Les nouveaux inquisiteurs

(Publié dans Echo Magazine du 22 août 2018)

Vous éprouvez quelque inquiétude quant à l’avenir d’un enfant élevé par un couple de même sexe car, comme l’écrit lucidement l’écrivain et poète Christian Bobin dans Le Très Bas (folio), «il est bon pour l’enfant d’avoir ses deux parents, chacun le protégeant de l’autre: le père pour le garder d’une mère trop dévorante, la mère pour le garder d’un père trop souverain».

Vous vous interrogez sur le bienfondé de la procréation médicalement assistée (PMA) anonyme, et notamment de son extension – actuellement discutée – aux femmes seules et aux couples de même sexe, au-delà du couple homme-femme stérile ou non conjugal. Ne pas connaître ses origines, ne serait-ce donc pas une nécessité vitale? Si la filiation n’était qu’une affaire sociale et non biologique, comment expliquer la quête effrénée de tous ceux qui sont à la recherche de leur véritable géniteur?

Vous craignez que la Gestation pour autrui (GPA) n’ouvre la voie à une marchandisation de la vie humaine. De manière générale, vous regrettez que les techniques de fécondation artificielle évacuent tous les échanges aussi fondamentaux que subtils qui se tissent entre la mère et son enfant durant les neuf mois de grossesse.

Vous déplorez que l’avortement, au lieu d’être pratiqué dans des cas exceptionnels comme le viol ou la mise en danger de la vie de la mère, soit désormais banalisé malgré les souffrances psychologiques, trop souvent inavouées, qu’il inflige à la femme, sans parler de ce que pourrait éventuellement ressentir une âme venant s’incarner.

Vous ne comprenez pas que l’on parle de «changement de sexe» quand un transsesexuel subit une opération chirurgicale car les nouveaux soi-disant organes masculins ou féminins greffés ne sont que des simulacres d’organes génitaux sans aucune fonction reproductive.

Si vous affichez ouvertement ces doutes, sachez que vous prenez le risque d’être considéré, au mieux comme un «catho retardé», au pire comme un «facho patenté». Par qui? Par les nouveaux inquisiteurs pardi!

Toujours plus nombreux, avec les mots «amour, tolérance, liberté, évolution» à la bouche, les nouveaux inquisiteurs auront vite fait de vous culpabiliser. Si leurs bûchers ne brûlent plus les corps physiques, comme au Moyen-Âge, ils crament les esprits réfractaires de tous ceux coupables, à leurs yeux, de ne pas s’aligner sur ce qui est désormais devenu la pensée unique. Celle qui, en encourageant les dérives enferme, au nom de la liberté, méprise, au nom du respect, les femmes et les hommes de notre temps en quête d’authenticité.

Philippe Le Bé

Désormais auteur, Philippe Le Bé a précédemment été journaliste à l’ATS, Radio Suisse internationale, la Tribune de Genève, Bilan, la RTS, L'Hebdo, et Le Temps. Il a publié trois romans: «Du vin d’ici à l’au-delà » (L’Aire),« 2025: La situation est certes désespérée mais ce n’est pas grave » (Edilivre) et "Jésus revient...en Suisse" (Cabédita)

2 réponses à “Les nouveaux inquisiteurs

  1. Bravo! Oui, je suis de ceux qui se posent ces questions. Mais non, pardon, je suis même de ceux qui répondent délibérément non aux tentations de ceux qui jouent à concurrencer la vie ou à remplacer Dieu par l’homme et la vie par la science et la technique. L’indépendance de mon esprit m’est plus chère que d’éviter le risque de devenir victime de cette inquisition. Inspiré pas la phénoménologie de la vie selon Michel Henry, je crois en la liberté de la vie de s’éprouver et se manifester comme elle le fait, sans qu’il me soit donné de pouvoir la soumettre à mes idées. J’accepte délibérément d’être donné par la vie comme je suis et je témoigne comme Quaker pour la reconnaissance des limites de ma contingence et je rend grâce à la vie pour tout ce qu’elle me donne, entre autres aussi l’expérience des manques et des contraintes qu’elle m’impose.

  2. Incroyable. Je m’attendais tout sauf à ça.

    Personnellement je ne vous connais pas, mais en lisant le titre de l’article, et avant de cliquer dessus pour accéder à l’article en entier, je m’attendais justement à lire encore un article qui traite de fachos, nazis, ceux qui pensent différemment de ceux qui se croient “progressistes”.

    Ca me surprend tellement que je trouve l’article incroyable.

    Je crois que de nos jours, il n’est pire que cette censure idéologique qui constamment va essayer de vous disqualifier, constamment vous empêcher de vous exprimer et in fine d’avoir un débat démocratique.

    Avec eux, les “progressistes”, les “humanistes”, point de débat, ils ont la science infuse et ne vous avisez pas de penser différemment.

    On appelle ça le totalitarisme.

    Merci pour votre article, car quoiqu’on pense sur ces sujets, il est bon d’avoir des paroles libres.

    Or de nos jours, les gens qui ont la parole libre sont assez rares.

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