Le jeudi 7 mars la séance du Conseil national présentait un intérêt inhabituel. On débattait de la « Recherche énergétique suisse coordonnée », sujet austère qui normalement passe comme une lettre à la poste. Il s’agissait d’attribuer 60 millions sur quatre ans à ce programme. Le montant était raisonnable, mais qui allait payer ?
L’idée géniale du Conseil fédéral consistait à obliger les EPF à prélever ce montant sur leur budget ordinaire et à l’affecter obligatoirement à ce genre de recherche. Première entorse à une règle bien établie : les EPF sont autonome pour leur enseignement et leur recherche, sinon ce ne sont plus des universités au sens plein du terme. Argument du Conseil fédéral : en 2012, lors de la discussion sur le plan quadriennal 2013-2016, le parlement à une large majorité avait augmenté le budget des EPF de façon à assurer une croissance constante de 3, 9% par an sur la période considérée. Cela avait suscité la mauvaise humeur du Conseil fédéral, anxieux de réaliser des économies sur cette période. Dès lors qu’une augmentation du budget ordinaire avait été imposée par le parlement en 2012, il n’était pas question de prévoir une autre augmentation de 60 millions en 2013, même si elle concernait une tâche supplémentaire. Les EPF n’avaient qu’à transformer des biologistes et des informaticiens en spécialistes de l’énergie par un coup de baguette magique.
Le PS est alors entré en dissidence et a menacé de ne pas voter le budget de l’énergie si les EPF ne renonçaient pas à une toute autre mesure, qui n’avait rien à voir avec l’énergie, à savoir la proposition de doubler les taxes d’inscription des étudiants. Cela pouvait faire du vilain car de toute façon l’UDC voterait contre le budget par réflexe machinal et haine viscérale de l’Etat. Mis au pied du mur les EPF ont abandonné leur projet d’augmentation générale des taxes et le PS a voté finalement le 7 mars les 60 millions pour l’énergie.
Ce n’est pas tout. Dans ce qu’il faut bien appeler un « deal », les EPF ont proposé d’entente avec le PS de tripler les taxes des étudiants dont les parents résident hors du pays (Suisses et étrangers) et ne payent donc pas d’impôts à la Confédération. Et donc ces braves gens, qui n’habitent pas le pays, financeront en partie notre programme énergétique à l’issue de cette partie de billard politico-fiscal à trois bandes.
Tout ceci est aussi sordide que stupide. Il nous faut recruter dans les EPF les meilleurs talents, d’où qu’ils viennent et quels que soient la fortune ou le statut fiscal de leurs parents, particularités qui n’ont strictement rien à voir avec nos programmes de recherche dans un domaine ou un autre.
Durant tout le débat, le Conseiller fédéral Schneider-Amman garda profil bas. Le Conseil fédéral n’a d’autre passion que l’équilibre des comptes. Le reste ne l’intéresse pas sinon au niveau des grandes déclarations rhétoriques. A quand un vrai ministre de l’Education nationale ?