Fais ce qui te chante…et danse !

La dernière fois que je l’avais vue, elle m’avait confié que danser avait souvent agit sur elle comme une thérapie naturelle pour surmonter ou apaiser des moments difficiles. C’était à Zürich, lors d’un déjeuner, qu’elle m’avait divulgué ce secret ! Carmel Fröhlicher-Stines que j’ai connu à la Commission fédérale des migrations (CFM) dont elle a été membre pendant douze ans, était arrivée à notre rendez-vous avec son aura de grande dame (ou grande âme) lumineuse et toujours porteuse d’espoir.

Il n’y a pas d’âge pour être jeune 

Être en compagnie de Carmel, c’est d’abord voyager naturellement dans plusieurs univers à la fois : elle passe de l’anglais, à l’allemand et au français avec aisance, comme dans une danse ! Ensuite, c’est recevoir du courage et des good vibes sans même s’en apercevoir, car elle distille de la douceur avec beaucoup de force, de la gentillesse avec clairvoyance, une écoute intelligente qui inspire, des paroles empreintes d’actions et d’engagements (montrant seulement la pointe de l’iceberg !) et des silences qui ne sont pas muets.

Ceci dit, ce qui m’avait frappée la dernière fois que nous nous étions retrouvées à Zürich, ce fut sa réaction lorsque je lui parlais d’un projet au détour d’une phrase. Elle me lança très spontanément « Ah oui alors c’est pour quand ? Et alors ? Vas-y ! Oui il faut y aller ! », sans aucune hésitation, comme s’il s’agissait pour elle d’une simple respiration, d’un souffle à saisir, quelque chose d’instinctif et de naturel qui ne fait pas l’ombre d’un doute. Là où d’autres vous mettraient des freins avec tant de questions et de mises en garde, elle, elle avait non seulement approuvé, mais en plus désamorcé les craintes du mental pour avancer. De la hardiesse ? Peut-être ! De l’insouciance ? Que nenni ! Car elle en a fait des expériences et sait très bien la difficulté que peut représenter toute initiative ou projet. Mais rien n’arrête son enthousiasme. Et c’est bien cet état d’esprit qui fait grandir et donne l’envie d’explorer, de découvrir et d’avancer, imperméable aux injonctions du temps qui passe et des années qui creusent des rides. Être jeune n’a pas d’âge !

Désormais, je pense à Carmel qui m’inspire ce credo « Fais ce qui te chante et danse ! ». Car oui, dans la vie, faire ce qui nous chante, c’est aussi faire ce qui nous valorise, ce qui nous célèbre dans notre dignité. Et danser, c’est aussi savoir contourner et surmonter toutes les anfractuosités de la vie comme autant de crevasses sur un glacier froid et menaçant. Certains esclaves, certains peuples et quelques artistes ont d’ailleurs fait de leurs chants et de leurs danses de véritables forces d’insoumission.

Mais plus qu’une invitation à faire ce que l’on veut au sens strict – idée souvent mal comprise, car l’impression d’exercer sa volonté peut être biaisée par des pulsions qui, elles-mêmes, peuvent être guidées par le regard des autres – c’est un choix de délivrance. Un appel à la liberté qui rend vivant, peu importe les circonstances extérieures.

“Je suis noires”

Alors comment être libre et vivre sa vie, lorsque la couleur de peau, l’origine, les formes et les apparences deviennent des marques d’exclusion ?

Récemment, lundi 20 mars, Carmel a été récompensée par la Ville de Zürich qui lui a décerné, ainsi qu’à Zeedah Meierhofer-Mangeli, un prix pour son engagement contre le racisme. Dans son parcours militant, elle a notamment co-fondé le collectif Women of Black Heritage à Zürich. Son engagement ne peut toutefois pas se résumer à cette initiative, tant elle a œuvré à différents échelons professionnels, privés et publics. Ceci dit, malgré le fait d’avoir porté différentes casquettes durant sa vie, une constante est toujours restée : Carmel est une femme noire. L’année passée, elle aussi a témoigné, parmi d’autres femmes, dans le film documentaire réalisé par Juliana Fanjul et Rachel M’Bon intitulé « Je suis noires ». Elle y évoque quelques expériences de son vécu, en tant que femme noire. À voir donc !

Tandis que derrière les nuages, la brume ou les ouragans, le soleil brille éternellement, Carmel, elle, danse éternellement…

 

À voir :

 

 

 

 

Chanter pour les vaches, encore ?

L’expression « vache à lait » prend tout son sens, dans l’émission de Temps présent diffusée jeudi passé et intitulée « Coop, Migros, les petits secrets de la grande distribution ».

Quand j’avais écrit dans un autre post que je chantais pour les vaches, je faisais référence à d’autres « vaches à lait ». Mais aujourd’hui, de vraies vaches me susurrent à l’oreille : « qu’est-ce que tu nous chantes-là, t’étais pas au courant (…) ?! ».

