a rendu visite à la communauté italienne en Suisse. Comme l’indique le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) sur son site internet, “quelque 320’000 ressortissants italiens vivent en Suisse (sans compter les doubles nationaux), formant la plus grande communauté étrangère du pays”. Le lendemain, il a visité le Musée Paul Klee et la Collégiale de Berne. Le soir a eu lieu le traditionnel banquet d’Etat avec de nombreux invités suisses et italiens. Lors de la troisième et dernière journée de la visite d’Etat, les Présidents Cassis et Mattarella se sont rendus à Zurich. Ils ont visité l’EPFZ, une des universités techniques les plus réputées au monde et qui compte aussi beaucoup de chercheurs italiens. Une occasion pour les deux chefs d’Etat de montrer l’importance de la collaboration scientifique entre la Suisse et l’Italie, mais aussi entre la Suisse et l’UE. D’ailleurs, le dossier européen traité par le Conseil fédéral m’inquiète, car il n’y a toujours pas de solution ni d’accord pour aller de l’avant. On verra bien si en 2023 Alain Berset se décide à enfin conclure un accord pour apaiser les relations entre Berne et Bruxelles.

Une première rencontre avec son homologue italien

Ignazio Cassis a pu rencontrer dans la journée de mardi son homologue italien Sergio Mattarella. Lors de leur discussion, les deux hommes d’Etat ont évoqué de nombreux sujets bilatéraux d’intérêts communs comme la guerre en Ukraine, l’approvisionnement énergétique en Europe ou encore la politique européenne de la Suisse.  A ma connaissance ils ne s’étaient jamais rencontrés auparavant. Les deux présidents ont évidemment communiqué qu’en italien. Je regrette toutefois que le président italien n’ait pas décidé de s’arrêter quelques heures au Tessin, seul canton italophone de Suisse. Il aurait pu faire la promotion de la langue italienne et son importance dans les deux pays. La dernière visite d’Etat en Suisse d’un président italien remonte à 2014. Giorgio Napolitano avait cette année-là été reçu à Berne par l’ancien Président Didier Burkhalter. Et il s’était rendu dans le Canton du Tessin contrairement à son successeur.

Les relations helvetico-italienne en chiffres

La Suisse et l’Italie entretiennent de solides relations. Sur le plan des échanges commerciaux, “l’Italie est le troisième partenaire commercial de la Suisse”, comme l’indique le DFAE. L’an passé, notre pays a exporté pour une valeur d’environ 15,5 milliards de francs. Et les importations depuis l’Italie s’élevaient à environ 19 milliards de francs.

Tapis rouge pour Ignazio Cassis en Belgique

Jeudi 24 et vendredi 25 novembre, Ignazio Cassis et son épouse ont été reçus avec les plus grands honneurs du royaume belge lors d’une visite d’Etat de deux jours. L’occasion de souligner les étroites relations et les nombreuses valeurs communes entre la Suisse et la Belgique. Récit de ces deux journées exceptionnelles.

Ignazio Cassis et son épouse viennent de passer deux jours en Belgique. Ils ont été accueillis officiellement au Palais royal de Bruxelles par le Roi Philippe ainsi que la Reine Mathilde, respectivement roi et reine des Belges, à l’occasion d’une visite d’Etat historique. Elle avait pour but de mettre à l’honneur et de renforcer les excellentes relations bilatérales entre Berne et Bruxelles. Les Souverains et le couple présidentiel ont visité le Musée des Instruments de Musique et ont assisté à un concert. Le soir, le Roi Philippe a porté un toast aux relations entre son royaume et la Suisse lors du banquet d’Etat au Château de Laeken (lieu de résidence du souverain belge). La dernière visite officielle en Suisse du Roi Philippe remonte à 2017. Il avait cette année-là été reçu à Berne par l’ancienne Présidente Doris Leuthard.

Une deuxième rencontre avec Alexander De Croo

Ignazio Cassis a également pu rencontrer dans la journée de jeudi le Premier ministre belge Alexander De Croo. Lors de leur discussion, les deux hommes d’Etat ont évoqué de nombreux sujets bilatéraux d’intérêts communs comme la guerre en Ukraine, l’approvisionnement énergétique en Europe ou encore la politique européenne de la Suisse. Ils s’étaient déjà rencontrés au mois de mars à Sierre à l’occasion de la douloureuse commémoration de l’accident de Sierre. En 2012, 28 personnes dont 22 enfants de Lommel et Heverlee perdaient la vie dans un accident de car dans un tunnel.

Un programme chargé sur deux jours

Lors de la deuxième journée de la visite d’Etat, le Président Ignazio Cassis s’est rendu à Liège en Wallonie, région francophone du pays. Il s’est ensuite rendu en Flandre. Il a aussi fait une halte à la Health House, un centre technologique sur la santé. La visite s’est terminée vendredi soir avec un concert de jazz au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles. Les Souverains étaient bien sûr présents et c’était une occasion pour eux de clore la visite d’Etat et surtout de remercier le couple présidentiel suisse.

Les relations helvetico-belges en chiffres

La Suisse et la Belgique entretiennent de solides relations. Quelque 15’000 ressortissants belges vivent en Suisse et 8500 Suisses résident en Belgique. Les échanges de marchandises ont atteint 7,8 milliards de francs l’année passée, ce qui place le royaume belge au 13e rang des partenaires commerciaux de la Suisse. La prochaine fois, ce sera au tour du Conseil fédéral de recevoir les deux Souverains en Suisse pour une visite d’Etat. Peut-être en 2024.

