Poutine: quand le remède est pire que le mal.

Dans l’optique de Poutine la Russie est humiliée, marginalisée et encerclée au point où elle n’a même plus d’espace ou reculer. Acculée, sa seule alternative est de se battre, mais se battre pour quoi ?

Une multinationale.

L’Union Soviétique dont la Russie est en partie l’héritière n’avait d’Union que le nom. En réalité c’était l’Empire Russe, gouverné de Moscou par une classe politique essentiellement Russe. Le ciment de cette parodie d’union était le Parti communiste de l’Union Soviétique. C’était en fait une multinationale qui, en plus du pouvoir qu’elle exerçait sur les Républiques Soviétiques, avait une influence globale  par ses filiales de par le monde sous la forme de Partis Communistes locaux qui faisaient rapport à la maison mère.

L’Empire s’étend

Suite à la défaite du troisième Reich en 1945 l’Empire étendit son emprise sur l’Europe de l’Est. La Guerre Froide qui s’en suivit devint un exercice international d’équilibrisme dont chaque parti connaissait les limites à ne pas dépasser. Certes il y eut des exceptions ; Cuba et l’Afghanistan pour l’Union Soviétique. Le Vietnam pour Washington. Mais ces écarts n’affectèrent pas un équilibre des forces essentiellement stable et donc prévisible.

Washington numéro un

Avec l’effondrement de l’Union Soviétique les Etats Unis se retrouvèrent comme la seule Super Puissance à laquelle il n’y avait désormais plus de contrepoids. De la globalisation au pouvoir du dollar, de Google à l’internet  au GPS, de l’innovation à ce qui passait s

Certes il y avait encore des poches de résistance telle que la Corée du Nord et l’Afghanistan mais, tout sommé, le 21 ème siècle débuta comme le siècle américain.

Rien ne s’opposait donc à ce que Washington invente un prétexte pour laminer Saddam Hussein ou mette à genoux le système bancaire Suisse. Mais c’était là des errements sans grande conséquence et qui n’affectaient en rien la liberté individuelle ou la vie quotidienne de ceux qui vivaient sous le parapluie américain .

Une double chute

La chute de l’Union Soviétique fut un double effondrement ; celui de l’Etat soviétique et celui du parti politique qui l’avait généré à savoir le Parti Communiste de l’Union Soviétique.

Si le Parti Communiste ne survécut pas à a cet effondrement la Russie elle, blessée, diminuée et initialement en pleine dérive surnagea tant bien que mal. Il fallut attendre un Poutine pour voire l’Etat Russe remis sur pied avec un bémol ; sous sa gérance la Russie fit du sur-place.

McDonald

 La chute de l’Union Soviétique vit l’ouverture d’un McDonald à Moscou. Le succès fut immédiat et les moscovites par milliers firent la queue pour y avoir accès. Mais il n’y avait  pas d’équivalent Russe pour ouvrir une succursale à New York. Ce qui suivit fut une voie à sens unique. Les porte-drapeaux d’une société de consommation étaient désormais libres de faire  marche vers un Russie qui n’avait rien de à offrir en contrepartie.  Ainsi, trente ans après la chute de l’Union Soviétique la Russie reste une économie basée sur l’exportation de quelques matière premières avec une base industrielle faible malgré quelques pôles d’excellence. Mais plutôt que de focaliser son régime sur le développent et la diversification de sa base économique, Poutine avait les yeux ailleurs. Ce qu’il voyait, ou croyait voire, c’était l’érosion de l’ame Russe par un système de valeurs qui n’était pas le sien et auquel il était incapable de se référer.

L’âme russe en péril

En fait, son véritable ennemi ce n’était ni l’Ukraine ni l’OTAN ; c’était Vuitton, Google, l’Internet, pour ne pas dire Mercedes et les sociétés qui les avaient générés. Or c’était la un ennemi contre lequel les armes nucléaires n’offraient aucune protection. La seule protection aurait été  l’émergence d’une société Russe dont le niveau d’attractivité fondé sur la créativité, l’innovation, la diversité des opinions et la liberté d’expression pouvait se présenter comme une alternative à celle générée par l’Occident. Mais pour Vladimir Poutine en tant que produit d’un système qui ne savait gérer la diversité qu’en l’écrasant, c’était trop demander. Ainsi, alors que la Chine débarrassée de son délire Marxiste dont elle n’as gardé que l’étiquette se réinventait, la Russie elle, rêvait de son passé.

