Immigration, intégration et Europe

L'immigration est l'un des thèmes les débattus aujourd'hui, et encore plus en ces temps d'élections européennes. Comme le fait remarquer la Commissaire Emma Bonino, il n'y a pas de solution miracle, mais c'est en même temps un vieux "problème", qui va continuer encore pendant longtemps et qui n'a toujours pas trouvé de solutions satisfaisantes.

De plus, pour une Europe viellissante, tout le monde, même les plus populistes, s'accordent à dire que 20% d'actifs ne peuvent payer pour 60% de retraités sans massacrer le welfare state qui représente toujours, malgré son grignotage systématique et son appauvrissement, une des valeurs fondamentales voulues par les populations européennes. Il faut aussi bien dire que si autant d'immigrés viennent en Europe, ce n'est pas pour la beauté du geste. Ils ne viennent pas au Mali, ni en Afghanistan, mais en Europe, pour sa prosperité économique, pour sa stabilité judiciaire, pour son respect des individus et des droits humains. L'Europe doit être fière du rayonnement de ses valeurs au niveau mondial qui agissent comme une référence et qui font que notre continent possède (encore) un poids considérable sur la scène internationale. Ce n'est pas uniquement pour sa prospérité économique, qui d'ailleurs décline. Enfin, les populations immigrées ne viennent pas en Europe parce qu'elles veulent y imposer un état de fait qu'elles ont elle même fui mais bien pour profiter et faire vivre ces valeurs.

On oublie malgré tout que ces valeurs qui font de l'Europe un phare international mais ont également contribué à sa prospérité économique depuis la fin de la seconde guerre mondiale ne se sont pas construites à partir de rien du tout. Il s'agit de la résultante de siècles de batailles sanglantes et d'une histoire tourmentée que les populations des autres pays n'ont pas vécus. Devant des stigmatisations toujours plus nombreuses et profondes, devant une négation toujours plus systématique des droits humains, les immigrés font ce que tout être humain fait, même inconsciemment: reproduire ce qu'il connaît. C'est pour cela que les diasporas se forment, que les autochtones ne se sentent plus "chez eux" (comme pendant la colonisation), mais la grande majorité reste volontaire et active pour s'intégrer, apprendre, intégrer, vivre et promouvoir des valeurs humaines. C'est le grand projet de toute immigration avec en toile de fond, la responsabilité individuelle et celle des institutions qui devrait offrir un cadre législatif et institutionnel permettant de concilier les faits suivants: (1) la possibilité de chaque individu de se réaliser dignement et de pouvoir subvenir à ses besoins, (2) garantir les valeurs qui font que l'Europe est et reste encore un phare dans les valeurs internationales de respect des individus et des cultures, (3) garantir la sécurité des autochtones comme des migrants et (4) organiser à la fois le maintien et le développement des sytèmes d'organisation communautaires basés sur le welfare tout en permettant ce même développement dans les zones d'origine des migrants eux-mêmes.

Cela passe en premier lieu par une planification de la migration de masse, par un cadre institutionnel qui permette à chaque migrant d'arriver dans des conditions décentes, de participer à la prospérité européenne et de se réaliser petit à petit, par une intégration laissant la place à l'innovation et la créativité de chacune et de chacun, d'apporter sa pierre à l'édifice européen. Cela passe également par une politique qui, au niveau européen serait une politique volontariste de réindustrialisation de l'Europe en rapatriant les industries à faible valeur ajoutée pour les amener vers des industries à forte valeur ajoutée, dans des zones de développement spéciales qui seraient les premières portes d'entrée dans l'Europe. Cela donnerait également de la dignité, de la protection et une capacité d'intervention et de gestion accrue aux pouvoirs publics dans le respect de la concurrence et de l'innovation.

Car si l'Europe à fait l'essentiel de sa richesse sur sa capacité d'innovation, il est clair qu'au niveau collectif d'une population entière, cette capacité créative et d'innovation ne peut se développer qu'en donnant la chance à chacun de l'exprimer. De même, la démocratie ne peut vivre et se développer tout en gardant un sens sans un ensemble de devoirs auquel chacune et chacun qui y est soumis doit non seulement y concevoir son respect, son intégration intime et son apport individuel. Cela ne signifie pas que les systèmes de représentation populaires soient figés mais aussi qu'ils doivent évoluer pour refléter les changements techniques du monde et ses changements humains.

Au niveau de la sécurité, l'absence de sens et la stigmatisation quotidienne crèent une partie de l'insécurité, De l'autre, les mouvements extrémistes et particularistes ont toujours existés. Qu'ils soient islamistes, fascistes, narcos ou d'extrême gauche, ils restent tous des mélanges entre des intérêts de pouvoirs particularistes (il est commode d'aller  faire tuer des autres pour en retirer profit sous forme de pouvoir ou/et d'argent) et une réelle volonté d'expression et de reconnaissance parfois bloquée par les outils et systèmes de représentation.

En mettant en place des système d'immigration directement dans les pays d'origine des migrants, on éviterait des histoires terrifiante de migrants exploités, épuisés, massacrés sur le chemine d'une liberté et d'une prospérité qui n'agit que comme un mirage à celles et ceux qui n'ont pas forcément de choix. Et cette force de travail et d'innovation peut profiter à l'Europe.

Au lieu de vouloir "tous les rejeter à la mer", au lieu de subir ces vagues de désepérés que nous créons par notre mode de vie, organisons nous pour pouvoir en profiter et les en faire profiter eux aussi. Créons ces zones de développement spéciales pour réindustrialiser notre continent, lui redonner un souffle d'innovation et de culture et redonner la dignité nécessaire tant aux migrants qu'à nous-mêmes, populations européennes.

 

Nicolas Giannakopoulos

Nicolas Giannakopoulos est un des spécialistes reconnu internationalement dans le domaine des organisations et autres structures criminelles. Au travers des recherches qu’il mène depuis 1991, il a apporté le soin de concilier recherche et pratique, développant ainsi des compétences scientifiques dont l’utilité pratique est quasi immédiate.