Blockchain: une meilleure traçabilité pour un consommateur éclairé

En cette période festive et d’achats (CyberMonday, BlackFriday), une question vous est peut-être venue à l’esprit: d’où viennent précisément les produits que nous consommons? Quel processus de transformation ont-ils subis? Quel moyen de transport a été utilisé? À l’heure du changement climatique, et d’une prise de conscience généralisée de l’impact de nos choix individuels sur le futur de la planète, la traçabilité des produits que nous consommons devient primordiale. La transparence devrait non seulement “expliquer” le prix final, mais aussi nous aider à faire un choix éclairé.

Dans ce contexte, la technologie des chaînes de blocs (ou blockchain en Anglais) est d’une grande utilité. Cette technologie permet de suivre et d’enregistrer chaque étape de la vie d’un produit, depuis l’approvisionnement en matières premières jusqu’à la vente finale, en fournissant aux consommateurs des informations fiables, transparentes et précises sur leur achat potentiel.

Les chaînes de blocs permettent ainsi de suivre et d’enregistrer chaque étape de la vie d’un produit: chaque transformation ou “déplacement” du produit est horodatée et géolocalisée. Chaque agent de la chaîne d’approvisionnement est identifié et ses actions sont enregistrées. Ces informations sont mises à la disposition de toutes et tous, et il n’y a aucun moyen de les modifier. Ainsi, la transparence inhérente à la technologie des chaînes de blocs peut conduire à une plus grande responsabilisation des producteurs et distributeurs, ce qui est d’autant plus important dans un monde globalisé, où nous consommons des produits fabriqués, transformés ou assemblés dans différentes parties du monde.

Quelques exemples pour illustrer ces propos:

La start-up Everledger certifie et surveille le commerce des diamants, afin de diminuer les ventes de pierres précieuses volées ou de pierres de guerre. FoodTrax et Provenance sont deux organisations qui visent la transparence des chaînes d’approvisionnement afin d’aider les consommateurs à mieux choisir leurs produits. Par exemple, Provenance a collaboré avec l’industrie indonésienne de la pêche pour retracer quels sont les poissons capturés de manière durable. Ainsi, les consommateurs peuvent savoir où un poisson a été pêché, combien de transformations il a subi, et s’il provient vraiment d’un procédé de production durable équitable.

Dans ce contexte, la technologie des chaînes de blocs pourrait grandement simplifier le travail des agents des douanes puisqu’ils pourraient facilement identifier les produits faisant l’objet d’un commerce illégal.

De même, le Fonds mondial pour la nature (WWF) a appliqué la technologie des chaînes de blocs à l’industrie de la pêche au thon, afin d’éliminer les captures illégales et les violations des droits de l’homme dans la région des îles du Pacifique.  Pour éviter d’acheter un thon provenant d’une pêche non réglementée ou d’entreprises qui violent les droits de l’homme, le WWF a développé une application basée sur la technologie des chaînes de blocs, qui permet aux consommateurs de scanner n’importe quel emballage de thon avec leur téléphone pour savoir où et quand le poisson a été pêché, par quel navire, et selon quelle méthode de pêche. Comme l’a déclaré Dermot O’Gorman, Directeur de WWF-Australie : “La chaîne de blocs permettra d’éviter la pêche illégale, non réglementée et non déclarée.”

Le Forest Stewardship Council (FSC) est une autre organisation qui utilise cette même technologie pour promouvoir une meilleure traçabilité des produits issus des sociétés forestières. Cet organisme de certification permet aux consommateurs de choisir du bois issu de forêts gérées de manière responsable. Toutefois, l’organisation souhaite accroître la transparence de son processus de certification et ainsi s’attaquer aux allégations trompeuses et fausses. “Des millions de consommateurs et des milliers d’entreprises font confiance au label FSC, et nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour maintenir cette confiance “, déclare Kim Carstensen, Directrice générale du FSC.  Avec cet objectif en tête, FSC met en œuvre une nouvelle stratégie basée sur la technologie de chaînes de blocs.

Ces quelques exemples innovants mettent en lumière une utilisation positive des technologies numériques. En nous permettant d’accéder librement et facilement à toutes ces informations, et en assurant la véracité de ces informations, nous pouvons avoir un impact positif sur l’avenir du commerce mondial et notre planète, grâce à des choix d’achat éclairés et transparents.

Références:

  • Provenance: https://www.provenance.org
  • FoodTrax: https://www.foodtrax.nl
  • Everledger: https://www.everledger.io
  • Forest Stewardship Council: https://ic.fsc.org/en/what-is-fsc

 

Jérôme Duberry

Jérôme Duberry est enseignant-chercheur Post-Doc au Centre de Compétences Dusan Sidjanski en Études Européennes, Global Studies Institute, Université de Genève, et chercheur associé à l’IHEID. Ses activités de recherche s'articulent autour de la convergence entre technologies numériques, politique et développement durable (ODD).

2 réponses à “Blockchain: une meilleure traçabilité pour un consommateur éclairé

  1. C’est vrai qu’on ne peut pas modifier les informations contenues dans la blockchain, mais il ne demeure pas moins que la preuve que la donnée correspondant à la réalité reste à démontrer : un thon peut être faussement déclaré sans que personne le soupçonne et quand il est inscrit dans la blockchain, tout le monde pense qu’il est d’origine contrôlée .
    Il faudrait pour cela que chaque élément de la chaîne soit scrupuleusement vérifié pendant son enregistrement pour éviter toute fraude, ce qui est évidemment impossible .
    Le deuxième point négatif de cette technologie est le fait qu’elle exige de conserver la totalité de l’information pour une traçabilité sans faille, ce qui aura pour conséquence une augmentation exponentielle de la taille des donnés à conserver et personne ne parle pour l’instant de la durée de rétention de l’information . Au bout de combien d’années peut-on se permettre d’élaguer la base de données ? Et par ce fait rompre la chaîne , car sans le début de la chaîne , la traçabilité se perds !
    Comme aucune application n’a encore été sérieusement été mise en pratique , nul ne sait ce qui va se passer sur le long terme !
    Le troisième défaut vient de l’interopérabilité des données : aujourd’hui, les humains font le lien entre les différentes sources par leur flexibilité intellectuelle, mais la blockchain doit conserver la même structure pour une plus grande efficacité ce qui a pour conséquence de devoir intégrer toutes les données de toutes les sources selon le même principe . Imaginez seulement les ingrédients d’une seule pizza jusqu’au moindre petit grain de poivre à enregistrer dans la chaîne ! Qui peut bien vérifier que le contenu final de la chaîne soit conforme ?
    On peut faire la même remarque sur le CV d’une personne .
    (…)
    Cette technologie est belle en théorie, mais difficilement applicable dans la réalité !

  2. L’idée est belle, mais pour une fois, je suis d’accord avec l’ami Hub.
    Avec la corruption régnant à travers le monde, illusoire d’obtenir des garanties sérieuses.

    Ce serait pourtant idéal de pouvoir savoir que le jambon de Parme vient d’un cochon hollandais, transporté avec des jours de camion pour y être bouchoyé et ressortir avec le fameux label!

    Ou que la tomate Barrilla vient de Chine, qui sait, on pourrait même rêver de la provenance de la cocaïne?
    🙂

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