Municipales françaises : l’écologie politique grande gagnante

Nombreux ont été les observateurs politiques – certains en le regrettant, d’autres en se frottant les mains – qui ont prédit un ralentissement de la “vague verte” qui a depuis un peu plus d’une année submergé les parlements nationaux, régionaux ou communaux de nombreux pays, parmi lesquels nous pouvons citer la Belgique, la Finlande, l’Allemagne ou encore la Suisse.

La crise sanitaire liée au COVID-19 et celle économique qui la suit de près auraient en effet détourné les électrices et électeurs de l’écologie, pour les ramener vers des thèmes jugés plus “terre à terre” et concrets, et les partis les défendant.

Les résultats du second tour des élections municipales françaises semblent leur donner lourdement tort… Lyon, Bordeaux, Annecy ou encore Poitiers ont en effet élu des maires écologistes, et Europe Écologie les Verts réalise le meilleur score de son histoire à des élections municipales. À Paris, la maire sortante socialiste Anne Hidalgo, qui a été attaquée tout au long de son mandat pour son “fanatisme” écologique et sa volonté de réduire le trafic motorisé dans la capitale, est réélue haut la main.

Bien sûr, la sociologie politique est là pour nous rappeler qu’il existe autant de manières de voter qu’il y a d’électrices et d’électeurs, et les situations locales sont très différentes d’une ville à l’autre. Il n’en reste pas moins que le signal est extrêmement fort !

L’engouement d’une part croissante de l’électorat pour les partis politiques porteurs d’un projet écologiste ne semble pas avoir été brisé par la crise du COVID-19, loin s’en faut.

On peut esquisser deux hypothèses pour expliquer ces excellents résultats des listes écologistes :

  • La prise de conscience du désastre environnemental et social vers lequel nous nous dirigeons si nous ne menons pas rapidement des politiques publiques ambitieuses protégeant la biodiversité et le climat est désormais profondément ancrée au sein de la société. On peut et doit avoir peur pour son emploi et sa santé, mais cela ne fait pas oublier qu’un danger encore bien plus grand plane sur nos têtes. Les nombreuses nouvelles catastrophiques sur le front de l’environnement ( marée noire en Sibérie, températures record au nord du cercle polaire arctique etc.) qui ne cessent de nous parvenir contribuent probablement à cela.
  • La volonté, qui découle de cette prise de conscience, de changer de modèle. Veut-on vraiment tout faire repartir comme avant, relancer la machine de la croissance à n’importe quel prix ? Ou veut-on profiter de cet arrêt forcé et douloureux pour améliorer et changer un système à bout de souffle, et le remplacer par un autre plus durable et respectueux de l’environnement et des personnes ? Les électrices et électeurs français semblent avoir donné ce soir un signal assez fort pour un changement de paradigme.

Quoi qu’il en soit, il semble en tout cas qu’il faudra compter encore un moment avec les écologistes dans la panorama politique français et européen. De là à dire que ce soir le futur semble un petit peu plus équitable et durable, il y a un pas que je franchis volontiers…

 

 

Alberto Mocchi

Alberto Mocchi est député vert au Grand Conseil vaudois et Syndic de la commune de Daillens, dans le Gros de Vaud. À travers son blog, il souhaite participer au débat sur les inévitables évolutions de notre société à l'heure de l'urgence écologique.

12 réponses à “Municipales françaises : l’écologie politique grande gagnante

  1. Juste une petite remarque, cette vague verte est aussi le resultat d une expulsion de plus en plus forte des classes populaires , qui souvent galerent trop pour supporter une nouvelle taxe carbone et un immobilier tres cher, des gdes et moyennes villes au profit des classes moyennes sup, bcp plus sensible aux theories ecolo… et d autre part c est aussi la prise de pouvoir des verts sur la gauche au depens des socialistes…

  2. Ajoutons pour calmer les ardeurs 60% d’abstention, un séisme pour la représentation communale qui était jusqu’à présent la seule à survivre au rejet des politiciens. Ce n’est plus le cas.
    Et un fossé, voire un gouffre à présent entre les bobos verts tertiarisés des mégapoles et le reste du pays dont les préoccupations sont bien plus terre à terre et liées aux difficultés du quotidien.
    Cela promet…

  3. Alors certainement pas.
    La grande gagnante est l’abstention de presque 60% des électeurs, ce qui est un taux record sous la Vème république.
    Donc parler de soi disant vague verte alors que les français n’ont massivement pas voté, c’est juste de la rigolade.
    Ce qui devrait exister en France comme ailleurs, c’est l’interdiction de valider une élection s’il n’y a pas plus de 50% d’électeurs.
    On ne peut pas laisser une minorité gouverner pour la majorité.

    1. Personnellement, j’en fais une toute autre lecture du taux d’abstention: ceux qui s’abstiennent sont ceux qui ne se sentent pas dignes de représenter la démocratie, et acceptent implicitement le choix de la majorité.
      Les 60% d’électeurs qui se sont abstenus font donc pleinement partie de la vague verte.

      Après, je ne suis pas vraiment inquiet de ce taux record. Il s’agit certainement de l’effet Covid qui s’ajoute au taux usuel d’abstention.