Ignazio Cassis et Emmanuel Macron veulent tourner la page

Le Président de la Confédération Ignazio Cassis était vendredi à Paris pour y rencontrer son homologue Emmanuel Macron. Cette visite est la première depuis quatre ans, signe peut-être d’un réchauffement des relations diplomatiques entre Berne et Paris. Le dernier président suisse à avoir été reçu pour une visite officielle par un président français est Alain Berset. Durant l’entretien, les deux chefs d’Etat ont évoqué plusieurs sujets, dont les relations entre la Suisse et l’Union européenne. Pour couronner le tout, Ignazio Cassis a invité Emmanuel Macron à effectuer une visite en Suisse l’an prochain.

«Le moment était venu de revitaliser nos relations». C’est la déclaration d’Ignazio Cassis durant un point presse à l’ambassade de Suisse à Paris. Il avait rencontré quelques minutes avant le Président français Emmanuel Macron. L’entretien a duré environ une demi-heure en marge du Forum de Paris sur la paix auquel il a participé. Plusieurs sujets bilatéraux ont pu être évoqués comme les questions énergétiques, la fiscalité des frontaliers français en télétravail ou encore la participation de la Suisse à la Communauté politique européenne. Cet entretien tombe à pic, car il n’y avait plus eu d’entretien entre un président suisse et un président français depuis quatre ans. Et quatre années où deux pays voisins ne se parlent pas ou plus menace la coopération pourtant étroite entre Berne et Paris.

Une relation franco-suisse indispensable

Emmanuel Macron avait reporté il y a environ un an une rencontre au Palais de l’Elysée avec Guy Parmelin, officiellement pour des raisons d’agenda. Il est de coutume que tous les six mois, le président de la Confédération se rende dans un pays membre qui va prendre la présidence tournante du Conseil de l’UE. Pour le premier semestre de 2023, c’est la Suède qui présidera, donc Ignazio Cassis devrait très probablement se rendre à Stockholm ce mois-ci ou en décembre. Cette annulation était intervenue après deux événements importants et fort regrettables de la part du Conseil fédéral : de un le choix de la Suisse d’acheter des FA-35 américains et non des Rafale français. Et de deux d’arrêter unilatéralement les discussions sur l’accord-cadre avec l’UE. L’invitation d’Emmanuel Macron à Ignazio Cassis de participer au Forum de Paris sur la paix peut être traduit comme une volonté d’aller de l’avant et de mieux travailler ensemble sur une pléthore de sujets d’intérêts communs. Il est clair que la Suisse a besoin de la France, mais la France a aussi besoin de la Suisse. Rien qu’au niveau de la coopération économique, la Suisse était en 2018 le 2e investisseur en France avec une valeur totale de 82,3 milliards. A l’inverse, la France figurait au 4e rang des investisseurs étrangers en Suisse avec 48,7 milliards. Ce sont les chiffres du DFAE. La Suisse et la France sont plus que des voisins !

Emmanuel Macron en Suisse l’an prochain 

Ignazio Casiss Cassis a profité de l’occasion pour inviter Emmanuel Macron à se rendre en visite (officielle ou d’Etat, pas précisé) en Suisse. «Il a dit être très intéressé, mais rien n’est encore décidé», a précisé le président suisse. La dernière visite d’un président français en suisse remonte à 2015. Cette année-là, François Hollande avait effectué une visite d’Etat sur invitation de Simonetta Sommaruga. Est-ce qu’il viendra? Et si oui, est-ce que ce sera dans le cadre d’une visite officielle ou une visite d’Etat? Réponse au printemps 2023.

Brésil : une élection présidentielle sous haute tension

Au début de ce mois, le Brésil et ses 215 millions d’habitants ont célébré dans la joie et la bonne humeur les 200 ans d’indépendance de leur pays. Ancienne colonie portugaise, plus grand pays d’Amérique latine et puissance économique membre du G20, le Brésil est encore une jeune et grande démocratie d’à peine 37 ans. Lors de cette célébration, l’actuel chef de l’Etat Jair Bolsonaro a clairement fait de la récupération politique en mettant en avant sa candidature pour un deuxième mandat de quatre ans. Une fête nationale doit être un moment de rassemblement, pas pour faire campagne dans le pays. Cela aurait dû être plutôt une fête solennelle ou institutionnelle, mais Jair Bolsonaro a préféré chauffer à blanc ses supporters, avec notamment les plus religieux, une partie de l’agrobusiness et une partie des forces armées.

