Industrie du tabac: la Suisse gravement complice d’un business mortel!

La complaisance du monde politique suisse à l’égard de l’industrie du tabac est scandaleuse et inquiétante. Concernant les restrictions de la publicité pour le tabac, notre pays pointe à l’avant-dernier rang du classement 2019 du « Tobacco control Scale » en Europe. Cette échelle mesure depuis 2006 les politiques de prévention anti-tabac des pays européens

 

Un business mortel dont nous sommes complices

La cigarette tue chaque année prématurément 9500 personnes en Suisse, soit plus d’un décès sur 7.[1] Et un fumeur sur deux. Ce fardeau sanitaire global du tabac est colossal. À lui seul, il est responsable de 1 cancer sur 3, dont principalement ceux du poumon, de la gorge, de la bouche, des lèvres, du pancréas, des reins, de la vessie, et de l’utérus.[2] Le tabac cause aussi de graves pathologies cardio-vasculaires tels que l’infarctus du myocarde ou les accidents vasculaires cérébraux. Et 90% des personnes souffrant de broncho-pneumonie chronique obstructive (BPCO), une maladie terrible ayant un impact majeur sur la qualité de vie, sont des fumeurs ou d’anciens fumeurs.[3] Ainsi, un fumeur régulier sur deux mourra des conséquences de son tabagisme.[4] Drôle d’industrie que celle qui tue la moitié de ses consommateurs.trices…

57% des fumeurs ont commencé alors qu’ils étaient mineurs. Les cigarettiers le savent, les autorités politiques aussi. Pourtant, nous laissons faire.

La cigarette a été développée par une industrie particulièrement sans scrupule qui au cours de son histoire n’a pas hésité à mentir à plusieurs reprises lors d’importants procès (tant sur la nocivité de la cigarette que sur l’addictivité de la nicotine) pour éviter de devoir rendre des comptes et pouvoir étendre son business mortel.

De plus, la publicité et la promotion des produits du tabac sont au cœur de la démarche marketing des cigarettiers et elles ciblent avant tous les jeunes. En effet, la nicotine contenue dans la cigarette est une aubaine pour l’industrie du tabac. Plus addictogène que la cocaïne, elle garantit la fidélité du client sans nécessité de carte cumulus ou de cadeaux annuels. Ainsi, l’essentiel du business model des cigarettiers est simple : trouver des nouveaux clients. En toute logique, les jeunes sont leur cible favorite. Et le constat est sans appel : 57% des fumeurs ont commencé alors qu’ils étaient mineurs.[5] Les cigarettiers le savent, les autorités politiques aussi. Pourtant, nous laissons faire.

La complaisance, ou même complicité, du monde politique suisse à l’égard de l’industrie du tabac a pour conséquence une mauvaise protection de notre jeunesse. 31.6% des jeunes de 15 à 25 ans fument quotidiennement ou occasionnellement dans notre pays.[6] Ce pourcentage élevé n’est malheureusement pas surprenant quand on sait que la Suisse est le seul pays d’Europe à ne pas avoir ratifié la convention cadre de l’OMS pour la lutte antitabac. L’influence importante du lobby de la cigarette est la seule explication à cette passivité extrême des autorités helvétiques en matière de prévention antitabac.

 

Un cendrier pour illustrer la Suisse

Source: Tobacco Control

Les récents épisodes (2019) du financement du vernissage de l’ambassade suisse à Moscou[7] et celui prévu pour le pavillon suisse à l’expo universel de Dubaï[8] ont même mené à ce que la Suisse fasse la une de la revue scientifique « Tobacco Control » dans son numéro de septembre 2019. En effet, la couverture représentait une carte de l’Europe avec au centre une Suisse en forme de cendrier. L’éditorial de ce numéro était d’ailleurs sans appel, fustigeant la politique suisse en matière de prévention anti-tabac et l’influence malsaine de l’industrie du tabac sur le monde politique suisse.[9] Cette proximité douteuse entre industrie du tabac et monde politique et diplomatique suisse dure depuis trop longtemps et nous nous devons de faire passer l’intérêt public de la santé de notre jeunesse avant celui de quelques entreprises privées.

