Exit, sortir de la souffrance

Ce sujet pourrait paraître d’emblée peu en adéquation avec l’ambiance festive de cette période de fin d’année, et pourtant. Une année se termine, c’est la fin d’une chose et le commencement d’une autre. Comme la mort, peut-être.

Une amie chère à ma mère a fait le choix de mourir un mardi après-midi à 14h, il y a moins de deux semaines. Avec l’aide d’Exit et ses proches à ses côtés. Pour se libérer de la souffrance du cancer, pour ne pas subir la déchéance qui l’attendait, inévitablement, cruellement.

Je pense à sa douleur et à celle de ceux qui restent. Est-ce plus difficile de faire le deuil d’une mort qui était planifiée ? Comment peut-on être prêt à faire soi-même le geste qui entraînera notre propre mort ? Être prêt à quitter le monde alors que le mal n’est pas encore à son apogée ?

Exit, c’est aussi choisir, reprendre le contrôle d’un corps et d’une destinée qui désormais nous échappent.

Mais Exit, c’est aussi choisir, reprendre le contrôle d’un corps et d’une destinée qui désormais nous échappent. C’est pouvoir prendre une décision dans le chaos, s’accrocher à une branche pour éviter d’être emporté par la tornade.

Personne ne choisit la maladie, la souffrance, la perte d’autonomie. Ça vous tombe dessus et ça balaie vos projets d’avenir. La maladie emporte toute perspective, tout repos, toute tranquillité. Vos proches sont condamnés avec vous, d’une certaine manière. Impuissants, peut-être en colère contre l’injustice de ce drame qui frappe au hasard.

Alors oui, Exit, c’est choisir de mourir dans la dignité à défaut d’avoir pu continuer à vivre.

 

 

Logo EXIT – https://www.exit-romandie.ch/ 

Aude Bertoli

Psychologue et passionnée d'écriture, Aude Bertoli rédige des articles, des nouvelles et des textes courts qui sont tous en lien, de façon directe ou indirecte, avec des aspects dramatiques de l'existence (deuil, perte, agression, violence,...). Il s'agit non pas d'une optique voyeuriste ou théâtrale, mais bien du besoin de briser le silence autour de sujets sociaux encore tabous. Contact: aude.bertoli[at]bluewin.ch

16 réponses à “Exit, sortir de la souffrance

  1. Je pense à toutes les personnes fragiles et seules au soir de Noël et qui vont lire votre message.
    Comme j’en fais partie, je peux en attester. C’est le baiser de la mort d’une bien portante à des personnes qui souffrent.

    Nous dire qu’on peut mourir, le jour où on souffre le plus de notre solitude, devrait être interdit. C’est en tout cas cruel.

    1. Bonjour et merci pour votre commentaire.
      Je ne suis pas sûre d’avoir compris pourquoi mon article vous semble cruel. Il est question de droit à mourir dans la dignité pour les personnes qui le souhaitent; en aucun cas une invitation ou une forme de prosélytisme.
      Mais je suis désolée de lire que vous souffrez de solitude en cette veille de Noël et je vous souhaite de trouver du réconfort, de quelque façon que ce soit.

      1. Vous nous dites que le salut de notre souffrance est la mort.
        Pas de nous battre, pas qu’il y aura des jours meilleurs, pas que notre solitude peut être vaincue; juste que nous pouvons – vu que nous souffrons – mourir dignement.

        Je pense que vous ne mesurez pas à quel point les fêtes de Noël peuvent être pénibles pour nous, qui sommes seul.e.s ce soir. Et tous les autres soirs par ailleurs.

        1. Je ne parle en aucun cas de souffrance psychique ou morale dans mon article mais de maladie somatique incurable (comme certains types de cancer par exemple) menant inévitablement à la mort. Ce qui n’est évidemment pas du tout la même chose.
          Loin de moi l’idée de minimiser la souffrance de la solitude, en cette période de l’année comme de façon plus générale…

          1. Je vous souhaite de belles fêtes et d’être entourée par votre famille et vos amis ce soir. 🎄

            … Je pensais aussi, avant de l’endurer, qu’il existait une hiérarchie entre les douleurs, physiques et psychiques. J’ai appris que “différents” ne voulaient pas dire souffrir moins. Pensées à votre amie.

  2. C’est vrai que le sujet de la mort souhaitée mérite d’être abordé, surtout en cas de cancer très long et très douloureux. Les personnes dans cette situation sont malheureusement très nombreuses. En ces temps de covid, on nous parle sans cesse de reconnaissance envers la médecine mais que fait-on pour intensifier la recherche médicale? Multiplier les tentatives même les plus discutables, abandonner les dépenses sur des activités moins pressantes, mettre plus d’argent sur ce sujet, brainstorming, utiliser plus d’intelligence artificielle? La mort est l’ennemie. Combat total. Même effacer la souffrance, on n’y arrive pas. En venir à la souhaiter, la mort, est terrible. La science n’est encore qu’un balbutiement, l’esquisse d’un tout petit progrès. Quand même, choisir la nuit de Noël pour parler de suicide est un peu surprenant, mais bon. Interrogation personnelle?

  3. Je remercie l’auteure d’avoir des pensées réalistes le jour de Noël pour les personnes qui souffrent sans espoir d’aller mieux, vos paroles ne sont pas des cadeaux creux comme tant de propos emplis de bonnes intentions, et c’est souvent pour éviter ces pauvres échanges que les personnes concernées décident de s’isoler pendant les fêtes, elles comprennent que la réalité qu’elles vivent est trop lourde, la soirée risque de s’assombrir même si elles se taisent.

