Au fur et à mesure que la pandémie touche les différents continents (Afrique, Amérique Latine, Moyen-Orient, Asie du Sud-Est) dans lesquels les donateurs que nous accompagnons soutiennent des projets de développement sur différentes thématiques, il me semble utile de continuer à témoigner des réalités vécues par les acteurs de terrain et surtout les réponses apportées à cette crise sanitaire hors Europe.
Mon propos n’est pas de tirer de constat, je crois qu’il est encore trop tôt pour le faire mais plutôt de partager mon analyse sur la base des échanges réguliers avec les organisations qui viennent en aide aux plus démunis et donner, quand faire se peut, une mise en perspective :
Vulnérabilité
Poursuivre les activités malgré les mesures de confinement plus ou moins strictes prises par les autorités dans chacun des pays concernés. A l’image des PME chez nous, beaucoup d’organisations doivent travailler avec un effectif réduit dans des pays où l’allocation chômage n’existe pas.
Continuité
Concrètement, il faut garder un niveau d’activités, protéger les équipes qui les réalisent, tout en réduisant les salaires et en licenciant une partie des équipes.
Du développement à l’humanitaire
En l’espace de deux semaines, la plupart des organisations ont dû revoir ce qu’on pourrait qualifier de « modèle d’affaire » en passant de services de développement (accès à l’éducation, formation professionnelle, réduction de la pauvreté) à de l’aide humanitaire de base (repas, médicaments) pour leurs bénéficiaires qui sont souvent la population la plus vulnérable (famille vivant sous le seuil de pauvreté avec des profils vulnérables comme personnes âgées, très jeunes enfants, ou encore foyer monoparental,).
Sens du mot partenariat
La majorité des bailleurs de fonds a informé les organisations de leur solidarité quant à la situation et sur l’utilisation des fonds. Cependant, les modalités ne sont pas toujours précisées.
Les amateurs de whisky connaissent bien le concept de la part des anges : il s’agit de la part d’évaporation du breuvage lors de son vieillissement et qui rend le breuvage meilleur. Si l’on fait l’analogie avec le monde de la philanthropie, il peut s’agir des fameux coûts administratifs sur lesquels il existe un débat sans fin. On peut les percevoir comme superflus alors qu’il s’agit bien souvent des salaires des équipes ou autres coûts fixes dont dépendent le bon fonctionnement d’une organisation.
Je ne peux qu’inviter les donateurs à soutenir cette part des anges pour les mois à venir, c’est ce qui permettra aux organisations de se relever. Il ne s’agit pas de signer un chèque en blanc mais plutôt de faire preuve de la même flexibilité que les organisations pour répondre à ce nouveau contexte et de permettre à celles-ci de garder les collaborateurs qu’elles ont mis des années à former et de permettre la réalisation des activités prioritaires au service des plus démunis.
Martial Paris