Le parallèle est frappant entre les deux votes référendaires, de 2017 sur la loi sur l’énergie et celui de 2023 sur la loi sur le climat. Le 17 mai 2027 : 58,2% de oui ; le 18 juin 2023 : 59,1% de oui. Dans les deux cas, des lois incitatives et fixant des objectifs et un agenda. Et dans les deux cas, le parti le plus « souverainiste » fait tout pour nous maintenir dans la dépendance d’énergies provenant de régimes douteux et les plus toxiques: le fossile et le fissile, qui composent toujours les trois quarts de notre mix énergétique !
Mises ensemble, ces deux lois nous offrent une belle feuille de route pour davantage de résilience, de durabilité et d’autonomie.
Une belle feuille de route
La modification de la loi sur l’énergie comporte en particulier une réduction de la consommation de 43% jusqu’en 2035 par rapport à 2000 pour l’ensemble des énergies, et de 13% pour l’électricité, et une production de nouvelles énergies renouvelables de 11,4 TWh en 2035 dont 4,4 d’ici 2020 (réalisé en 2021 : 4,04 TWh).
Quant à la loi sur le climat, elle énonce un agenda précis de réduction des « émissions de gaz à effet de serre en Suisse par rapport à 1990 comme suit: a. dans le secteur du bâtiment: 1. jusqu’en 2040: de 82 %, 2. jusqu’en 2050: de 100 %; b. dans le secteur des transports: 1. jusqu’en 2040: de 57 %, 2. jusqu’en 2050: de 100 %; c. dans le secteur de l’industrie: 1. jusqu’en 2040: de 50 %, 2. jusqu’en 2050: de 90 % » (art. 4, al. 1).
Toutefois, si l’on considère le poids carbone de nos importations, les émissions de la Suisse passent de 46 millions de t à 115; l’impact des investissements suisses hors de Suisse est encore bien plus important, d’un facteur 20 à 30 (selon McKinsey, Klimastandort Schweiz, juillet 2022). Aussi l’art. 9, al. 1 de la loi fait-il appel au secteur financier : « La Confédération veille à ce que la place financière suisse apporte une contribution effective à un développement à faible émission capable de résister aux changements climatiques. Il s’agit notamment de prendre des mesures de réduction de l’effet climatique des flux financiers nationaux et internationaux ».
Un plan d’action clair
Le plan d’action est clair : d’une part mobiliser les ressources locales et renouvelables, dont le potentiel est bien plus important qu’on le pense communément : solaire, éolien, géothermie biomasse et biogaz… considérant aussi que l’hydraulique pourra connaître des difficultés si le changement climatique devait réduire la pluviométrie. Et d’autre part, poursuivre la chasse au gaspillage à la fois par l’optimisation technique (efficience) et la sobriété dans la consommation (suffisance). Le Parlement a récemment avancé sur le premier pilier de la transition, mais rechigne encore à mobiliser le second. Sachant aussi que la décarbonisation passera par une électrification raisonnable d’une automobilité elle aussi raisonnable et par la généralisation des pompes à chaleur, et que donc une partie des économies d’électricité nous permet de développer ces solutions.
Chasser le fantôme du nucléaire
Certains, pensant qu’on pourra s’en sortir sans aucun changement de nos habitudes (alimentaires, de déplacement, etc.), veulent à tout prix inclure le nucléaire dans les solutions. Or remettre au surlendemain ce qu’on peut et doit faire aujourd’hui est très imprudent non seulement face à l’urgence climatique avérée, la Suisse se réchauffant deux fois plus vite que la moyenne mondiale, mais en termes de risques (on ajoute aux risques du fossile ceux du fissile) et d’affectation de ressources financières. Avec la dizaine de milliards de CHF que coûte une centrale nucléaire actuellement, nous pouvons obtenir un bien meilleur résultat en isolant notre parc immobilier et en captant les énergies renouvelables présentes autour de nous !
Assumer nos choix
Restent des craintes d’ordre environnemental. Le développement des énergies renouvelables aura un impact sur le paysage; même si l’on agit avec humilité et doigté, on ne peut pas récolter l’énergie du vent ou du soleil de manière invisible et sans aucun impact. Mais l’impact d’un changement climatique qu’on aurait renoncé à mitiger serait infiniment plus lourd.
Et soyons fiers de commencer maintenant un peu plus sérieusement à valoriser nos ressources propres, comme nous avons été voici quelques décennies fiers de nos barrages, assumons nos choix, au lieu de tout cacher comme si l’on en avait honte. Et s’agissant des matériaux tels que batteries des voitures électriques, pales d’éoliennes, panneaux solaires usagés, il s’agit de mobiliser le savoir-faire de l’économie circulaire pour faire des déchets d’aujourd’hui les ressources de demain.
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