Post-Covid-19: quelle place pour les mobilisations citoyennes?

La société civile a un rôle essentiel à jouer pour soutenir les efforts en faveur d’une société plus juste, d’un environnement plus sain et d’une économie plus durable. Les récent mouvements sociaux s’inscrivent non seulement dans la contemporanéité du numérique, mais aussi dans une longue tradition de contestation citoyenne autour de grands enjeux. La participation en masse des populations à ces manifestations illustre peut-être une conscientisation de la nécessité de trouver des solutions ensemble. C’est peut-être là un grand espoir pour l’avenir, qui ne pourra être construit qu’ensemble et au delà des différences.

Le Covid-19 a mis les mobilisations citoyen-n-e-s sur pause. Tout du moins au début. Et puis sont venus des abus de pouvoir, aux États-Unis par exemple, qui ont déclenché les mouvements de contestation de masse que nous avons pu observer ces dernières semaines [1]. Les réflexions et les transformations que ces mouvements génèrent au sein de la classe politique et des médias mettent en lumière la nécessité d’une société civile active, engagée, et qui a conscience de son rôle pour répondre aux grands enjeux de société. En Suisse, les débats autour de la Loi sur le CO2, ou à Genève à propos des nouvelles pistes cyclables, illustrent le tiraillement des autorités entre développement économique et protection de l’environnement. La société civile a un rôle essentiel à jouer pour soutenir les efforts en faveur d’une société plus juste, d’un environnement plus sain et d’une économie plus durable.

Cette mobilisation s’inscrit dans une longue tradition de revendications et de participation citoyenne. Au cours des dernières décennies et du siècle passé, le rôle de la société civile à évolué [2], tout autant que ses thématiques, outils, modes de financements et de gouvernance.

Avant les années 1970, la guerre froide et la fin du colonialisme ont déclenché de nombreux mouvements sociaux, qui se sont déroulés dans un monde dominé principalement par les états. Les multinationales n’avaient pas encore émergées comme acteurs de la scène internationale. Les thématiques étaient liées aux processus de décolonisation et d’auto-détermination, mais aussi en lien avec l’emploi et la répartition des richesses. Ces mouvements étaient composés d’ouvrier-e-s et d’intellectuel-le-s, avec une stricte hiérarchie verticale. Leur financement provenaient de leurs membres, et leurs principales formes d’action étaient la manifestation de rue et la grève.

La génération suivante de mouvements sociaux des années 1970 et 1980 ont abordé les questions des droits de l’homme, du droit des femmes, de l’environnement et de la solidarité avec les pays en voie de développement. Ils sont issus des révolutions étudiantes de 1968 avec de nouvelles valeurs de paix et de collaboration mondiale. Ces mouvements incarnent une nouvelle vision du monde et une sensibilisation aux grands enjeux mondiaux. Ils étaient, entre autres, composés d’étudiant-e-s, avec une hiérarchie moins rigide et plus horizontale. Leur forme d’action préférée était soit l’action directe comme les manifestations de rue, les événements de masse comme les concerts, et l’utilisation des médias. Leur financement provenait des membres et des sympathisants, mais aussi d’événements culturels.

À la fin des années 1980 et dans les années 1990, la société civile s’est progressivement de  professionnalisée et structurée. Le nombre d’organisations non gouvernementales (ONG), de groupes de réflexion et de commissions scientifiques et professionnelles a crû rapidement, grâce en particulier à une faiblesse institutionnelle de certains états et des technologies de communication plus abordables [3]. Ces organisations ont pu entre autres fournir des prestation de services, représenter des groupements de citoyen-ne-s, et développer des expertises dans les domaines des droits de l’homme, du développement, de la réduction de la pauvreté, et de la résolution des conflits. Leur financement provenait de gouvernements, d’institutions internationales et de fondations privées.

Si le nombre d’ONG n’a pas beaucoup évolué depuis le début des années 2000, leur répartition sur la planète est resté assez similaire aux années 1990. En d’autres termes, les ONG sont encore majoritairement issues des pays développés. L’Afrique est la seule zone géographique qui a connu une croissance du nombre d’ONG au cours des vingt dernières années, bien que cette augmentation ne soit pas proportionnelle à sa croissance démographique [4].