La tentative de rester au pouvoir par tous les moyens

Jair Bolsonaro suit exactement le même parcours que l’ancien Président américain Donald Trump. C’est son modèle pour ainsi dire. De la même façon que Donald Trump a contesté le système électoral américain lors des dernières élections en 2020, Jair Bolsonaro clame depuis des mois que les urnes électroniques ne sont absolument pas fiables, alors qu’elles n’ont jamais posé de problèmes pour la démocratie électorale ces dernières années. Il conteste déjà l’utilisation de ces urnes électroniques. Ses supporters et lui-même attaquent sans arrêt le Tribunal suprême fédéral et la Cour électorale supérieure en mettant en cause leur partialité. Du coup, plusieurs observateurs craignent le lendemain des résultats des élections en cas de non-réélection de Bolsonaro.  Parmi ceux-ci, Fiorenzo Iori qui est un fin connaisseur du Brésil et de ses institutions politiques. Va-t-on vers un assaut violent des bâtiments institutionnels de la part des supporters les plus extrêmes de Bolsonaro ? Impossible de dire à l’heure actuelle, mais selon Fiorenzo Iori, cette piste-là n’est pas à écarter. Il pourrait selon lui se dérouler un coup d’Etat si Jair Bolsonaro n’était pas réélu et s’il ne reconnaissait pas sa défaite. Actuellement, les sondages laissent présager une victoire importante, difficilement au premier tour, mais plus facilement au deuxième tour de son adversaire de centre-gauche Luiz Inácio Lula da Silva.

Des manifestants pro Donald Trump attaquent le Capitole à Washington en 2021. Image : JOSE LUIS MAGANA / AP

Les soutiens indéfectibles de Bolsonaro

Les fidèles de Bolsonaro sont par exemple les votes religieux. Les évangélistes au Brésil représentent tout de même 25% de l’électorat brésilien. Il y a aussi les membres du secteur agricole et industriel, soit l’agrobusiness. Non pas de façon hégémonique, mais la plupart des personnes appartenant à l’agrobusiness soutiennent évidemment Jair Bolsonaro. Le 2 octobre prochain va donc être un dimanche électoral sous haute tension. On craint beaucoup ce que pourraient faire les forces armées le lendemain des résultats des élections. Vont-elles respecter la constitution comme le souhaitent certains officiels ou généraux ou vont-elles se plier aux exigences de leur président qui souhaiterait par ailleurs un coup d’Etat ? Les Etats-Unis, l’Union européenne et la Suisse ont déjà promis des sanctions si ce scénario prenait forme.

Les relations entre la Suisse et le Brésil

D’après le Département fédéral des affaires étrangères dirigé par Ignazio Cassis, « le Brésil est le premier partenaire commercial de la Suisse en Amérique latine ». Il y a 2 ans, notre pays a importé pour environ 1,4 milliard de francs de biens qui venaient du Brésil et a exporté dans ce même pays des biens d’une valeur de 2,1 milliards de francs. Berne et Brasilia ont noué des premiers contacts au début du XIXe siècle. A cette époque, plusieurs commerçants suisses ont vu en ce grand pays un débouché économique à ne pas rater. Toujours selon le DFAE, « en 1819, le premier consulat suisse outre-mer a ouvert à Rio de Janeiro. À partir de la fondation de la ville Nova Friburgo (1818) jusqu’au milieu du XXe siècle, le Brésil a été une destination privilégiée par de nombreux émigrants suisses ». La dernière rencontre entre un président suisse et un président brésilien remonte à 2019. Cette année-là, Ueli Maurer s’était entretenu avec Jair Bolsonaro en marge du Forum économique mondial.

Le Président de la République fédérative du Brésil, Jair Bolsonaro, lors d’une rencontre bilatérale avec le Président de la Confédération suisse, Ueli Maurer. Image : Alan Santos/RP

Finlande : la Première ministre Sanna Marin au coeur d’une polémique “bête”

Imaginez un des sept membres du Conseil fédéral dansant joyeusement lors d’une fête alcoolisée. Si cela arrivait sous nos latitudes, on n’aurait pas fini d’en parler. C’est pourtant ce qui est arrivé à Sanna Marin, la jeune Première ministre de Finlande. Cette histoire continue à susciter la polémique dans ce pays nordique d’habitude calme. La vidéo de la politicienne a été diffusée contre son gré, et celle-ci a été obligée de s’exprimer en public. Une dirigeante ou un dirigeant politique d’un pays est-il un personnage comme les autres ? Si oui, a-t-elle ou a-t-il le droit de s’amuser ?

Une première ministre finlandaise qui fait la fête, qui danse, qui se déhanche et surtout qui profite lors d’une soirée entre amis. Jusqu’à là, rien à dire. Cela fait partie de la vie courante chez de nombreux citoyens durant les week-ends. La vidéo où l’on voit Sanna Marin, la Première ministre finlandaise, en pleine fête, continue à enflammer les réseaux sociaux. On parle de cette affaire même en Inde ou aux Etats-Unis.

Sanna Marin sommée de s’expliquer

Le petit problème se situe dans l’extrait vidéo, car certains Finlandais auraient entendu le mot « farine », l’associant directement à de la drogue. Comme toujours, la polémique a pris de telles proportions que Sanna Marin a été contrainte de s’expliquer sur cette soirée. « A ma connaissance, il n’y avait pas de drogue, je n’en n’ai pas vu. Ce week-end-là, nous n’avions pas de réunion gouvernementale. J’avais du temps libre et je l’ai passé avec des amis. Je n’ai rien fait d’illégal. » a expliqué Sanna Marin lors d’un point presse. A la demande de l’opposition d’extrême-droite, la Première ministre sociale-démocrate de 36 ans va se soumettre à un test de dépistage de drogue. Les résultats seront publiés dans le courant de la semaine prochaine.

