Le retour à la raison

L’ampleur du rejet de la votation sur l’initiative «Ecopop» donne un signal clair: la grande majorité de la population est hostile à toute expérimentation hasardeuse dans le domaine migratoire. Après les ondes de choc provoquées par la courte victoire du oui à l’initiative dite «contre l’immigration de masse», la limpidité du résultat de ce dimanche remet prudemment les pendules à l’heure. Le oui du 9 février s’explique en effet notamment par un vote protestataire assez large et ne saurait être interprété comme une volonté majoritaire de mettre un terme à la libre circulation des personnes avec l’Union européenne. Autrement dit, il y a moins d’un an, il s’agissait pour une partie de la population de donner un avertissement à la Confédération afin que le Conseil fédéral et les Chambres se préoccupent davantage d’accompagner les effets de la libre circulation par des mesures adéquates: mesures de revalorisation des travailleurs résidents, politique active en matière de constructions de logements à loyer abordable, renforcement des infrastructures dans le domaine des transports publics, augmentation du revenu disponible de cette moitié de la population active qui a vu sa situation se péjorer.

L’après 30 novembre donne aux autorités fédérales l’occasion d’avancer de manière cohérente sur deux plans. Premièrement, en répondant adéquatement aux attentes des habitants du pays dans le domaine des mesures d’accompagnement. Deuxièmement, en menant sereinement et de façon déterminée les négociations avec l’Union européene afin de trouver une solution eurocompatible au oui du 9 février passé. Il ne s’agit pas alors de passer outre la volonté populaire, mais d'interpréter le message donné ce jour-là. Le non à «Ecopop» est rassurant car il signifie avant tout un retour au pragmatisme. Le Conseil fédéral et le Parlement ont maintenant deux ans pour transformer ce signal en une politique acceptable aussi bien pour l’Union européenne que pour la majorité raisonnable de nos concitoyens.

Celsa Amarelle

Professeure de droit à l'Université de Neuchâtel, Cesla Amarelle enseigne actuellement le droit constitutionnel, les droits humains et le droit de la libre circulation des personnes. Elle est également conseillère nationale (PS/VD), membre de la Commission des institutions politiques et de la Commission des finances (présidente de la sous-commission en charge de la santé), et vice-présidente des Femmes socialistes suisses.