La charrue avant les vaches

C’est bien connu : quand on met la charrue avant les vaches, rien ne marche. Il y a peut-être, voire très sûrement, une logique du marché qui n’est pas logique du tout. Voici quelques questions que je me pose :

  • Comment peut-on garantir des produits de qualité sans pesticides et sans danger pour la santé, si la logique du marché laisse croire aux agriculteurs et agricultrices qui ont des préoccupations financières qu’ils et elles doivent d’abord penser au rendement de leur production plutôt qu’à la qualité ?
  • Lorsque des tomates ou d’autres produits exportés (parce que moins chers ailleurs) sont étalés dans les grandes distributions, offre-t-on réellement un choix de consommation aux personnes dites working poor en Suisse ?
  • Est-ce que profiter des fruits du travail d’une main-d’œuvre moins chère à l’étranger ne favorise-t-il pas des économies dites de « pays riches » au détriment d’autres économies où les travailleurs et travailleuses se voient contraints de migrer ? Peut-on alors empêcher la migration ?

Bien que le reportage de Temps présent lève un pan du voile sur les marges des grands distributeurs dans le domaine des produits laitiers, il reste un vaste horizon à observer pour comprendre les diverses implications et interactions de ces pratiques commerciales, quand il s’agit de consommation, de conditions de travail et de commerce international.

Dans ce sens, swissinfo.ch qui relaie un autre reportage de l’émission À Bon Entendeur, évoque « des conditions de travail choquantes dans l’agriculture suisse ». Si la plupart des paysans/paysannes et/ou agriculteurs/agricultrices souffrent de conditions de travail précaires, il y a encore – plus loin – une réalité du marché de l’emploi à relever : celle des migrant-e-s qui travaillent pour des salaires de misère. Dans cette émission, la chambre valaisanne d’agriculture le dit : « la mauvaise situation économique des ouvriers agricoles est aussi celle de l’agriculture suisse dans son ensemble ». Elle rajoute : « on aimerait bien payer beaucoup plus nos employés, mais pour ça il faudrait que les produits soient mieux payés ». On en revient donc au même problème : il faudrait mieux payer les produits, mais reste à savoir qui doit le faire parmi les différents acteurs impliqués et dans la chaîne des intermédiaires du marché.

Maintenant, si on va encore plus loin dans ce vaste horizon d’une logique du marché basée sur le profit – un horizon qui semble lointain, mais qui a tout de même de forts impacts sur notre vie – on atterrit chez Les « gilets jaunes » d’Afrique. Pourquoi des inégalités dans certains pays peuvent-elles influencer d’autres inégalités en Europe ?

 

Image de mise en avant :

Oeuvre originale intitulée “Vache qui rit” référencée sur le site : Amanni Galerie d’art

Références :

Emission de Temps présent intitulée « Coop, Migros, les petits secrets de la grande distribution » (9 mars 2023)

Article de swissinfo.ch intitulé “Des conditions de travail choquantes dans l’agriculture suisse

Emission À Bon Entendeur intitulée “Les forçats de l’agriculture suisse” (7 septembre 2022) :

L’an 22022

L’année passée, un ami m’avait envoyé un message pour me souhaiter « Bonne année 22022 ». Ainsi je m’étais retrouvée projetée, malgré moi, dans un futur qui m’avait donné le vertige à plus d’un titre. Mes yeux s’étaient mis à loucher ne sachant plus quel 2 en trop il fallait soustraire pour retrouver un semblant de réalité et vivre le moment présent.

Cette année, je m’attendais donc, selon toute logique, à vivre en 22023. Mais en fait non, quelle déception ! Après sa virée dans le futur, l’ami en question est revenu au présent, histoire de mettre en pratique des idées futuristes, créatives et avant-gardistes découvertes en 22022, mais adaptées à l’année 2023.

La créativité comme art du raisonnable

Dans cette lancée, je vous le demande : serait-ce une idée futuriste, créative et avant-gardiste que d’entreprendre et d’oser, par exemple, se souhaiter une bonne année après la date conventionnelle et durant toute l’année ?

Serait-ce complètement décalé ou un brin raisonnable ?

Si l’on part du principe que tous les jours, tout peut recommencer, mais que c’est sur la durée que les choses se maintiennent et deviennent « bonnes », alors il faudrait que chaque jour compte pour que l’année soit bonne. Ainsi – qui sait ! – peut-être que de « bonnes » résolutions seraient prises plus souvent durant l’année pour mieux réussir à les mettre en pratique. Sans pression mais avec raison, on réaliserait que chaque jour a de la valeur et construit une année, voire deux, trois, quatre…

2+2+0+2+2 = 8

Selon la symbolique des nombres, le 8 (addition des chiffres de l’an 22022) a, entre autres, comme signification l’infini, lorsqu’il est positionné couché. Il se pourrait donc que l’an 22022 cache un infini qui s’ignore encore.

