La malédiction du génome (suite)

 

Pour 200 CHF, on peut actuellement effectuer une analyse du génome. Cela peut servir à deux types de recherche : soit pour la santé, soit pour la police. Soit pour identifier  et prévenir des maladies génétiques ; soit pour identifier  sur base d’une suspicion fondée des criminels qui auraient laissé des traces sur les lieux de leur méfait ou encore pour disculper des innocents.

Or, la loi sur l’analyse génétique humaine est très (trop) stricte. Dans son principe, on ne peut relever l’identité génétique d’une personne qu’avec son accord. De plus celui, qui voudrait faire procéder par simple curiosité à sa propre analyse génétique en assumant les coûts, doit d’abord obtenir l’accord d’un médecin. Est réservé bien entendu l’usage de l’analyse à des fins policières. En tous cas ni l’employeur, ni une compagnie d’assurances ne peuvent exiger une telle analyse.

Coup sur coup, le Conseil national a émis deux votes qui sont contradictoires : sollicité par une motion de la Commission Science, Education culture de proposer à titre volontaire une analyse aux parents de tous les nouveaux nés en vue de détecter et de soigner d’éventuelles maladies génétiques, le Conseil a refusé avec indignation, à peine sept voix sur 200 se sont prononcées en faveur de cette mesure de médecine préventive.

A la session suivante une motion proposait de réaliser un test ADN « sur certains requérants d’asile » à titre préventif et de manière systématique. Dans le développement, la catégorie visée est précisée : les requérants originaires de Tunisie, d’Algérie et du Maroc parce que dans cette catégorie le taux de criminalité est élevé. Le Conseil fédéral s’est opposé à cette motion contraire au droit dans son principe: toute personne bénéficie d’une présomption d’innocence ; tous les habitants de la Suisse jouissent de l’égalité de traitement. A partir du moment où la loi s’appliquerait de façon différente à certaines catégories, la porte est ouverte au pire : dissoudre l’unité du genre humain pour s’en prendre à certains groupes.

La situation juridique paraissait claire et cette motion aurait dû être repoussée. Ce fut le contraire, il se trouva 92 conseillers nationaux pour la soutenir. Pour le parlement fédéral, un test ADN, utile pour prévenir la criminalité, est inutile pour prévenir une maladie.

Le plus simple serait – et sera dans le futur –  de procéder à l’enregistrement de l’ADN de toute la population, tout comme on l’identifie actuellement dans les passeports par d’autres moyens. La police sera bien faite et de façon égale pour tout le monde. Et surtout on pourra enfin travailler à une thérapie intelligente des maladies génétiques.

 

Jacques Neirynck

Jacques Neirynck est ingénieur, ancien conseiller national PDC et député au Grand Conseil vaudois, professeur honoraire de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), d'origine belge, de nationalité française et naturalisé suisse. Il exerce la profession d'écrivain.