Angela Merkel fait ses courses. Y que pasa?

Alors que l'Espagne souffre, emportée dans une profonde crise institutionnelle et économique, les us et coutumes sociétaux des Ibères ne changent guère. L'élite politique, aussi chahutée soit-elle, maintient ses privilèges et ses distances avec le bas peuple. Ainsi, lorsqu'un journaliste du grand quotidien El Pais croise la chancelière allemande dans un supermarché berlinois, en train de se faire ses courses, cela l'étonne prodigieusement. Certes, comme le démontrent les photos de circonstance, les gardes du corps de Frau Merkel ne sont pas bien loin, traquant l'activiste déguisé en chou fleur ou l'ennemi politique prêt à balancer un rayon de boîtes de raviolis sur la plus puissante des Européennes. Il n'en demeure pas moins qu'elle est bel est bien en train de faire ses achats comme Liselotte et Manfred.

On peut comprendre l'étonnement du journaliste espagnol, car ce n'est pas demain qu'un Président de son pays se rendra au Corte Inglés le plus proche de la Moncloa pour acheter son chorizo, sa daurade ou son Priorat préféré. Et pourquoi pas? Alors que la colère gronde dans les ménages de la Péninsule, gangrenés par la précarité économique et le chômage des jeunes, est-ce que les conseillers en communication de Mariano Rajoy ne devraient pas s'inspirer de cet exemple germanique? Ils pourraient suggérer à leur leader de faire honneur au nom de son parti (Partido Popular) en se montrant – pour une fois – proche du peuple et de sa réalité quotidienne. Et s'ils organisaient un petit coup médiatique dans une poissonnerie ou dans un marché populaire?  Cela serait une bien mauvaise idée, en vérité, tant le fossé est colossal entre Rajoy et sa base. Je vois déjà la ménagère ulcérée s'emparer d'un espadon et l'écraser de toutes ses forces sur la barbe du Président…

Non, pour que l'élite politique espagnole récupère la confiance de ses électeurs, il faudra davantage que des opérations RP ponctuelles. Le véritable enjeu est l'amélioration durable de la situation du pays et cela prendre du temps, beaucoup de temps. Les Espagnols attendent de la transparence et des actions concrètes. Comme dans toute situation de crise, la communication jouera un rôle-clé dans ce processus car les citoyens exigent des explications et des prises de responsabilité assumées de manière visible par leurs élus.

Daniel Herrera

Daniel Herrera a été responsable des relations publiques de Nestlé Suisse, puis DirCom de la BCV, de l’America’s Cup, de Romande Energie et de Kudelski. Il a fondé et dirigé YJOO Communications Lausanne de fin 2011 jusqu’à mai 2014 et il est responsable de la communication institutionnelle du Groupe Assura depuis juin 2015. Ses dadas: accompagnement du changement, relations médias, événementiel et communication de crise.