Afin de l’explorer déjà maintenant avec créativité, j’ai donc l’immense plaisir de vous souhaiter une belle année 2023 (pas avec du retard !), avec une longueur d’avance sur les temps qui courent…parfois un peu trop vite sans respirer !

Par la voix, ouvrir des voies

Elle entre sur scène, seule. Se dirige vers le piano, conquiert le micro. Sa voix se met à résonner dans toute la salle qu’elle enveloppe de chaleur, tandis qu’il pleut dehors. Assise à côté d’Imma qui a fait le trajet depuis Fribourg, je me laisse traverser par cette voix ; d’une amplitude magnétique, elle vibre de tout son être et raconte des histoires que ses paroles ne disent pas encore. Car oui, il y a les paroles, la mélodie, les notes, le rythme, certes, mais il y a aussi le coffre et tout ce qu’il porte en lui de secrets et de trésors.

Elle est entrée sur scène, seule. Mais maintenant, elle est sur scène, entourée de mille et une voix, mille et une histoires, mille et une identités, mille et une vies. Avec, en supplément, ses dix doigts qui domptent chaque note du piano, je perçois chez elle l’influence d’une discipline et d’un parcours musical classique à l’école du Conservatoire. Au milieu du concert, elle joue et chante « Requiem », un doigt suspendu à quelques centimètres du clavier qui sait exactement le poids et la portée de sa chute sur une note qui résonne avec conscience.

La voix comme engagement   

Comment résumer le concert d’Afra Kane ? Chanteuse soul, lauréate du Montreux Jazz festival en 2019, il y a tellement de choses à dire. Mais pendant la pause, Imma, qui se trouve à côté de moi, et dont le nom complet – Immaculée Mosoba – cache une activité sociale et professionnelle, ainsi qu’un engagement politique exemplaires, me regarde et résume : « elle est magnifique ! ». Ayant eu le temps de réfléchir pendant le concert, je lui propose : « Imma, vous êtes toutes les deux magnifiques, ça te dit que j’écrive un texte vous concernant les deux, en tant que femmes engagées, sur mon blog ? ». Imma me répond interpellée avec deux yeux comme deux points d’interrogation : « Ah bon ? tu as un blog ? ».

En 2017, Immaculée Mosoba devient membre du Conseil général de la Ville de Fribourg. Depuis plusieurs années, elle exerce sa fonction de conseillère générale membre du parti socialiste, mais porte aussi la casquette de Vice-présidente du comité de l’Espace culturel le Nouveau Monde et du Café culturel de l’Ancienne Gare. Professionnellement, elle a, entre autres, un parcours engagé dans la migration, en ayant travaillé comme conseillère dans les centres fédéraux pour requérants d’asile (CFA) de Boudry et de Giffers. Master de droit en poche et en attendant de commencer son stage d’avocate, c’est maintenant en tant que juriste qu’elle travaille dans les CFA de Boudry et de Giffers.

Alors que dire de la voix comme engagement ? Celle d’Imma est une voix portée par écrit et à l’oral dans un engagement à plus d’un titre. Lors de ses discours et dans ses recours devant des instances judiciaires, elle défend les plus démunis. Quant à la voix d’Afra Kane, elle est aussi un engagement à part entière. Sa personnalité, sa voix, sa présence sur scène m’inspirent plein d’histoires. Je peux les laisser se répercuter sur moi et me raconter des contes de mille et une nuits d’histoires ancestrales et à venir. J’entends l’Afrique et l’Occident, je vois les chocs et les accidents. J’écoute l’histoire des corps et ma corde sensible qui me réveillent en faisant défiler devant moi un monde à venir, jeune et prometteur.

Qu’est-ce qui change le monde, la chimie ou l’alchimie ?

Alors que la deuxième semaine d’octobre 2022 est aussi celle des prix Nobel, notamment celui de la chimie, que dire de l’alchimie ? Si je devais décerner le prix Nobel de l’alchimie, je le donnerais à une personnalité dont l’engagement est celui d’inspirer les autres, de les éveiller à leur âme dans ce qu’ils ou elles ont de plus beau en eux, en elles. Dans cette perspective, Afra Kane ferait partie des lauréates et lauréats. En préambule à une chanson où elle évoque l’hypersensibilité qui est en rapport avec le titre de son dernier album « Hypersensitive », elle lance au public : « (…) aimez-vous comme vous êtes ! ». Elle chante aussi « Start again » qui incite à surmonter tous les obstacles de la vie. Debout, sur scène avec sa voix puissante, Afra Kane est entièrement engagée dans la vie, engagée pour faire reconnaître son existence de femme noire, mais pas seulement, car elle est plus qu’une apparence. D’ailleurs, si Shakespeare résumait une grande part du mystère de la vie par « être ou ne pas être ? », chez Afra Kane, il y a justement cette puissance d’être…

En coulisses, deux femmes se rencontrent   

À la fin du concert d’Afra Kane, Imma et moi allons dans les coulisses du Festival12 à Neuchâtel. C’est alors un échange entre Afra Kane et Imma qui ont pas mal de choses en commun, à commencer par leur âge dont je tairai le chiffre. Elles parlent de leurs engagements, du fait de se sentir seules parfois dans des causes qu’elles portent en elles. Elles évoquent aussi le nouveau Festival Black Helvetia dont l’objectif est – comme énoncé par Sylvie Makela au forum des 100 – de « proposer une réflexion sur l’identité, la diversité et la représentation des femmes noires en Suisse. ».

