Coup de balai : j’ai testé pour vous

Samedi passé a eu lieu l’action Coup de balai organisée par les cantons de Vaud et Fribourg. L’activité consiste à impliquer les citoyennes et les citoyens dans le ramassage des déchets jetés hors des poubelles. De nombreuses communes y ont participé, dont la mienne. En tant que nouvelle résidente d’Ecublens complètement novice en la matière, j’ai décidé de me lancer.

28 personnes ont récolté un total de 800 kg de déchets en 3 heures à Ecublens. Photo de Pierre-Alain Meylan

Une récolte surprenante

Une bonne équipe de vingt-huit personnes, dont plusieurs membres du Centre de jeunes, est accueillie par le sourire de Pierre-Alain Meylan, adjoint du chef de service des travaux publics et de l’environnement de la Ville d’Ecublens. Il nous offre des pinces ramasse-déchets (vraiment utile ?) et des sacs poubelles (pourquoi autant ?), puis nous divise par secteur. Je suis assignée à une forêt bordée par une route avec Maïlys, Denis et Sophie, que je ne connaissais pas. J’apprécie l’occasion de rencontrer des personnes qui n’habitent pas trop loin de chez moi et qui s’avèrent très sympathiques.

Mon scepticisme quant à l’utilité de l’outil distribué et le nombre de sacs s’évapore en une minute. « Les gens s’attendent à trouver trois cannettes en un après-midi, ils sont souvent surpris » explique Pierre-Alain Meylan, qui permet à la ville d’Ecublens de participer à cette action depuis 2017. Cannettes, mégots, débris de sagex, morceaux d’aluminium, confettis en plastique, emballages alimentaires, il y en a pour tous les goûts. La première place en termes de quantité est offerte à la bouteille de bière de 33 cl, dont la couleur se confond facilement avec les végétaux. On retrouve aussi des objets insolites ou plus encombrants – une vieille banquette de voiture, un gril, une palette en bois abandonnée au creux de la forêt, un sac poubelle rempli de crottins de cheval, « j’ai aussi trouvé un préservatif dans la forêt ! » rigole l’un des participants.

L’ampleur du littering

Jeune (enfin, plus tant que ça) et plutôt naïve, je me surprends dans l’incompréhension. La grande majorité des déchets sont très proches de la route, apparemment jetés par les fenêtres des voitures qui passent. On trouve aussi beaucoup de bouteilles abandonnées près du refuge d’Ecublens en fin de soirée. Ceci dit, le plus marquant était la très haute concentration de bouteilles de bières qui se trouvait dans la végétation près de l’entreprise de recyclage Tinguely. Je suis gênée d’admettre l’ironie de la situation.

Pierre-Alain Meylan passe plusieurs fois pour embarquer les sacs et les déchets encombrants que nous laissons en bord de route ; il en profite pour nous motiver. Après trois heures de ramassage, on retrouve l’équipe au complet au point de rencontre, où l’on prend une photo avec tous les déchets récoltés – pas moins de 800 kg. Surprise par l’ampleur de la pollution, je suis aussi satisfaite d’avoir participé et d’être gratifiée d’un résultat autant marquant. Un petit en-cas nous est offert et ça papote. Je réalise alors que les conversations gravitent autour de thématiques écologiques, mais sur un ton plutôt las.

Les déchets ne se privent pas de surprendre. Photo de Pierre-Alain Meylan

Paradoxes écologiques

« On nous interdit de promener les chiens sans laisse dans la forêt sous prétexte que la zone est protégée, mais la rivière est tout le temps polluée » s’exprime une participante ; « l’objectif est d’interdire les voitures à long terme, comment feront les parents de jeunes enfants ? » Cette action m’a fait prendre conscience du fossé qui divise les consciences concernant le littering[1]. Les discussions m’ouvrent les yeux sur autre clivage, qui nous habite toutes et tous concernant les efforts en lien avec l’environnement.

On est souvent plutôt d’accord avec l’idée de condamner les activités polluantes qui ne nous concernent pas, mais on ressent de l’injustice lorsqu’on nous demande de renoncer à un confort très présent dans notre quotidien. Moi la première, une presque végétalienne qui donne de la viande à son animal de compagnie trois fois par jour. J’ai décidé d’adopter un chaton il y a moins de deux ans, alors que je savais que son alimentation serait extrêmement polluante et que sa présence serait une menace à la biodiversité. Comment est-ce que je peux exiger des efforts dans des domaines qui ne me concernent pas, mais qui sont importants pour d’autres personnes ?

Un impact positif

C’est le genre de réflexion qui m’occupe lorsque je fais le chemin du retour sur mon vieux vélo, en quête d’une bonne douche et d’une soirée au chaud. Les pensées en lien avec la préservation de l’environnement sont devenues très importantes ces derniers mois, et les résistances sont omniprésentes, dans ma tête et partout autour de moi.

Puisque les pensées coincent, j’écris. Cela offre l’espace dont mes doutes ont besoin. J’arrive ensuite à me focaliser sur le positif : vingt-huit personnes ont offert trois heures de leur temps un samedi après-midi et ont réussi à collecter plus de 800 kilos de déchets. La participation a plus que triplé par rapport à 2018, où huit personnes avaient participé à cette action selon l’article de l’Evènement syndical. Ces chiffres s’appliquent uniquement à Ecublens, nous pouvons donc ajouter à cette réussite les 120 actions organisées cette année dans les cantons de Vaud et Fribourg. Aussi petite qu’elle puisse paraître, je décide tout de même de considérer cela comme une victoire.

Comment participer ?

  • Prochain évènement : 15-16 septembre 2023, le Clean-Up Day. Il est possible de joindre l’une des communes, écoles ou organisations qui y participent, ou de prendre l’initiative d’organiser une action Clean-Up Day par soi-même.
  • L’action Coup de balai a lieu chaque année dans de nombreuses communes des cantons de Vaud et Fribourg en mars, il est donc possible de participer l’année prochaine.

[1] « Le littering, c’est le fait de jeter ou d’abandonner sur la voie publique de petites quantités de déchets urbains, sans utiliser les infrastructures prévues. » https://www.bafu.admin.ch/bafu/fr/home/themes/dechets/info-specialistes/politique-des-dechets-et-mesures/littering.html

Marion Marchetti

Marion Marchetti est hypnothérapeute. Son accompagnement et ses réflexions se focalisent sur l'hypersensibilité et l'environnement.