On pensait que la Cour suprême des Etats-Unis (photo Jim Watson/AFP) allait éclaircir une fois pour toute le débat sur l'immigration en confirmant ou en invalidant la loi anti-immigration d'Arizona. Lundi, elle a abrogé plusieurs éléments apparemment centraux de la loi, mais a maintenu la disposition la plus controversée: la possibilité pour la police de contrôler qui que ce soit à tout moment si elle a un doute quant au statut légal d'une personne. C'est précisément ce que la communauté hispanique dénonce, car cette disposition risque d'inciter au profilage racial et au délit de faciès.
Les républicains sont certains d'être les grands gagnants à l'issue de la décision de la Cour. La gouverneure d'Arizona Jan Brewer, qui avait pointé son doight en direction du président démocrate lors d'un de ses passages à Tucson, estime que les neuf juges ont confirmé le bien-fondé de la loi. Elle a aussi déclaré que cette loi avait été adoptée pour compenser l'échec de la politique d'immigration de l'administration Obama. Le candidt républicain à la Maison-Blanche Mitt Romney avait donné son soutien à la loi d'Arizona.
Du côté démocrate, on est un peu plus discret, mais on pense aussi avoir "gagné". En vérité, rien ne paraît définitif et la disposition pouvant favoriser le délit de faciès pourrait encore être attaquée en justice par les organisations de défenses des droits civiques. Pour les Latinos, dont le vote sera crucial lors de la présidentielle de novembre, la décision de lundi est peut-être une victoire pour Barack Obama, mais ce n'en est pas une pour les Hispaniques qui pourraient subir encore davantage des délits de faciès maintenant que la Cour suprême a entériné la disposition.
Faisant montre de peu de réserve, le juge très conservateur Antonin Scalia n'a pas manqué de fustiger l'attitude du président américain en matière d'immigration. Si les auteurs de la Constitution américaine avaient été dans la salle ce lundi, ils se seraient précipités vers la sortie, a déclaré Scalia, s'ils avaient pris connaissance du décret présidentiel visant à ne pas expulser des étudiants arrivés jeunes de façon illégale aux Etats-Unis, mais ayant particulièrement brillé dans leur parcours scolaire et universitaire. Antonin Scalia s'est même demandé si certains Etats auraient rejoint l'Union s'ils avaient su que le président pouvait décider de ne pas appliquer une clause particulière de la loi sur l'immigration. A ses yeux, avec le décret d'Obama, la souverainté des Etats n'est plus garantie.
Mais au fait, qu'en est-il de la politique d'immigration de Barack Obama? La réformer était l'une de ses grandes promesses. Il ne l'a pas tenue, mais il a des circonstances atténuantes. Il avait déjà engagé la très lourde réforme de la santé et face à un Congrès d'une rare hostilité face à l'administration en place, il avait une faible marge de manoeuvre. Dans les faits, le démocrate est sans doute l'un des présidents ayant le plus refoulé de clandestins à la frontière. Mais c'est aussi lui qui a plaidé en faveur du Dream Act, une loi que les républicains n'ont pas voulue, mais qui aurait permis aux jeunes immigrés illégaux de terminer leur cursus scolaire et académique et d'éventuellement demander dans les formes la nationalité américaine selon la procédure habituelle.
Electoralement, le maintien de la disposition risquant de favoriser le délit de faciès est peut-être perçu comme une victoire chez les républicains, mais il pourrait se retourner contre eux en novembre. La communauté hispanique pourrait fortement se mobiliser en faveur de Barack Obama dont l'administration a contesté la constitutionnalité de la loi.