Il y a dans cette rencontre entre Afra Kane et Immaculée Mosoba, entre ces deux femmes aux identités multiples, la promesse d’échanges fructueux et créatifs. Parfois, il suffit d’une rencontre pour changer de monde, changer un monde, changer des mondes…et par la voix, ouvrir des voies.

 

 

Copyright – Photo de mise en avant prise par Damien Monnier au Festival12

Pour plus d’informations

Site d’Afra Kane

Mandats d’Immaculée Mosoba

Programme du Festival12

Programme du Festival BlackHelvetia

À vélo pour entreprendre et échanger des compétences avec l’Afrique

Assise dans le tram, je regarde gratuitement « le film » que le paysage fait défiler dehors. Le tram s’arrête. Le regard scotché à la vitre, je vois alors une jeune femme jongler à cinq massues près de son vélo. Subjuguée, j’admire. Elle est plutôt douée, d’une précision à couper le souffle : on dirait une pro qui fait ça l’air de rien ! Le tram redémarre. La jeune femme remet les massues dans sa sacoche, se synchronise avec le mouvement du tram qui repart, remonte à vélo et poursuit sa route. C’est à ce moment-là que j’aperçois son visage et la reconnais : « Ah, mais c’est elle ?! ».

Terminus du tram, « le film » est terminé. Je file au magasin m’acheter un demi-litre de sorbet à la framboise qui, une fois chez moi, s’est transformé en flotte : pas à cause de la chaleur, mais parce qu’à la sortie du magasin je recroise l’actrice principale « du film »…

Ride for the Future

À la sortie du magasin, Joëlle ne me reconnait pas, car on s’était rencontrées par hasard, il y a une année, dans la voiture d’une connaissance en commun. Il faut le dire, Joëlle, elle, ne se fait pas de films, elle concrétise ses rêves à 200%. « Ride for the Future – Bike for Peace », c’est le nom du projet qui est né avec l’association Urumuri, suite à son voyage, en 2020, à travers l’Afrique qu’elle a sillonné seule à vélo. C’est courageux, mais je découvre encore, en parlant avec elle, une personne engagée, inspirante, enthousiaste et une battante qui sait ce qu’elle veut. En effet, le projet vise à créer de l’emploi et des opportunités en faveur de jeunes souhaitant se former dans des métiers d’avenir. En fabriquant des cadres de vélo à partir du bambou, matière locale au Rwanda, le projet est à la fois écologique et promoteur d’échanges de compétences entre la jeunesse suisse et rwandaise.

L’engagement de Joëlle est également inspirant et enthousiasmant, car elle a décidé de se consacrer à plein temps et de manière bénévole au projet avec Urumuri. Interpellée par sa détermination, j’oublie que Joëlle sait jongler au sens propre et figuré avec toutes sortes de difficultés et que quand elle décide quelque chose, elle y va jusqu’au bout. D’ailleurs, elle n’hésite pas à me proposer spontanément de la rejoindre pour un tour à vélo au Rwanda ce mois d’août. Que dire ? À l’heure des questions liées aux crises économiques, sociales et environnementales, la motivation qui se situe au cœur des échanges humains et des entreprises tournées vers un avenir durable n’est-elle pas essentielle ? Faire preuve de créativité et entreprendre semble parfois si ardu, mais sans ces qualités, comment sortir de nos crises actuelles, individuelles et collectives ? Après notre discussion et des recherches internet, je tombe sur une interview de Joëlle à la radio et j’apprends qu’elle a effectivement été jongleuse professionnelle : c’est une femme de cœur qui suit ses passions et ça vaut le coup de s’en inspirer !

L’Afrique et ses lumières

Urumuri qui signifie « lumière » en kinyarwanda, résume la vocation de l’association dans laquelle s’inscrit le projet « Ride for the Future ». C’est Gilbert Bigirindavyi, Suisse et Rwandais, qui a fondé l’association en 2004. Joëlle coordonne les projets culturels, de formations, sportifs et artistiques. Elle gère aussi la communication et l’organisation des évènements. Avec « Ride for the Future », il y a partage de connaissances de la mécanique du vélo, mais également une jeunesse Suisse et Africaine avec des compétences sociales, de la motivation, des capacités créatives et des potentiels d’inventivité. Car ne l’oublions pas : l’Afrique, continent ouvert à son propre essor, a ses lumières et roulera pour le futur…

Informations complémentaires :

Suivre le projet sur internet

Comment contribuer au projet ? faire un don / contacter Gilbert Bigirindavyi (079 303 61 14) et/ou  Joëlle Huguenin (076 754 96 06) / écrire à [email protected]

Pour mieux connaître l’association Urumuri : www.urumuri.ch

Interview de Joëlle Huguenin à la radio RTS la première

 

Où est la Suisse ?

