Pleux, l’éducation et les enfants d’aujourd’hui

J’ai lu quelques interviews de Pleux sur l’enfant roi. J’ai l’impression que son début de carrière avec des jeunes à problèmes l’a trop influencé. Certains comportements n’existent pas chez un chérubin bien traité.

La discipline bien appliquée aurait pour effet de canaliser l’enfant dans des activités autorisées  et  bénéfiques pour lui. Pour cela, il faut établir une liste de possibilités d’activités. Le cerveau de l’enfant se développe le plus pendant les trois premières années. Il explore, bouge, comprend et apprend énormément à cette période, et doit disposer de tout cela.

Les personnes âgées savent que les enfants sont capables d’effectuer quelques tâches exigées par le passé, comme la politesse et le respect de l’adulte. Je me souviens de ma classe à l’école, nous étions quarante élèves assis à leur pupitre.  Nous pouvions tous être assis dans le calme. C’est possible, cela peut être obtenu par des punitions, par des récompenses, par un cours intéressant, et probablement d’autres façons. Nous devons garder à l’esprit ce qui est possible, et améliorer les techniques pour l’obtenir.

Pleux semble surpris quand les parents laissent l’enfant s’exprimer, et  communiquer avec lui. Les parents appliquent évidemment ce qui est conseillé par les psychologues, notamment Dolto, depuis trente ans au moins, et qui figure actuellement dans les articles de conseils d’éducation Pro Juventute. Dans le cas d’un petit, de nombreux comportements s’expliquent vraiment par le fait qu’il a perdu sa chaussure ou qu’il ne sait pas comment ouvrir l’emballage. Le problème est résolu dès qu’il est expliqué.

Dans une interview il remarque que l’enfant va bien lorsqu’il est content d”être enfant. Ca, je l’ai observé aussi. J’ai arrêté de travailler pour être avec ma fille  et j’ai créé un monde où le petit enfant joue autant que possible, plusieurs heures par jour. Les trajets, sorties au supermarché et autres activités des parents étaient minimisés. L’adulte ne parle pas des problèmes ni de ses intérêts et au contraire s’intéresse et participe aux jeux, et cela se passait très bien.   Malheureusement les autres l’initient aux jouets nocifs , réseaux sociaux etc.

Au cours des années, par contre, j’ai suivi les indications des psychologues, qui conseillaient d’autoriser au pré-adolescent le bonbon de son choix, les habits qu’il aime, la télévision et les réseaux sociaux.  Ils conseillent de donner exactement ce que l’enfant veut, pour l’intégration sociale, et ignorent les effets nocifs des colorants chimiques, des dessins animés violents, etc. J’observe qu’un choix libre peut avoir une composante instinctive mais la mode et la publicité priment clairement.  Récemment, plusieurs études et articles montrent la nocivité des réseaux sociaux et leur effet négatif sur la santé mentale des jeunes.

Cependant, je me suis demandée si le problème de la jeunesse actuelle ne serait pas ailleurs. Dans mon enfance, de nombreuses mères étaient à la maison avec les enfants, la mienne est restée avec moi jusqu’à trois ans, puis a travaillé à temps partiel. Nous jouions avec les autres dehors, et seuls à la maison.  Le rythme de vie de l’enfant est alors plus calme, il changera d’activité environ dix fois moins souvent. Des études ont montré qu’un loupiot dans une bonne crèche a un comportement normal mais son niveau de cortisol est plus élevé. Celui-ci indique le stress, l’enfant vit, les premières années, un stress plus élevé. On peut imagine qu’il s’y habitue, recherche ensuite le stress et l’excitation et ne se concentre pas aussi bien.

Ils sont aussi en grand groupe, et il est impossible de se reposer en cas de fatigue.  Le résultat est l’irritation, le fatigué ennuie les autres et l’irritation se répand dans le groupe.

L’enfant qui allait à l’école partait de la maison vers huit heures, passait quelques heures à l’école, souvent la pause de midi à la maison, et rentrait pour le goûter. La mère était constamment à la maison, ne sortait quasiment pas, et les périodes passées dans un groupe de vingt enfants surexcités dans une pièce étaient bien plus rares. Dans des telles conditions, les animaux s’agressent dans les élevages.  Avant, l’enfant jouait dehors et se couchait tôt au calme.  Les différences résident donc probablement dans la présence aimante de la mère, qui devait s’occuper toujours des enfants, le nombre plus petit d’enfants dans la pièce, et les journées moins chargées.

Aujourd’hui, le parent voit l’enfant seulement une ou deux heures, après une journée très fatigante pour celui-ci. Combien de fois l’enfant at-il été frappé pendant cette journée? Qu’est-il arrivé d’autre? Peut-être est-il fatigué ou irritable. Les articles sur le phénomène du ‘broken cookie’ où l’enfant fait une crise de larme parce que son biscuit est tombé par terre expliquent qu’il s’agit en fait d’un excès de frustration de la journée. C’est la goutte qui fait déborder le vase et l’enfant exprime son excès d’émotions par une crise de larmes. Les articles sur le sujet conseillaient d’accueillir celle-ci par un gros câlin, sachant qu’après une demie-heure l’enfant aura fini de pleurer et jouera à nouveau.

