Le jeudi 21 mai vers 17 heures une délégation du Conseil national a assisté au débarquement de 287 réfugiés érythréens depuis un escorteur de la marine militaire italienne. Cela se passait ä la base navale d’Augusta dans la province de Syracuse. Des hommes vêtus de combinaisons étanches désinfectaient les arrivants qui débarquaient ensuite à la queue leu leu. Le premier geste de la Croix-Rouge sur le quai était de leur offrir une bouteille d’eau et des chaussures pour ceux qui étaient pieds nus. Ils seraient ensuite logés dans une vaste tente pendant le temps nécessaire à leur enregistrement et aux visites médicales. Puis ils émigreront vers un camp définitif près de Gela ou vivent parfois pendant des années 5 000 personnes.
Ceux qui débarquaient avaient l’air en bonne santé, guère éprouvés par cinq jours de dérive sur une embarcation précaire partie de Lybie : c’étaient de jeune gars fuyant le « service militaire » sans fin ou le travail forcé dans les entreprises d’Etat. Ils ont risqué leur vie pour franchie la frontière et ont accepté de la risquer une seconde fois en traversant la mer. On éprouve le sentiment que toute l’Afrique est en train de faire naufrage comme un gigantesque bateau à la taille d’un continent. Après avoir expulsé les colonisateurs, elle expulse ses propres citoyens.
Nous avons rencontré les préfets italiens en charge de l’opération. Ils sont résolument engagés dans une tâche sur laquelle il n’y a pas de discussion possible : les passagers d’un bateau en perdition doivent être secourus selon la loi de la mer ; les réfugiés authentiques doivent être accueillis par le pays où ils cherchent refuge. Ce n’est pas de la grandeur d’âme, c’est la stricte application des lois. Or, cela ne se passe pas de la même façon dans les eaux du Sud Est asiatique : les réfugiés ne sont pas vraiment accueillis mais abandonnés en mer ou parqué dans des camps. Les préfets italiens expriment le sentiment que l’Europe se distingue par un respect des valeurs à nul autre pareil. Nous avons appris de l’histoire.
Après tant de guerres sur son sol meurtri et balafré, l’Europe a enfin compris l’importance de la paix et le respect des personnes. Les parlementaires UDC de la délégation n’étaient pas moins émus que les autres. On discutera bientôt de l’accueil suisse à ces réfugiés pour soulager l’Italie qui en accueille déjà 170 000. La vision crue de la réalité inspirera-t-elle une majorité au parlement fédéral ?