Initiative de limitation : en tout point semblable à l’initiative contre l’immigration de masse … ou presque

L’initiative de limitation soumise au vote le 27 septembre prochain n’est-elle qu’une redite de l’initiative contre l’immigration de masse, acceptée par le peuple et les cantons le 9 février 2014 ?

On pourrait le penser en comparant les deux textes. L’initiative de limitation vise l’introduction dans la Constitution fédérale d’un nouvel article (art. 121b) qui ne prévoit fondamentalement rien de nouveau par rapport à la réglementation qui a fait son entrée en 2014 lors de l’acceptation de l’initiative contre l’immigration de masse. En particulier, son premier alinéa (« La Suisse règle de manière autonome l’immigration des étrangers ») répète presque mot pour mot l’art. 121a al. 1 Cst., introduit par l’initiative contre l’immigration de masse (« La Suisse gère de manière autonome l’immigration des étrangers »).

Il existe toutefois une différence de taille entre ces deux initiatives, qui a trait au sort réservé à l’Accord sur la libre circulation des personnes conclu avec les Etats membres de l’UE.

L’art. 197 ch. 11 Cst. introduit par l’initiative contre l’immigration de masse prévoit que les traités internationaux contraires à l’art. 121a (soit en particulier l’ALCP) soient « renégociés et adaptés », dans un délai de 3 ans à compter de l’acceptation de l’initiative. Une dénonciation de l’ALCP n’est pas explicitement prévue. Si l’on pouvait considérer qu’une acceptation de l’initiative contre l’immigration de masse pouvait impliquer une dénonciation de l’ALCP (à moins que l’hypothèse peu probable que celui-ci puisse être renégocié se réalise), cet avis n’était pas unanime. En fin de compte, l’Assemblée fédérale a adopté une législation de mise en œuvre « eurocompatible » et l’accord n’a pas été dénoncé.

La situation est différente avec l’initiative de limitation. Son texte prévoit en effet explicitement la fin de l’ALCP (art. 197 ch. 12). Pour reprendre celui-ci, en cas de oui le 27 septembre, « [d]es négociations seront menées » afin que l’ALCP « cesse d’être en vigueur dans les dans douze mois qui suivent l’acceptation » de l’initiative. Si ces négociations n’aboutissent pas, « le Conseil fédéral dénonce l’accord […] dans un délai supplémentaire de 30 jours ».

Ainsi, le mandat tendant à la résiliation de l’ALCP est clairement donné par l’initiative de limitation.

Guillaume Lammers

Docteur en droit, Guillaume Lammers est avocat à Lausanne et chargé de cours à l'UNIL. Il s'intéresse de près aux différents aspects du droit constitutionnel, domaine dans lequel il a rédigé sa thèse de doctorat ainsi que différentes contributions. Il est également auteur au sein du think tank foraus.