Il y a mille ans, l’Europe était couverte d’une immense forêt. Peu à peu, elle a été défrichée pour faire place aux champs et aux pâturages. Le carbone s’accumulait alors dans le sol par les racines des arbres, les organismes vivants du sol, et les feuilles qui tombent.
J’ai l’impression que notre agriculture a consommé au cours des siècles ce carbone accumulé par les arbres. Le sol est pourtant la meilleure solution pour de le stocker, car il y augmente la fertilité et la rétention d’eau.
L’agriculture régénératrice enrichit les champs en carbone par des applications de compost ou des restes végétaux. Elle inclut des techniques telles que la réduction du labour, les couverts végétaux, la rotation des culture, le compost et le fumier. Une étude effectuée sur les terres du Vermont, état américain au climat tempéré, suggère que dans des systèmes pérennes, le pâturage en rotation est la stratégie de régénération la plus efficace. Au cours des premières décennies, le ‘rotational grazing’, l’élevage avec rotation, permet d’enrichir le sol en carbone de 5,3% en dix ans.
Cependant la stratégie la plus efficace est l’afforestation. Elle augmente le carbone du sol de 6.5% en dix ans. Il faudrait y ajouter le carbone accumulé dans le bois des arbres, et leur effet régulateur sur le climat local.
Si les champs actuels sont utilisés en agriculture régénératrice, le sol peut être enrichi de 5% en 50 ans. Si par contre ils étaient transformés en pâturages bien gérés, ils acculeraient 11% de plus de carbone, et en tant que forêts, ils en contiendraient 17% déplus dans 50 ans.
Les forêts dont le bois est exploité accumulent moins de carbone dans le sol que celles-ci qui atteignent la maturité.
Le sol forestier s’enrichit continuellement pendant cent ans, même quand les arbres ralentissent leur croissance. Ce résultat est cohérent avec d’autres études, qui avaient aussi rapporté une augmentation de carbone du sol dans les forêts anciennes.
Cette étude montre encore une fois que des changements dans la gestion de l’agriculture, en particulier un passage de la culture d’aliments pour bétail aux pâturages, et surtout l’afforestation, pourraient compenser une partie des émissions de carbone.
Les chiffres obtenus ici sont plus modestes que ceux présentés par le projet 4 pour mille, qui estimait que 20 à 35% d’émissions de carbone pourraient être stockées dans le sol. L’agriculture sans labour n’est pas inclue car les auteurs mentionnent des informations contradictoires à ce sujet.
Les auteurs supposent que le bétail est nourri avec des aliments produits localement dans la ferme, mais actuellement, l’élevage s’accompagne souvent de déforestation et cultures polluantes ailleurs dans le monde. Leur vision est donc pour le moment exagérément optimiste, mais un tel élevage est possible. Ils soulignent aussi que la conversion des champs de maïs fourrager en pâturages ne signifie pas une diminution des ressources alimentaires pour l’Homme, mais simplement une autre façon d’alimenter le bétail. Par contre, je suis sûre que si les aliments végétaux cultivés dans les champs étaient directement consommés par les humains, une partie des terres agricoles pourrait être afforestée. Nous vivons le début de l’Anthropocène, qui se caractérise par des inondations et des vagues de chaleur de plus en plus importantes. L’élevage et le transport du bétail seront perturbés par ces changements climatiques et il faut mettre en place d’autres solutions pour les prochaines décennies.
Lien sur l’article: https://journals.plos.org/climate/article?id=10.1371/journal.pclm.0000021
Image de couverture: yoshitaka2 de Pixabay