Ces sandwichs au poulet frit qui rendent fous

J’étais récemment en Louisiane et, forcément, goûter à la «bonne cuisine du Sud» a fait partie du programme. La cuisine du sud des Etats-Unis? Cajun ou créole, elle est bien plus exotique qu’ailleurs. Alors il a fallu goûter au jambalaya, au gombo ou encore aux shrimps and grits. Sans oublier le Po’ Boy, ce sandwich très lourd dont tout le monde semble raffoler, avec ou sans tabasco, autre spécialité du coin. J’ai eu le malheur de choisir celui aux huîtres frites. Avec une portion plus que généreuse, qui m’a non seulement empêchée de finir le plat mais fait sauter les deux repas suivants.

«Revoilà un poor boy»

Ce sandwich, avec du vrai pain croustillant (c’est si rare aux Etats-Unis), a d’ailleurs une belle histoire. Deux frères, conducteurs de trams, sentant les difficultés arriver dans leur secteur, ont décidé un jour d’ouvrir un restaurant. Lors d’une grande grève en 1929 contre l’entreprise qui gérait les trams de la Nouvelle-Orléans, ils ont distribué des sandwichs copieux à leurs anciens collègues, toujours plus nombreux à venir faire la queue. «Oh, revoilà encore un poor boy», aurait dit une fois l’un des frères. Le nom est resté. C’est en tout cas ce que veut la légende.

Les Po’Boy peuvent bien sûr être faits au poulet frit, autre «attraction» locale. Mais les histoires de 2019 sont moins belles que celles de 1929. Popeyes, la chaîne de fast-food de Louisiane qui ne jure que par le poulet frit épicé, vient de lancer un tout nouveau sandwich à 3,99 dollars, le 12 août dernier. Elle n’avait auparavant rien de tel à son menu. Dépassée par son succès, elle a rapidement dû faire face à une rupture de stock. Dans le Nevada, un restaurant avait même dû momentanément fermer, car l’afflux de consommateurs affamés gênait la circulation.

Fausse publicité?

Une redoutable stratégie marketing, pour donner encore plus envie? A la base, le but était bien de concurrencer Chick-Fil-A, une enseigne qui donnait déjà dans le sandwich au poulet frit. Rapidement, la guerre entre les deux a battu son plein. Le #Popeyesgate a fait rage sur les réseaux sociaux. D’autres fast-foods vendant des sandwichs au fried chicken sont entrés dans la danse après avoir constaté que le tweet de désapprobation de Chick-Fil-A et surtout la réponse de Popeyes étaient devenus viraux. C’est à partir de ce moment-là que Popeyes a été victime de son succès.

Depuis, les inconditionnels de poulet frit commencent sérieusement à perdre patience et dénoncent une pénurie organisée à des fins commerciales. Un habitant du Tennessee est allé jusqu’à porter plainte contre l’enseigne pour publicité mensongère..

Le 27 août, Jose Cil, le patron du groupe propriétaire de Popeyes, a dû venir s’expliquer sur CNN. «Nous avons fait quelque chose de faux. Nous ne nous attendions pas à cartonner ainsi sur internet», a-t-il admis. Désormais, vous le saurez: aux Etats-Unis, le poulet frit est capable de déchaîner les passions. Mais l’histoire, qui à la base fait sourire, a failli prendre une tournure dramatique le 2 septembre: un homme, à Houston, a pointé son arme sur des employés de Popeyes en apprenant que son sandwich tant convoité n’était toujours pas disponible. De quoi, de nouveau, provoquer des réactions enflammées sur les réseaux sociaux. On n’a pas fini d’entendre parler de poulet frit.

 

 

Valérie de Graffenried

Valérie de Graffenried est la correspondante du Temps aux Etats-Unis.

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