Depuis deux ans, on assiste à une série de coups d’état ou de tentatives en Afrique de l’Ouest, ce qui n’est pas sans inquiéter les voisins qui se méfient de plus en plus de leurs « armées ». En effet, le Mali, par deux fois (août 2020 et mai 2021), la Guinée Conakry en septembre 2021, le Burkina Faso en janvier 2022, ont connu des renversements de pouvoir à la faveur de putschs militaires, dont les auteurs sont en général de jeunes soldats qui gravitent autour des présidents dont ils sont censés assurés la protection. La Guinée-Bissau, elle aussi, a failli connaître une révolution de palais en février 2022. Il s’en est fallu de peu pour que le président Umaro Sissoco Embalo ne soit renversé. Mais pourquoi donc cette partie de l’Afrique vit-elle aujourd’hui cette période de déstabilisation?
Plusieurs raisons me viennent à l’esprit. La 1ère est d’ordre historique. En effet, depuis 1960, année de l’indépendance de la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest, les puissances coloniales ont continué à exercer une sorte de mainmise sur leurs anciennes colonies, au point de favoriser d’une manière ou d’une autre l’avènement de leurs « poulains » à la tête de leurs anciennes colonies. De plus, à la fin de la guerre froide, suivie de l’éclatement de l’URSS et de la naissance des blocs Est et Ouest, on a assisté à une lutte d’influence entre ces deux blocs qui a contribué à la fragilisation des régimes africains de façon générale. La Russie, d’un côté, certains pays occidentaux de l’autre côté, se sont évertués à maintenir sous leurs jougs respectifs les pays qu’ils jugeaient utiles de contrôler pour des raisons inavouées.
La 2ème raison est liée à l’incapacité des présidents de ces pays à faire face au défi du terrorisme, à assurer la sécurité de leurs concitoyens. Sentant la faiblesse des moyens militaires et matériels des pays africains, notamment dans la zone sahélienne, les groupes terroristes n’ont pas eu beaucoup de peine à s’installer et à affronter, parfois brutalement, les régimes en place. Dépassés, ces derniers ont souvent compté sur quelques puissances étrangères, la France notamment, pour assurer leur sécurité. Avec des résultats plus que mitigés. La France, malgré le déploiement de quelques 4800 de ses soldats depuis 2013, n’a pu ramener la paix et la sécurité totale dans le Sahel, au grand dam des populations de la région.
Ce triste constat a favorisé l’émergence d’une nouvelle élite militaire africaine qui s’est arrogée le « droit d’agir au nom de ses concitoyens » afin de montrer les limites des accointances de certains dirigeants africains avec la France et de finalement prendre les choses en mains. Ce faisant, les nouveaux maîtres de ces pays ont trouvé grâce aux yeux des populations, des jeunes notamment qui voient en eux des « sauveurs ». Cette légitimation, en apparence, a bouleversé la donne politique dans la sous-région, symbolisée par la décision d’expulsion de l’ambassadeur de la France au Mali intervenue le 31 janvier dernier. Cette décision est intervenue alors que les nouvelles autorités maliennes ont reproché à quelques dirigeants français d’avoir tenu des propos peu respectueux à leur égard.
La 3éme raison tient à l’absence d’une bonne gouvernance dans presque tous les pays concernés par ces coups d’état. Les populations, dans leur ensemble, ont soi f d’une véritable démocratie, porteuse d’espoir pour la jeunesse qui représente l’écrasante majorité des habitants du continent africain. Cette jeunesse, de plus en plus éveillée, n’accepte plus que son avenir soit hypothéqué par des gouvernements qui font de la corruption, de l’impunité et du népotisme des pratiques courantes.
La 4ème raison est à trouver dans l’appétit vorace du pouvoir de certains dirigeants africains qui n’hésitent à violer la constitution de leurs pays pour s’éterniser au sommet de leurs états. Cette cécité politique de ces dirigeants a conduit à des impasses politiques, et par conséquent sociales et économiques, qui ont plongé leurs pays dans une situation d’extrême pauvreté. Ces coups d’état « constitutionnels », sous la forme d’une modification des constitutions en vue de s’offrir un troisième mandat, ne passent plus tellement aux yeux des populations, même si certains les comprennent. C’était le cas en Guinée où le président Alpha Condé avait fait modifier la constitution de son pays pour pouvoir se présenter à un 3ème mandat qu’il a obtenu sans trop de peine. Mais face à la grogne grandissante des populations, il a été déposé par sa propre armée le 5 septembre dernier. D’autres pays comme la Tunisie, le Tchad, la Côte d’Ivoire, le Togo et le Bénin ont également connu des coups d’état « constitutionnel » ces dernières années.
Comment arrêter cette mauvaise spirale ?
Il est indispensable voire vital que des institutions fortes voient le jour partout en Afrique, en particulier dans des régions très fragiles comme l’Afrique de l’Ouest. Au lendemain des indépendances de la plupart des pays africains en 1960, la priorité des dirigeants était plutôt orientée vers le développement économique, ce qui était compréhensible, car il fallait améliorer le quotidien des populations qui vivaient dans des conditions très austères. Mais les choses ont évolué depuis. Aujourd’hui, les Africains veulent vivre en paix et libres. Ils exigent plus de démocratie dans leurs pays.
C’est à partir du discours de La Baule, prononcé par François Mitterrand en 1990 que les processus démocratiques ont vu le jour dans la plupart des pays d’Afrique francophone. Le président français disait dans ce discours que « La France liera tout son effort de contribution aux efforts qui seront accomplis par les gouvernements africains pour aller vers plus de liberté ». Autre discours important qui allait dans le même sens, celui du président Barack Obama, de passage à Accra en 2009, qui affirmait devant des parlementaires du Ghana que « l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais d’institutions fortes ». J’ajouterai qu’elle a besoin des 2, car ce sont des hommes forts comme le président Abdou Diouf, du Sénégal, qui ont ouvert la voie à des alternances pacifiques en Afrique de l’Ouest. C’était en mars 2000 lorsque le président Abdou Diouf reconnaissait sa défaite face à son adversaire de l’opposition, Maître Abdoulaye Wade. Comme quoi, il est bien possible d’instaurer le multipartisme et le respect des institutions en Afrique, conditions sine qua non pour assurer la stabilité des pays africains et, partant, leur développement économique.
PHOTO / JOHN WESSELS / AFP
1 raison simple: le trafic de drogue.
Tous ces pays sont des points de passage des cartels d’Amérique du Sud.
Et à force de parler colonisation, les forces vives de ces pays ignorent la dure réalité: ils sont aux mains des cartels de drogue.
le problème des cartels existe mais ce n est pas eux qui décident de la valeur du CFA.
Les accords de la baule, et la présidence Mitterrand plus largement, furent délétères pour l Afrique. Dévaluation du CFA , soutien logistique et militaire du gouvernement Habyarimana entre autres. Je vous recommande le livre “Kamerun” sur l indépendance du Cameroun.
Les Chinois, eux, ne font pas l’énumération de ce qui leur a été défavorable; ils ont misé sur l’éducation, le travail et le contrôle des naissances.
en chine ou en Afrique? Des conflits sociaux sont apparus dernièrement au sein d entreprises chinoises notamment au Sénégal. Le libéralisme(ultra?)se heurte a la notion d altérité.