En politique monétaire, la crédibilité de la banque centrale est un atout majeur pour assurer l’efficacité de ses interventions ayant pour objectif la stabilité des prix et, de là, contribuer à la stabilité macroéconomique. Le «nouveau consensus en macroéconomie», qui s’est imposé au sein de la profession, affirme que l’indépendance de l’autorité monétaire est cruciale pour asseoir la crédibilité de la politique menée par la banque centrale. Ce consensus est particulièrement bien établi en Allemagne, où la Banque centrale européenne (BCE) a son siège et où se trouve la banque centrale nationale (Bundesbank) la plus intégriste qui existe à cet égard.
Or, le recours déposé par environ 35 000 citoyens allemands à la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, en Allemagne, contre l’implication de la BCE dans le mécanisme de soutien de la zone euro remet en question l’indépendance de l’autorité monétaire européenne, contredisant ainsi, ouvertement, le principe de l’indépendance des banques centrales. Nul n’a besoin d’être économiste pour comprendre que cette contradiction, une fois découverte par les marchés, affaiblira la crédibilité de la BCE et donc le dispositif «pare-feu» mis sur pied tardivement avec son aide.
Qui plus est, l’audition de Jörg Asmussen – le membre allemand du Directoire de la BCE – face aux huit juges de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, le 11 juin 2013, peut avoir un impact dramatique sur les marchés financiers et aggraver la crise systémique de la zone euro.
S’il est vrai que l’annonce de Mario Draghi du 26 juillet 2012 à Londres devant un parterre de financiers, leur expliquant que «la BCE est prête à faire tout ce qu’il faut pour préserver l’euro […] et ce sera suffisant», a réussi à réduire visiblement les taux d’intérêt que doivent payer bien des États en grave difficulté au sein de l’Euroland, grâce notamment à l’adoption d’un programme de rachats d’obligations publiques (nommé «OMT») sans aucune limite préétablie, les explications fournies par J. Asmussen à la Cour constitutionnelle de Karlsruhe vont dans le sens contraire, précisant que «le programme [OMT] est effectivement limité […] par le nombre limité d’obligations qui peuvent être achetées» sur le marché secondaire de la dette publique.
Dès lors, même si la décision des juges de Karlsruhe ne sera connue que dans quelques mois, il faut craindre un été chaud et perturbé pour toute la zone euro. Il est temps de prendre des vacances pour changer les idées…