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la Suisse n’est pas cette parcelle de terrain située au milieu de l’Europe : elle surfe sur presque tous les continents ! Et si vous me demandiez de définir qui se cache derrière ce pronom « on » si imprécis et indéfini, je me risquerais à confirmer qu’il est « neutre » comme la Suisse, et donc indéfinissable…comme la Suisse.

Au Costa Rica

Au Costa Rica, lorsqu’une “Tica” ou un “Tico” me demandait d’où je venais et que je répondais : « de la Suisse », elle ou il s’exclamait fièrement : « Ah, mais le Costa Rica est la Suisse de l’Amérique centrale ! ». Perplexe, je me disais en mon for intérieur : « Mince alors, je pensais avoir quitté la Suisse. Est-ce que je tourne en rond ? Je devrais peut-être lire les guides du routard pour préparer mes voyages ». Le Costa Rica est réputé pour ses nombreux spots de surf et sa nature incroyable abritant une biodiversité des plus riches et abondantes du monde. Mais il est aussi connu pour sa démocratie, sa stabilité politique et sa neutralité face aux politiques de ses voisins. Bref, après avoir surfé, le temps passe et il faut que je retourne voir la Suisse (celle de l’Europe).

Au Liban  

Le jour de mon retour du Costa Rica et alors que je me dirige vers le tram pour rentrer chez moi, je croise un couple main dans la main. L’écho de leurs voix se jette à moi comme un coup de vent qui me souffle une bribe de leur discussion : « tu savais que le Liban était la Suisse du Moyen-Orient ? ». Décidément, je refais un petit cours d’histoire de la Suisse et de l’exportation (ou exploitation ?) de son image. Dans son ouvrage « Liban. Identités, pouvoirs et conflits. Idées reçues sur un État dans la tourmente », l’auteur Daniel Meier intitule l’un de ses chapitres « Le Liban était la Suisse du Moyen-Orient » où il est notamment expliqué que l’expression vient de la France coloniale.

Au Togo

Quelques semaines après mon expérience costaricaine, les Alpes grisonnes susurrent à ma conscience que la jeunesse est avant-gardiste. Preuve en est quand je demande à mon filleul de 8 ans : « quelle est la capitale du Togo ? » et qu’il s’écrie à la vitesse de l’éclair : « L’Afrique ! ». Erreur ou anticipation ? Car l’association que le cerveau a faite entre le Togo et l’Afrique est tout à fait juste d’un point de vue géographique. Une inversion logique pourrait également établir (de façon anticipée) que le Togo sera un jour la capitale de l’Afrique ! Tout cela paraît tiré par les cheveux, mais une voix intérieure m’a rappelé que le Togo était autrefois surnommé « la Suisse de l’Afrique ».

Alors, où est la Suisse ? Etrangement, voyager hors d’un pays permet également de le visiter. Observer son reflet depuis l’extérieur questionne les visions préconstruites et redimensionne les distances qui rapprochent ou éloignent. Quelles sont les interdépendances étatiques et les migrations qui façonnent nos imaginaires ? Lesquelles bâtissent nos réalités historiques, sécuritaires, économiques, politiques et sociales ?

 

Infos et références :

Relations diplomatiques entre la Suisse et Costa Rica

«Liban. Identités, pouvoirs et conflits. Idées reçues sur un État dans la tourmente », ouvrage de Daniel Meier, publié en 2016

« TOGO. Le naufrage de la Suisse de l’Afrique », article paru dans le Courrier international le 9 février 2005

120 secondes

Le temps est tellement précieux car on n’en a jamais ! Et pourtant, si seulement nous avions ne serait-ce que 120 secondes supplémentaires dans nos vies trépidantes, pas pour des tirs aux buts, ni pour tirer des conclusions, ni pour se tirer d’affaire, mais pour autre chose… ?

Un jour, je cherchais en ville de la monnaie dans mon porte-monnaie quand une voix insistante m’interpella plusieurs fois : « Bonjour ! », « Bon…jour ! ». Persuadée qu’on me réclamait de l’argent, je levais la tête et vis un jeune mineur migrant que j’accompagnais dans sa procédure d’asile : « Bonjour ! », répondis-je surprise et hébétée.

Quelques jours plus tard, mais cette fois-ci dans un magasin, on se recroisait au rayon pistaches et autres noix. Elles étaient en action à quelques pourcentages et moi immobile à tout prix. « Bonjour ! », pour la deuxième fois je me retrouvais malgré moi projetée vers l’enfance, comme une réminiscence des Télétubbies. « Bonjour ! », mot clé pour entrer dans le monde secret d’une société d’accueil. « Bonjour ! », comme le tic-tac du crocodile poursuivant le Capitaine Crochet. « Bonjour ! », était-ce vraiment le bon jour ?

