Quelles réformes structurelles?

Les partisans des réformes structurelles pour sortir la zone euro de sa propre crise insistent mordicus sur la nécessité d’équilibrer les finances publiques par une réduction des dépenses pour la protection sociale et par une privatisation accrue des services publics d’antan. Ce credo est fondé sur la pensée économique dominante, alignée sur les intérêts du dernier centile (1%) de la répartition des revenus et de la richesse. Or, contrairement à la théorie du ruissellement, les écarts de revenu et de richesse, au sein des pays membres de la zone euro et entre ceux-ci, n’ont pas diminué suite à l’adoption d’une monnaie unique européenne et se sont davantage creusés suite à la mise en œuvre des premières mesures d’«austérité expansionniste» dans les pays périphériques de l’Euroland.

Les tenants du néolibéralisme affirment qu’il faut laisser le temps à ces mesures de déployer pleinement leurs effets, qui, à leur dire, seront de signe positif en ce qui concerne la croissance économique (attendue). Ainsi, par exemple, la Banque centrale européenne, dans son Bulletin mensuel de décembre 2012 (page 84), reconnaît dans le cadre de ses simulations que «ces processus d’ajustement durent plus que dix ans» – entendez que, dans cet intervalle de temps, le niveau du PIB ne sera pas plus élevé (en fait, il sera plus bas) que celui de l’année précédant la mise en œuvre des politiques d’austérité.

Or, si les réformes structurelles sont censées être finalement la clé de voûte pour sortir de la crise, il est légitime de s’interroger sur la raison fondamentale qui empêche les autorités politiques de proposer, et de mettre en œuvre, de telles réformes pour limiter les effets nuisibles au plan systémique des activités financières «prédatrices». Ce serait une manière élégante d’assurer la cohérence entre les principes des choix publics et leur application à l’ensemble des parties prenantes dans les pays membres de l’Euroland, en ce qui concerne notamment les pays les plus problématiques pour la poursuite de l’intégration européenne, mise à mal et sérieusement menacée par les «intégristes du marché».

Sergio Rossi

Sergio Rossi est professeur ordinaire à l’Université de Fribourg, où il dirige la Chaire de macroéconomie et d’économie monétaire, et Senior Research Associate à l’International Economic Policy Institute de la Laurentian University au Canada.