La force brute

L’invasion de l’Ukraine fut l’aboutissement logique d’une vision ou la force brute était la seule expression du pouvoir.

Si l’invasion de l’Ukraine est un conflit entre états, c’est aussi une guerre générationnelle. Pratiquent tous les ukrainiens qui se battent aujourd’hui n’ont aucun souvenir de l’époque  Soviétique. Et s’ils regardent vers l’Europe, c’est parce-que la Russie n’a rien à leur offrir.

Une partie déjà perdue

La marginalisation de la Russie a débuté avec la chute de l’Empire Soviétique. En fait, Poutine n’avait pas tort de considérer que la Russie était réduite à sa plus simple expression. Son tort c’est de n’avoir pas compris que son problème, ce n’est pas l’OTAN. C’est la Russie  et plus spécifiquement  son incapacité á se  réinventer et á se projeter dans un monde post Soviétique, Ce qui revient à dire que quelque soit l’aboutissement de son aventure Ukrainienne, Poutine a déjà perdu la partie. Certes, ce ne sera pas nécessairement le dernier clou dans le cercueil de l’Union Soviétique. Mais cela ne facilitera pas une résurrection.

 

Alexandre Casella

Diplômé de la Sorbonne, docteur en Sciences Politiques, ancien correspondant de guerre au Vietnam, Alexandre Casella a écrit pour les plus grands quotidiens et a passé 20 au HCR toujours en première ligne de Hanoi a Beirut et de Bangkok à Tirana.

17 réponses à “Poutine: quand le remède est pire que le mal.

  1. Non, c’est pas Russe, c’est statutaire.
    C’est le statut de super-puissance qui est l’enjeu.
    Poutine veut avoir un siège Russe à la grande table.

    Base NATO en Ukraine c’est les missiles à Cuba,
    Le jardin d’une super-puissance, c’est son jardin, point final.
    C’était ainsi en 1062, c’est ainsi en 2022, ce sera ainsi aussi en 2082.

    Les nouveaux empires sont les BRICS,
    Il n’y a plus d’empires en Europe,
    50% de l’humanité est BRICS, les pays européens sont des puissances régionales, plus mondiales.

    Ch A

    1. “Les nouveaux empires sont les BRICS”

      BRIC : Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud.

      Quels empires?
      Au fait, pourquoi l’Afrique du Sud? Peu importe.

      “50% de l’humanité est BRICS”

      Et alors? Il y a des gros pays avec des petites économies (exemple: le Brésil, la Russie, l’Inde et l’Afrique du Sud), et symétriquement, des petits pays avec des grosses économies (exemple: les pays européens).

  2. Internet pullule de devins et d’analystes plus ou moins lucides, j’ai du mal à résister à cette tentation. L’avenir n’appartient à aucun humain et discerner ce qui se passe réellement en Russie devient de plus en plus difficile. Les Russes savent faire des révolutions mais la propagande actuelle et surtout le sentiment d’être attaqués va les retenir longtemps. Les sanctions n’auront un effet qu’à long terme et on ne peut deviner lequel. Ce qui rassure c’est que l’armée des envahisseurs utilise peu d’armes chinoises en Ukraine et cela fera peut-être mériter à la Chine son futur statut de première puissance mondiale. Pour Poutine c’est dur de se résigner à n’être qu’un pays comme les autres. Le monde ira vers l’homogénéisation ou connaîtra une nouvelle guerre terrible

  3. Votre point de vue est extrêmement intéressant: commercialiser la créativité pour exister en tant que nation dans un monde globalisé, toute chose dont une dictature oligarchique est incapable… La tradition du soft power étant absente des manuels d’histoire Russe, vient donc la guerre type 1945. Bravo. Il n’empêche que l’ornière est énorme: présenter comme une opération spéciale la destruction d’un état de 38 millions d’habitants en sachant qu’il trouvera des alliés puissants, si ce n’est un coup de folie, c’est un coup de génie. La Chine parviendra, peut-être, à sauver la Russie de l’effondrement au moyen d’une guerre économique mondialisée, mais quel sera leur prix?

  4. Donc au fond, M. Casella, si on comprend bien, vous pensez que la Russie avec sa culture, n’a rien à offrir pour concurrencer ce modèle yankee consumériste décadent, que nous subissons contre notre gré, qui nous exploite, nous opprime, nous dégoûte et que nous haïssons. Meme pas sa gastronomie ? Vous affirmez que la Russie n’aurait pas pu offrir une restauration rapide russe, comme l’Amérique nous a imposé Mac Donald.