 

 

Source: https://www.tobaccocontrolscale.org/

Concrètement, comment se traduit cette influence du lobby de l’industrie du tabac sur le monde politique suisse ?

La réponse est peut-être à chercher dans la comparaison avec nos voisins européens. Ainsi, la Suisse pointe au 35ème rang sur 36 du classement 2019 du « Tobacco control Scale » en Europe. Cette échelle mesure depuis 2006 les politiques de prévention anti-tabac des pays européens. Ce qui est d’autant plus inquiétant, c’est que la Suisse était encore au 21ème rang en 2016. Pire, et comme mentionné plus haut, notre pays est dernier de classe concernant les restrictions de la publicité pour le tabac!

 

L’interdiction de la publicité auprès des mineurs est une des mesures les plus efficaces

 

Pourtant, la lutte antitabac existe maintenant depuis des décennies et nous savons parfaitement quels sont les outils de prévention efficaces. Selon l’OMS, il y en a 4 essentiellement[10] :

  1. Augmenter le prix du paquet de cigarette ;
  2. Sensibiliser et informer la population (paquet neutre, message choc, etc.) ;
  3. Soutenir les programmes d’aides au sevrage ;
  4. Interdire la publicité pour le tabac.

Selon l’OMS qui se base sur de nombreuses données scientifiques, une interdiction de la publicité qui atteint les mineurs a ainsi pour impact de réduire clairement la consommation à long terme.

L’interdiction concernant les produits du tabac de toute forme de publicité qui atteint les enfants et les jeunes est en vigueur dans la plupart des pays européens et dans 182 pays dans le monde. Mais pas en Suisse!

Dans ce cadre, l’initiative « Oui à la protection des enfants et des jeunes contre la publicité pour le tabac » comble une lacune importante de la politique sanitaire suisse. Cette initiative propose en effet d’inscrire dans la Constitution une interdiction concernant les produits du tabac de toute forme de publicité qui atteint les enfants et les jeunes. Cette interdiction est d’ailleurs en vigueur dans la plupart des pays européens et permettrait à la Suisse de respecter, sur ce point, la Convention cadre de l’OMS en matière de prévention contre le tabac, convention ratifiée par 182 pays (représentant plus de 90% de la population mondiale), mais pas par la Suisse (!).

Quant au contre-projet adopté par le Parlement, ce n’est qu’un exercice alibi : la publicité dans les médias gratuits, les festivals ou les réseaux sociaux, soit partout où l’on peut particulièrement bien atteindre les jeunes, resterait autorisée. Le contre-projet montre surtout qu’au Parlement les intérêts de l’industrie du tabac pèsent davantage que le bien-être et la santé des enfants et des jeunes.

Qu’en 2022 des politiciennes et politiciens osent encore tenir le discours du libre choix et de la liberté économique dans un contexte de dépendance à une substance psycho-active relève d’un aveuglement idéologique, d’une ignorance coupable ou d’une soumission aux intérêts privés du lobby du tabac.

5 milliards par année. C’est le montant des coûts socio-sanitaires du tabac en Suisse.  Ils sont répartis entre frais médicaux (3 milliards) et baisse de productivité (2 milliards).[11] Ces coûts dépassent donc largement l’impôt sur la cigarette qui a rapporté 2.08 milliards de francs en 2018.[12] Une diminution du nombre de fumeurs, objectif final de cette interdiction de la publicité auprès des enfants et des jeunes, sera donc bénéfique aussi pour les caisses publiques.