Le jeune prit alors dans sa main un paquet de pistaches et me les montra en essayant de me poser une question. Avec un doigt arrêté sur la mention 250 grammes, il s’empara ensuite d’un deuxième paquet et fit un geste de la main pour indiquer le chiffre 5 : « five ?». Songeuse et perturbée, je lui dis : « 2 fois 250 grammes font 500 grammes : Yes, two is five, ok. Two packs is 5 ». Il partit me remerciant et me laissant immobile près des noix en action. Mais à peine avait-il dit « five » en montrant sa main entière avec ses cinq doigts tendus, que je restais coi ! Quoi ? Je savais intuitivement que l’équation n’avait pas été résolue et que X restait la parfaite inconnue. Quoi ? vous dis-je.

Deux minutes. Deux minutes pour me rendre compte de ma bêtise. Deux minutes c’est 2 fois 60 secondes. Et 2 fois 60 secondes équivalent à compter jusqu’à 120 : le temps de faire le tour du magasin pour jouer à cache-cache.

Cacher ma honte !

Où est le rayon crayon, qu’on me gomme ? Le rayon fromage, qu’on me rappe ? Le rayon patates, bananes, courges, pour m’y confondre ? Le rayon cosmétique, qu’on me maquille ? Le rayon Histoires, histoire d’oublier ?

Finalement, je me perdis au rayon casseroles que je laissais traîner. Mais, il me restait encore beaucoup de secondes avant d’arriver à 120 et je pu réfléchir. C’est vrai, ce jeune n’était certainement pas en train de cogiter nerveusement en se demandant si 250 grammes de pistaches allaient lui permettre de concocter cette fameuse recette lue au détour d’un livre qui en réclamait en fait 500 ! L’art de la consommation est-il le même partout ? Bien que cachée, je cherchais…une réponse :

Tiens ! l’emballage plastique est-il biodégradable ? Et si oui, à 100% ?

– Tiens ! ces biscuits contiennent plus de trois E, faut-il s’en méfier ?

– Tiens ! cette pâte à tartiner contient-elle de l’huile de palme ?

– Tiens ! ce produit est-il issu du commerce équitable ?

– Tiens ! ces fraises maudites sont-elles de saison cet hiver ?

– Tiens ! ces tomates sont-elles cultivées par des migrants exploités au sud de l’Italie ?

– Tiens ! ce poisson a-t-il échappé aux filets électrifiés de la pêche intensive ?

Tiens, tiens, tiens … je n’en finirai jamais ! Et oui, l’art de la consommation est épuisant et nous consomme avant que l’on puisse consommer soi-même.

Il existe ce slogan : « Dis-moi ce que tu manges et je te dirai qui tu es ». Mais que dit un parcours migratoire difficile ou des conditions de vie difficiles de ce que nous sommes (les uns par rapport aux autres) ? Peut-être que si l’on se pose trop de questions, c’est qu’on va bien et qu’on a assez d’argent. Mais si on est dans l’urgence et la précarité, une seule question compte :

– ça coûte combien ?

 

 

Terre happy

Les discours écologiques prêtent parfois une voix ou des émotions connues de l’humain pour faire parler les choses et les éléments de la nature. Par exemple, il peut arriver d’entendre ou de lire au détour d’une phrase que « les arbres parlent », que « les animaux pleurent », que « le chien est content » etc… Et bien, dans cette lancée, moi aussi j’ai envie d’affirmer que « la Terre est happy » et que ce n’est pas faute de vouloir partager gratuitement son happiness que nous sommes malheureuses et malheureux, mais plutôt parce qu’à une « Terre happy » nous préférons des thérapies. L’autre jour, en lisant les offres thérapeutiques d’une devanture d’institution de bien-être, je me suis demandée : sommes-nous si mal en cette ère de notre existence sur Terre ? Sans réponse, je me suis dit que s’il faut choisir une option, je commencerai par la méditation.

Petite leçon d’humour, grande leçon de vie

Sac tout neuf en bandoulière à l’épaule, il fait nuit et je remonte une rue pavée un peu sombre. Tout à coup, la jointure lâche brusquement et mon sac neuf tombe à terre (en bruitage, ça fait d’abord « pouf » et ensuite un petit bout de métal « clic, clic, clic » rebondit sur le pavé). Je cherche alors des yeux la jointure par terre, mais elle est cassée. Mon sac devra donc être porté à la main. Plus loin, je croise une dame d’un certain âge qui regarde elle aussi par terre. Je la salue et lui demande : « vous cherchez quelque chose ? ». Elle me répond : « non, non c’est gentil, je regarde si mon chien a fait caca ». « Ah !» me dis-je silencieusement, « effectivement mieux vaut pas chercher… », car j’avais bien l’intention de sortir ma lampe de poche pour aider cette dame en pleine inspection des lieux. Mais comme le dit l’adage : « faut pas chercher la merde ! ».