    J’espère que vous réalisez à quel pointvotre pétition de principe est à la fois ridicule et absurde. Il est bien évident que c’est complètement faux. Si la Russie ne s’est pas vue proposer de lancer une chaîne de fast food avec du bortch et autres pkats typiques russes, c’est uniquement dû à la puissance US momentanément dominante, qui l’a interdit dans son empire mondial. La cuisine russe aurait été 1000 fois préférable à ces saloperies de hamburgers.

    Seulement la roue tourne cher monsieur. Aujourd’hui l’oncle Sam a connu la défaite humiliante en Afghanistan, en Syrie et en Ukraine la Russie est victorieuse sur toute la ligne. Les sanctions anti russes plingent les économies du monde americano centré dans la dépression economique alors que la Russie connaît un boom. L’OTAN et ses esclaves européens ne semble pas prête à concéder sa victoire à la Russie, bien que sur le terrain cette victoire est acquise. Pour la lui contester, il n’y aurait qu’une seule possibilité: pousser à la 3ème guerre mondiale en espérant que l’Amérique la gagnera contre la Russie et la Chine, ce qui est douteux.

    Alors j’aimerais vous poser la question: approuvez -vous le scénario du déclenchement de la 3ème guerre mondiale, ce qui semble être l’objectif de l’OTAN, y compris la Suisse, qui en fait de facto partie puisqu’elle a même abandonné sa neutralité pour s’aligner servilement sur Washington?

    1. Les États-Unis n’ont pas inventé le capitalisme; par ailleurs, ils n’ont rien imposé au reste du monde. MacDo, tout le monde adore, même les Russes. Le monde adore et en redemande, voyez-vous…

      Du reste, tout ce que vous avancez dans votre texte est faux, mais je n’ai ni le temps ni l’énergie de contre-argumenter (cf. loi de Brandolini)

      Au fait, que diable avez vous contre les hamburger? Bien fait et avec des ingrédients de qualité, c’est délicieux.

    2. “la Russie est victorieuse sur toute la ligne”, belle “victoire” pour la Russie en effet (!!): après plus de quatre mois de combat, des gains territoriaux limités (dans une région de l’Ukraine qui était en plus déjà en partie en main de pro-Russes), des reculades forcées sur plusieurs fronts, un quart à un tiers des forces russes engagées mis hors de combat, le renforcement et l’extension de l’UE et de l’OTAN (cette dernière étant avant l’intervention russe quasiment en mort clinique comme l’avait justement fait remarquer Emmanuel Macron), la disparition de pays neutres “tampons” avec maintenant le “bloc occidental” au contact direct des frontières russes, tout ce que précisément Poutine voulait éviter. On va pouvoir moderniser l’expression “victoire à la Pyrrhus” en la remplaçant par “victoire à la Poutine” 🙂 !
      Par ailleurs, comme disent les Anglo-saxons: “game is not over”! Il est un peu tôt pour crier victoire que ce soit d’un côté comme de l’autre. Ceux qui déclarent d’ores et déjà Poutine vainqueur me font penser aux capitulards de 1941 qui voyaient déjà Hitler définitivement maître de l’Europe après la défaite de la France et disaient qu’il fallait dorénavant collaborer avec lui. C’est pourtant ceux qui ont refusé ce défaitisme, Churchill, de Gaulle, les résistants comme Jean Moulin, etc., qui ont fini par triompher alors que les Chamberlain, Pétain, Quisling et autres “collabos” ont, eux, fini dans les poubelles de l’Histoire!

    3. La cuisine russe est infecte autant que son idéologie de puissance toxique. Pour avoir subi URSS, je prie pour voir cette Russie haïe ruinée. Désolé d’être brutal mais je préfère subir le joug des USA, si déjà.

    4. “La cuisine russe aurait été 1000 fois préférable à ces saloperies de hamburgers.”

      Ces “saloperies de hamburgers”, les Moscovites n’en redemandent-ils pourtant pas depuis que leur MacDonald, repris par un gérant russe auquel la chaîne américaine le lui a vendu, vient de ré-ouvrir? Et ce n’est pas pour refiler des bitoks, pourtant capables de rivaliser avec les meilleurs “Big Mac’s”, ni borstch, ni blinis, ni shashlik, ni pirochki à ses clients.

