Ecopop, Or de la BNS, immigration et restrictions des droits populaires

Il y a un proverbe de là bas que j'aime bien: "Lorsque le sage montre la lune, l'imbécile regarde le doigt".

Cette année 2014 aura été un grand cru pour les votations populaires: populistes, électoralistes, mal fagotées, parfois puant d'un eugénisme mystique, voilà qu'elles posent la question de l'expression des droits populaires. C'est un débat étonnant puisqu'au lieu de se poser la question du pourquoi de telles initiatives arrivent sur la place publique suisse sous forme d'initiatives ou de référendums, on se propose de limiter les dégats en resteignant les droits populaires. De plus, ces initiatives ne sont pas le fait d'un mouvement citoyen, ni même de certaines personnes éclairées qui battent le pavé des émissions, médias et autres internet en expliquant, débattant, ajoutant la pédagogie à la conviction, mais bien de la part d'une partie de parlementaires battus et dégoûtés. Des parlementaires qui se cherchent. Qui cherchent leur mission et qui admettent, en entamant avec une certaine conviction ce débat sur la restriction des droits populaires, que c'est la population qui est stupide et qu'il convient donc de lui restreindre ses droits. Refrain connu d'élites perdues, et constat amer de la facilité avec laquelle il serait possible de manipuler les électeurs et les votants en y injectant les moyens monétaires adéquats.

Ce constat est malheureusement biaisé, tordu et manipulé en lui-même. Il rappelle étrangement celui de la transparence, de la justice fiscale, chère à la gauche, de l'égalité des chances et de la liberté individuelle. Il est inutile d'espérer que des citoyens harassés de travail, de tracasseries administratives, pris dans les tourments familiaux que l'éducation correcte de ses enfants exige de parents overbookés et bombardés jour et nuit d'informations mondiales sur lesquelles ils n'ont ni prise ni même intérêt, puisse s'accaparer cette transparence, ce choix et ces réfléxions.

Le véritable problème n'est il pas justement la communication politique ? Contrer une communication politique par une autre devrait être le terrain de jeu et non pas jouer sur un plan réglementaire que plus personne ne comprends tant il s'est spécialisé, complexifié, hermétisé jusqu'à l'abscon et à l'absurde. La réponse réglementaire à des peurs sociétales est une réponse indiote mais également dangereuse. Le citoyen est déjà suffisamment mis en coupes réglées par des systèmes sur lesquels il n'a plus prise que lui restreindre encore ce petit morceau de droits populaires qui fait des Suisses une population assez privilégiée au niveau de ses droits est une idée dangereuse.

La communication politique n'est pas crier fort. Les mensonges et les idioties sont nombreuses, tout comme les manipulations. Je m'étonne chaque jour de voir le temps et l'argent que nous perdons sur une initative aussi nauséabonde qu'Ecopop qui, avec un phrasé de maître vis à vis de son esclave, juge sur son ridicule bout de territoire ce que l'avenir de la planète doit être et ce que nous autres, riches, devons faire à ceux-là, pauvres, parasites mais main d'oeuvre bien docile et soumise, ce qu'il convient de faire pour conserver notre propre petit bien être. C'est vraiment n'importe quoi, même si cela ne part pas d'une mauvaise intention. Mais on le sait, les bonnes intentions pavent les autoroutes de l'enfer.

L'initiative sur l'or de la BNS semble également partir d'une bonne intention, mais visiblement, les initiants n'y connaissent absolument rien en économie. Pourquoi personne ne se pose de questions quand à la réserve fractionnaire, aux bilans bancaires qui ne respectent pas les normes comptables GAAP comme le Centre d'Etudes Monétaires de Modena l'a montré pour plus de 60 banques européennes ? Pourquoi n'enseigne t'on pas l'histoire monétaire et les effets du fiat money sur les bancs de faculté d'économie ? Pourquoi le poids des économies et acteurs criminels dans l'économie, la banque, l'industrie, les médias et la politique sont systématiquement occultés des facultés de science sociale ? 

La question est moins de donner son avis sur telle ou telle autre initiative mais bien de se poser la question de ce qui engendre les effets de masse qui poussent nos concitoyens à voter pour la limitation de l'immigration ou pour vouloir se couper du reste du monde tout en préservant nos richesses. Il faut comprendre ces peurs, et il est bien naturel d'en avoir dans ce monde en plein bouleversement dans lequel nous vivons aujourd'hui. Toutes les populations européennes ont peur de leur avenir, mais toutes ne sont pas figées dans un réflexe identitaire, restrictif construisant barbelés et murs autour d'elle pour se protéger de l'autre qu'on ne comprends plus. Dans le même temps, des expériences naissent, des réflexions aboutissent et d'autres expériences avortent ou s'arrêtent d'elles même. Ce bouillonnement d'idée touche la conception même de la démocratie, de la place de l'individu dans le groupe et la communauté, la question des dialogues et des conflits à résoudre, des intérêts antinomiques à concilier et de la manière de communiquer et d'écouter. 

Au lieu de restreindre les droits populaires, certains parlementaires devraient plutôt s'inspirer de leurs bêtes noires pour les battre sur leur propre terrain plutôt que de faire le lit d'une peur plus grande encore qui ne présage de toutes façon rien de bon.

Nicolas Giannakopoulos

Nicolas Giannakopoulos est un des spécialistes reconnu internationalement dans le domaine des organisations et autres structures criminelles. Au travers des recherches qu’il mène depuis 1991, il a apporté le soin de concilier recherche et pratique, développant ainsi des compétences scientifiques dont l’utilité pratique est quasi immédiate.