Contrairement à la rhétorique des opposants à l’initiative, fumer ne se limite pas à une question de libre choix. La publicité et la promotion des produits du tabac, ciblant tout particulièrement la jeunesse, influencent le consommateur jeune et l’incite à commencer à fumer. L’addictivité de la nicotine fait le reste pour que la dépendance s’installe rapidement. Qu’en 2022 des politiciennes et politiciens osent encore tenir le discours du libre choix et de la liberté économique dans un contexte de dépendance à une substance psycho-active relève d’un aveuglement idéologique, d’une ignorance coupable ou d’une soumission aux intérêts privés du lobby du tabac.

D’ailleurs, plus de 60% des fumeurs souhaiteraient arrêter la cigarette.[13] Mais face une substance aussi addictive, le défi est majeur. En légiférant sur la publicité et en soutenant cette initiative, on limite les tentations.

La question est simple : souhaitons-nous mieux protéger notre jeunesse contre un danger sanitaire majeur ou préférons-nous poursuivre cette publicité mortifère ? C’est à chacun.e d’entre nous d’en décider en son âme et conscience.

Protégeons nos enfants et nos jeunes contre les méfaits du tabac.  Stopper la publicité auprès de la jeunesse est une des meilleures façons de réduire cette importante cause de mortalité.

 

[1] https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/sante/determinants/tabac.html

[2] https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/tabac/articles/quelles-sont-les-consequences-du-tabagisme-sur-la-sante

[3] https://www.stop-tabac.ch/fr/risques-et-maladies/les-maladies-consecutives-au-tabagisme/bpco).

[4] https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/tabac/articles/quelles-sont-les-consequences-du-tabagisme-sur-la-sante

[5] https://enfantssanstabac.ch/arguments-2/

[6] https://enfantssanstabac.ch/arguments-2/

[7] https://www.letemps.ch/suisse/un-oligarque-russe-sponsor-lambassade-suisse-moscou

[8] https://www.letemps.ch/economie/philip-morris-sponsor-pavillon-suisse-dubai-tolle

[9] https://tobaccocontrol.bmj.com/content/28/5

[10] https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/tobacco

[11] https://www.suchtmonitoring.ch/fr/1/8.html

[12] https://www.bag.admin.ch/bag/fr/home/strategie-und-politik/politische-auftraege-und-aktionsplaene/politische-auftraege-zur-tabakpraevention/tabakpolitik-schweiz/tabaksteuer.html

[13] https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/sante/determinants/tabac.html

Soutenir l’ensemble d’une profession liée au dévouement

Vous vous souvenez quand, au début de la pandémie, nous étions sur nos balcons tous les soirs pour applaudir le personnel soignant qui faisait face avec courage et abnégation à la première vague de coronavirus? Il est temps de le remercier d’une manière plus concrète en acceptant l’Initiative sur les soins infirmiers. Voici pourquoi:

 

1. Pour ne pas compter que sur la main d’oeuvre étrangère

Depuis une année et demi, le personnel soignant est mis sous pression par la COVID-19. De manière générale, la situation dans la profession est très problématique, et ceci déjà avant l’arrivée de la pandémie: près de la moitié du personnel infirmier quitte en effet la profession prématurément. La Suisse manque ainsi cruellement de soignant∙e∙s. Actuellement 10’000 postes ne sont pas repourvus et d’ici 2029 nous aurons besoin de 70’000 soignant∙e∙s supplémentaires.

Cette pénurie est notamment due aux efforts insuffisants en matière de formation: depuis 2014, la Suisse ne forme que 56% de son besoin annuel en personnel soignant, voire 43% pour les diplômé∙e∙s. Le solde, c’est la main d’oeuvre étrangère qui le comble. Or, cette pénurie ne peut pas être résorbée à volonté. La Suisse doit redoubler d’efforts afin que le nombre de personnes choisissant cette profession s’accroisse rapidement. C’est justement l’objectif de l’initiative sur les soins infirmiers.