      Je ne sais quelles sont vos affinités avec la Russie mais pour avoir parcouru l’ex-URSS de part en part au plus chaud de la guerre dite “froide” – mettons, pour une mission d’un genre un peu “spécial” – au milieu des années 1970 et jusqu’à la chute de l’empire soviétique, des côtes du Primorski Kraï sibérien à l’ex-Leningrad, je peux vous assurer que, déjà à cette époque, les Russes, de Nakhodka aux rives de la Neva en passant par Khabarovsk, Irkoutsk, Omsk et Moscou, ne juraient que par le consumérisme à l’occidentale et croyaient à l’idéologie communiste autant qu’au Père Noël. Et il est peu probable qu’ils croient plus en la propagande de Poutine aujourd’hui.

      Comme d’autres commentateurs de ce blog, ne céderiez-vous pas à la confiance aveugle de certains occidentaux dans le “modèle” soviétique, dont le régime actuel offre un exemple achevé de ce qu’Alexandre Zinoviev appelait un parangon de farce stalinienne -, dans la lignée des Aragon, Sartre et autres avatars de l’intelligentzia bourgeoise – mot d’invention russe – pourtant restés aveugles sur les crimes du stalinisme?

      Dans son livre “La désinformation vue de l’Est”, l’écrivain français d’origine russe Vladimir Volkoff rappelle que toutes les persécutions subies par les Chrétiens en deux mille ans, à toutes les époques et sous tous les régimes, ont fait quelques trente mille morts. Mais les néo-staliniens au pouvoir aujourd’hui ont effacé de manière délibérée la mémoire des trois cent mille Chrétiens massacrés en moins d’un demi-siècle par Staline.

      Ne seriez-vous pas de ceux qui trouvent plus commode de dénoncer les morts dus aux actions terroristes que ceux provoqués par les accidents de la route, dont les chiffres montrent qu’ils sont au moins dix fois supérieurs aux premiers?

  5. L’Occident s’est permis de fermer RT et Sputnik par simple décision administrative et de saisir des biens appartenant à des Russes hors de tout droit commun.
    Ce que dit l’article a été vrai mais il oublie que ces gens débarrassé du carcan d’une idéologie savent regarder et réagir, et en plus ce ne sont pas des “sans dent”.

  6. Personne n’a gagné, ou ne gagnera jamais, tant que rancune, jalousie, orgueil dominent,

    Aujourd’hui, l’acrimonie domine. Certains dirigeants, parmi d’autres motivations, tentent d’assurer le « bonheur » de ceux qu’ils dirigent. Parfois ils dérapent, persévèrent et entrainent d’inutiles souffrances.

    L’histoire de l’humanité le démontre, pourtant notre intelligence se développe. Comment avons nous progressés ? En oubliant jalousie, rancune, rage, etc… et en utilisant notre créativité.

    L’humilité est l’incubateur de la créativité… Voyez la superbe transformation du Japon dès les années 60.

    Comparer Russie et USA c’est apporter du fuel au feu de la jalousie. doit-on comparer les hommes plutôt que les sociétés ? Les hommes choisissent toujours la liberté pour être créatifs, aimer et apporter du positif. Les migrations illustrant bien ce choix.

    L’aliénation existe tant aux USA qu’en Russie (et ailleurs) mais l’OTAN fédèrent des pays qui privilégient la liberté et la créativité, pour le futur de l’humanité. Restons vigilant et fuyons ceux qui entendent imposer l’inverse.

    Merci pour ce blog.

  7. J’aimerais bien avoir la réponse de M. Alexandre Casella lui-même à ma question, et non celle de tous les habituels va-t-en guerre…

    Ils prétendent qu’on doit aller jusqu’à la guerre mondiale au nom des droits de l’homme, car selon eux la Russie est un danger pour leur rêve de “multilatéralisme démocratique” (comme a osé le dire Emmanuel Macron) ce qui dans leur esprit inclut les droits de l’homme, mais ils oublient juste que leur guerre causera un nombre de victimes avec un zéro de plus que la dernière fois, soit environ 500’000’000, ou un demi milliard de personnes.

    Ils sont beau les droits de l’homme qui causent la mort de 500 millions de personnes.

