Immigration et économie, un couple indissociable

Ce sont des chiffres qui n’ont pas fait les gros titres, mais ils sont significatifs d’une réalité têtue : en Suisse, l’immigration est un indicateur de la marche de l’économie. Les statistiques fédérales de septembre 2017 – les plus récentes que l’on puisse consulter en libre accès – montrent, sur une année, un recul net de près de 5% de la population immigrée résidente permanente, une baisse de l’immigration effective de 5,6% et une chute du solde migratoire de près de 17%.

En trois ans et demi, le contexte qui avait vu l’initiative « Contre l’immigration de masse » être adoptée par le peuple suisse, à une courte majorité, a donc passablement changé. Et s’il est probable que l’accroissement des contrôles visant les abus en matière de travailleurs détachés a pu jouer un rôle, c’est d’abord la baisse de la demande de main-d’œuvre qui est en cause.

Bonne ou mauvaise nouvelle ? Tout est affaire de point de vue. L’économie suisse poursuit une croissance légère, et certains de ses secteurs durement touchés – par la fin du taux plancher avec l’euro, les excédents de stocks ou une chute des ventes (l’horlogerie en l’occurrence) – montrent des signes encourageants de reprise. Cependant, la pression sur les marges et la mutation numérique accroissent un climat de tension sur la place économique suisse, qui, plus que jamais, doit créer de la valeur ajoutée si elle veut conserver sa solidité.

Privilégier la souplesse

Bien sûr, l’apaisement du débat migratoire est à saluer, mais le contexte qui y préside ne doit absolument pas déboucher sur une nouvelle surenchère de restrictions ou de barrières à la libre circulation des biens, des services et des travailleurs, qui seraient préjudiciables à l’économie suisse. Car si les chiffres de l’immigration baissent, cela ne veut pas dire qu’il sera plus facile de remplir les conditions d’application de la politique acceptée par le peuple le 9 février 2014 (initiative populaire «Contre l’immigration de masse»). Mieux intégrer les seniors et les femmes dans le monde du travail, améliorer la formation continue pour trouver ici les compétences nécessaires à assurer l’avenir de nos entreprises : autant d’objectifs ambitieux qui ne trouveront leurs réponses qu’avec une économie dynamique. Celle-là même qui a justement besoin d’un accès souple à l’immigration pour bien fonctionner.

Claudine Amstein

Claudine Amstein est la directrice de la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie, depuis 2005. Après avoir été juriste et secrétaire générale de la Chambre vaudoise immobilière, elle en reprend la direction en 1993. Elle a été constituante au Grand Conseil vaudois, avant d’en être députée pendant dix ans. Elle est très engagée dans les associations faîtières de l'économie suisse.