Un Secrétaire d’Etat qui promet de ne pas faire de vagues

Ce 1er janvier, le Conseiller fédéral Schneider-Amman assumera la responsabilité politique de la formation et la recherche, avec toutes les circonspections que l’on connait. Mais, en plus, Mauro Dell’Ambrogio endossera l’habit neuf de Secrétaire d’Etat à la formation, à la recherche et à l’innovation, habit qu’il veut aussi étriqué que possible. Contrairement à son patron, il s’agit d’un haut fonctionnaire certes compétent et intelligent, mais littéralement paralysé par un manque de vision, qui confine à l’autisme.

Dans une entrevue accordée à 24 Heures, il a livré le fond de sa pensée, qui a été vite atteint. «Il ne se passera rien», «L’Etat ne peut piloter le choix de la formation», «Le défi est un peu bureaucratique et ne va pas soulever l’enthousiasme», «Les drames du milieu académique et du milieu professionnel se neutralisent réciproquement». Bref, circulez, il n’y a surtout rien à voir.

Le Secrétaire d’Etat suit une ligne typiquement helvétique: il n’est ni pour, ni contre quoi que ce soit, bien au contraire. La formation et la recherche sont un vaste marché qui doit se réguler par la concurrence avec le moins d’intervention possible de l’Etat fédéral. Aux hautes écoles de faire preuve d’imagination. Dès lors, ce libre marché se régulera par l’argent: Dell’Ambrogio n’a pas d’objection à ce que les taxes d’études soient augmentées, voire atteigne les 8000 CHF annuels exigés par la haute école tessinoise. Bien entendu, les étudiants étrangers pourront payer davantage. Quant aux bourses il n’est pas possible de les harmoniser, voire de les augmenter car les cantons ne parviennent pas à se mettre d’accord. Et au fond, ce n’est pas l’affaire du pouvoir fédéral.

Cette absence de politique rassurera les notables. Leurs fistons et leurs fifilles jouiront d’une exclusivité d’accès à l’enseignement supérieur et ne subiront plus la concurrence des enfants de la classe moyenne, renvoyés aux places subalternes qu’ils occupent avec tellement de dévouement. Les étrangers seront sélectionnés sur la même base. La formation se divisera en deux branches divergentes: aux uns la science, le pouvoir et l’argent; aux autres lacorvée, la servitude et la disette. A chacun son métier et les vaches seront bien gardées.

Jacques Neirynck

Jacques Neirynck est ingénieur, ancien conseiller national PDC et député au Grand Conseil vaudois, professeur honoraire de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), d'origine belge, de nationalité française et naturalisé suisse. Il exerce la profession d'écrivain.