Je me demande donc si le petit “gâté” n’est pas parfois un enfant en crise de nerfs après une journée trop dure.

J’aimerais voir une étude qui montre si le fait d’être à la maison ou en garderie et accueil périscolaire a un effet sur  la concentration, le comportement, etc. Je suis au courant d’une étude scandinave montrait que l’hyperactivité était éliminée si l’école commençait à huit ans au lieu de sept. Il faudrait savoir comment ces premières années se passaient, quelles sont les bonnes conditions d’éducation. A mon avis, elle devrait inclure un échantillon d’enfants ayant passé les premières années auprès de leur maman, souvent dans les bras de celle-ci, élevés sans violence ni stress, et libres de jouer et de faire des découvertes toute la journée.

Addendum le 29 mars: Une opinion professionnelle: Isabelle Filliozat: https://www.youtube.com/watch?v=6FkhDmJcPv4

Une tribune ouverte de 280 professionnels de l’éducation dans le Monde parue le 23 mars 2023: https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/03/23/le-recours-a-une-education-repressive-est-defavorable-au-developpement-de-l-enfant_6166631_3232.html

Une de mes amies psychologues trouvait que certains enfants ne mangent pas assez à l’âge de deux à cinq ans, et que la faim crée l’agitation, qui se transforme en habitude. Par contre, s’ils sont repus, ils ont plus calmes et se concentrent mieux.

Selon cet article léger, les enfants japonais ne sont pas punis, restent avec leur mère et font ce qu’ils veulent jusqu’à 5 ans (lien). Le bouddhisme conseille apparemment aussi de tolérer beaucoup les premières années.   L’éducation japonaise pourrait être comparée à l’européenne.

Une étude montre que les enfants dont la petite enfance c’est passée en  crèche sont plus hyperactifs jusqu’à 13 ans (lien).

Dorota Retelska

Dorota Retelska, décrypte les nouvelles du climat. Docteure ès Sciences de l’UNIL, auteure d’Antarctique-Ouest dans le Vide, elle alerte sur les dangers du climat depuis plusieurs années. Elle est active dans plusieurs organisations de défense du climat, entre autres l’Association Climat Genève, Greenpeace, TACA, et le Collectif Climat 2020.

4 réponses à “Pleux, l’éducation et les enfants d’aujourd’hui

  1. Ce constat de l’enfant Roi à qui l’on a laissé tout faire sans donner de cadre est catastrophique. Plus de respect dans la grande majorité des cas.
    J’ai eu la chance d’avoir des parents qui nous emmenaient le week-end dans la Nature et des parents qui ont toujours privilégié l’échange que l’individualisme. Dire Bonjour et Merci laisser sa place dans le bus à une personne âgée où en difficulté était une évidence. Apprendre à utiliser des poubelles pour ces déchets, respecter toute autorité y compris à l’école était le BaBa. Et les punitions comme copier x fois je ne ferai plus….n’a à ma connaissance jamais tué personne. Où être privé de tv ou de sortie csr nous avions dépassé les bornes nous a appris les limites et le Respect en règle générale, et je remercie mes parents aujourd’hui pour cette éducation.
    Ce que les parents d’aujourd’hui ne prennent absolument pas conscience et c’est le plus dramatique. C’est que leurs enfants vont faire leur monde de demain et ce n’est que quand ils seront confrontés à des individus égoïste et sans respect pour autrui qui s’occuperont d’eux dans le chemin de leur vieillesse et les cotoyerons dans leur parcours professionnel qu’ils constaterons leur erreur. Mais là malheureusement il sera trop tard.
    Le Monde de demain est à plaindre.

  2. L’éducation !!
    Il semble que dans cette époque on parle beaucoup de « l’éducation » on parle parle et…. On ne l’a fait pas ! Le monde a changé : par les avantages obtenus d’un côté ( facilité travail- loisirs plus qu’importants – portables) on a créé des déficiences dans d’autres….

    Je sais seulement une chose que j’ai essayé d’appliquer pour mes enfants :
    « L’enfant a besoin d’un cadre et de limites
    C’est ainsi qu’il est rassuré ( aimé) et peut donc s’épanouir »

    Bonne route

    1. Bonsoir,

      Que pensez-vous de ce “cadre” contenant rassurant qui vient d’être évoqué per Deglon ?
      Et s’il advenait que vous lui trouviez du sens selon votre manière de concevoir les choses, ce cadre est-il encore à votre avis correctement défini par les parents ?

      Accessoirement, Pleux évoque aussi les adultes tyrans, allant donc plus loin, et le livre d’Eric Sadin sur l’ère de l’individu tyran interroge sur les conséquences d’un biotope, de l’éducation qu’il propose et des parents qu’il crée.

      Vous remerciant pour ces réflexions,

      1. Le « cadre » tel que définit ce dessus est ce dont a besoin un enfant pour être rassuré et apprendre qu’il y a des limites, des règles , du respect, et ne pas être déboussolé dans le monde adulte quand il sera confronté aux nécessaires règles et contraintes du travail, du vivre ensemble .
        Pas des règles abstraites comme quand j’étais enfant, sanctionnées d’un « parce que c’est comme ça »! Mais des règles expliquées , valorisées ,et appliquées par les parents aussi bien sûr : l’exemple étant toujours plus explicite que les grands discours !

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