Légiférer sous la contrainte

 

Ce qui est demandé au parlement fédéral pour régler le différend des banques avec les USA est invraisemblable : voter une loi d’exception, contraire au Code pénal et à la Constitution, dans l’urgence sous la menace de mesures de rétorsions des USA. Il suffit d’énoncer cette proposition, sans même signaler le contenu de la loi, pour s’y refuser absolument, sans même entrer en matière. Or il ne s’est trouvé qu’une courte majorité de 100 voix contre 90 pour le refus.

Le contenu de la loi est encore plus significatif. Il s’agit d’autoriser les banques à dénoncer aux USA leurs employés qui ont été mêlés à des soustractions d’impôts par des citoyens américains. Que signifie pour eux cette dénonciation ? Sans doute le risque d’une inculpation, d’une condamnation à de longues années de prison et, de fait, à l’impossibilité de voyager hors de Suisse de peur d’être extradé. Personne ne réfléchit au fait que ces employés n’avaient pas le choix de refuser les ordre qui leurs étaient donnés par la direction sous peine d’être licenciés. Travaillant en Suisse, ils n’ont pas violé le droit suisse. Le cas échéant les membres de la direction de ces banques pourraient être mis en cause mais on devine déjà qu’ils ne le seront pas.

Comment un parlementaire conscient de son devoir peut-il dans ces circonstances  faire fi de son serment de respecter les lois de son pays ? C’est un grand mystère. Les abimes de la lâcheté humaine sont insondables.

Jacques Neirynck

Jacques Neirynck est ingénieur, ancien conseiller national PDC et député au Grand Conseil vaudois, professeur honoraire de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), d'origine belge, de nationalité française et naturalisé suisse. Il exerce la profession d'écrivain.