Erich a 34 ans en 1933 quand il assiste à l’incendie de ses écrits à Berlin. «Et en l’an 1933 mes livres furent brûlés en grande pompe funèbre sur la place de Berlin, près de l’opéra, par un certain Monsieur Goebbels», raconte-t-il dans son livre Kennst du das Land, in dem die Kanonen blühen?. «Le nom de vingt-quatre écrivains allemands, qui devaient être à jamais symboliquement effacés, furent par lui triomphalement proclamés. J’étais le seul des vingt-quatre qui me fus personnellement déplacé pour assister à cette mise en scène éhontée. Je me trouvais près de l’université, coincé entre des étudiants en uniforme de SA, la fleur de la nation et là je vis nos ouvrages s’envoler vers les flammes étincelantes et j’entendis les tirades prétentieuses du nabot hypocrite et menteur. Un temps d’enterrement régnait sur la ville.»
Aujourd’hui, huitante-quatre ans après, j’ai, à quelques années près, le même âge que lui. Si aucun livre n’a plus été brûlé de la sorte depuis des décennies en Europe, qui sait ce que nous réservent les prochaines années? Car dans quelques jours, la France va faire un choix crucial entre les idées d’ouverture de M. Macron et de fermeture de Mme Le Pen. Et alors que cette dernière a d’ores et déjà décidé pour sa campagne d’entre-deux tours de sélectionner les médias qui sont autorisés à la suivre, interdisant ainsi l’accès à ses déplacements à plusieurs titres de presse, qui sait jusqu’où elle ira en cas d’élection?
Lundi 8 mai, hasard du calendrier, la France fêtera la victoire de 1945 des Alliés sur l’Allemagne nazie et la fin de la Seconde Guerre Mondiale. C’est à cette même France désormais de choisir de quelle manière elle souhaite honorer ce lundi la mémoire des personnes qui ont lutté pour restaurer la paix sur son territoire : par un retour au nationalisme, qui a été la cause de multiples conflits, ou par le choix de l’ouverture et de l’Europe, synonyme de paix depuis plus de 70 ans? L’avenir de tout un continent est en jeu.