2. Le contre-projet est insuffisant

Le Conseil fédéral et la majorité du Parlement estiment que l’initiative va trop loin et lui opposent un contre-projet indirect. Ce dernier prévoit que la formation et la formation continue recevront jusqu’à un milliard de francs sur huit ans. C’est un pas dans la bonne direction mais qui est insuffisant. D’une part parce qu’avec le contre-projet, la base légale doit d’abord être créée dans tous les cantons avant que les parlements respectifs puissent prendre des décisions budgétaires. Et si un canton rejette le budget, il n’y aura pas non plus de financement fédéral. D’autre part, le contre-projet se limite à investir dans la formation. Mais cela n’en vaut la peine que si le personnel formé reste plus longtemps dans la profession. C’est pourquoi il faut absolument améliorer les conditions de travail, les salaires et la dotation en personnel des hôpitaux et établissements médico-sociaux.

3. Réduire l’épuisement du personnel soignant

La situation de pénurie conduit rapidement à l’épuisement du personnel soignant. L’initiative sur les soins infirmiers permet ainsi non seulement d’en former davantage, mais aussi, de par meilleure anticipation des plannings et en offrant des suppléments de salaire pour le travail de nuit, le week-end et les jours fériés, pourra rendre la vie familiale compatible avec cette profession difficile.

4. Améliorer la qualité des soins

En offrant de meilleures conditions de travail et de formation au personnel soignant, l’initiative permet in fine, et c’est un point particulièrement important, d’améliorer la qualité des soins et la sécurité des patient∙e∙s.

A cause de la pénurie de personnel, les soignant∙e∙s doivent traiter de plus en plus de patient·e·s simultanément. Cela met en danger la qualité des soins et empêche une approche humaine avec les patient·e·s, avec une probabilité d’erreurs médicales bien plus importante.


5. Soutenir l’ensemble d’une profession liée au dévouement

Un dernier argument pour tordre le cou à une idée reçue : un·e infirmier·ère travaillant en EMS ou gériatrie n’a pas moins de compétences qu’un·e infirmier·ère travaillant en chirurgie ou aux urgences. Les deux mobilisent des compétences différentes toutes aussi indispensables. L’un·e utilisera des compétences peut être plus techniques sur un temps de prise en charge réduit, l’autre fera appel aux compétences nécessaires à une prise en charge davantage holistique sur une période à moyen, voire long terme, avec toute la complexité que cela implique. C’est pourquoi il est nécessaire de soutenir l’ensemble de la profession.

Cette évolution fondamentale de la profession, couplée à l’évolution démographique de la suisse et à un contexte de pénurie chronique de soignant·e·s, sont les éléments essentiels pour comprendre la démarche faite aujourd’hui au travers de cette initiative.

L’origine des soins infirmiers est historiquement liée au dévouement. C’est une profession de cœur au service des malades. Cette profession est incarnée, de la fin du Moyen-Âge jusqu’au début du 20ème siècle par la femme consacrée. Ensuite les soins se laïcisent et deviennent de plus en plus techniques, les formations évoluent, l’infirmier·ère gagne en autonomie notamment avec la reconnaissance de son rôle propre au milieu des années 1950 et aujourd’hui ce sont les sciences infirmières qui sont enseignées dans les hautes écoles.

Cette évolution fondamentale de la profession, couplée à l’évolution démographique de la suisse et à un contexte de pénurie chronique de soignant·e·s, sont les éléments essentiels pour comprendre la démarche faite aujourd’hui au travers de cette initiative. L’infirmier·ère a aujourd’hui des compétences spécifiques, il·elle n’est plus une subalterne du médecin, est un partenaire aux compétences indispensables tout comme les ingénieur·e·s et les architectes sont partenaires pour construire un hôpital.

Dire Oui à l’initiative pour les soins infirmiers, c’est concrétiser nos applaudissements du printemps 2020 et assurer une meilleure qualité des soins pour nos aîné∙e∙s, pour nos enfants, pour nous.