Un personnage d’Etat est je crois une personne presque comme tout le monde. Il se lève le matin, il part travailler, il dirige une administration ou un pays. Certes, un dirigeant se doit d’être exemplaire, sérieux, attelé à son travail de booster l’économie ou de défendre son pays contre toute menace extérieure. Mais un dirigeant politique a aussi le droit de s’amuser, de se relâcher un peu face à la pression quotidienne. Après tout, elle n’a rien fait de mal. Je me demande aussi si les critiques auraient été les mêmes si cela avait concerné un premier ministre. Probablement et malheureusement non. Je remettrais bien la palme de l’indignité à la personne qui a filmé cela et diffusé sur les réseaux sociaux pour faire du buzz.

Cher Conseil fédéral, ressaisissez-vous ou démissionnez!

Ce mois de juillet n’a pas été de tout repos pour Ueli Maurer, Alain Berset, Ignazio Cassis et Viola Amherd. Grâce à des informations qui ont fuitées dans la presse, on a appris qu’on avait un Conseil fédéral désuni, qui avance en ordre dispersé, où tous les coups sont permis et qui traverse une mauvaise passe. Dans une année et trois mois, le peuple suisse renouvellera sa classe politique. Il est temps que le Conseil fédéral se ressaisisse ou tout simplement démissionne en bloc.

Il y a quelques semaines, Roger Nordmann, Président du Groupe socialiste au Parlement fédéral, expliquait dans “Le Matin Dimanche” qu’actuellement “le Conseil fédéral traverse une mauvaise passe”. Bien que les sept ministres soient actuellement en vacances et s’apprêtent dès aujourd’hui à sillonner la Suisse pour délivrer des discours à l’occasion de la fête nationale de notre pays, le constat est clair : le Conseil fédéral tel qu’il est composé de nos jours ne fonctionne plus ou pas correctement. Cela est très grave et peut sérieusement nuire au bon fonctionnement du pays. Bref rappel des “scandales”.

Ueli Maurer fait son shopping

Début juillet, Ueli Maurer est testé positif au Covid-19. Son porte-parole a donc indiqué que ses voyages prévus à Bali pour la réunion ministérielle du G20 et en Inde étaient bien sûr annulés. Lorsqu’on est testé positif, impossible de prendre l’avion. Mais quelques jours plus tard, quelque chose a surgi sur Facebook. Une photo d’Ueli Maurer le même jour que le sommet du G20, dans un magasin de chemises et sans masque. Étrange coïncidence ? On sait qu’Ueli Maurer n’est pas le plus grand défenseur des mesures sanitaires liées au Covid-19 et c’est son choix. Mais de là à esquiver deux voyages à l’étranger et préférer faire du shopping interpelle. Un départ volontaire du Conseiller fédéral en 2023 n’est pas à exclure.

Alain Berset et ses multiples gaffes

Peter Lauener, collaborateur et bras droit d’Alain Berset, a dû démissionner à cause de fuites dans l’affaire Crypto AG. Il y a aussi eu l’affaire du chantage avec cette mystérieuse femme qui a tenté de faire chanter le Conseiller fédéral. S’agissait-il d’une maîtresse ? Impossible de le confirmer, mais son image de mari modèle se retrouve écorné. Et dernièrement, Alain Berset a été contrôle par la sécurité aérienne française lors d’un vol privé entre le Canton de Fribourg et la France. L’affaire est quand même remontée jusqu’au Président français Emmanuel Macron. Une tâche de plus dans des relations diplomatiques Suisse–France déjà compliquées. Si Alain Berset veut espérer rester encore quelques années au Conseil fédéral, il devra d’abord régler ses affaires personnelles et ensuite se concentrer sur les dossiers qui préoccupent vraiment les Suisses. Il pourrait y avoir des candidats chez les Verts prêts à remettre en cause le deuxième siège socialiste au Conseil fédéral.

Ignazio Cassis : un président là, mais pas vraiment là

L’affaire Crypto AG ne concerne pas seulement le département d’Alain Berset, mais également celui du président cette année Ignazio Cassis. Markus Seiler, le Secrétaire général du magistrat tessinois est aussi visé dans cette affaire. On apprend également la démission de 28 collaborateurs des RH au DFAE depuis janvier. De quoi s’inquiéter. Au-delà de ça, Ignazio Cassis est président cette année. C’est-à-dire qu’il est amené à voyager un peu partout dans le monde pour rencontrer d’autres chefs d’Etat. Hormis quelques voyages en Europe, il ne s’est rendu que deux fois hors du continent européen. En février pour un voyage au Niger et en avril pour un déplacement au Japon. A l’inverse, le seul chef d’Etat hors sol européen reçu à Berne était le président kenyan en mai dernier. Il ne s’est même pas rendu aux obsèques de Khalifa ben Zayed Al Nahyane, le Président des Emirats arabes unis, lors de son décès au mois de mai. Quelle pauvre diplomatie ! On est en droit de se demander si Ignazio Cassis prête importance aux relations avec les autres Etats du monde. Si Ignazio Cassis veut rester au Conseil fédéral après 2023, il devra montrer une autre diplomatie, plus active et surtout débloquer le dossier européen.

