Sur l’art de tourner en rond au parlement

Ainsi les deux chambres ont accepté le principe de la clause du besoin. Les cantons pourront freiner l'ouverture de nouveaux cabinets médicaux sous le prétexte d'empêcher l'explosion des primes d'assurance maladie. Durant les dix années du précédent moratoire, cela n'a pas empêché cette "explosion". Comme cela n'a pas marché, on espère que cela marchera dans le futur.

Durant le débat, Alain Berset a énoncé un chiffre qu'il a utilisé comme argument pour le moratoire, mais qui en fait le démystifie. En 2012, la Suisse n'a diplômé que 845 médecins dans ses facultés. Mais simultanément elle a importé 2425 diplômés étrangers. En fait il y a eu durant cette année plus de médecins allemands que suisses à s'installer. Pourquoi? Parce que le besoin s'est fait sentir. Ces médecins n'émigreraient pas s'ils ne trouvaient pas en Suisse des patients à soigner.

Il y a trop peu de diplômés suisses parce que les cantons universitaires refusent de relever le numerus clausus. Et l'on va confier aux cantons le pouvoir de contrôler le nombre de cabinets! Ils agiront dans le sens d'un rationnement des soins qui effectivement réduira le coût global.

Il ne fallait pas nationaliser les soins médicaux. Maintenant c'est trop tard. On s'enfonce dans une gestion administrative, bureaucratique, politique de notre système de santé. Cela ne peut vraiment réussir que si l'espérance de vie diminue. C'est un objectif comme un autre. Pourquoi ne pas l'annoncer clairement?

Jacques Neirynck

Jacques Neirynck est ingénieur, ancien conseiller national PDC et député au Grand Conseil vaudois, professeur honoraire de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), d'origine belge, de nationalité française et naturalisé suisse. Il exerce la profession d'écrivain.