Le petit chien blanc de la dame s’approche de moi, l’air tout content la queue frétillant à l’air, et sa maîtresse lui lance complice : « t’as pas fait caca alors ? ». Et ma voix intérieure de s’exclamer : « quelle chance, ça m’évite d’y avoir marché dedans ».  À méditer !  

Apprendre à compter

Dans un train, un père et sa fille jouent à un jeu de cartes, mais la fille s’énerve parce qu’elle ne sait pas compter les points. Elle veut prendre son téléphone pour calculer, mais le père préfère qu’elle apprenne à calculer seule : « alors tu dis que 8 + 2 = 11 ? ». La fille s’énerve, ça lui paraît insurmontable.

Après quelques rires et câlins affectifs, le père lui demande ce qu’elle a appris à son cours de basket : « comment ça s’appelle lorsqu’on fait rebondir le ballon ? », et la fille de répondre : « je sais pas ». « Ce serait pas dribbler ? » rajoute le père. Ensuite il lui demande : « et quand tu as fait trois pas et que tu peux pas lancer dans le panier, tu fais quoi ? » et la fille répond « bah, ça j’ai pas encore appris ». Réponse du père : « tu passes le ballon à quelqu’un ». Mais la fille répète : « ben, on n’a pas encore appris ça… ».

Même en sport, il faut pouvoir compter sur les autres et passer le ballon à quelqu’un. Dans tous les cas, je me suis dit qu’apprendre à compter avec ses doigts c’est utile et savoir compter autant sur soi que sur les autres c’est nécessaire. À méditer !     

Si, en lisant cet article, quelqu’un me demande « mais quel est le rapport de tout cela avec la migration ou l’intégration ? », je répondrai « aucun ! (à priori), mais… à méditez ! ».

Je chante pour les vaches

En chantant pour des vaches assises confortablement dans les prés, savez-vous ce qu’elles ont fait ? Elles ont tendu leurs oreilles dans ma direction avec un regard des plus pénétrants. Mais la grâce d’être entendu n’est pas à confondre avec le droit d’être entendu. En effet, prévu à l’article 29 de la Constitution Suisse et commenté par la jurisprudence : « le droit d’être entendu garantit notamment au justiciable le droit de s’expliquer avant qu’une décision ne soit prise à son détriment, d’avoir accès au dossier, de prendre connaissance de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos (…) ». [1]

Sacrément vaches

Alors qu’en est-il du droit d’être entendu des migrants relatif au bien-fondé de leur venue en Suisse ? Bien entendu certains diront « La Suisse n’est pas une vache à lait pour les étrangers », tandis que d’autres répliqueront  « Les étrangers ne sont pas des vaches à lait pour la Suisse ». Sur ce, un débat  télévisé pourrait faire l’affaire, tant le débat semble cornélien. Mais si l’on se penche sur la pratique de ce droit, hors des sentiers battus de la politique, il existe des vécus dramatiques, souvent complexes et des histoires sacrément vaches

En matière d’asile, l’exercice de ce droit peut revêtir différentes formes et concerner divers aspects de procédure. Par exemple, dans le cadre de la procédure Dublin qui détermine quel est l’Etat européen compétent pour le traitement d’une demande d’asile, les requérants ont la possibilité d’indiquer les obstacles qui s’opposent à leur renvoi vers un autre pays, lorsqu’y figure la trace d’un premier passage ou du dépôt d’une demande d’asile.

Un jour, un requérant d’asile que j’avais accompagné lors de son entretien avec les autorités pour déterminer si la Suisse était compétente ou non pour l’examen de sa demande d’asile n’avait pas manqué d’humour. À la question « Existe-t-il des motifs contre un renvoi vers les Pays-Bas ? », il avait répondu « Je suis d’accord de retourner là-bas, si on m’offre un café ». Loin de cet aparté anecdotique, il y a cependant des situations où un « Non je ne retournerai pas là-bas (…) » résonne comme un écho qui se perd dans le vide. Avoir le droit d’être entendu ne garantit pas celui d’être compris. Il peut dépendre de la bienveillance de celui ou de celle qui écoute, mais aussi de la marge de manœuvre circonscrite par le droit ou l’action politique. En Grèce, par exemple, des rapports internationaux continuent de faire état de nombreuses situations de non-respect des droits fondamentaux et de « défaillances systémiques » dans la procédure d’asile. La situation est, par ailleurs, d’autant plus préoccupante pour les personnes vulnérables dont font parties les femmes. À ce sujet, j’ai pu entendre le témoignage d’une jeune femme qui racontait avoir été constamment sur le qui-vive dans les camps de réfugiés, quotidiennement à la merci des agressions sexuelles. Son histoire raconte malheureusement l’histoire de plein d’autres femmes.

