Dans un contexte assez particulier marqué par une crise sanitaire de grande ampleur, la femme africaine a célébré hier 31 juillet 2020 sa journée internationale. Ce jour a été consacré “Journée de la femme africaine” à l’occasion du premier congrès du Pan-African Women’s Organisation (PAWO) qui s’était tenu à Dakar, au Sénégal, le 31 juillet 1974. Cependant, les historiens évoquent le la date du 31 juillet 1962 comme étant le point de départ de cette reconnaissance historique. Dans une réunion organisée à Dar es Salaam, en Tanzanie, des femmes de grande envergure représentant plusieurs pays africains avaient décidé de créer la première organisation de femmes, la “Conférence des Femmes Africaines” Depuis, les femmes africaines ont parcouru bien du chemin et jouent aujourd’hui un rôle prépondérant dans le développement économique de leurs pays, en plus d’occuper des postes politiques de premier plan.
L’événement passerait presque inaperçu, parce que peu médiatisé, mais la Journée internationale de la femme africaine est bien une réalité qui a plus de 50 ans d’existence. Cette reconnaissance n’est pas le fruit du hasard, car quelques figures emblématiques féminines africaines se sont particulièrement illustrées dans leurs combats contre la colonisation et l’esclavage. Quelques unes d’entre elles sont des fiertés dans leurs pays pour avoir joué un rôle de pionnières dans le combat pour l’émancipation de la femme africaine
Parmi ces pionnières, le Sénégal peut se targuer d’avoir vu naître sur son sol une certaine Aline Sitoé Diatta, née en 1920 et décédée en1944, non sans avoir mené des luttes dont se remémorent bien des historiens. Originaire de la Casamance, région du sud du Sénégal, connue aujourd’hui pour ses verts paysages et son potentiel touristique, Aline Sitoé Diatta est notamment réputée pour avoir lutté contra la pénétration et la domination française au Sénégal.
Son histoire n’est pas très simple, elle a perdu très tôt ses parents et s’est retrouvée toute seule avec son oncle paternel qui l’a élevée. Elle perdra également cet oncle, ce qui lui valut des moments très difficiles. Mais en véritable guerrière, Aline se rendit à Ziguinchor pour travailler d’abord comme docker avant de rejoindre la grande ville de Dakar. Dans la capitale sénégalaise, les colons français étaient légion. L’économie était entre leurs mains, et très naturellement, l’un d’entre eux employa Aline comme domestique. Mais c’était sans compter avec la nature révolutionnaire d’Aline, qui en 1942, décida de résister aux colons pour sauver le Sénégal d’une soumission à la France qui lui aurait été fatale. En pleine guerre, la France, en manque de guerriers, demande à ses colonies de participer à l’effort de guerre, mais Aline, révoltée par le ponctionnement par la France de la moitié de ses récoltes de riz en Casamance, s’oppose à l’idée de défendre la France à cause de cette injustice. Résultat, les Casamançais refusent d’être enrôlés dans l’armée française, ce qui fit rentrer dans l’histoire cette femme dont on dit qu’elle avait certains pouvoirs surnaturels. Elle est arrêtée par les autorités coloniales le 8 mai 1943 pour être envoyée en prison dans différents pays voisins du Sénégal. Elle décède finalement au Mali, une année exactement après son arrestation, soit en mai 1944. Aujourd’hui, elle demeure présente dans tous les esprits au Sénégal, à tel point que plusieurs artistes lui ont dédié des chansons où son courage et son charisme sont évoqués comme étant supérieurs à ceux de ses compatriotes masculins.
Une autre femme africaine a également marqué son époque par sa lutte pour la décolonisation de la Guinée par la France. M’balia Camara, née en 1929, était connue pour avoir accéléré le processus d’indépendance de son pays en s’attaquant le 9 février 1955 au représentant local de la France, le chef Almamy David Sylla. Lors d’une bataille avec ce dernier, elle fut gravement blessée alors qu’elle était enceinte. Finalement elle meurt le 18 février 1955, après avoir perdu son enfant mort-né une semaine plus tôt.
Les populations de la Guinée ont très mal vécu la nouvelle de son décès et plus de 10000 personnes ont assisté à son enterrement. Cette mobilisation a joué un rôle prépondérant dans l’indépendance de la Guinée qui sera acquise le 2 octobre 1958.
Après avoir contribué grandement à l’indépendance de leurs pays, ces femmes de la période coloniale ont ouvert la voie aux nouvelles générations de femmes africaines de la période d’après la colonisation. Aujourd’hui, elles sont de brillantes intellectuelles ou femmes d’affaires à succès.