    J’avoue que je suis déçu par cet article de M. Casella qui d’habitude me semblait dire des choses intéressantes en dehors de la matrice…

    1. “les habituels va-t-en guerre”, vous parlez sans doute de Poutine, Lavrov & Co? Avez-vous regardé les TV d’état russes, Первый канал en particulier, depuis le début de “l’opération spéciale” (très “spéciale” en effet 🙂 ) en Ukraine? Ce ne sont que rodomontades sur la puissante armée russe qui va balayer toutes celles des pays de l’OTAN, sur Londres, Paris, etc. détruits par des missiles nucléaires (avec simulations “réalistes”!), sur un tsunami créé par des torpilles nucléaires qui va submerger toutes les îles britanniques (re-simulation spectaculaire!), etc. La population russe subit un vrai matraquage de propagande qui les conditionne à accepter n’importe quelle escalade guerrière, même si beaucoup devaient en mourir, car peu importe puisque, toujours selon les TV russes, “les Russes iront au paradis et les Occidentaux en enfer”! Je n’ai rien vu de tel, et de loin, dans nos pays ou, au contraire, on fait tout le possible pour éviter d’en arriver au “clash” nucléaire généralisé (mais Poutine fera-t-il preuve de la même retenue, on peut malheureusement en douter au vu de ce qui est rappelé ci-dessus?!)!

  8. Monsieur Casella,
    Votre article est certainement intéressant mais, malgré votre lucidité, vous êtes malheureusement acquis aux vues des mondialistes et autres rêveurs occidentaux qui ne voient pas, ou ne veulent pas voir, que le capitalisme à outrance et le mondialisme sont morts. Le nouveau monde sera multipolaire que cela vous plaise ou non. Et cela m’intéresserait en effet de lire votre réponse au commentaire factuel de REALPOLITIK, même si ce dernier se cache derrière l’anonymat.

  9. Dans son “Art de la guerre”, qui a exercé une influence considérable sur tous les stratèges chinois et japonais, Mao Tsê-Tung y compris, et a été étudié dans toutes les écoles militaires du bloc communiste, aussi bien russes que pékinoises, le général chinois Sun Tzu (VIe-IVe siècles?) écrit: “L’art suprême de la guerre, c’est de soumettre l’ennemi sans combat.”

    Selon lui, le chef de guerre idéal doit “prendre intact tout ce qui est sous le ciel […] Dans la guerre, la meilleure politique, c’est de prendre l’Etat intact: l’anéantir n’est qu’un pis-aller.[…] ceux qui sont experts dans l’art de la guerre soumettent l’ennemi
    sans combat. Ils prennent les villes sans donner l’assaut et renversent un Etat sans opérations prolongées.”

    Comment est-ce possible? Par ce qu’on appelle de nos jours l’intox et le “fake news”. Pour le général chinois, “tout l’art de la guerre est fondé sur la duperie” et “le suprême raffinement, c’est de s’attaquer aux plans de l’ennemi.” Bref, aujourd’hui Sun Tzu dirait qu’avant même d’avoir tiré un seul coup de fusil, le pays ennemi s’est rendu.

    A cet égard, Poutine et son état-major n’auraient pas brillé à l’école de Sun Tzu. N’obtiennent-ils pas l’effet exactement inverse de celui qu’ils escomptaient? Poutine voulait-il neutraliser, démilitariser et “dénazifier” l’Ukraine? Il l’a précipitée dans les bras de l’Union Européenne, faite réarmer par les pays occidentaux et a échoué à renverser son président, de confession juive. Voulait-il faire reculer les frontières de l’OTAN? Il a poussé la Suède et la Finlande dans ses bras – la Finlande offrant à l’Alliance atlantique sur un plat d’argent ses mille trois cent quarante kilomètres de frontière commune avec la Russie. Ce sont ses troupes qui ont reculé sur tous les fronts, avec des pertes que le Kremlin juge lui-même “importantes”, pour ne conquérir qu’un espace minime au prix de destructions, de pertes humaines et matérielles qui ont dépassé en trois mois celles que l’URSS a subies en dix ans en Afghanistan.

    Se dit-il “encerclé” par le bloc militaire occidental? Quand on dispose du plus vaste territoire de la planète, couvert par onze fuseaux-horaire, ne faut-il pas avoir une notion pour le moins singulière de l’encerclement?

    Habile tacticien peut-être, Poutine n’est-il pas à coup sûr un piètre stratège? La seule leçon qu’il semble avoir retenue de Sun Tzu – à supposer qu’il l’ait lu -, c’est le mensonge. De même que Soljenitsyne affirmait autrefois qu’il aurait suffi que les Russes arrêtent de mentir pour que le communisme s’effondre du même coup, de même ne suffirait-il pas que Poutine et sa clique cessent de mentir pour que cette guerre aussi absurde que cruelle s’arrête?

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