Quels sont les enjeux de la cyberdéfense?

La prospective est « la démarche qui vise, dans une perspective à la fois déterministe et holistique, à se préparer aujourd'hui à demain »[1]. « Elle ne consiste pas à prévoir l'avenir mais à élaborer des scénarios possibles sur la base de l'analyse des données disponibles (états des lieux, tendances lourdes, phénomènes d'émergences) et de la compréhension ainsi que la prise en compte des processus socio psychologiques » comme le rappelle Michel Godet (1997) : « si l'histoire ne se répète pas, les comportements humains se reproduisent ». La prospective doit donc aussi s'appuyer sur des analyses rétrospectives ainsi que la mémoire du passé humain et écologique (y compris, par exemple, les impacts environnementaux et humains des modifications « géoclimatiques » comme techniques passées).

Le cyberespace, constitué par le maillage de l’ensemble des réseaux, est radicalement différent de l’espace physique. Il est sans frontière, évolutif, anonyme et  l’« identification certaine » d’un agresseur y est délicate. Un peu comme les frontières des pays/nations face aux changements climatiques.

La fonction première de la prospective est d'être une aide à la décision stratégique, qui engage un individu ou un groupe et affecte des ressources (naturelles ou non) plus ou moins renouvelables ou coûteuses sur une longue durée, comme les systèmes d’information, véritable réseau neuronal de l’entreprise. Elle acquiert ainsi une double fonction de réduction des incertitudes (et donc éventuellement de certaines angoisses) face à l'avenir, et de priorisation ou légitimation des actions. Avoir confiance de manière aveugle en ses systèmes d’information équivaut, pour un chef d’entreprise, à une vision quelque peu suicidaire.

La prospective est une démarche continue, car pour être efficace, elle doit être itérative et se fonder sur des successions d'ajustements et de corrections (en boucles rétroactives) dans le temps, notamment parce que la prise en compte de la prospective par les décideurs et différents acteurs de la société modifie elle-même sans cesse le futur. Dans cette logique, pour quelle raison un dirigeant d’entreprise, dans son comité de direction du lundi matin, ne pose-t-il pas la question : « d’où provenait la majeur partie des attaques informatiques dirigées contre notre entreprise ces sept derniers jours ? ».

Sans entrer dans les détails des domaines de l’intelligence économique, de la prospective du « métier » du dirigeant, du comportement au travail, des pratiques de management, des prospectives sectorielles et des impacts environnementaux, cet article vise à sensibiliser les dirigeants (managers) aux impacts de la cybersécurité sur l’organisation de leur entreprise et la gestion et protection du savoir comme des processus d’information.

Article complet : EGEA (Etudes Géopolitiques Européennes et Atlantiques)

 

Sandro Arcioni

Sandro Arcioni, Dr ès sciences, lieutenant-colonel, expert en stratégie et en cyberdéfense, directeur de mupex Sàrl et enseignant-chercheur dans le domaine de la gouvernance.