Cette année électorale s’ouvre sur deux défis majeurs : les suites de la votation du 9 février 2014 qui incluraient une pénurie de main d’œuvre qualifiée; les conséquences du franc fort qui freineraient nos exportations, composant 70% de notre revenu national. De quelque côté que l’on se tourne, c’est le danger d’une crise économique dont les classes moyennes seraient les premières victimes. C’est la pointe d’une campagne électorale, là où il faut prendre courageusement position plutôt que de papoter sur des sujets mineurs.
Deux problèmes soigneusement dissimulés font ainsi impitoyablement surface : notre relation ambigüe avec l’UE ; notre réussite nationale dans un continent en crise. En allant à la source de ces défis, on retrouve deux fois le même problème : l’égoïsme nationaliste finit par se retourner contre celui qui le pratique. Comment pourrions-nous indéfiniment être prospères parmi des voisins en voie d’appauvrissement ? Comment fonctionner en fermant les frontières aux personnes et en exigeant de les ouvrir large aux marchandises ? Comment se désintéresser du sort de notre continent, comme s’il ne nous concernait pas ?
Un sondage récent donne 58% du peuple favorable aux relations bilatérales, plutôt qu’à l’application aveugle du nouvel article constitutionnel contre l’immigration, dite massive. C’est le moment d’exploiter cette brèche, c’est-à-dire de rappeler que l’UDC a lourdement menti aux citoyens en prétendant que son initiative ne mettrait pas en péril les relations bilatérales. Il faut tout de suite donner au peuple l’occasion de se prononcer clairement sur nos relations avec l’Europe, même au risque d’échouer.
Ce serait l’occasion de lui présenter en plus une proposition réglant nos problèmes de change avec nos voisins. Qu’on le veuille ou non nos échanges commerciaux avec nos voisins sont tellement importants que nous ne pouvons plus maintenir une indépendance factice et dangereuse du franc suisse. On ne peut pas être à la fois dehors et dedans, alors qu’on ne pèse pas plus qu’un Länder allemand.
Quoi que nous fassions, quel que soit notre égoïsme national, prétendument sacré, la Suisse n’est pas une île perdue dans l’Océan Pacifique. Elle est solidaire de son environnement géographique et économique. Il n’est pas possible d’être de plus en plus riche avec des voisins de plus en plus pauvres. Il n’est pas possible d’être heureux tout seul et encore moins de se gausser du malheur des autres.