  4. Vous êtes un écolo plutôt sympathique. Tant mieux pour vous si vous bénéficiez de cette “vague verte”. Mais ce qu’on voit en pratique, déjà chez nous en Suisse, c’est qu’à peine cette bande de petits arrivistes accède au pouvoir qu’ils se transforment en accapareurs de places, de prébendes, de sinécures, comme tous les autres.

    Personnellement je suis écoeuré. Je serais partisan d’une politique protégeant l’environnement plus encore que ne le demandent les écolos. Le gaspillage et l’exploitation effrénée de la nature étaient le résultat de la pensée progressiste des Lumières, c’est à dire de la gauche. L’écologie, si elle était honnête et non une ruse marxiste sournoise, devrait être d’extrême droite.

    On entre dans une période où un nouveau conformisme, qui sera suffoquant autant que les conformismes du passé, va s’imposer. Le conformisme vert. On va assommer les petites gens de taxes sur l’essence. On va imposer des tracasseries ridicules sur l’économie. On sera mesquins et obtus. On le voit déjà. Tout cela n’améliorera pas les choses du point de vue de l’environnement. En plus on verra que la haute finance est là derrière, car on créera un marché des droits à polluer. Quelle mascarade sinistre!

    Tout cela est le produit d’un travail de propagande massif des médias au service de milieux oligarchiques qui ont créé de toutes pièces ce concept écolo depuis les années 70 et le Club de Rome. C’est à dire un think tank oligarchique et mondialiste proche de la Commission Trilatérale et des Bilderberg. Le but de l’opération est un gouvernement mondial sous prétexte d’écologie, dans une sorte de convergence entre socialisme marxisme et capitalisme libéral sous la supervision des immenses compagnies transnationales qui sont devenues les vrais souverains. Ces compagnies imposeront des standards contraignants, qui pour elles ne seront pas difficiles à observer, mais qui leur permettront de tuer les petites et moyennes entreprises indépendantes, et donc de régner en maîtres absolus, comme le véritable gouvernement du monde. C’était le but de l’opération depuis le début et les militants écolos idéalistes n’ont jamais été que les idiots utiles de ce projet.

    C’est écoeurant. Il n’y a vraiment pas de quoi se réjouir. Rien de bon ne peut en sortir pour le peuple

  5. Oh, ne criez pas victoire, cher Alberto.
    D’abord, car la France n’a rien a voir avec la Suisse, ni d’ailleurs l’Italie.
    On a vu ce qu’il est advenu de Monsieur Hulot!

    Restons en Suisse, si vous le voulez ben, où on édulcore tout.

    Pensez-vous sincèrement que le parti politique “vert” serve à quelque chose?
    Bon, le PLV, j’ai la réponse, … Un sous-marin de PL, dommage pour ses votants 🙂

    1. Oui, je pense sincèrement qu’il sert à quelque chose, si non je vous assure que je ferais autre chose de mon temps libre 😉
      qu’on le veuille ou non, pour l’heure si on veut faire changer les choses rapidement, il faut passer pour la politique, que ce soit au niveau communal (très concret), cantonal ou fédéral ( plus abstraits, mais aux impacts plus globaux). Et les Vert-e-s y amènent un discours fort et crédible sur les questions environnementales, ce qui fait qu’ils ont à mon sens tout à fait leur place dans ce système, et que leur rôle est plus que jamais déterminant 🙂

      1. Vous avez raison, commençons par le revenu de transition, tel que proposé par Sophie Swaton.
        “think global, act local”

        1. Tout à fait ! Une députée verte, Rebecca Joly, a proposé cela au Grand Conseil vaudois il y a quelques semaines… On verra ce que cela va donner 🙂

          1. Vous avez une députée verte vaud qui est brillante, autant que d’un grand courage, mais je ne me rappelle plus son nom, mais elle en a des c. et des b. 🙂

  6. Les 60% d’abstenus n’ont pas d’excuse , qu’ils viennent des campagnes ou des villes .
    Il faut relever que le réflexe de voter « RN » contre le président a disparu, les verts sont devenus crédibles , spécialement auprès de la nouvelle génération.
    C’est un tournant dans la politique française qui va marquer les prochaines élections .

  7. @HUBERT GIOT

    C’est intéressant cette remarque que vous faites : le FN, pardon RN, a perdu sa capacité de rassembler les mécontents, contre la “bande des quatre”, l’UMPS ou le LREM. Evidemment, quand on n’a qu’une obsession, qui est de se mettre en conformité avec les attentes des bien pensants (dédiabolisation), on cesse de représenter une alternative. On n’est même plus une opposition. Dans ces conditions à quoi bon voter pour un tel parti? Il n’intéresse plus personne. Louis Aliot réussit une belle percée, due à ses mérites personnels, et en gommant son appartenance frontiste. Il deviendra sûrement un grand notable de province, mais son élection n’est pas le début de la conquête du pouvoir municipal par le RN, qui s’effondre partout ailleurs.

    C’est la faute de Marine Le Pen, parce qu’elle n’a pas endossé un gilet jaune et n’a pas défilé avec la manif pour tous.

    Avec tout ça, la percée des Verts se fait uniquement par défaut. C’est le contraire de glorieux. Au royaume des aveugles les borgnes sont rois. Les Verts émergent grâce à l’abstention, parce que tous les autres s’effondrent. Il n’y a pas une vraie adhésion. Les Verts français sont en train de devenir un de ces partis attrapent-tout, ramassis d’opportunistes, comme naguère les radicaux-socialistes.

    Pouah!

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