Depuis 2011, suite à un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), la Suisse ne renvoie plus de requérants vers ce pays, excepté s’ils sont bénéficiaires d’une protection internationale. Or, il s’avère que ceux-ci se retrouvent souvent dans des conditions dramatiques, voire pires qu’avant l’octroi d’une protection. Dans l’un de ses articles, Minos Mouzourakis décrit cette situation dans le contexte actuel : « Dans le cadre de la pandémie de Covid-19, des centaines de bénéficiaires d’une protection se sont retrouvés sans abri à Athènes. » [2]

La justice allemande, qui n’a pas fait la sourde oreille, a décidé en janvier de ne plus renvoyer en Grèce des personnes ayant obtenu une protection internationale [3]. Alors à quand ce genre de décision aussi en Suisse ?

 

Bref, si je ne suis pas entendue, je peux quand même continuer à chanter pour les vaches. Et si ça vous tente aussi alors chantez, vous verrez, votre fondue aura bien meilleur goût !

 

Notes de bas de page et références : 

[1]ATF 142 III 48 4.1.1 p. 52 s. et les références

[2] Article publié sur le site forumréfugiés ” la protection des réfugiés en Grèce : un double discours”

[3] Article paru dans le journal 24 heures “La justice allemande interdit les renvois vers la Grèce”

Seins moqués ou saint Moka ?

Neuchâtel. 7h30 du mat. Juin 2021 bat son plein. Le bus dans lequel je suis s’arrête brusquement. Un malaise s’empare tout à coup de moi, non pas à cause d’un mal des transports (mon ventre va bien), mais à cause de ma tête qui tourne. Elle tourne vers la gauche et voit une petite fourgonnette estampillée de la marque Au Moka. Je découvre alors l’image d’une femme noire, nue jusqu’aux seins, portant des plumes sur la tête. Il fait chaud, mes poils s’hérissent. Mais pourquoi ?

Étrange, d’autant plus que la veille j’avais discuté avec Thaís Silva Agostini de son travail en tant que responsable du projet « se respecter », service d’écoute et de conseil contre le racisme à Fribourg. Elle m’avait évoqué, en partie, ses expériences personnelles et professionnelles avec le racisme et la discrimination. Elle m’avait parlé de l’Histoire et des milieux militants. Je l’écoutais.

Dessins animés

Mais pourquoi cette image me dérange ? J’essaie de rationaliser, de contextualiser, mais malgré moi je suis projetée vers des siècles passés : « ai-je déjà vu quand je voyageais sur le continent africain ou ailleurs dans le monde des femmes noires avec des plumes sur la tête ? ». Je fouille dans les archives de ma mémoire et, au plus lointain, j’y trouve un dessin animé : Pocahontas, qui n’est pas Africaine, avec ses plumes et ses mocassins. Je repense à son histoire aux 16 et 17èmes siècles et à l’arrivée des colons. Je fouille encore et je vois Joséphine Baker en spectacle, tel un dessin qui s’anime, avec des plumes et des seins nus. Je repense à son histoire et à ses combats d’émancipation. Je fouille encore et j’entends Gainsbourg chanter « (…) Que j’aime ta couleur café (…) C’est quand même fou l’effet que ça fait de te voir rouler ainsi des yeux et des hanches, si tu fais comme le café, rien qu’à m’exciter (…) ».

Ce corps, l’envers du décor

Que raconte l’image de ce corps alors ? Que montre-t-il de nos rapports conscients et inconscients avec la femme en général et la femme noire en particulier ?

Plus tard dans la matinée, j’envoie un email à Thaís Silva Agostini qui me répond : « C’est dommage de voir une telle image en tant que marque identitaire d’une entreprise. Après tout ce qui s’est passé avec les manifestations liées au mouvement Black Lives Matter l’an dernier, la prise de conscience de ce racisme « invisible » peine à se concrétiser. Il y a malheureusement beaucoup d’agressions quotidiennes qui ne sont aperçues que par des personnes concernées (…)».

Thaís rajoute encore : « Je me sens aussi concernée par l’image de cette femme noire aux seins nus et des plumes aux cheveux dans un contexte « exotique », à savoir le café/moka qui est le produit de cette marque. Le racisme qui existe à l’encontre de la femme noire – toujours sexualisée – concerne aussi toutes les autres femmes auxquelles l’inconscient collectif rattache les mêmes stéréotypes. Nous, les femmes Sud-Américaines, sommes toujours ramenées aussi à cette même sexualisation. J’ai déjà vécu en Suisse beaucoup de situations très gênantes, analogues à celles qui sont témoignées par les femmes noires. Le racisme que nous, Sud-Américaines, subissons n’est pas encore connu ; sauf par nous, les femmes Sud-Américaines. Y penser me rend triste et, parfois, même colérique. »

Il n’est pas toujours aisé de déconstruire nos schémas de pensée et nos stéréotypes conscients et inconscients, mais l’on peut toujours tenter de réfléchir et se poser des questions. Alors que dire : seins moqués ou saint Moka ?

 

* Image de mise en avant tirée du site www.maxicoffee.com