Une réponse de la Suisse aux attentats islamistes

 

 

Selon l’alinéa 3 de l’article 72 de la Constitution fédérale « la construction de minarets est interdite ».[. Cette prescription indécente résulte d’un vote populaire, acquis en 2009 à une large majorité du peuple et des cantons, contre l’avis du Conseil fédéral et du parlement et salué unanimement par les partis fascistes de l’étranger. Les événements de la semaine passée à Paris motivent l’occasion de revenir sur cette erreur politique et de la corriger.

Aussi longtemps que la communauté musulmane sera discriminée en Europe, où que ce soit, de quelque façon que ce soit, des vocations de terroristes surgiront. Des esprits faibles sont susceptibles d’être endoctrinés à bon compte. La Suisse, neutre en principe, risque de devenir une cible symbolique. Si un attentat s’y produit, les initiateurs de cette clause en seront responsables.

La riposte au terrorisme n’est jamais la vengeance du pays agressé, parce que c’est précisément le but visé par ces criminels égarés.  La réplique intelligente et efficace consiste à prendre le contrepied de la violence subie. A prévoir bien sûr des mesures de protection de la population, mais aussi à respecter et à intégrer la communauté musulmane dans la nation, mieux que de l’en exclure. Elle est la première offensée par des meurtres qui visent à la bafouer, à décrier sa religion, à la présenter comme un ennemi de l’intérieur et à inscrire ce verdict infâmant dans la Constitution.

C’est exactement dans ce piège que tomba en 2009 l’initiative antiminarets. Certains initiateurs furent peut-être assez cyniques pour espérer qu’elle susciterait des troubles allant jusqu’à l’attentat meurtrier. Il en serait résulté des bénéfices électoraux pour la mouvance fasciste de la politique. Cette espérance a été déçue : la communauté islamique s’est murée dans sa dignité offensée.

Il est maintenant temps de corriger cette grave erreur politique. Le peuple a eu le dernier mot dans cette affaire mais il n’a pas eu raison. Il a été trompé. Il est temps de lui dire la vérité. Il faut expliquer que l’Islam est la troisième confession du pays, qu’elle prône l’amour du prochain autant que le christianisme et qu’elle ne peut plus être isolée jusqu’au niveau constitutionnel. Il faut que le Conseil fédéral lance une initiative pour supprimer ces six mots qui déshonorent notre loi fondamentale. Quels sont les partis, les Eglises, les associations qui soutiendront cette proposition ? Et qui s’y opposera ?

 

Jacques Neirynck

Jacques Neirynck est ingénieur, ancien conseiller national PDC et député au Grand Conseil vaudois, professeur honoraire de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), d'origine belge, de nationalité française et naturalisé suisse. Il exerce la profession d'écrivain.