Continuer à soutenir l’idée européenne

Nombreux sont ceux qui s’interrogent actuellement sur le futur de l’UE  et notamment en ce qui concerne la question de la politique d’immigration  et sur les raisons de continuer à soutenir l'idée européenne. 

La politique européenne actuelle concernant les migrants a été beaucoup critiquée ces derniers mois. En point de mire: l’Allemagne et sa politique d’accueil soupçonnée d’avoir créé l’anarchie au sein de l’UE. Cependant, l’Allemagne est l’une des seules qui, avec la Suède et la Slovénie notamment, respecte les valeurs d’hospitalité de l’UE. Ce n'est donc pas d’Angela Merkel, qui a compris que le sauvetage de l’UE passera par l’ouverture et non par le repli[1], que vient le problème, mais plutôt du fait qu’aucune politique commune ambitieuse en matière d’immigration n’a pu être mise sur pied au sein de l’UE ces derniers mois. Pire encore, les décisions unilatérales des pays membres de l’UE se succèdent, sans aucune solidarité entre les Etats. Ainsi, l'Autriche a accusé la Grèce de ne pas vouloir endiguer le flot de réfugiés et a organisé l’isolement de la Grèce à travers une réunion des pays de la «route des Balkans» sans la Grèce ni l’Allemagne, ce qui a poussé Athènes à rappeler son ambassadeur à Vienne. Parallèlement, la Belgique a instauré des contrôles aux frontières avec la France après le démantèlement d’une partie du camp de Calais et les frontières de la Pologne et de la Hongrie restent imperméables. Bref, c'est bien la politique de fermeture et le manque de solidarité de certains Etats-membres qui encourage l'anarchie et non la politique d'accueil d'Angela Merkel.[2]

Pourtant, faire preuve de solidarité est d’autant plus important que la Turquie, la Grèce ou encore l’Italie, on l’a vu, ne peuvent plus faire face à un tel afflux de migrants. Il est donc logique que certains d’entre eux soient «relocalisés» dans le reste de l’UE, même si une telle mesure va à l’encontre des principes du règlement Dublin III qui prévoit que les demandeurs d’asile formulent leur requête dans leur pays d’arrivée, pays qui n’est bien entendu le plus souvent ni l’Allemagne ni la Suède. Ainsi, pour mettre en place cette relocalisation, il faut maintenant que les Etats fassent preuve de bonne volonté et ne laissent pas les pays d'entrée vers l'Union seuls face à ces défis. Un pas dans ce sens a été effectué mercredi 2 mars puisque la Commission européenne a confirmé l’octroi en urgence de 700 millions d’euros sur trois ans aux pays de l’UE en crise humanitaire, mesure qui aurait cependant pu être évitée si certains gouvernements n’avaient pas pris les décisions unilatérales qui ont mené à la fermeture de leur territoire aux migrants.

Enfin, ce sont les frontières extérieures de l’UE qu’il s’agit désormais de renforcer et non celles se trouvant entre les pays membres. Il est également nécessaire d’accélérer la création de «hot-spots», ces centres qui servent à trier les migrants pouvant bénéficier de l’asile au sein de l’UE de ceux qui viennent pour des raisons économiques ne pouvant bénéficier du statut de réfugiés[3]. Car l’UE ne sera fragilisée que si les Etats membres prennent des décisions unilatérales et ne respectent pas le principe de solidarité. En revanche, si chacun des pays y met du sien et collabore pour élaborer une politique commune en matière d’immigration, alors l’UE sortira grandie de cette crise.

 

 


[1] Voir à ce sujet le blog du Prof. Gilbert Casasus «Pourquoi il faut soutenir Merkel» (09.11.2015)

[2] A noter cependant que Merkel avait certes annoncé unilatéralement l’ouverture de ses frontières, mais les a ensuite refermées avant de demander un effort de solidarité aux autres Etats européens.

[3] Statut réglé par la Convention de Genève (1951): http://www.unhcr.fr/4b14f4a62.html.

 

Caroline Iberg

Caroline Iberg a travaillé entre 2013 et 2017 au Nouveau mouvement européen Suisse (Nomes). Elle est désormais chargée de communication à Strasbourg.