    Aborder les questions de la fin de vie et d’Exit le 24 décembre n’est pas approprié ? Je voudrais faire part ici d’une soirée de Noël que j’avais vécue à l’âge de sept ans. Un monsieur très âgé que j’aimais beaucoup était notre invité. Avant que celui-ci arrive, mes parents m’avaient mis au courant qu’il ne lui restait que peu de temps à vivre : « Si tu vois qu’il a de la peine ou a mal, ne lui demande pas pourquoi, ce n’est pas de cela qu’il aura envie de parler… »

    Le moment était venu pour apporter chacun nos cadeaux. Je me réjouissais de lui offrir le chapeau de luxe que j’avais fabriqué sur mesure avec du feutre et des fils de fer, et lui la belle Rolls-Royce qui m’avait émue trois jours plus tôt devant la vitrine du magasin de jouets. Chacun avait dit grand merci à l’autre, et quelque temps après je devais me retenir de pleurer… « Pourquoi est-ce que tu vas mourir ? On ne peut pas faire quelque chose pour que tu ne meures pas ?.. » Mes parents s’étaient trouvés très embarrassés, voulaient qu’on se mette rapidement à table, mais lui m’avait répondu : « C’est normal que les gens trop vieux meurent, je ne veux pas que tu sois triste, moi je ne suis pas triste parce que je n’oublierai pas ton amitié quand je serai là-haut, je penserai beaucoup à toi, au chapeau et à tout ce que tu m’as déjà donné… »

    Est-ce que cet événement, cet échange, était inapproprié le soir de Noël ? Au contraire, positif et courageux comme votre article, et mon optique n’a pas changé depuis ce 24 décembre 1959.

  4. @ Martin / 24.12.2021 à 20:36

    Choisir Noël pour parler d’euthanasie quand on se porte bien, c’est donner une petite place aux personnes concernées qui ce jour-là gardent le silence plus que toute l’année, pour ne pas déposer leur malheur parmi les heureuses surprises sous les guirlandes du sapin.

      1. Face aux virus (sida, covid…) et au cancer, la médecine et ses chercheurs s’essoufflent et piétinent. La commisération ne compense pas cet état de fait qui nous tue. La gentillesse ne guérit pas, mais réchauffe un tout petit peu.

  5. @ Martin / 26.12.2021 à 11:12

    1. La recherche médicale ne s’essouffle pas du tout, elle demande simplement d’importants moyens financiers et nécessite la participation de multiples autres disciplines en amont pour lesquelles l’argent ne tombe pas non plus du ciel. Et puis le dénigrement actuel de la science en général, le scepticisme d’une part grandissante de la population pour les progrès déjà accomplis n’arrange rien, la pandémie est révélatrice d’une lourde dalle de bêtise qui s’abat sur toutes les discussions traitant du virus, où l’on se moque des rares médecins ou chercheurs qui viennent s’exprimer, chacun exposant ses théories fantaisistes en n’ayant jamais rien étudié.

    2. Ne parlez pas de commisération à des personnes qui comprennent ce dont une personne seule qui souffre a besoin, je ne vois d’ailleurs pas une trace de pitié dans l’article ni dans les commentaires, la pitié c’est peut-être vous qui la ressentez, souhaitant la guérison sans avoir déjà appris à poser un simple pansement. La pitié s’en va en agissant, chacun selon ses capacités pour parvenir à aider.

    3. La gentillesse ? Mais je ne l’ai pas vue non plus dans toute cette page, excepté l’enfant de 1959 qui pleurait parce qu’il aurait voulu pouvoir faire un miracle : comme vous, gentil adulte sensible au malheur des autres, la gentillesse reconnue réchauffe un tout petit peu mais ne guérit pas les malades. Cette gentillesse n’est pas inutile pour bien faire, mais encore faut-il savoir comment. Donc ne perdez pas votre gentillesse qui est un bon départ, mais apprenez (comme bénévole dans une association, par exemple). Et venez nous parler ensuite de vos expériences vécues, nous serons alors dans la réalité.

  6. Vous avez sans aucun doute des choses à dire mais, ici, vous vous tenez dans une sorte de théorisation qui fait qu’on a du mal à comprendre ce qui vous soucie vraiment. Etes-vous médecin? Si oui, quelle expérience personnelle vous fait nous parler de tout cela? “Le dénigrement de la science en général” est de tous les temps. Voyez comment les grands savants ont dû s’imposer. Quand on est malade personnellement ou qu’on a un proche malade, forcément on trouve que la recherche se hâte avec lenteur (cancer). “Je ne vois d’ailleurs pas une trace de pitié ” Encore une fois c’est une question de ressenti personnel, voire un problème d’attitude face à ce qui vous arrive. Quand on souffre et qu’on se pense seul, incompris, pas aidé, on en veut à tout le monde. Parler de mes expériences personnelles? Je pense que le domaine psycho-médical n’est pas celui auquel je peux contribuer. Je ne raconte pas mon passé, ce n’est pas le lieu, mais la question que soulève Aude Bertoli m’intéresse. N’espérez pas de moi davantage .

    1. Mon erreur est d’avoir voulu vous aider à comprendre le sujet de l’article et sa raison d’être. Mes commentaires sont loin d’être une théorisation, et encore moins construite sur le vécu de ma seule personne. Je vous souhaite de vous ouvrir un peu plus sur les autres, c’est la seule chose que j’espère pour vous, il sera alors plus possible de partager les questions soulevées qui vous intéressent, vous y gagnerez aussi.
      Restons-en là pour 2021,
      Bonne Année.

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