Un accord vient d’être trouvé entre l’UE et la Turquie : chaque immigrant clandestin en Grèce sera reconduit en Turquie et en compensation un requérant d’asile, dûment vérifiée, sera transféré de Turquie dans l’UE. Cette procédure a deux avantages : interrompre le flot de réfugiés traversant la mer au risque de leur vie et au bénéfice de passeurs ; constituer une garantie pour la Turquie de ne pas accroître sa charge en réfugiés. Ce n’est pas glorieux, même si c’est astucieux, comme le sont les solutions agencées par des débats diplomatiques.
On cessera donc d’annoncer chaque soir le nombre noyés de la journée et d’entasser des réfugiés dans des camps précaires aux frontières de la Grèce. Le fond du problème n’est pas touché : la fuite éperdue de réfugiés fuyant les combats qui menacent leurs vies après avoir détruits leurs biens ; le flux de réfugiés économiques qui risquent la mort par la faim. Les Etats-Unis qui sont largement responsables du désordre au Moyen-Orient s’en désintéressent ; la Russie songe à en tirer un bénéfice en terme de puissance ; les riches pays arabes du Golfe témoignent d’une indifférence totale à l’égard de leurs coreligionnaires dans la détresse. L’Europe reste donc la seule terre promise parce que la paix et la prospérité y règnent.
C’est le lieu de rappeler que ce ne fut pas toujours le cas. Depuis 70 ans l’Europe a connu une époque de paix, qui ne s’est jamais produite auparavant. Tel fut le but et le résultat de l’UE. Instruits par deux guerre mondiales, les Européens ont décidé de régler leurs conflits pacifiquement par la négociation. Ils viennent d’esquisser des solutions pour la Syrie.
C’est l’occasion de rappeler aussi qu’Angela Merkel fut la seule à s’inscrire résolument dans cette œuvre de générosité politique. Certains Européens dans les pays de l’Est ont manifesté leur refus de venir en aide aux réfugiés ou, pire, de les trier selon leur religion. Les partis populistes ont surfé sur la vague d’inquiétude des électeurs. Il reste que dans les élections régionales allemandes, la somme des voix allant aux partis soutenant Angela Merkel représente toujours une majorité. Les Allemands ont durement appris que le nationalisme, le racisme, le génocide finissent par se retourner contre les initiateurs de ces abominations.
Ce qu’il y a de plus précieux dans une famille, c’est le plus faible, le nouveau-né. Le bien-être de tous les peuples se mesure à celui du plus démuni. L’espèce humaine se sépare de la lutte pour la survie par sa solidarité avec les plus faibles, qui sont porteurs d’une valeur irremplaçable et mystérieuse. Angela Merkel a sauvé l’honneur de l’Europe. Elle entre dans la généalogie des grands Européens, quelque part entre Rousseau et Mère Theresa.