Viola Amherd et ses avions F-35

Le dossier des avions de combat américains F-35 risque de connaître la même fin tragique que les suédois Gripen. On sait que le PS et les Verts sont fermement opposés à tout type d’achat d’avions, même s’ils oublient un peu vite que le peuple suisse a donné son accord sur l’achat d’avions de combat et pas la marque. Cependant, les critiques viennent également de la droite qui dénoncent la mauvaise manière de gérer le dossier. Si Viola Amherd veut rester au Conseil fédéral en 2023, elle devra prouver à la population le bien-fondé d’acheter américain et surtout surveiller ses arrières. Il pourrait y avoir des candidats au Centre prêts à se profiler pour gagner l’unique siège centriste au gouvernement.

Vous l’aurez compris, rien ne va plus au gouvernement fédéral. Quatre ministres sont empêtrés dans des dossiers qui pourraient leur coûter leur siège au Conseil fédéral. Et d’après un sondage apparu aujourd’hui dans la presse dominicale, 64% des Suisses interrogés estiment que les ministres fédéraux ne travaillent pas bien ensemble. «On essaie de se nuire mutuellement par des indiscrétions ciblées», précise le politologue Michael Hermann, qui souligne que cet esprit de compétition rappelle les souvenirs de luttes de pouvoir passées. Trop c’est trop. Ce gouvernement doit se ressaisir ou démissionner. Le Parlement fédéral a voté pour des candidats qui ont promis de travailler les uns avec les autres pour le bien du pays, pas pour des candidats qui travaillent les uns contre les autres !

Les femmes au pouvoir dans le monde en 2022

Elisabeth Borne est devenue en début de semaine la deuxième femme à entrer à l’Hôtel de Matignon (résidence du premier ministre français) après Edith Cresson, dans les années 90 sous la présidence de François Mitterand.

Le Président français Emmanuel Macron a nommé lundi dernier Elisabeth Borne au poste de Premier ministre, ou plutôt devrais-je dire Première ministre, suite à la démission de Jean Castex. Cette fidèle de l’idéologie Macron a occupé jusqu’à maintenant le ministère des transports (2017-2019), le ministère de la transition écologique et solidaire (2019-2020) et enfin le ministère du travail, de l’emploi et de l’insertion (2020-2022). La Cinquième République compte enfin sa deuxième première ministre de l’histoire. Entre 1991 et 1992, Edith Cresson avait occupé cette fonction pendant le second septennat de François Mitterand. Une première dans l’histoire politique française. Il y a un progrès constaté autour du globe, même si je soutiens une accession encore plus importante des femmes à de tels postes. Tour d’horizon des femmes qui sont actuellement cheffes de Gouvernement ou cheffes d’Etat (y compris les monarques et les vices) sur les continents de ce monde, du Pacifique à l’Atlantique. La palme d’or revient aux pays de l’Amérique, nord et sud confondu, avec un total de 14 femmes. La répartition se fait entre des présidentes, des vice-présidentes, des premières ministres et des gouverneures générales.

Océanie : 2 pays

Nouvelle-Zélande : Jacinda Ardern, Première ministre

Samoa : Naomi Mata’afa, Première ministre

Jacinda Ardern, Première ministre de la Nouvelle-Zélande depuis 2017.

Asie : 8 pays

Azerbaïdjan : Mehriban Aliyeva, Vice-Présidente

Bangladesh : Sheikh Hasina, Première ministre

Géorgie : Salomé Zourabichvili, Présidente

Népal : Bidya Devi Bhandari, Présidente

Philippines : Leni Robredo, Vice-Présidente

Singapour : Halimah Yacob, Présidente

Taïwan : Tsai Ing-wen, Présidente

Vietnam : Vo Thi Anh Xuân Vice-Présidente

Halimah Yacob, Présidente de Singapour depuis 2017.

Europe : 12 pays + UE

Danemark : Margrethe II, Reine / Mette Frederiksen, Première ministre

Estonie : Kaja Kallas, Première ministre

Finlande : Sanna Marin, Première ministre

France : Elisabeth Borne, Première ministre

Grèce : Ekateríni Sakellaropoúlou, Présidente

Hongrie : Katalin Novák, Présidente

Islande : Katrín Jakobsdóttir, Première ministre

Lituanie : Ingrida Šimonytė, Première ministre

Moldavie : Maia Sandu, Présidente / Natalia Gavrilița, Première ministre

Royaume-Uni : Elisabeth II, Reine

Slovaquie : Zuzana Čaputová, Présidente

Suède : Magdalena Andersson, Première ministre

Union européenne : Ursula von der Leyen, Présidente (Commission européenne)

Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne depuis 2019.

Afrique : 11 pays

Bénin : Mariam Chabi Talata, Vice-Présidente

Ethiopie : Sahle-Work Zewde, Présidente

Gabon : Rose Christiane Ossouka Raponda, Première ministre

Gambie : Isatou Touray, Vice-Présidente

Liberia : Jewel Taylor, Vice-Présidente

Namibie : Saara Kuugongelwa-Amadhila, Première ministre

Ouganda : Jessica Alupo, Vice-Présidente

Tanzanie : Samia Suluhu, Présidente

Togo : Victoire Tomegah Dogbé, Première ministre

Tunisie : Najla Bouden, Première ministre

Zambie : Mutale Nalumango, Vice-Présidente

Sahle-Work Zewde, Présidente de l’Ethiopie depuis 2018.

