Charles Colson, entre Raspoutine et Karl Rove

Son nom n'est pas très familier des Européens. Charles Colson (photo Stephen Jaffe/AFP) a pourtant été une figure influente de Washington. Formé à la Brown University après avoir refusé une bourse pour Harvard, il s'engage rapidement pour le Parti républicain. Après avoir exceptionnellement soutenu le démocrate JFK, il deviendra un proche conseiller de Richard Nixon. Il jouera un rôle essentiel dans son écrasante victoire lors de la présidentielle de 1972.

Mais Charles Colson est étroitement lié au Watergate, le scandale par lequel les républicains commanditent un cambriolage dans les locaux du Parti démocrate près du Kennedy Center dans un édifice qui porte le nom de Watergate. Peu avant, il avait constitué une équipe faite d'un retraité de la CIA et d'un ex-agent du FBI pour entrer par effraction dans l'étude du psychiatre de Daniel Ellsberg. L'idée est de discréditer par tous les moyens possibles cet ancien du Pentagone, qui était à l'origine des fuites sur la réalité de la guerre du Vietnam connues sous le nom de "Pentagon Papers". C'est la même équipe qui mènera l'opération du Watergate.

Charles Colson sera condamné à 7 mois de prison pour avoir fomenté le coup contre Daniel Ellsberg. En prison, il se convertira à l'Eglise évangélique pour devenir l'un de ses plus fervents hérauts. Tout le monde, aujourd'hui encore, ne croit pas à cette transformation tant Colson était connu pour être l'homme de Nixon chargé des basses oeuvres. La connivence entre lui et le président sera totale. Nixon dira de Colson qu'il était comme le fils qu'il n'a pas eu. C'est Colson qui établissait de vastes listes d'ennemis potentiels, politiques, journalistes et c'est lui qui imaginait les moyens de les neutraliser. Illustration de son manque de scrupules, il avait raconté qu'il ferait tout pour faire réélire Richard Nixon, quitte à "rouler sur sa grand-mère". Après sa conversion, les mauvaises langues diront qu'il a changé Nixon pour Jésus-Christ.

Parmi les sceptiques de la transformation de l'ex-conseiller de Nixon figure Daniel Ellsberg lui-même. Ce dernier n'a jamais obtenu la moindre excuse de Charles Colson, ni le moindre contact, alors qu'il avait tenté de l'établir à plusieurs reprises. Un religieux sincère, un Raspoutine ou un Karl Rove, prêt à détruire l'adversaire? La déclassification de documents historiques permettra peut-être, à l'avenir, de jeter une nouvelle lumière sur ce personnage qui est décédé samedi à l'âge de 81 ans.

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