Les ONG ont progressivement obtenu un rôle d’observateur au sein des accords et mécanismes intergouvernementaux. Leur participation a été possible grâce au soutien financier de certains états, mais aussi grâce à la généralisation des technologies de l’information et de la communication. Cependant, ce statut – limité – d’observateur, et un système multilatéral qui fait la part belle à certains puissants états, a également mené à l’émergence de nouveaux mouvements de contestation.

Les initiatives altermondialistes, comme le Forum Social Mondial, visaient alors à défendre les victimes de la mondialisation, et à abolir voire réformer les institutions multilatérales mondiales. Ils étaient composés d’étudiant-e-s, d’ouvriere-e-s et de paysan-ne-s, et comprenaient un vaste réseau d’ONG et de mouvements sociaux. Ces mouvements étaient plutôt cosmopolites et flexibles:  cosmopolite car les participants avaient conscience d’une communauté plus large voire mondiale, et flexible de par leur forme de gouvernance permettant à tout individu de participer [5].

Black Lives Matter, FridayforFuture, ou encore Extinction Rebellion sont les successeurs directs de ces mouvements sociaux de contestation. Les grandes manifestations qu’ils ont organisées récemment ont largement utilisé le numérique, et en particulier les réseaux sociaux, pour coordonner leurs efforts, sensibiliser les populations et communiquer au plus grand nombre. Cependant, ces mouvements s’inscrivent non seulement dans la contemporanéité du numérique, mais aussi dans une longue tradition de contestation citoyenne autour de grands enjeux, comme la lutte contre le changement climatique ou le racisme systémique.

Leurs modes de financement, leurs outils et leurs formes de gouvernance ont évolué au cours des décennies. Cependant, leur responsabilisation face aux grands enjeux mondiaux, et leur modèle de fonctionnement flexible et basé sur un principe de participation inclusive, les inscrivent dans une longue et nécessaire tradition de contestation citoyenne.

La participation en masse des populations à ces manifestations illustre donc peut-être une conscientisation de la nécessité de trouver des solutions ensemble. C’est peut-être là un grand espoir pour l’avenir, qui ne pourra être construit qu’ensemble et au delà des différences.

Note: 

[1] À Hong-Kong, la réponse citoyenne est restée modérée, probablement car elle fait face à un certain découragement et à un nouveau positionnement des milieux énonomiques qui se sont vus bousculés par le Covid-19.

Références:

[2] Edwards, M. and Gaventa, J. eds., 2014. Global citizen action. Routledge.

[3] Kaldor, M., 2012. New and old wars—organized violence in the globalized era, 32–70.

[4] Kaldor, M., Moore, H.L. and Selchow, S., 2012. Global Civil Society 2012 (Vol. 248). Basingstoke: Palgrave Macmillan.

[5] Anheier, H.K., Glasius, M. and Kaldor, M., 2004. Global civil society 2004/5. Sage.

Jérôme Duberry

Jérôme Duberry est enseignant-chercheur Post-Doc au Centre de Compétences Dusan Sidjanski en Études Européennes, Global Studies Institute, Université de Genève, et chercheur associé à l’IHEID. Ses activités de recherche s'articulent autour de la convergence entre technologies numériques, politique et développement durable (ODD).

3 réponses à “Post-Covid-19: quelle place pour les mobilisations citoyennes?

  1. Voilà encore un article irritant…

    On est perplexe en observant ce M. Duberry. Il a l’air sympathique, propre sur lui, tout pour plaire. Mais dès qu’il prend la plume on est plongé dans le plus affligeant discours conformiste dicté par la doxa de la gouvernance mondiale. Pas le moindre esprit critique envers les aberrations de ce discours. Ca se comprend, dans la mesure où ce monsieur gagne sa vie dans ce milieu. Il faut bien qu’il vive et fasse vivre sa famille s’il en a une. Mais tout de même on reste interdit: comment est-il possible de se faire zombie, répétant comme un perroquet perinde ac cadaver, tout ce que le système veut lire et entendre.. Moi, je ne pourrais pas. J’aurais trop honte, je percevrais trop le ridicule du rôle qu’on veut me faire jouer. M. Duberry non, lui il est parfaitemant à l’aise de faire le groom du mondialisme. Ca ne le gêne pas. Il ne voit pas l’énormité de la chose ni son ridicule.

