L’hymne à la joie résonne, des milliers de drapeaux européens et fédéralistes flottent, les visages sont joyeux. Réunis sur la Piazza della Bocca della Verità, près de 8000 Européens engagés sont prêts à se mettre en route. Non loin de là se trouve la statue de Neptune, qui, selon la légende, dévore la main des menteurs. Pour les participants, il n’y a qu’une vérité: l’UE est plus importante que jamais et doit être défendue.
La journée de ce 25 mars 2017 commence à 8h00 sur la Place d’Espagne par un forum durant lequel des personnalités de toute l’Europe – dont Sylvie Goulard, Guy Verhofstadt et Jo Leinen – s’expriment sur le futur de l’UE. Pas sur l’histoire, malgré la date marquant les soixante ans des Traités de Rome, mais sur l’avenir. Avenir certes menacé par le Brexit et le nationalisme, mais qui peut encore être orienté vers l’unité et la solidarité. Chaque intervenant dessine sa vision de l’Europe de demain, persuadé que l’UE représente la plus belle invention de l’Europe d’hier. Dans le public, les gens écoutent religieusement, avides d’entendre des propos encourageants sur leur Union. «Peut-on encore trouver cette vieille dame de 60 ans sexy?», s’interroge le journaliste du Corriere della Sera, Beppe Severgnini. De son côté, le président des jeunes européens fédéralistes, Christopher Glück, encourage l’assistance à changer sa narration autour de l’Union europénne: «Ne nous parlez plus de paix, à nous les jeunes, nous ne savons pas ce qu’est la guerre. Parlez-nous plutôt d’ouverture, d’échanges, de culture».
A midi, les 500 participants au congrès rejoignent les centaines de manifestants déjà rassemblés près du Colisée, ouvrant la voie aux milliers d’autres qui se réuniront plus tard dans l’après-midi à Berlin, à Varsovie ou encore à Londres. Ici, aucun drapeau national ne flotte. A quoi bon, puisque tous partagent une seule et même identité européenne? La foule se met en marche, décidée, le coeur en joie. Un couple de septuagénaire français se réjouit de la présence d’une jeune délégation helvétique. Car c’est cela aussi la Marche pour l’Europe: une rencontre entre plusieurs générations, plusieurs histoires, plusieurs visions. Tout le long du parcours, des policiers prêts à dégainer surveillent un défilé si pacifique qu’ils se demandent ce qu’il font là. Enfin, après un kilomètre et demi, tous s’arrêtent au pied du Colisée. La Marche pour l’Europe 2017 à Rome a atteint son but: elle a rappelé l’engagement des citoyens pour leur continent et leurs valeurs.
Un constat peut être fait à l’issue du rassemblement: la génération des 35-50 ans était peu présente à Rome (la majorité étant des jeunes ou des retraités). Il est donc nécessaire de rendre l’UE à nouveau séduisante pour tous en simplifiant et en modifiant les arguments en sa faveur, nécessaire de continuer à encourager les dirigeants européens à réformer l’UE en profondeur, nécessaire de mobiliser tous les citoyens proeuropéens, notamment à travers la multiplication des manifestations telle que celles du mouvement «Pulse of Europe». Cependant, une chose est sûre: durant la marche pour l’Europe, chacun a retrouvé ou renforcé sa foi en l’Union européenne. Avec ses défauts, son besoin urgent de réformes, ses menaces. Et gardera en tête la remarque de Guy Verhofstadt: si c’était un Etat qui faisait face aux défis actuels de l’UE, est-ce qu’on envisagerait de l’abolir?
C’est certain que nous sommes dans une période dans laquelle les principes et les bénéfices d l’UE sont en train d’être testé. Mais je pense que cette période ne sera que transitoire jusqu’au moment où le multiculturalisme deviendra la norme acceptée.