Faire le Malin

 

"La plus belle des ruses du diable est de vous persuader qu'il n'existe pas!", fait dire Charles Baudelaire à un prédicateur dans Le Joueur généreux. Et si le diable existait pour de mal? En ce XXIème siècle où les esprits rationnels dominants croient avoir définitivement éliminé toute réalité d’un monde invisible qui serait peuplé d’entités plus ou moins lumineuses, plus ou moins ténébreuses, la formule du poète peut prêter à sourire.

Les possédés de la haine et du fanatisme, comme ces membres de l’organisation Etat islamique, ne seraient que des détraqués mentaux, des cas psychiatriques. Au même titre que les possédés du fric et de l’insolence qui pataugent dans une finance déconnectée de toute réalité, manipulateurs-manipulés avec leurs monstrueux robots-traders qui en un simple clin d’œil réalisent jusqu’à 7000 transactions. Au même titre que ceux qui cautionnent les parachutes dorés quand des milliers d’employés s’abîment sur les décombres de leur entreprise démembrée.

Et si les acteurs de toutes ces violences, qui ne sont peut-être pas sans lien, étaient manipulés par le Malin? Ce tentateur qui, selon les écritures saintes, a essayé vainement de faire plonger le Christ dans le néant. Illusion, fantasme? Dans le doute, je relis Dialogues avec l’ange, un ouvrage écrit par Gitta Mallasz, publié il y a presque quarante ans et traduit en 18 langues. L’ange souligne: «Tu accueilles en toi le mal et tu le transformes en bien. Car le mal n’existe pas, mais seulement la force non transformée».

Les Verts ne devraient plus exister!

 

Selon le dernier baromètre électoral de la SSR, les Verts et surtout les Vert’libéraux continuent à perdre des plumes dans les intentions de vote. Si les questions environnementales étaient désormais au cœur des préoccupations de tous les partis politiques, cet effritement n’aurait rien d’inquiétant. Hélas, ce n’est vraiment pas le cas.

Dans une société vraiment évoluée, on n’entendrait ni ne lirait plus des inepties du genre: «C’est bon pour l’économie». Prenons l’exemple de l’automobile, la référence suprême pour beaucoup d’entre nous. Pour la conduire, jusqu’à preuve du contraire, il faut un pilote. Et pour la faire rouler, il faut un carburant ou de l’électricité, bref de l’énergie. Symboliquement, l’économie, c’est de l’énergie, un moyen de faire avancer un pays. Mais ce n’est certainement pas un acteur de ce pays! Sans énergie la voiture ne roule pas. Mais c’est le pilote qui est maître du jeu. Sans saine économie, un pays n’avance pas. Mais ce sont les femmes et les hommes qui doivent prendre leur destin en main. Que telle décision soit bonne ou non pour l’économie, nous n’en avons rien à cirer. La seule question qui compte est de se demander si cette décision est bonne ou non pour notre humanité. L’économie n’est pas un OBJECTIF mais un MOYEN de réaliser cet objectif.

Dans une société vraiment évoluée,  les critères de l’écologie (et de l’environnement au sens large) seraient situés en haut de l’échelle des valeurs. Aujourd’hui, c’est l’économie qui mène le bal. Et quel bal, une vraie bousculade où tout le monde se marche dessus! Hormis quelques voix négationnistes qui se font encore un devoir de minimiser les causes et les effets catastrophiques déjà perceptibles du dérèglement climatique, avec l’acidité croissante des océans, la disparition ou la mutation de nombreuses espèces animales, la raréfaction de l’eau potable, l’épuisement des sols, etc., les esprits éclairés pensent qu’il est encore temps de limiter les dégâts. Pour ce faire, toute décision politique et économique devrait être prise avec le souci premier de ne pas encore aggraver la situation, voire de l’améliorer.

Dans une société vraiment évoluée,  l’écologie ne serait plus l’affaire d’un parti que l’on se croit obligé de flanquer à gauche (pour les Verts) ou à droite (pour les Vert’libéraux), mais de l’ensemble des formations politiques. Déjà au début des années 1970 Robert Poujade, premier ministre de l’environnement en France, déplorait dans son livre Le ministère de l’impossible l’énorme difficulté de faire prendre conscience à ses pairs des enjeux de l’écologie. «Vous allez apprendre ce qu’est l’Administration. Vous n’aurez pas beaucoup de moyens. Vous aurez peu d’actions très directes sur les choses » lui avouait dès son arrivée en fonction le président Georges Pompidou. Presque un demi siècle plus tard, force est de reconnaître qu’il reste encore bien du chemin à faire.

Dans une société vraiment évoluée,  il n’y aurait donc ni Verts ni Vert’libéraux mais des femmes et des hommes politiques suffisamment éclairés et lucides pour saisir la gravité de la situation. Et qui auraient le courage de faire passer l’intérêt de l’humanité avant toute considération égocentrique et partisane.