L’art de capituler sans qu’il y paraisse

Ce matin, la presse s’étrangle d’indignation devant les conditions que le diktat américain impose à la législation suisse. Sans avoir besoin d’envoyer une armée pour envahir le territoire, les Etats-Unis imposent leur loi et prélèvent un tribut. Parmi toutes les vexations de cet ultimatum, la pire est sans doute l’obligation faite aux banques de dénoncer leurs collaborateurs. Dès lors ceux-ci devront s’abstenir de voyager aux Etats-Unis de peur d’y être arrêtés. Pire : nombre de pays ont des accords d’extradition avec les EU et le collaborateur bancaire dénoncé finira par n’être plus en sécurité qu’en demeurant dans les frontières de la Suisse. En attendant que les EU nous imposent d’extrader nos propres citoyens. On ne voit pas comment la Suisse pourrait résister.

On peut parier que le Parlement se couchera même si aujourd’hui tous les partis, hormis le PBD, se déclarent opposé à cet « accord ». DE vastes négociations de couloirs vont se développer dès la semaine prochaine. On expliquera aux récalcitrants qu’ils seront responsables de la ruine du pays s’ils ne cèdent pas. Et à force de pressions, une petite majorité se rangera du côté du Conseil fédéral après que l’on ait expliqué que finalement les inconvénients ont été exagérés.

Il y a pourtant une solution simple : interdire aux banques suisses d’encore accepter des clients américains et détruire les archives qui contiennent les noms des clients du passé. Dès lors on pourrait signer n’importe quoi puisqu’il n’y aurait plus d’information à transmettre. J’ai naïvement suggéré cette échappatoire à des grands experts financiers. Ils m’ont ri au nez. Ce serait trop simple. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Et pourquoi faire compliqué sinon pour empêcher de prendre des décisions claires ?

Jacques Neirynck

Jacques Neirynck est ingénieur, ancien conseiller national PDC et député au Grand Conseil vaudois, professeur honoraire de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), d'origine belge, de nationalité française et naturalisé suisse. Il exerce la profession d'écrivain.