UDC Vaud: faites ce que je dis, pas ce que je fais

Convaincue d'avoir enregistré en douce ses collègues lors d'une séance interne, Fabienne Despot a sauvé sa tête à la présidence de l'UDC Vaud ainsi que sur les listes pour les fédérales de cet automne, suite à un congrès extraordinaire de sa formation . Ce faisant, elle a rendu un immense service à toutes celles et tous ceux qui se battent pour une justice humaine.

Depuis quelques semaines, l'UDC Vaud nous gratifie d'un des plus beaux feuilletons de l'été qu'on ait eu à vivre ces dernières années dans ce coin de pays: sur fond de querelles d'égo et de guerres intestines, la présidente du parti Fabienne Despot a été accusée, puis a reconnu avoir enregistré ses collègues lors d'une séance interne sans les en avertir, acte pénalement répréhensible. D'abord tentée de minimiser l'affaire, l'UDC Vaud a finalement dû se résoudre, poussée notamment par ses parlementaires fédéraux, à organiser un congrès de tous les dangers pour, en somme, faire le procès de Fabienne Despot.

Or, en l'espèce, le congrès a traité la question de manière exemplaire. Il a entendu les parties, donné le droit à l'accusée du jour de se défendre et de demander la clémence et la compréhension de l'auditoire, permis à ce dernier de juger, en son âme et conscience, le pour et le contre, en considérant les tenants et aboutissants de l'affaire et des circonstances particuières l'entourant. Au final, une majorité du congrès a absous Fabienne Despot, acquittée politiquement de ses fautes, maintenue à la tête de l'UDC Vaud et sur les listes électorales de son parti pour les fédérales de cet automne. Un bien bel exercice de justice humaine, où l'énoncé du droit cohabite avec l'appréciation souveraine de la situation et de ses subtilités – et c'est très bien comme ça: c'est ainsi que toute justice respectueuse des droits fondamentaux des personnes, en premier lieu desquelles les accusées et accusés, se doit de fonctionner.

Le contraste est évidemment saisissant avec le discours de l'UDC en matière de justice: dans le domaine du droit, l'UDC ne cesse de prôner la tolérance zéro: le renvoi automatique des requérants d'asile déboutés ou l'expulsion automatique des criminels étrangers, pour ne prendre que deux exemples où elle est particulièrement vocale. L'UDC veut imposer une justice aveugle, où les procédures s'appliquent automatiquement et qui interdit aux juges et aux cours de prendre en compte les circonstances dans lesquelles un crime ou un délit a été commis. Mais qu'il s'agisse de l'un des siens ou de l'une des siennes, et comme par miracle, le discours – comme la pratique! – vient à changer du tout au tout. Le moins qu'on puisse dire, c'est que l'UDC ne juge pas approprié de s'appliquer ses propres préceptes – comme disait mon père en citant le pasteur Bonzon de Payerne: faites ce que je dis, pas ce que je fais.

En définitive, l'UDC a évidemment perdu toute crédibilité lorsqu'elle réclame la tolérance zéro en matière d'actes délictueux.

En soi, c'est une excellente nouvelle.

 

Pierre Dessemontet

Pierre Dessemontet est docteur en géographie économique, syndic d'Yverdon-les-Bains, député au Grand Conseil vaudois, et vice-président du Parti Socialiste Vaudois.