Elles sont des actrices majeures du développement et de la croissance économique du continent. Chaque jour qui passe, elles démontrent leurs aptitudes à participer à la construction de leur pays à différents niveaux de responsabilité. D’ailleurs elles sont de plus en plus nombreuses à être présentes au sein des instances dirigeantes des entreprises de leurs pays, même si elles doivent encore faire face à de nombreuses inégalités sous des formes différentes.
Á titre d’exemple, Public Investment Corporation (PIC), le plus grand gestionnaire d’actifs en Afrique, a à sa tête une jeune Sud-Africaine de 37 ans. Microsoft for Africa est dirigée par l’Éthiopienne Amrote Abdella; Facebook Afrique par la Sud-Africaine Nunu Ntshingila; Google au Nigeria par Juliet Ehimuan.
Autre exemple très symbolique, celui de Hewlett-Packard qui jusqu’à récemment était dirigée par la Franco-Capverdienne Elisabeth Moreno (photo) en tant que vice présidente et directrice générale Afrique. Celle-ci vient de connaître une nouvelle consécration avec son entrée dans le gouvernement français le 7 juillet dernier comme Ministre chargée de l’Ẻgalité entre les femmes et les hommes.
Plusieurs études font état de l’excellent apport des Africaines dans la prospérité de plusieurs entreprises de renom. Celle menée par la London Stock Exchange (LSE) intitulée «Compagnies to inspire Africa», publiée en janvier 2019 indique que les sociétés comptant le plus grand nombre de femmes dans leurs conseils d’administration ont connu une augmentation de leurs bénéfices de 20% par rapport à la moyenne générale des entreprises. Une autre étude similaire menée par le cabinet McKinsey avait également démontré que la moyenne de femmes africaines membres de conseils d’administration, cheffes ou cadres d’entreprise dans le secteur privé en Afrique était supérieure à la moyenne mondiale, ce qui place l’Afrique en très bonne position avec 5% de femmes cheffes d’entreprise, soit un peu plus que la moyenne mondiale qui est de 4%.
Cependant, toutes les réussites évoquées ci-dessus ne sont pas à mettre sur le compte de la simple féminité. Loin s’en faut, car la compétence de ces femmes est unanimement reconnue, y compris par leurs pairs masculins, chose plutôt encourageante. De toute évidence, cette nouvelle génération de femmes africaines dirigeantes de grandes entreprises peut faire évoluer les mentalités et influer positivement sur les générations futures.
Néanmoins, même si le continent connaît des avancées significatives en matière de parité dans le leadership au sein des entreprises, il n’en demeure pas moins que leur autonomisation et intégration professionnelle dans les conseils d’administration de grandes entreprises locales ou internationales demeurent encore un défi à relever quotidiennement. Mais l’espoir est permis. Après avoir lutté contre les puissances coloniales pour l’indépendance du continent, elles ont obtenu leur Journée internationale au début des années 1960. Aujourd’hui, elles sont reconnues comme de véritables architectes du développement du continent.
il y a un bouquin dont le titre est “la femme est l’avenir de l’homme”, équipée de quelque sécateur, elle rabaisse facilement le caquet des mecs ! notre parait-il ministre français de l’intérieur est un vrai scandale d’état ! vive les femmes. merci pour votre article qui prouve que la francafrique ne se vit plus tout en rose !
Ce me parait etre une chanson de Jean Ferrat?
je dirais plutot que la femme est l’avenir de l’Afrique.
Mais ce qui m’inquiete plus dans cette optique, notre ami Tidiane, se retrouve seul correspondant africain?
sur les listes bloguesques, d’un quotidien qui veut gagner des parts de marche en afrique francophone, je veux dire….?
Comme si les francophones africains avaient de quoi se payer un abo au Temps 🙂
Merci Frere Diawara pour votre attention particulière aux chemins des femmes combattantes pour le développement partagé de l’Afrique.
Je voudrais rappeler que nous avons aussi plusieurs figures de grandes dames combattantes maliennes qui nous ont laissé des traces indélébiles comme repères dans les mouvements panafricains de l’AOF… Ça me fait penser à une d’entre elles qui est restée gravée dans ma tête, au nom de Aoua KEITA , première femme Député de l’assemblée nationale du soudan-français et initiatrice de la comémoration de cette date symbolique du “31 JUILLET” dans les années 1962, sous réserves de votre verification car je ne suis pas une historienne.
En tt cas. Merci pour l’accompagnement des Femmes.
Salutations.