 

 

Notre argent tue!

Financement du matériel de guerre: notre argent tue !

Notre argent, via nos caisses de pension, finance aujourd’hui la production de bombes et d’armes chimiques qui sont utilisées dans différents pays autour du globe.

Il ne faut pas nous voiler la face : la réalité, c’est que notre argent tue ! En tant que ressortissant d’un pays qui revendique sa tradition humanitaire, je n’en suis pas vraiment fier.

C’est pour remédier à cette situation que l’initiative “Pour une interdiction du financement des producteurs de matériel de guerre” vise deux choses. Premièrement, interdire à la Banque nationale suisse ainsi qu’aux institutions de prévoyance de financer les entreprises dont plus de cinq pour cent du chiffre d’affaires annuel provient de la production de matériel de guerre; deuxièmement, mettre en place des normes similaires sur les investissements des banques et des assurances aux niveaux national et international.

 

Un commerce mortifère

Les Verts s’engagent depuis leur création pour la paix et le désarmement dans le monde. Ils ont soutenu ces dernières décennies les initiatives populaires visant cet objectif, et il en va de même cette fois-ci.

Les institutions financières suisses comme la Banque nationale ou les grandes banques investissent des milliards chaque année dans ce commerce mortifère

A chaque fois qu’une initiative s’oppose à l’exportation ou à la production de matériel de guerre, c’est toujours la même rengaine, les mêmes arguments que l’on entend de la part des opposants. Cette initiative n’échappe pas à la règle: la Suisse serait trop petite pour faire bouger les choses au niveau international; ce serait trop compliqué au niveau administratif; nos retraites seraient en danger, car nos caisses de pension ne pourraient plus investir comme elles le souhaitent; les emplois seraient menacés dans l’industrie et la finance.

Dans le cas de l’initiative “pour une interdiction du financement des producteurs de matériel de guerre”, ces arguments ne tiennent tout simplement pas la route. Ils sont là uniquement pour faire peur à la population, qui témoigne de la sympathie pour l’initiative. Ils sont révélateurs de la vision des opposants, qui, une fois encore, privilégient les aspects économiques et financiers aux aspects éthiques et de responsabilité sociale.

 

La Suisse joue un rôle décisif au niveau mondial

En interdisant le financement de l’industrie de l’armement, l’initiative vise à contribuer à ce que la Suisse ne participe pas de manière indirecte aux conflits actuels et à prévenir des guerres futures. Cela peut paraître une goutte d’eau dans l’océan, mais ce n’est pas le cas: je vous rappelle que la Suisse est une des plus importantes places financières mondiales et joue ainsi un rôle décisif. Les institutions financières suisses comme la Banque nationale ou les grandes banques investissent des milliards chaque année dans ce commerce mortifère. En 2018, la place financière suisse a investi pas loin de 10 milliards de dollars américains dans des entreprises productrices d’armements, soit plus de 1000 dollars par habitant·e suisse. Par l’importance de sa place financière, la Suisse doit montrer l’exemple et entraîner dans son sillage d’autres pays.

 

Double jeu

Cette initiative vise aussi la cohérence avec le principe de neutralité, pierre angulaire de notre politique extérieure. Or, aujourd’hui, la Suisse joue un double jeu. D’un côté, elle se veut championne de la promotion de la paix dans le monde,  de l’autre, elle vend des armes. Où est la logique?

La cohérence, c’est de voter OUI à cette initiative. Pour que notre argent ne serve pas à financer du matériel de guerre !

Des milliards pour une menace non identifiée

En 2014, les Suisse.sse.s ont dit non à l’achat de Gripens pour 3,1 milliards de francs. Le Conseil fédéral et le parlement proposent aujourd’hui l’achat de nouveau avions de combat pour 6 milliards de francs.  L’enveloppe pourrait même se monter à 24 milliards, d’après plusieurs experts, avec les frais d’exploitation, d’entretien et de modernisation des avions. Y aurait-il aujourd’hui une raison pour que le peuple change d’avis et opte pour un achat aussi démesuré? Quelle est la menace?


