Fais ce qui te chante…et danse !

La dernière fois que je l’avais vue, elle m’avait confié que danser avait souvent agit sur elle comme une thérapie naturelle pour surmonter ou apaiser des moments difficiles. C’était à Zürich, lors d’un déjeuner, qu’elle m’avait divulgué ce secret ! Carmel Fröhlicher-Stines que j’ai connu à la Commission fédérale des migrations (CFM) dont elle a été membre pendant douze ans, était arrivée à notre rendez-vous avec son aura de grande dame (ou grande âme) lumineuse et toujours porteuse d’espoir.

Il n’y a pas d’âge pour être jeune 

Être en compagnie de Carmel, c’est d’abord voyager naturellement dans plusieurs univers à la fois : elle passe de l’anglais, à l’allemand et au français avec aisance, comme dans une danse ! Ensuite, c’est recevoir du courage et des good vibes sans même s’en apercevoir, car elle distille de la douceur avec beaucoup de force, de la gentillesse avec clairvoyance, une écoute intelligente qui inspire, des paroles empreintes d’actions et d’engagements (montrant seulement la pointe de l’iceberg !) et des silences qui ne sont pas muets.

Ceci dit, ce qui m’avait frappée la dernière fois que nous nous étions retrouvées à Zürich, ce fut sa réaction lorsque je lui parlais d’un projet au détour d’une phrase. Elle me lança très spontanément « Ah oui alors c’est pour quand ? Et alors ? Vas-y ! Oui il faut y aller ! », sans aucune hésitation, comme s’il s’agissait pour elle d’une simple respiration, d’un souffle à saisir, quelque chose d’instinctif et de naturel qui ne fait pas l’ombre d’un doute. Là où d’autres vous mettraient des freins avec tant de questions et de mises en garde, elle, elle avait non seulement approuvé, mais en plus désamorcé les craintes du mental pour avancer. De la hardiesse ? Peut-être ! De l’insouciance ? Que nenni ! Car elle en a fait des expériences et sait très bien la difficulté que peut représenter toute initiative ou projet. Mais rien n’arrête son enthousiasme. Et c’est bien cet état d’esprit qui fait grandir et donne l’envie d’explorer, de découvrir et d’avancer, imperméable aux injonctions du temps qui passe et des années qui creusent des rides. Être jeune n’a pas d’âge !

Désormais, je pense à Carmel qui m’inspire ce credo « Fais ce qui te chante et danse ! ». Car oui, dans la vie, faire ce qui nous chante, c’est aussi faire ce qui nous valorise, ce qui nous célèbre dans notre dignité. Et danser, c’est aussi savoir contourner et surmonter toutes les anfractuosités de la vie comme autant de crevasses sur un glacier froid et menaçant. Certains esclaves, certains peuples et quelques artistes ont d’ailleurs fait de leurs chants et de leurs danses de véritables forces d’insoumission.

Mais plus qu’une invitation à faire ce que l’on veut au sens strict – idée souvent mal comprise, car l’impression d’exercer sa volonté peut être biaisée par des pulsions qui, elles-mêmes, peuvent être guidées par le regard des autres – c’est un choix de délivrance. Un appel à la liberté qui rend vivant, peu importe les circonstances extérieures.

“Je suis noires”

Alors comment être libre et vivre sa vie, lorsque la couleur de peau, l’origine, les formes et les apparences deviennent des marques d’exclusion ?

Récemment, lundi 20 mars, Carmel a été récompensée par la Ville de Zürich qui lui a décerné, ainsi qu’à Zeedah Meierhofer-Mangeli, un prix pour son engagement contre le racisme. Dans son parcours militant, elle a notamment co-fondé le collectif Women of Black Heritage à Zürich. Son engagement ne peut toutefois pas se résumer à cette initiative, tant elle a œuvré à différents échelons professionnels, privés et publics. Ceci dit, malgré le fait d’avoir porté différentes casquettes durant sa vie, une constante est toujours restée : Carmel est une femme noire. L’année passée, elle aussi a témoigné, parmi d’autres femmes, dans le film documentaire réalisé par Juliana Fanjul et Rachel M’Bon intitulé « Je suis noires ». Elle y évoque quelques expériences de son vécu, en tant que femme noire. À voir donc !

Tandis que derrière les nuages, la brume ou les ouragans, le soleil brille éternellement, Carmel, elle, danse éternellement…

 

À voir :

 

 

 

 

Hélène Agbémégnah

Juriste de formation, ses expériences professionnelles et personnelles lui ont permis, entre autres, de côtoyer des problématiques liées à la migration et à la diversité. Elle a été membre de la Commission fédérale des migrations (CFM) pendant quatre ans et s’intéresse, dans ce blog, à partager ses vues et réflexions multiples.

Une réponse à “Fais ce qui te chante…et danse !

  1. Rester jeune, c’est aussi conserver ses idéaux qui ne contribuent pas à se faciliter la vie dans le présent. L’âge de raison est parfois l’abandon de ses plus beaux désirs qui voulaient une vie heureuse partagée. Ensuite on danse seul…

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