Amériques : 14 pays

Argentine : Cristina Fernández de Kirchner, Vice-Présidente

Barbade : Sandra Mason, Présidente / Mia Mottley, Première ministre

Belize : Froyla Tzalam, Gouverneure générale (= représentante de la Reine Elisabeth II)

Canada : Mary Simon, Gouverneure générale (= représentante de la Reine Elisabeth II)

Colombie : Marta Lucía Ramírez, Vice-Présidente

République dominicaine : Raquel Peña, Vice-Présidente

Etats-Unis : Kamala Harris, Vice-Présidente

Grenade : Cécile La Grenade, Gouverneure générale (= représentante de la Reine Elisabeth II)

Honduras : Xiomara Castro, Présidente

Nicaragua : Rosario Murillo, Vice-Présidente

Saint-Vincent-et-les-Grenadines : Susan Dougan,Gouverneure générale (= représentante de la Reine Elisabeth II)

Trinité-et-Tobago : Paula-Mae Weekes, Présidente

Uruguay : Beatriz Argimón, Vice-Présidente

Venezuela : Delcy Rodríguez, Vice-Présidente

Kamala Harris, Vice-Présidente des Etats-Unis depuis 2021.

Le Président des EAU Khalifa Ben Zayed Al Nahyane est mort

Absent de la scène internationale depuis un AVC en 2014, Khalifa Ben Zayed Al Nahyane a été remplacé par son demi-frère, le Prince héritier d’Abou Dhabi, Mohammed Ben Zayed Al Nahyane. Déjà aux commandes du pays, il a été élu président hier.

Feu Khalifa Ben Zayed Al Nahyane avait accompagné ces deux dernières décennies le développement fulgurant de son pays sur la scène régionale et internationale. Le Président des Emirats arabes unis est mort à l’âge de 73 ans, ont annoncé vendredi 13 mai les autorités de cette riche monarchie du Golfe. Le gouvernement a pour l’occasion décrété « un deuil officiel et les drapeaux mis en berne » pour une durée de quarante jours, selon l’agence de presse officielle WAM. Le portrait du président défunt a immédiatement été affiché partout dans les rues du pays. Rarement vu en public depuis l’AVC dont il a été victime en 2014, Khalifa Ben Zayed Al Nahyane a été remplacé rapidement par son demi-frère, le Prince héritier d’Abou Dhabi, Mohammed Ben Zayed Al Nahyane, dit « MBZ », déjà considéré comme le dirigeant de facto de ce pays. Le dernier grand voyage de Khalifa Ben Zayed Al Nahyane remonte à 2013, c’était à l’occasion d’une visite d’Etat au Royaume-Uni. Les Émirats arabes unis ont été pendant longtemps un protectorat britannique.

Le Président des Émirats arabes unis Khalifa Ben Zayed Al Nahyane en 2004.

Un pays ami et allié de l’Occident

Plusieurs dirigeants internationaux ont salué publiquement sur Twitter la mémoire de Khalifa Ben Zayed Al Nahyane. Le Président indien Ram Nath Kovind, le Roi saoudien Salmane Ben Abdelaziz Al Saoud, le Président israélien Isaac Herzog, le Président russe Vladimir Poutine, le Président français Emmanuel Macron, le Premier ministre britannique Boris Johnson ou encore le Président américain Joe Biden. Côté suisse, aucun tweet d’Ignazio Cassis. Ce qui est à mes yeux assez regrettable, car les Émirats arabes unis sont notre premier partenaire commercial au Moyen-Orient. Seul le compte Twitter de l’Ambassade de Suisse aux Émirats arabes unis a communiqué pour présenter les condoléances et indiquer que les drapeaux sur la Place fédérale à Berne ont été mis en berne. Contrairement à plusieurs chefs d’Etat européens, Ignazio Cassis n’a même pas pris la peine de se déplacer en personne à Abou Dhabi pour commémorer l’ancien président et rencontrer le nouveau. Je considère cela comme une faute diplomatique. Un partenaire économique de cette importance-là mérite un excellent traitement.

Puissance régionale et économique

Né en 1948, Khalifa Ben Zayed Al Nahyane a succédé en 2004 à son père, Zayed Ben Sultan Al Nahyane, président et père fondateur des Emirats arabes unis. Ce riche Etat du Golfe regroupe sept émirats au total, mais les deux plus importants sont Abou Dhabi, la capitale, et Dubaï. Les Emirats ont connu un rapide essor économique ces vingt dernières années. Il y a évidemment les richesses pétrolières à Abou Dhabi, mais aussi la finance et le tourisme à Dubaï. Cette ville est d’ailleurs appréciée des touristes suisses. Les Émirats arabes unis sont aussi un carrefour du transport aérien. Les Européens qui se rendent en Asie du Sud-Est ou en Océanie passent souvent par Dubaï. C’est sous l’impulsion du Prince héritier Mohammed Ben Zayed Al Nahyane que le pays est sorti de sa discrétion. Il a gagné une influence grandissante au Moyen-Orient. A ma connaissance, les autorités de cet Etat du Golfe n’ont jamais été invités à effectuer une visite officielle ou d’Etat à Berne. A l’inverse des autorités suisses qui ont souvent été reçues à Abou Dhabi ou à Dubaï.

 

Sergio, grazie!

Les Parlementaires italiens se réunissent demain pour désigner le nouveau président. Sergio Mattarella s’apprête à quitter le Palais du Quirinal. Mais son départ provoque beaucoup d’inquiétudes en Italie et en Europe. Les candidats qui pourraient lui succéder sont pour le moment Paolo Gentiloni ou l’actuel Président du Conseil des ministre Mario Draghi.