« Attaque peu probable » selon le Conseil Fédéral

En Suisse, par définition, les avions de combats sont destinés à défendre notre territoire ou collaborer avec les forces aériennes des pays voisins, en cas d’attaque militaire. Or, Le Conseil fédéral reconnaît lui-même, dans son dernier Rapport sur la sécurité de la suisse de 2016, que la probabilité d’une telle attaque est quasi nulle : « Globalement, on peut affirmer qu’il est peu probable que la Suisse soit directement menacée par une attaque armée, que ce soit au sens traditionnel du terme ou sous une forme non conventionnelle, au cours des années à venir. On ne peut identifier aucun État ni aucun groupe qui dispose des capacités pour attaquer la Suisse par des moyens militaires et qui manifeste également l’intention de le faire. » (p. 36).

Par ailleurs, la Suisse est déjà dotée d’une défense aérienne, qui peut encore fonctionner de manière efficace. Elle vient d’ailleurs d’investir près d’un milliard de francs dans la modernisation des FA-18 actuels, qui pourront ainsi être opérationnels jusqu’en 2035 au moins. Elle n’a donc pas besoin de nouveaux avions de luxe.

Le Conseil fédéral le reconnaît lui-même, dans son dernier Rapport sur la sécurité de la suisse de 2016: la probabilité d’une telle attaque est quasi nulle

La preuve, lors de la votation de 2014, on nous disait qu’après 5000 heures de vol, les FA-18 étaient bons pour la casse. Suite au refus du peuple, ces mêmes FA-18 pouvaient tout d’un coup miraculeusement voler jusqu’à 6000 heures. Le Canada, qui a acheté des FA-18 avant la Suisse, prévoit de faire voler ces avions jusqu’à 8000 heures au moins.


Des milliards pour une menace non identifiée

Cet arrêté fédéral pour lequel nous devons voter est de plus un véritable chèque en blanc : la population votera sans connaître ni le nombre, ni le type d’avion et encore moins le nom du constructeur et son pays d’origine. Et le timing n’est vraiment pas le bon.

Est-il logique que la Suisse investisse des milliards pour parer à une menace non identifiée? Ne devrait-elle pas concentrer ses ressources pour répondre aux véritables menaces de ces prochaines décennies? Les cyber-attaques, les épidémies, les black-out énergétiques ou la crise climatique. Il va falloir déployer des moyens pour s’en protéger! Car contrairement à ce que prétendent les partisans de cet achat, ces 6 milliards ne sont pas dévolus au département militaire. Le parlement a le pouvoir de demander une nouvelle répartition du budget.

La Suisse doit concentrer ses ressources pour répondre aux véritables menaces de ces prochaines décennies: les cyber-attaques, les épidémies, les black-out énergétiques ou la crise climatique.

Je le vois tous les jours au Parlement : les demandes de soutien pour des places de travail mises en péril par la crise du COVID-19 viennent de toutes les branches économiques. Et ce alors même que cette crise va fortement impacter les recettes fiscales et donc la capacité des collectivités publiques à soutenir l’économie. La priorité est au sauvetage de la prospérité de la Suisse et à la transition écologique, pas à l’achat d’avions de combat !

L’homme n’est pas maître et seigneur de la nature!

Dans toute la Suisse, une large coalition de partis politiques, d’organisations de protection de la nature et de l’environnement, de chasseurs, de forestiers et d’agriculteurs s’oppose à la réduction de la protection des espèces dans la révision de la Loi sur la chasse et la protection des mammifères et oiseaux sauvages. Le peuple suisse se prononcera à ce sujet le 27 septembre 2020. 

 

En Valais, le débat risque de tourner, à tort, pour ou contre le loup.