    Il est évident que cette épidémie de manifs est ridicule. Mais surtout cela démontre le mensonge officiel. Voici des manifs antiracistes encouragées par le pouvoir. Bon. Des milliers de gens défilent côte à côte, la police ne boge pas le petit doigt, pourtant ces manifs contreviennent aux consignes strictes de distance sociale et d’interdiction des rassemblements de plus de cinq personnes… Cherchez l’erreur!

    Les dirigeants ne se rendent même pas compte que le public est intelligent, décode, et remarque que cette incohérence démasque le mensonge du pouvoir qui a tenté de passer en force dans la mise en place de toutes sortes de dispositions orwelliennes de traçage généralisé, vaccination généralisée, mise en place d’une identité biomértrique mondiale avec toutes les informations vaccinales et autres accessibles par Big Brother…

    Maintenant on le sait. Le pouvoir mentait: la preuve, maintenant que les priorités de faiseurs de fausses vérités ont changé, maintenant qu’il ne s’agit plus de confiner els gens comme du bétail humain, mais d’empêcher la réélection de Trump à n’importe quel prix, alors on bazarde le narratif Covid-19, sans prendre la peine de suspendre l’interdiction des rassemblements ni la distance sociale obligatoire, et on encourage, avec la même couverture médiatique que pour le confinement et la même propagande, ces manifs anti Trump.

    Donc en cair, on change le narratif à volonté sans s’embarrasser de cohérence et sans se soucier que les gens puissent voir que tout est cousu de fil blanc. On nous prend vraiment pour des c…

    M. Duberry vante le groupuscule d’agitateurs stipendiés (c’est prouvé) Extension Rebellion, qui se permet de commettre des dommages à la propriété dans des banques accusées d’avoir investi dans des actions de compagnies pétrolières. Mais M. Duberry ne nous dit pas – et pourtant je suis certain qu’il le sait – qu’Extension rebellion n’est qu’un faux nez globaliste, DONT LE BUT EST DE RIPOSTER A LA MENCE QUE REPRESENTE, POUR LE PROJET GLOBALISTE LE MOUVEMENT DES GILETS JAUNES. Non, cette vérité n’est pas évoquée. Nous sommes priés de gober l’imposture de ces spin doctors sans broncher. Les menterus sont pince sans rire. Ils prennent plaisir à voir la jobardis d’une grande partie du public. C’est certain.

    Monsieur Duberry, vos propos dans leur tonalité gnangnan, convenue et lénifiante sont imbuvables. Qui peut supporter un pareil robinet d’eau tiède idéologique.

    La vérité c’est qu’on a affaire à un abêtissement dramatique de la population, qui se montre manipulable par n’importe quelle manipulation montées apr les maîtres de la pensée politiquement correcte, e5t par les médias mainstream. Mais heureusement, tout le monde nest pas dupe.

    Vous nous décrivez très bien tout ce réseau d’ONG constituant une “société civile” planétaire. Mais chacun, qui est capable de décoder, a compris qu’il s’agit d’un filet serré dans lequel le pouvoir illégitime mondial entend nous piéger pour nous abuser, nous spolier, nous dominer, nous aliéner. Cette société civile que vous vantez est une imposture, une fabrication visant à créer l’apparence d’une fausse opinion publique, entièrement fabriquée, à l’appui des projets liberticides et inhumains de la classe dirigeante mondiale.

    Il est affligeant que tant de gens se laissent mener ainsi. Peut-être que l’humanité a toujours désiré être nourri de guimauve et bercé par une sorte de bien pensance gnangnan. L’Eglise pendant longtemps a su tirer parti de cette faiblesse humaine, maintenant ce sont les ONG et toute cette superstructure parasitaire de la “”communauté” internationale qui vous paye votre salaire. Je ne vois pas le progrès.

    Vous êtes affligeant M. Duberry. Les bras m’en tombent.

  2. Il est dommage que ces blogs, souvent passionnants, soient trollés par des sauriens complotistes sous multi-pseudos.

    Des UDC qui montrent la vraie face de leur parti et de leur esprit étroit, avec le courage de faire des attaques ad hominem cachés.

    Je me demande toujours qui dirige ce quotidien, des capitaux trumpistes?

    1. P.S.
      Ces mêmes délicats qui agressent les femmes, avec leur vision de pépé, à peine elles se jettent à l’eau du comment, c’est odieux!

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