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Blockchain et le financement de projets durables

Dans un monde globalisé, le besoin de confiance et de sécurité des transactions est accru. Les parties à une transaction ne se connaissent que rarement. Ainsi, les intermédiaires traditionnels, tels que les organisations internationales, les banques et les gouvernements assurent ce niveau de confiance et de sécurité. Aujourd’hui, ces intermédiaires peuvent parfois être remplacés par la technologie blockchain, qui peut elle aussi, offrir un niveau élevé de sécurité, mais à travers une solution décentralisée.

Dans le cadre de la protection de l’environnement et de développement durable, le besoin de fonds est croissant. La prise de conscience mondiale de la vulnérabilité de notre environnement, et de notre responsabilité à préserver des ressources naturelles saines pour les prochaines générations, demandent de trouver de nouveaux modèles de financement plus transparents, participatifs et efficaces. Grâce à la blockchain, ces nouveaux modèles sont dorénavant accessibles. Des fonds peuvent être envoyés directement aux principaux bénéficiaires, de manière transparente et avec un niveau de sécurité élevé. Cette sécurité et transparence permet la confiance, et donc incite à contribuer davantage. La blockchain relie de manière transparente et directe les donateurs aux projets qu’ils soutiennent. Du fait de cette transparence et automatisation des transactions, la blockchain peut également aider à réduire les ressources consacrées au suivi des transactions financières.

Bien que les transactions sur une blockchain soient anonymes,  la possibilité d’utiliser des contrats intelligents (smart contracts), permet aux donateurs de s’assurer que les fonds ne soient attribués que par tranche et sous des conditions pré-établies. Le donateur se rapproche ainsi du terrain et peut donc mieux vérifier l’impact espéré. Dans le cas des deux milliards d’individus non bancarisés dans le monde, l’utilisation de la crypto-monnaie permet de financer de très petits projets de restauration et des opérations locales. Ainsi, les donateurs peuvent soutenir directement, et à moindre coût, de nombreux micro-projets durables et de protection de l’environnement.

Voici quelques exemples de nouveaux modèles de financement.

BitGive est un des premiers organismes de bienfaisance sur la Blockchain, tendant à réduire l’écart entre une technologie innovante et ses applications pratiques pour la philanthropie mondiale. BitGive facilite la collecte de fonds pour les dons en bitcoin visant à soutenir des projets durables et de protection de l’environnement. GiveTrack est une plateforme de don innovante pour les organisations à but non lucratif, visant à assurer la transparence des donations et de leur allocation en temps réel. BitHope est une autre organisation de la société civile qui génère des fonds pour les campagnes à but non lucratif dans le monde. Ces plateformes utilisent des contrats intelligents pour garantir un niveau élevé de confiance et fournir des fonds uniquement lorsque les étapes de réalisation du projet sont atteintes.

La Natural Capital Finance Alliance (NCFA) associe plusieurs organisations dont le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (UNEP), Global Canopy, Fundacao Gerulio Vargas, afin de développer de nouveaux instruments pour le secteur financier, qui intègrent les considérations environnementales. Cela permettra aux banques, aux investisseurs et aux assureurs de prendre de meilleures décisions en évaluant plus précisément l’impact de leurs activités.  L’objectif est également de mieux comprendre les risques, et de trouver des opportunités pour une économie plus verte. La NCFA a l’intention d’utiliser une plateforme blockchain pour augmenter les investissements dans des projets de protection de la biodiversité des écosystèmes et des espèces, y compris les forêts tropicales et les mangroves. Une offre initiale de cryptomonnaire (ICO) permettra à la NCFA de mobiliser des capitaux sous forme de monnaie virtuelle. Chaque donateur, qui acquiert une pièces numérique, peut choisir de les identifier avec une couleur qui représente les ressources en biodiversité qu’il ou elle souhaite protéger. Les donateurs peuvent également choisir les conditions d’échange de leurs pièces numériques. Enfin, ces pièces représentant des actifs de la biodiversité, elles permettent à la NCFA de valoriser les ressources naturelles.

Le Fonds de partenariat pour le carbone forestier (FCPF) est une alliance de gouvernements, d’entreprises, d’organisations non gouvernementales et de communautés de peuples autochtones, qui vise à protéger les forêts du monde entier et à réduire les émissions de CO2 résultant du déboisement et de la dégradation des forêts. Les gouvernements et les différentes parties prenantes sont incités à protéger leurs forêts, et reçoivent en échange des paiements en crypto-monnaire. Le méta-objectif de ce mécanisme est d’atténuer l’impact négatif de la déforestation sur le changement climatique mondial. Le Fonds carbone, géré par le FCPF, soutient financièrement diverses parties prenantes, telles que les peuples autochtones tributaires de la forêt, d’autres habitants de la forêt ou le secteur privé, qui contribuent à gérer les forêts de manière durable.

Ces quelques exemples ne sont de loin pas exhaustifs. Mais ils illustrent le bouillonnement de nouvelles initiatives de financement vert, transparent et fiable. La blockchain permet de soutenir les acteurs sur le terrain qui sont en contact direct avec les écosystèmes en danger, et dont les actions ont un impact très concret sur la préservation de la nature. À l’heure des manifestations pour le climat, la technologies numériques peut apporter des solutions innovantes pour contribuer à renforcer le rôle de la société civile dans la protection de l’environnement et construire un avenir durable et sain pour toutes et tous.

Pour aller plus loin:

Global Environmental Governance in the Information Age: Civil Society Organisations and Digital Media, Routledge.

Jérôme Duberry

Jérôme Duberry est enseignant-chercheur Post-Doc au Centre de Compétences Dusan Sidjanski en Études Européennes, Global Studies Institute, Université de Genève, et chercheur associé à l’IHEID. Ses activités de recherche s'articulent autour de la convergence entre technologies numériques, politique et développement durable (ODD).