 

Campagne focalisée sur la loup, à tort

Alors que l’effondrement dramatique des espèces est de la même urgence que la lutte contre le réchauffement climatique, il n’est pas tolérable que la Suisse affaiblisse sur son territoire la protection des espèces menacées. En Valais la campagne risque fort de se focaliser, à tort, sur un débat pour ou contre le loup. Ce n’est en effet pas la raison pour laquelle le référendum a été lancé. Au départ, cette révision de la Loi sur la Chasse avait pour but de demander au Conseil fédéral de créer des bases légales afin de pouvoir réguler les populations de loups, avant que de gros conflits n’éclatent. Sur ce point tous les acteurs sont d’accord qu’il faut trouver des solutions. Le problème, c’est que le parlement a profité de la révision pour diminuer le statut de protection non seulement du loup mais des espèces protégées en général.

 

Le parlement a profité de la révision pour diminuer le statut de protection non seulement du loup mais des espèces protégées en général.

 

Des animaux n’ayant commis aucun dommage pourront être abattus!

La loi actuelle permet déjà la régulation des familles de loups et le tir des individus problématiques. Le principal changement porte sur la manière dont les décisions de régulation et de tir sont prises concernant les espèces protégées. Les tirs pourront être autorisés de façon préventive, ce qui signifie que les animaux appartenant à des espèces protégées pourront être abattus alors qu’ils n’ont commis aucun dommage !

La révision donne aussi la compétence au Conseil fédéral, sans que le parlement ait à s’exprimer ou qu’un référendum soit possible, de modifier la liste des espèces protégées mais régulables. Le castor avait ainsi été ajouté par les deux chambres parlementaires qui ont fini par revenir en arrière face à la menace d’un référendum. Pour le lynx, cela s’est joué à quelques voix près. Pour ces deux espèces, le Conseil fédéral a déjà exprimé sa volonté qu’elles fassent partie de la liste.

 

L’idée que l’homme est maître et seigneur de la nature est exactement le mode de pensée qui nous a amené dans les difficultés climatiques et écologiques actuelles.

 

Le tétra lyre, en voie de disparition, pourra être chassé
Le lièvre brun, la bécasse des bois, le lagopède ou encore le tétra lyre sont sur liste rouge des espèces menacées de disparition et pourtant encore chassables en Suisse.

Espèces en danger à la merci des chasseurs

Avec la loi actuelle, les cantons doivent faire une demande d’autorisation de tir à la Confédération. Avec la révision, les cantons n’auraient plus qu’à informer la Confédération. Les animaux ne s’arrêtent pas aux frontières cantonales et la gestion des espèces protégées ne peut pas être faite correctement avec 26 approches différentes.

Enfin, le Parlement n’a pas saisi l’opportunité de renforcer la protection de certaines espèces en danger. Le lièvre brun, la bécasse des bois, le lagopède ou encore le tétra lyre sont sur liste rouge des espèces menacées de disparition et pourtant encore chassables en Suisse. De même la chasse aux trophées de bouquetins est toujours possible, même si le Conseil d’Etat valaisan vient d’annoncer la fin de cette pratique dès 2021 pour les étrangers. Sur ces points, cette révision de la loi est clairement une occasion manquée.

 

Un mode de pensée égocentrique 

Cette révision s’inscrit dans l’idée que l’homme est maître et seigneur de la nature et qu’il doit la dominer. Exactement le mode de pensée qui nous a amené dans les difficultés climatiques et écologiques actuelles. Il est temps de comprendre que nous faisons partie de la nature et que tout affaiblissement de la biodiversité nous est préjudiciable. Refusons cette révision qui facilite l’abattage d’animaux protégés afin que le parlement reprenne le dossier et trouve des solutions pour une meilleure cohabitation entre les animaux de rente et le loup tout en ne diminuant pas le statut de protection de la faune sauvage.