Prix Goncourt 2021 en novembre. Prix Nobel de littérature en octobre 2021. La littérature africaine se porte très bien.

Il est des événements qui tombent à pic. La littérature africaine francophone, riche en talents, avait besoin d’un coup de pouce du destin pour confirmer sa tradition d’excellence. Celui-ci est arrivé le mercredi 3 novembre dernier. En effet, à travers Mohamed Mbougar Sarr, brillant jeune auteur de 31 ans seulement, l’Afrique a remporté le Prix Goncourt, considéré comme la plus prestigieuse des récompenses littéraires du monde francophone.

Cette distinction, comme une bénédiction, a été annoncée presque en même temps que se tenait à Dakar une réunion préparatoire de la journée internationale de l’écrivain africain, célébrée ce dimanche 7 novembre.

Cette réunion était organisée par l’AES (association des écrivains sénégalais) qui joue un rôle prépondérant dans la promotion de la littérature africaine d’expression française. En effet depuis le président poète, Léopold Sédar Senghor, le Sénégal a produit d’excellents écrivains dont Boubacar Boris Diop qui a obtenu tout dernièrement le prix américain Neustadt, sans oublier d’autres excellents auteurs comme le Dr Birago Diop (auteur des célèbres “Contes d’Amadou Koumba”), Aminata Sow Fall (auteur de “La grève des battus”), le poète Amadou Lamine Sall, président de la Maison Africaine de Poésie Internationale, Cheikh Hamidou Kane (auteur de l’Aventure ambigüe), entre autres. Dans la même veine, je pourrai également citer le malien Amadou Hampaté Bâ, membre du Conseil exécutif de l’Unesco de 1962 à 1970, auteur de la célèbre citation qui a fait le tour du monde : «En Afrique, quand un vieillard meurt, c’est une bibliothèque qui brûle»

Le parcours de Mohamed Mbougar Sarr est assez édifiant sur sa qualité de jeune écrivain très prometteur. On apprend que, très tôt, il avait déjà remporté dans le cadre d’un concours général le premier prix de philosophie, d’histoire-géographie avant d’être décoré et élevé au grade de chevalier national de l’ordre du mérite par le président de la République du Sénégal. Après avoir reçu son prix, le jeune lauréat a déclaré : «Je salue ce geste littéraire de la part de l’Académie Goncourt qui envoie un signal très fort à tous les milieux littéraires de l’espace francophone ». Il a enchaîné « Ce n’est pas une faveur que l’on fait à un écrivain africain », rappelle-t-il tout en précisant ne pas ignorer «  les questions politiques qu’il peut y avoir derrière une récompense semblable».

Le président de l’Académie Goncourt, Didier Decoin, très élogieux à l’égard de l’écrivain a montré son admiration pour son roman et a reconnu que «c’est un très beau livre » et un «hymne à la littérature». «Ce que j’aime dans la littérature, c’est quand elle ouvre ses fenêtres. Je l’ai lu d’une traite», a-t-il déclaré. Un membre du jury, en la personne de Philippe Claudel n’y est pas allé par quatre chemins pour magnifier l’œuvre de Mohamed Mbougar Sarr : « Avec ce jeune auteur, on est revenu aux fondamentaux du testament du Goncourt. 31 ans, quelques livres devant lui. Espérons que le Goncourt ne lui coupera pas son désir de poursuivre  ». Un autre membre du jury, Paul Constant, a également affirmé. «Ça c’est fait au premier tour. C’est écrit de façon flamboyante. C’est un hymne à la littérature». 

Il y a tout juste un mois, le romancier Abdulrazak Gurnah, né en Tanzanie mais habitant au Royaume-Uni, recevait le prix Nobel de littérature. Il est le premier auteur noir à recevoir la plus prestigieuse des récompenses littéraires depuis 1993. Le Tanzanien, connu notamment pour son roman Paradise a été récompensé pour son récit « empathique et sans compromis des effets du colonialisme et le destin des réfugiés pris entre les cultures et les continents », selon le jury.

Bref, au-delà du Sénégal et la Tanzanie, c’est toute l’Afrique qui est fière de ces prix qui, certainement en appelleront d’autres.

Pour rappel, Mohamed Mbougar Sarr est aussi le premier écrivain d’Afrique subsaharienne à recevoir ce Prix. A noter que la publication de son roman est le fruit d’une co-édition entre les éditions Philippe Rey et la maison d’édition sénégalaise Jimsaan.

La presse occidentale a souvent omis? de citer cette dernière. D’où cette précision.

Tidiane Diouwara

Tidiane Diouwara est journaliste RP et spécialiste des sciences de l’information. Il est titulaire d’une maîtrise universitaire en linguistique, d’un doctorat 3 ème cycle en sciences de l’information. Il est Directeur du CIPINA (www.cipina.org), une association spécialisée dans la promotion de l'image de l'Afrique. Il est également Conseiller diplomatique et expert des Droits de l'Homme.