L’Italie s’apprête à plonger dans l’incertitude politique. En effet, les députés italiens se réunissent demain pour procéder à l’élection du nouveau président de la République. La fin du septennat de l’actuel Président Sergio Mattarella touche presque à sa fin. Le chef de l’Etat de 80 ans n’a malheureusement pas souhaité rempiler pour un deuxième mandat. Sa succession a entrainé un grand round de négociations entre les différents partis politiques. A la différence d’une élection présidentielle en France, ce sont les Parlementaires de la Chambre des députés (chambre basse) et du Sénat (chambre haute) qui élisent le président pour un mandat de sept ans. En Italie, le rôle du président est essentiellement honorifique. Il n’intervient pas dans les débats politiques. Il a plutôt un rôle d’assurer l’union nationale, par exemple lors de crises gouvernementales ou de tensions entre le Nord et le Sud du pays.

Un homme à la hauteur de la fonction

Sergio Mattarella est une figure politique respectée dans le pays. Il a été député (1983-2008), Ministre de la Défense (1999-2001), Vice-Président du Conseil des ministres (1998-1999), Juge à la Cour constitutionnelle, car jeune il a étudié le droit (2011-2015) et enfin Président dès 2015. En 1980, il fait face à un drame terrible avec la mort de son frère, tué par la mafia. C’est le premier Sicilien à entrer au Palais du Quirinal. Je loue l’ancien juge constitutionnel, car il a su faire face à différentes crises politiques pendant son mandat. Comme en 2018 face à la coalition gouvernementale entre le Mouvement 5 Etoiles (parti populiste de gauche) et la Lega (parti d’extrême-droite). Il a su se poser en garant du respect de la démocratie et de l’Etat de droit. Un comble pour un pays fondateur de l’Europe.

Matteo Salvini de la Lega (à gauche) prête serment devant le Président de la République Sergio Mattarella et le Président du Conseil des ministres Giuseppe Conte à la cérémonie d’investiture du gouvernement italien, le 1er juin 2018, à Rome. Photo : Francesco Ammendola, AFP.

Qui pour lui succéder?

Parmi les candidats les plus cités dans la presse italienne, on retrouve Paolo Gentiloni et Silvio Berlusconi (deux anciens chefs de gouvernement). Mais celui-ci a annoncé hier qu’il renonçait à briguer la présidence italienne. Je verrais bien Paolo Gentiloni à la tête de l’Italie, car c’est un homme qui croit au destin européen. Un autre nom qui circule est l’actuel Président du Conseil des ministres Mario Draghi.

Vers un séisme politique?

J’ai l’intime conviction que Mario Draghi a toutes les qualités requises d’un homme d’Etat. Son engagement pro-européen n’est plus à démontrer, car il a sauvé l’euro lors de la crise financière à la fin des années 2000. Son gouvernement d’union nationale permet à l’Italie de profiter des nombreux fonds du plan de relance européen alors que le pays avait été l’un des États membres de l’Union européenne les plus touchés au début de l’épidémie de Covid-19. Avec le départ possible de Mario Draghi du Palais Chigi, je crains le pire. Les Italiens seront une nouvelle fois appelés aux urnes et l’Italie connaîtra probablement une longue zone de turbulence.

L’actuel Président du Conseil des ministres Mario Draghi (à droite) figure parmi les favoris pour succéder à Sergio Mattarella (à gauche) à la présidence italienne. Photo : AFP.

Et les relations avec le voisin suisse?

Comme l’indique le Département fédéral des affaires étrangères sur son site, les relations diplomatiques entre Berne et Rome excellentes. Cependant, je regrette que Sergio Mattarella ne se soit jamais rendu dans notre pays pour une visite officielle ou d’Etat. L’Italie est quand même notre troisième partenaire commercial. En sept ans de pouvoir, Sergio Mattarella n’aura rencontré que Simonetta Sommaruga lors de la visite de celle-ci à Rome en 2020. J’espère sincèrement que notre Président Ignazio Cassis recevra un officiel italien cette année à Berne.

Liban : une tragédie de plus pour un pays déjà à terre

Les deux explosions au port de Beyrouth qui ont détruit plusieurs quartiers de la capitale libanaise ont fait au moins une centaine de morts et plusieurs milliers de blessés, selon les derniers chiffres de la Croix-Rouge libanaise. Plusieurs pays, dont la France, ancienne puissance mandataire, ont envoyé de l’aide sur place. Dans un pays miné par les crises politiques, existe-t-il une solution pour sortir le pays de l’impasse? Et si le modèle helvétique, à travers le fonctionnement du Conseil fédéral, était transposable dans le système politique libanais?

Des centaines de morts, des milliers de blessés et de nombreuses personnes disparues : les Libanaises et les Libanais sont encore sous le choc. En cette fin d’après-midi du mardi 4 août dernier, deux explosions ont ravagé le port et plusieurs quartiers de la capitale libanaise. Les premières analyses ont conclu que l’origine du problème venait des près de 2’700 tonnes de nitrate d’ammonium stockées depuis six ans dans un entrepôt vétuste. Les images ou vidéos circulant sur les réseaux sociaux montraient une ville plongée malgré elle dans une sorte de chaos voire d’apocalypse. Quelques jours après ce terrible drame et faute de moyens mis en place par le Gouvernement libanais, plusieurs habitants ont pris les devants. Ils commençaient, seulement quelques heures après les deux explosions, à déblayer les rues et à accueillir ceux qui n’avaient plus de toit. Une manière de voir que les Libanais n’attendent plus rien de leurs dirigeants.

Enorme explosion au port de Beyrouth, Liban, jeudi 6 août 2020. Photo : Bedros Sakabedoyan

Aide internationale bienvenue

Plusieurs pays ont répondu présent pour apporter leur aide médicale, sanitaire ou encore logistique. Parmi ceux-ci, évidemment la France mais aussi la Russie, l’Iran, l’Arabie saoudite ou encore la Suisse. Berne a dépêché  sur place une “équipe de spécialistes composés d’ingénieurs civils et d’experts en logistique”. Un vrai élan de solidarité qu’on aimerait voir plus souvent. Le Président français Emmanuel Macron a été le premier chef d’Etat à se rendre sur place pour constater les dégâts. Il s’est également entretenu avec plusieurs responsables politiques en leur demandant un “profond changement”, dans un pays ruiné par les crises politique, économique et sociale ainsi que la corruption.

La France accusée d’ingérence dans les affaires internes du Liban

Avec cette visite sur le terrain, je conteste ceux qui disent que le Président Macron se permet de faire de l’ingérence dans les affaires intérieures du Liban. La France est l’ancienne puissance mandataire, c’est donc normal que les liens entre les deux pays soient très importants. Emmanuel Macron ne s’est pas comporté comme un nouveau colon mais plutôt comme un vrai Président, soucieux de voir un pays ami de la France s’enfoncer dans des crises à répétition. La déclaration du locataire de l’Elysée ne peut être plus claire : “pas de réformes, pas d’argent”. Aujourd’hui, plusieurs chefs d’Etat et de Gouvernement ainsi que des organisations internationales échangeront pour organiser et coordonner l’aide au Liban.

Emmanuel Macron recevant son homologue libanais Michel Aoun au Palais de l’Elysée, Paris, 25 septembre 2017. Photo : Présidence de la République française

Liban, de la richesse à la déliquescence

Le Liban, appelé autrefois la “Suisse du Moyen-Orient”, fait déjà face à une grave crise économique et à des années de corruption de l’élite politique. Le drame survenu mardi à Beyrouth est la goutte qui a fait déborder le vase. La population libanaise est en colère et n’espère plus un redressement économique du pays. L’automne passé, le Liban avait déjà connu des mouvements de protestation contre l’incapacité de la classe politique à redresser l’économie du pays. Selon le FMI, le Liban est aujourd’hui la 3ème dette mondiale derrière le Japon et la Grèce. La dette publique libanaise est estimée à plus de 86 milliards d’euros, soit 151% du PIB. Effarant! Alors, existe-t-il un modèle politique alternatif? Le modèle politique suisse, à travers la composition et le fonctionnement du Conseil fédéral, pourrait-il être transposable pour remplacer l’organisation actuelle du Gouvernement libanais?

Quel modèle politique dans le pays du Cèdre?

Le Liban est une république parlementaire, à l’image de l’Allemagne ou de l’Italie. C’est-à-dire que le rôle du Président de la République est essentiellement honorifique. Le poste dit “important” est celui du Président du Conseil des ministres, l’équivalent de Premier ministre dans d’autres pays. Le Liban se caractérise par un important pluralisme confessionnel, avec des chrétiens, des musulmans et une petite communauté juive. La répartition du pouvoir entre communautés religieuses a été définie ainsi : le chef de l’Etat est un chrétien maronite, le chef du Gouvernement est un sunnite et le Président du Parlement (système unicaméral) est un chiite. Le nouveau Gouvernement libanais, comme je l’imagine, serait basé sur le modèle du Conseil fédéral en Suisse. C’est-à-dire sept ou huit ministères contre dix-neuf aujourd’hui. Il devrait être composé de chrétiens et de musulmans sunnites et chiites. Le Gouvernement devrait travailler dans l’intérêt général du pays et non pour son propre égo. Les décisions devraient se prendre à l’unanimité. Plus de corruption et de clientélisme, on met une croix dessus. La durée de mandat d’un Président du Conseil des ministres ne devrait pas dépasser une année. Cela permettrait aux trois confessions religieuses principales d’occuper le poste de chef du Gouvernement à tour de rôle. Et donc il y aurait tous les trois ans des élections législatives. Je ne sais pas si cela marcherait au Liban, mais c’est une piste de réflexion pour proposer quelque chose de nouveau.

Alain Berset en visite présidentielle au Liban en 2018

La dernière visite présidentielle d’un chef d’Etat suisse au Liban remonte à 2018. Cette année-là, Alain Berset s’était rendu pendant deux jours dans le pays du Cèdre. Il s’était entretenu avec son homologue Michel Aoun et le Président du Conseil des ministres d’alors Saad Hariri. Les relations entre la Suisse et le Liban sont excellentes, fondées notamment sur des valeurs communes comme la défense de la démocratie, de l’Etat de droit ou encore de la langue française. A voir si la Confédération déroulera le tapis rouge pour le chef de l’Etat ou celui du Gouvernement cette année. Ce serait un juste renvoi d’ascenseur, deux ans après un accueil d’Etat pour la Suisse à Beyrouth.